CASIMIR-CRMA : Enquête artisans pâtissiers 1 QUALITE NUTRITIONNELLE « PATISSERIE-CHOCOLATERIE » Résultats d’une enquête réalisée auprès de dix artisans pâtissiers auvergnats Etude réalisée par le Pôle Technologique d’Auvergne CASIMIR et la Chambre Régionale de Métiers et de l’Artisanat d’Auvergne en collaboration avec les syndicats de pâtissiers. 1 CONTEXTE DE L’ETUDE : PROBLEMATIQUE NUTRITIONNELLE Aujourd'hui la qualité nutritionnelle et la valeur santé des produits alimentaires est un critère essentiel à prendre en considération (santé publique, acte d'achat des consommateurs, mobilisation des institutionnels). Les grands groupes de l'industrie agroalimentaire ont su réagir rapidement à cette nouvelle tendance en proposant de nouveaux produits ou en communiquant sur la valeur santé des aliments. Ainsi, la boulangerieviennoiserie-pâtisserie industrielle gagne des parts de marché sur l’artisanat en proposant des produits innovants et dont la qualité sensorielle est sans cesse améliorée [Eurostaf, 2004]. Les artisans n'ont pas les moyens de cette communication et pourtant les produits qu'ils fabriquent sont au centre de la problématique : - stigmatisation des produits de viennoiserie et pâtisserie face à la montée de l’obésité ; ce sont des produits « riches » en énergie, matières grasses, cholestérol et sucres ; - la loi de santé publique interdit les distributeurs automatiques dans les établissements scolaires à partir de la rentrée 2005 (car présence d’une offre nutritionnelle déséquilibrée) [RF, 2004] ; - l’Afssa a estimé que la collation du matin à l'école n'est pas justifiée ni adaptée. Fréquemment constituée de biscuits, pâtisseries ou boissons sucrées, cette prise alimentaire « paraît introduire un déséquilibre dans l'alimentation des enfants et doit être évitée » [Afssa, 2004]. Inversement, la qualité nutritionnelle des pâtisseries peut être optimisée et communiquée de manière relativement simple : - en optimisant la sélection des matières premières en fonction de leur valeur nutritionnelle : sucre non raffiné, farines bises, matières grasses végétales, etc. ; - en adaptant les formulations ; - en jouant sur la qualité nutritionnelle d’ingrédients tels que chocolat, miel, fruits (frais et secs), etc. ; Source : Inpes - dans le cadre du Programme national nutrition santé (PNNS), une campagne nationale de communication pour promouvoir la consommation de féculents et limiter celle de produits sucrés a été lancée en septembre 2005 [Pnns, 2002 ; Inpes, 2005] ; - l’AFSSA a récemment dénoncé la mauvaise qualité nutritionnelle des matières grasses (acides gras trans) et des glucides (simples raffinés) des produits de pâtisserie [Afssa, 2005] ; - voire en utilisant des ingrédients fonctionnels tels que substituts de sucres et/ou de matières grasses. En région Auvergne, des actions en nutrition ont été menées dès 2003 au niveau des artisans en prenant comme secteur test celui de la boulangerie. Voici un bref historique : - en 2003, une action conjointe CRMACASIMIR débute par une enquête (interview) d’une dizaine de boulangers afin d’identifier les besoins du secteur ; CASIMIR-CRMA : Enquête artisans pâtissiers - en 2004, sur la base des conclusions de l’enquête, une sensibilisation collective en nutrition (des boulangers et du personnel de fabrication) est réalisée à la Chambre des Métiers de la Haute-Loire. Elle sera suivie par des études personnalisées en entreprise : développement de produits, de communication et d’activité ; - en 2005, une action collective PNNS de grande envergure prend le relais en région Auvergne. Menée par le syndicat de la boulangerie, l’objectif est de faire évoluer l’offre de pain courant vers des produits de meilleure valeur nutritionnelle (pain type 80). Sur la base de cette démarche-test, rencontre, enquête et sensibilisation d’un petit groupe d’artisans pâtissiers ont été réalisées au cours du deuxième semestre 2005. Les buts de cette étude étaient d’identifier leurs connaissances, leurs besoins et leurs attentes afin de définir d’éventuelles actions à mener pour accompagner ces professionnels sur la thématique nutritionnelle. 2 2.1 ENQUETE : METHODOLOGIE Organisation Le choix et le recrutement des artisans a été réalisé conjointement par la Chambre Régionale des Métiers et les syndicats de pâtissiers. Le suivi administratif du dossier est sous la responsabilité d’un ingénieur qualité de la Chambre Régionale de Métiers d’Auvergne (CRMA). Pour la mise en place et le déroulement de l'étude, CASIMIR a mis à disposition un nutritionniste. 2.2 Echantillon d’étude Cette étude a été réalisée sur un échantillon de dix artisans répartis sur le territoire auvergnat comme suit : quatre dans le département du Puy-de-Dôme et deux pour chacun des autres départements Allier, Cantal, Haute-Loire. 2 2.3 Méthodologie L'étude a reposé sur quatre phases successives : 2.3.1 Recrutement des entreprises Le recrutement a été réalisé par la CRMA en collaboration avec les syndicats départementaux. Les prises de rendez-vous ont ensuite été réalisées au téléphone par l'ingénieur de CASIMIR. 2.3.2 Supports d'enquête Les enquêtes ont été réalisées sous forme d’interviews guidées par un questionnaire. Il est constitué d’une partie d’ordre général, visant à situer l’entreprise, ses moyens et sa stratégie (structure, dirigeant, employés, gamme de produits, fournisseurs, communication et positionnement) et d’une partie visant à évaluer les perceptions et connaissances des artisans en nutrition. Cette partie se décompose en questions ouvertes concernant les aspects « diététiques scientifique », « marché - environnement », « produits - ingrédients » et « communication réglementation ». 2.3.3 Enquête proprement dite L'enquête est réalisée par visite systématique des entreprises retenues par un ingénieur de CASIMIR. L’interview s’adresse principalement au dirigeant de la structure, responsable du développement et de la fabrication des produits avec cependant quelques questions destinées plus particulièrement à une personne directement en contact avec les clients (dans la majorité des cas les épouses des artisans). A noter que l’étude s’est déroulée sur les mois de novembre et de décembre, une période très chargée pour ces professionnels, en préparation des fêtes de fin d’année. Ainsi, deux professionnels ont été interviewés par téléphone, suivi d’une courte visite ou d’un questionnaire simplifié envoyé par fax. CASIMIR-CRMA : Enquête artisans pâtissiers 2.3.4 Analyse des résultats Vu le nombre limité d’individus de l’échantillon étudié, les résultats de ce travail sont à interpréter de manière qualitative, le but étant de fournir des pistes et des axes de réflexions. L'analyse des résultats porte plus particulièrement sur : - l’offre en produits (répartition de l’activité, positionnement, ingrédients utilisés) ; - le niveau de connaissances des artisans sur les questions nutritionnelles ; - leur sensibilité à ce thème ; - leurs attentes en terme de formation, information, développement ; - leur potentiel technique en liaison avec le thème abordé ; - leur potentiel en terme de communication. 3 RESULTATS 3.1 3.1.1 Echantillon Gérants et entreprises Les artisans enquêtés, choisis conjointement par la Chambre Régionale de Métiers et les syndicats, sont tous membres des syndicats départementaux. Ils sont âgés en moyenne d’une quarantaine d’années. Leurs entreprises sont situées pour moitié dans les agglomérations les plus importantes de la région (Aurillac, ClermontFerrand, Le Puy, Vichy…) et pour une autre moitié dans des villages. Seules deux entreprises possèdent deux points de vente (dans la même agglomération). Le nombre moyen de personnes travaillant dans les structures prospectées est de 9 personnes, apprentis y compris, avec toutefois une variabilité importante (minimum = 4 ; maximum = 19). 3.1.2 Stratégie d’entreprise Une différence marquée de stratégie et de vision du métier est remarquable. - Matières premières : certains artisans se font un point d’honneur à utiliser le plus possible de matières premières agricoles « fraîches » (lait, crème, œufs) alors que d’autres ont beaucoup plus recours aux produits stabilisés industriels (ovoproduits, produits laitiers UHT). 3 - Additifs : certains ne s’autorisent que quelques gélifiants (pectine, gélatine) pour proposer des produits très authentiques alors que d’autres emploient une large palette d’additifs alimentaires (arômes, conservateurs, colorants, gélifiants) afin de créer textures, couleurs et goûts originaux. - Procédé de fabrication et conservation : certains rationalisent leurs productions en confectionnant de grosses quantités qui seront progressivement déstockées alors que d’autres minimisent les stockages et produisent ainsi de petites quantités très régulièrement. - Offre produits : certains proposent majoritairement des pâtisseries traditionnelles (pâtes à choux…) alors que d’autres ne confectionnent que des spécialités. De la même manière, la revente représente une activité significative chez certains alors que d’autres ne proposent dans leurs magasins que des produits « maisons ». - Communication : une grande différence est làaussi constatée. Certains ne communiquent pas, considérant que c’est au client de juger alors que d’autre utilisent des moyens de communications variés (presse écrite, radios, affiches…). 3.1.3 Synthèse Les stratégies apparaissent fortement variables. Deux visions de l’artisanat sont schématiquement représentées : « le traditionnel » versus « l’innovant ». CASIMIR-CRMA : Enquête artisans pâtissiers 3.2 3.2.1 Offre produits Pâtisseries La vente de pâtisseries fraîches constitue en moyenne la moitié du chiffre d’affaire des entreprises visitées (avec une valeur extrême à 80 % du CA). La plupart des interviewés proposent une gamme de pâtisserie « classiques » type pâtes à choux. Les ventes de ces pâtisseries sont particulièrement importantes pour les entreprises situées en milieu rural. Les entreprises en milieu urbain en vendent beaucoup moins et certaines n’en fabriquent pas. Ces dernières axent leur offre sur des spécialités, notamment à base de chocolat, qui sont généralement plus élaborées. Toutes les entreprises proposent des « fruits » (gâteaux, tartes, mousses…) qui représentent parfois la catégorie de pâtisserie la plus vendue. 3.2.2 Chocolat Si toutes les entreprises sont des pâtisserieschocolaterie, l’importance de cette production diffère notablement. Certains professionnels confectionnent du chocolat uniquement pour les fêtes de fin d’années (env. 5% du CA) alors que d’autres réalisent près de la moitié de leurs ventes avec cette production. En général, plusieurs dizaines de chocolats assortis sont proposés. A noter, la bonne tenue des ventes de chocolat en plaquettes « maison ». 3.2.3 Confiseries Tous les professionnels interviewés déclarent confectionner des pâtes de fruits. La production est particulièrement importante en période estivale. Dans l’ensemble, les pâtes de fruits sont confectionnées à partir de 50 % de fruits nobles mis en œuvre sur produit fini. Les parfums oscillent entre les « purs fruits nobles du terroir » et des goûts plus audacieux mêlant par exemple fruits et épices, etc. Une offre parallèle en confiture est fréquemment retrouvée. Les glaces et sorbets sont encore assez fortement réalisés par les artisans, principalement l’été et en 4 fin d’année. Ensuite, une production plus retreinte de guimauves, voire de nougat et de caramels. Aucun ne réalise de bonbons en sucres cuits de type berlingot. 3.2.4 Autre Le reste de l’activité est fortement différent en fonction de la situation des boutiques et de la sensibilité des gérants. Certaines entreprises réalisent parfois près de 30% de leur activité sur l’un des segments suivants (alors que d’autres ne se positionnent pas sur ces mêmes segments) : viennoiserie, traiteur, salon de thé, ou panification. 3.2.5 Produits préemballés1 Si la plupart des artisans présentent des produits préemballés, notamment ballotins et tablettes de chocolat, les mentions obligatoires ne sont pas toujours scrupuleusement respectées. La liste des ingrédients, récemment modifiée [CE, 2003], est souvent insuffisante (obligation notamment de mentionner la présence de 12 allergènes majeurs). 3.2.6 Synthèse Les variabilités de sensibilités des dirigeants se retrouvent naturellement au niveau de l’offre produit : gamme de pâtisseries classiques versus spécialités ; activité viennoiserie, traiteur panification pour certains ; importance du pré-emballage… 1 ou Un produit est dit préemballé lorsqu'il est conditionné, hors de la présence de l'acheteur, dans un emballage de quelque nature qu'il soit, le recouvrant totalement ou partiellement de telle sorte que la quantité de produit contenue ne puisse pas être modifiée sans qu'il y ait ouverture ou modification décelable de l'emballage ou modification décelable du produit [RF, 1978]. CASIMIR-CRMA : Enquête artisans pâtissiers 3.3 3.3.1 Ingrédients Sucre Le sucre blanc, sous différentes formes (semoule, cristallisé, etc.), est de loin le composé sucrant le plus utilisé. D’autres glucides purifiés sont utilisés en quantité moindre pour leurs propriétés gustatives et technologiques, tels que le sucre inverti, le glucose et le fructose (sirop, cristallisé, etc.). Du miel et des sucres non raffinés de canne ou de betterave (vergeoise) sont employés en raison de leurs qualités gustatives ou visuelles pour un nombre restreint d’applications bien particulières (décors en sucre cuit, biscuits, pain d’épices, etc.). En effets, ces produits sont colorés et parfumés par les composants naturels de la matière première. Les édulcorants ne sont pas utilisés, hormis le sorbitol pour ses propriétés hygroscopiques (stabilisateur de l’humidité et inhibiteur de croissance des micro-organismes) et non pas pour son pouvoir sucrant. 3.3.2 Chocolat Différents chocolats de couverture sont utilisés pour réaliser entremets, chocolats fins et tablettes. Les principaux fournisseurs sont Valhrona, Barry Callebaut et DGF. 3.3.3 Matières grasses Les matières grasses les plus utilisées sont les matières grasses laitières : - le beurre (fin, AOC, tracé) pour la matière grasse concrète ; - la crème entière UHT pour la matière grasse liquide. 5 3.3.5 Lait Il est essentiellement utilisé du lait de vache UHT ½ écrémé. Comme pour la matière grasse laitière, quelques professionnels s’approvisionnent directement auprès d’agriculteurs. 3.3.6 Œufs Tous les professionnels enquêtés utilisent des œufs frais plus ou moins complétés par des ovoproduits pour gérer au mieux le risque microbiologique (jaunes, blanc et œufs entiers pasteurisés). 3.3.7 Sel Un artisan utilise un sel de mer non raffiné. 3.3.8 Additifs Plusieurs additifs sont couramment employés, plus ou moins selon les entreprises : - gélifiants (pectines, gélatine) ; - colorants ; - conservateur (acide citrique, sorbitol) ; - arômes. 3.3.9 Synthèse – conséquences nutritionnelles La matière sucrante est essentiellement représentée par des sucres purifiés : apport de saccharose donc d’énergie rapidement assimilable (en faveur des troubles du métabolisme des glucides) sans les composés protecteurs présents dans le végétal de base (minéraux, antioxydants). A noter : quelques professionnels s’approvisionnent directement en produits frais auprès d’agriculteurs. La matière grasse est essentiellement d’origine laitière (beurre et crème) : apport d’acides gras saturés et d’acides gras trans (néfastes vis-à-vis du système cardio-vasculaire). Un peu de matières grasses végétales hydrogénées peuvent être employées pour certaines préparations et pour le graissage des plats. Suite aux travaux de l’ENSP, un peu d’huile de colza est parfois utilisée dans la réalisation de cakes. Les farines employées sont blanches (T 55) apport d’amidon et de protéines, des composés énergétiques mais peu de facteurs protecteurs tels que fibres, vitamines et minéraux. 3.3.4 L’effort de certains professionnels pour obtenir des matières fraîches (lait, crème) est louable mais a peu de conséquences au niveau nutritionnel. Farine La farine de type 55 (0,55 mg de minéraux pour 100 g de farine) est largement utilisée. Elle est parfois associée à de la farine de gruau ou des farines de type 45 ou 65. CASIMIR-CRMA : Enquête artisans pâtissiers 3.4 Sensibilisation à la nutrition 3.4.1 Contexte Les aspects nutritionnels représentent une problématique nouvelle et éloignée du métier de base de la pâtisserie-chocolaterie. Les chefs d’entreprises interviewés n’ont jamais bénéficié de réelle formation en nutrition, éventuellement une sensibilisation lors de salon (salon du chocolat) ou de lettres d’informations (ENSP notamment). Leurs autres sources d’informations en nutrition résident dans la presse grand public et professionnelle. Internet est peu utilisé et les fournisseurs communiquent peu sur ces aspects, au regret de certains. La nutrition constitue pourtant une préoccupation personnelle pour plus de la moitié des interviewés. Les raisons sont diverses : recherche de bien-être, problèmes de santé, surpoids (propre ou des enfants), etc. Les épouses apparaissent plus sensibilisées. Certains perçoivent bien la tendance de fond actuelle et n’ont pas envie de « regarder passer le train ». Ainsi, bien que la demande de la clientèle (hormis quelques interrogations concernant la présence d’allergène) envers la composition nutritionnelle soit faible, elle est jugée « sous-jacente » et en « croissance ». De plus, « développer cet aspect nutritionnel contribue à l’image de marque l’entreprise ». A noter : la sensibilité des clients et des gérants semble beaucoup plus prononcée lorsque le magasin se situe dans une agglomération de taille importante et dans un quartier plutôt aisé. Cette observation concorde avec les études du domaine, montrant que les individus privilégiant une alimentation saine et équilibrée sont majoritairement des femmes vivant en milieu urbain et disposant d’un budget alimentaire supérieur à la moyenne [Crédoc, 2005]. 3.4.2 Développement de produits « nutrition santé » Les professionnels se sentent assez dépourvus sur cette thématique. Quelques essais ont parfois été tentés : - utilisation d’une margarine enrichie en oméga3 pour application viennoiseries ; - développement de spécialités mêlant céréales et chocolat ; - confection de produits sans allergènes (sans gluten, sans fruits secs). 6 Dans tous les cas, ces essais ont porté sur des produits bien spécifiques. Une réflexion sur l’offre globale n’a jamais été entreprise. Cependant, tous les interviewés ont déclaré chercher à réduire la teneur en sucres. Les raisons de cette diminution reposent sur une problématique gustative : le sucre masque les richesses aromatiques des ingrédients. De plus, certains professionnels déclarent conseiller leurs clients sur la quantité de matières grasses ou de sucres des préparations. 3.5 Connaissances nutritionnelles 3.5.1 Notion de nutrition et diététique Interrogés sur la relation entre la nutrition et la santé, ainsi que sur les bases d’une alimentation équilibrée, la majorité des artisans pâtissiers éprouvent des difficultés. Ils possèdent en général une vision assez manichéenne de l’alimentation avec : - des aliments « à éviter » tels que les matières grasses et les charcuteries ; - des aliments « bénéfiques » tels que les légumes et les produits naturels ; - et des aliments qu’ils n’arrivent pas à catégoriser tels que les produits laitiers (fromage notamment) et les céréales. D’un point de vue plus théorique, concernant la composition nutritionnelle des aliments, les difficultés croissent. Les termes « protides », « lipides » et « glucides » ne sont pas maîtrisés. Une confusion règne entre les lipides (matières grasses) et les glucides (sucres complexes et sucres simples), qui demeurent des notions très floues. Il est intéressant de constater que ces déficiences de connaissances apparaissent communes à celles des consommateurs européens [Beuc, 2005]. Par conséquent, les artisans enquêtés peinent à définir l’importance relative à accorder à ces trois classes de nutriments. Ils surestiment quasisystématiquement le besoin en protéines, une perception assez largement répandue dans la population. Il est intéressant de constater que les composés responsables d’effets santé indésirables (sodium, cholestérol, glucides simples) apparaissent beaucoup plus connu que ceux ayant un rôle protecteur (potassium, fibres, acides gras essentiels, micro-constituants…). CASIMIR-CRMA : Enquête artisans pâtissiers 3.5.2 7 Le PNNS (Programme National Nutrition Santé) et les multiples recommandations de l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments (collation à l’école, rapport sur les glucides, sur les acides gras trans…) sont passées assez inaperçues par l’échantillon d’étude. De la même manière, l’opération menée par la confédération des boulangers d’Auvergne dans le cadre du PNNS n’était pas connue. Deux artisans avaient vaguement entendu parler de cette opération lors de contacts informels avec des artisans boulangers engagés dans cette démarche. La connaissance du marché apparaît elle-aussi assez faible, que cela concerne la concurrence ou les ingrédients et fournisseurs. 3.5.3 de sa richesse en glucides simples, lipides et une méconnaissance de ses richesses nutritionnelles (fibres, magnésium, potassium, polyphénols…). Environnement institutionnel et marché Composition nutritionnelle pâtisseries et du chocolat Les édulcorants, ingrédients non-utilisés dans l’échantillon d’étude, demeurent des composés aux propriétés peu maîtrisées. 3.5.4 Communication nutritionnelle aspects réglementaires & Comme nous pouvions nous y attendre, les critères réglementaires régissant la communication nutritionnelle ne sont pas connus des sujets d’étude (AJR, étiquetage nutritionnel, allégations…). 3.5.5 Synthèse des La composition et la qualité nutritionnelle des pâtisseries leurs sont difficiles à estimer. La plupart des interviewés arrivent à déduire que ces produits contiennent des glucides et des lipides mais peinent à estimer leur importance et leur qualité. Interrogé de manière spécifique sur le beurre, la plupart sont aptes à décrire la composition en macro-éléments : environ 16 % d’eau et 82 % de matières grasse. Certains avancent même la richesse du beurre en vitamine (vitamine A). Cependant, la qualité nutritionnelle des graisses du beurre apparaît bien-souvent surévaluée : considérées comme bénéfique lorsqu’elles sont consommées crues et néfastes à la santé uniquement lorsqu’elles sont cuites. La composition nutritionnelle des autres ingrédients de base des pâtisseries est aussi lacunaire. Par exemple : - les huiles végétales sont souvent perçues comme moins grasses que le beurre ; - la composition nutritionnelle de la farine est peu connue car la relation entre la technologie et la nutrition est confuse : gluten/protéines, amidon/glucides, cendres/minéraux. Une remarque valable aussi pour les « impuretés » des sucres non raffinés ; - la composition du chocolat pose aussi problème. Il est observé une sous-estimation Des connaissances diététiques « générales » et nutritionnelles « produits » assez faibles en majorité. Mauvaise connaissance de l’environnement (institutionnel, marché) et des règles de communication en nutrition. Capacités limitées à se positionner sur la thématique nutrition-santé 3.6 Attente exprimée en nutrition Interrogés sur les actions à mettre en œuvre pour les accompagner sur cette thématique, la majorité des artisans pâtissiers (8/10) sollicite une action collective : travailler sur la formulation et la communication de quelques recettes (viennoiseries, pâtisseries allégées, chocolat, pâtes de fruits…). Ensuite, une moitié serait en faveur de diffusion d’information type « lettre technologique » ou de séance de formation. Une aide personnalisée n’apparaît pas la priorité, seul trois professionnels seraient intéressés, mais dans un deuxième temps. CASIMIR-CRMA : Enquête artisans pâtissiers 4 CONCLUSION La thématique nutritionnelle demeure encore très éloignée des préoccupations du secteur de la pâtisserie-chocolaterie traditionnelle. Les artisans de ce secteur montrent bien évidemment des carences en matière de notions scientifiques/diététiques et en moyen de communication. Les artisans les plus sensibilisés et intéressés à cette thématique sont les gérants présents en agglomération de taille importante. A l’opposé, les artisans situés dans des villages sont moins confrontés à cet aspect, moins sensibilisés et probablement moins mobilisables. L’enquête, qui se déroule en fait comme une discussion permet de sensibiliser les interviewés et de susciter leur intérêt. Les attentes exprimées par ces professionnels sont de 2 types : formation et action collective au sein du syndicat pour travailler sur un petit nombre de recettes et réaliser une communication adaptée. N.B. : tous les interviewés sont syndiqués. A noter aussi : les problèmes d’allergènes gagnent du terrain et les artisans apparaissent mal armés pour y faire face. Vu le nombre limité de professionnels, des efforts de mobilisations sont à prévoir pour l’élaboration d’éventuelles actions futures. 8 [Pnns, 2002] PNNS. La santé vient en mangeant : le guide alimentaire pour tous. Septembre 2002, 65 p. [Eurostaf, 2004] Eurostaf. Les perspectives du marché de la boulangerie, viennoiserie, pâtisserie industrielle. Septembre 2004, 130 p. [Inpes, 2005] Inpes - Institut national de prévention et d’éducation pour la santé. Manger moins souvent des produits gras et sucrés : c'est protéger notre santé. Dossier de presse, septembre 2005, 30 p. [CE, 2003] Directive 2003/89/CE du Parlement et du Conseil du 10 novembre 2003 modifiant la directive 2000/13/CE en ce qui concerne l’indication des ingrédients présents dans les denrées alimentaires. Journal officiel de l’Union Européenne du 25 novembre 2003, p 15. [RF, 1978] Décret n° 78-166 du 31 janvier 1978 relatif au contrôle métrologique de certains préemballages. Journal Officiel de la République Française du 16 février 1978, p 746. [Crédoc, 2005] Crédoc - Centre de Recherche pour l’Etude et l’Observation des Conditions de Vie. Des « adeptes de la nutrition » aux « obsédés de la balance » : la santé de plus en plus prégnante dans l'alimentation des Français. N°186, septembre 2005. [Beuc, 2005] Beuc - Bureau européen des unions de consommateurs. Rapport sur la perception de l'étiquetage des denrées alimentaires par les consommateurs européens. 31 août 2005, 17 p. ABREVIATIONS AFSSA : Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES CASIMIR : Centre d’Appui et de Stimulation de l’Industrie par les Moyens de l’Innovation et de la Recherche [Afssa, 2004] Afssa. Avis de l'Afssa relatif à la collation matinale à l’école. 23/01/04. CRMA : Chambre Régionale de Métiers d’Auvergne [RF, 2004] République Française. Loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique. JORF, n°185, 11/08/04, p14277, titre IV, chapitre I I. [Afssa, 2005] Afssa. Risques et bénéfices pour la santé des Acides "Gras trans " apportés par les aliments – Recommandations. Rapport, avril 2005, 216 p. ENSP : Ecole Nationale Supérieure de Pâtisserie PNNS : Programme National Nutrition Santé