J. GODARD, P. BONTEMPS, R. ANGONIN, G. JACQUET, A. CZORNY
Une intervention a lieu le 8 janvier 1990, elle permet de
découvrir un envahissement tumoral important avec
destruction osseuse en 81-82; le diagnostic anatomo-
pathologique extemporané est celui d'ostéosarcome
radio-induit en fonction du contexte clinique. Après un
curetage osseux le plus large possible, on utilise du
ciment acrylique armé sur des tiges de Kirschner afin de
combler la cavité créée.
L'évolution clinique est tout à fait favorable, avec
disparition des douleurs invalidantes et la récupération
de la paralysie des releveurs du pied droit. Le scanner
pelvien de contrôle montre l'absence de masse abdomi-
nale et la scintigraphie osseuse met en évidence une
fixation hétérogène du squelette, peut-être en faveur
d'une dissémination métastatique.
En juin 1990, la patiente est réhospitalisée àla suite d'un
tableau occlusif. La laparotomie retrouve une entérite
nécrosante du 1/3 distal nécessitant une résection-
anastomose du grêle. A cette époque la patiente se
plaint de quelques douleurs sciatiques mais cette fois à
gauche alors qu'il n'existe aucune modification radio-
logique (fig. 3).
Dix huit mois après la découverte de sa lésion radio-
induite la patiente décède suite àune altération
importante de l'état général et avec des douleurs diffuses.
DISCUSSION
Les effets secondaires des radiations ionisantes ont
surtout bien été étudiés depuis l'explosion de la première
bombe atomique à Hiroshima en 1945 (13). Plus
récemment, l'accident de Tchernobyl en 1985 a fait, et
fait encore, de nombreuses victimes.
Ce risque carcinogénique en général est faible pour les
sujets exposés professionnellement (5), leucémies au
début des radiations, tumeurs bronchiques chez les
sujets exposés au radon, radiodermites chez les anciens
radiologistes. Il est beaucoup plus ~élevé, mais ponctuel
après explosions nucléaires accidentelles ou destructri-
ces. Enfin, le risque actuel le plus important est donc
surtout en rapport avec les irradiations thérapeutiques,
cancer du col, cancer du sein, Hodgkin pour les mieux
étudiés.
La survie prolongée d'un cancer après radiothérapie
permet de voir apparaître une tumeur secondaire radio-
induite. Les premières victimes des radiations ionisantes
ont été les physiciens et les médecins qui les ont
manipulées, avec des lésions osseuses distales (17, 25).
Dans la statistique de la Mayo Clinic, le sarcome radio-
induit représente 1,5 % de l'ensemble des tumeurs
osseuses, myélome compris.
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Figure 3:
Radiographie de contrôle en Août 1990, avec ostéosynthèse, ciment +
broches en place. Aucun changement par rapport au contrôle post-
opératoire immédiat.
Parmi les cancers rencontrés après radiothérapie, on
trouve différents types dans la série d'Huvos et Coll. (9):
fibrosarcome (7,5 %) àrapprocher des fibrohistiosarco-
mes (38,5 %) l'ensemble correspondant à 46 %;
ostéosarcome (9 %) mais également chondrosarcome
12 %, sarcome mixte 12 % et des types plus rares peu
différenciés (6 %) ou bien différenciés (1,5 %).
Dans une série de sarcomes osseux 1 et II de la Mayo
Clinic (1) c'est l'ostéosarcome qui prédomine avec 55 %,
23 % de fibrosarcomes et 22 % de chondrosarcomes. Le
type fibrosarcome serait plus fréquent dans les sarcomes
radio-induits.
Cette tumeur touche la clavicule après irradiation pour
cancer du sein, le fémur et l'os iliaque après traitement
pour les cancers génitaux et l'humérus après traitement
pour Hodgkin.
La dose moyenne d'irradiation pour la survenue de telles
tumeurs est de 60 Gy avec des extrêmes de 30 Gy à 80 Gy
(la, Il, 18). Parmi ces tumeurs, le cancer du sein et celui du
col utérin sont les plus rencontrés. Le diagnostic clinique
est difficile; en effet l'apparition des douleurs se
manifeste non pas quelques mois mais plusieurs années
après la radiothérapie (l, 2, 6, 12,18), en moyenne cinq ans.
La moyenne d'âge des patients est de 42 ans (9, 13). La
durée moyenne d'apparition est de Il ans comme chez
notre patiente mais elle peut être plus longue, 20 ans
voire plus (25).