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FÉVRIER MARS 2013
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QUÉBEC PHARMACIE
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III Eets indésirables communs et importants par médicament10,47
Nom de HTA Sx PP N/V D Mucosites Neutro PLT Anémie Rash Fatigue Décoloration Alopécie Hypo Toxicité Toxicité
la molécule des cheveux T4 rénale hépatique
Sunitinib ++ + ++++ + +++ +++ +/++ ++++ ++ + +
Éverolimus +/++ ++ ++ +++ ++ +/++
Pazopanib ++ + +/++ ++++ ++ ++ + + +/++
Axitinib +++ ++ +/++ ++++ + + + ++ + ++ ++ +/++ +
Lapatinib ++++ ++ ++ ++
Capécitabine ++/+++ ++++ ++ + + + ++
Légende : + = 5-10 %; ++ = 11-25 %; +++ = 26-40 %; ++++ = 40 % et 60%; +++++ 60 % et plus; HTA = Hypertension; Sx PP = Syndrome palmo-plantaire; N/V = Nausées et vomissements; D = Diarrhées;
Neutro = Neutropénie; PLT = Thrombocytopénie; HypoT4 = Hypothyroïdie; Toxicité rénale = Élévation de la créatinine; Toxicité hépatique = Élévation des enzymes AST et ALT ou de la bilirubine
taire (PDGFR), les récepteurs de chacun des fac-
teurs de croissance endothélial vasculaire
(VEGFR-1, VEGFR-2, VEGFR-3) et le c-kit, le
sunitinib diminue l’angiogenèse, la prolifération
cellulaire et la progression métastatique de cer-
tains cancers24. Cette molécule a prouvé une e-
cacité dans le traitement du cancer rénal métasta-
tique et des tumeurs stromales gastro-intestinales
(GIST), ainsi que dans le cancer du pancréas à
tumeurs neuroendocrines métastatiques.
Dans le cancer rénal métastatique en première
intention, le sunitinib (50 mg DIE durant quatre
semaines puis arrêt de deux semaines) a démon-
tré des bénéces supérieurs à l’INF-α quant à la
survie sans progression, au taux de réponse et à
la qualité de vie25. Hormis pour la diarrhée, les
patients toléraient mieux le sunitinib. Dans une
mise à jour de cette étude, le sunitinib a aug-
menté la survie de 21,8 à 26,4 mois26. Ces résul-
tats ont permis d’établir un nouveau schéma de
traitement de première intention dans le cancer
rénal métastatique. Parmi les autres utilisations
thérapeutiques, le sunitinib (50mg DIE durant
quatre semaines puis arrêt de deux semaines)
s’est avéré supérieur au placebo dans le traite-
ment des GIST chez les patients réfractaires ou
intolérants à l’imatinib27. Dans les tumeurs pan-
créatiques neuroendocrines métastatiques, le
sunitinib a été comparé au placebo avec une
posologie diérente (37,5 mg DIE en continu)
jusqu’à une progression documentée ou l’appa-
rition d’eets indésirables inacceptables. L’étude
a été interrompue prématurément puisque la
survie globale sans progression a doublé, pas-
sant de 5,5 à 11,4 mois avec le sunitinib28.
Les eets secondaires les plus fréquents du suni-
tinib sont l’hypertension, une coloration jaune de
la peau, une dépigmentation des cheveux, un syn-
drome palmo-plantaire, des éruptions cutanées,
des diarrhées ou de la constipation, de la fatigue et
des neutropénies24,25,27,28. Moins fréquemment,
l’hypothyroïdie, des problèmes cardiaques et un
déséquilibre électrolytique peuvent survenir. Sur
le plan hématologique, les neutropénies ou
thrombocytopénies sévères peuvent survenir
pendant le traitement et ont tendance à se norma-
liser durant les deux semaines d’arrêt. Par son
action sur le VEGF, le sunitinib peut causer des
saignements (sang dans les selles ou les urines, sai-
gnements de nez). Avant toute intervention
chirurgicale à risque de saignements, il est recom-
mandé d’arrêter temporairement le sunitinib au
moins une semaine avant. L’hypertension est liée
à l’eet inhibiteur du VEGF et survient générale-
ment durant les trois à quatre semaines suivant
l’instauration du traitement. Tout comme pour
le sorafénib, le pharmacien doit encourager le
patient à suivre ses tensions artérielles à l’aide
d’un tensiomètre à domicile. En cas d’apparition
d’une hypertension légère à modérée, un traite-
ment pharmacologique est préconisé. L’hyper-
tension sévère (≥ 200 mm d’Hg) survient chez
4 % à 9% des patients et nécessite l’arrêt du suni-
tinib avec une réévaluation médicale10. Une
légère baisse de la fraction d’éjection du ventri-
cule gauche (FEVG) a été observée chez 8 % à
12% des patients. Bien qu’il n’y ait pas de consen-
sus à l’heure actuelle, une échographie cardia-
que transthoracique pourrait être entreprise à
l’instauration du traitement, puis répétée selon
l’avis médical. Lorsque la FEVG diminue de 20
points et se retrouve à moins de 50%, on suggère
de suspendre temporairement la dose ou de la
diminuer. Le sunitinib peut prolonger les inter-
valles QT et PR29. Il faut donc recommander un
suivi avec des ECG chez les patients ayant des
antécédents cardiaques ou prenant plus de deux
autres médicaments jouant sur le QT ou le PR.
La prise en charge des diarrhées associées au
sunitinib passe par une hausse de l’apport liqui-
dien; l’emploi du lopéramide dépend de la gra-
vité des symptômes. Si le patient présente moins
de quatre selles molles par jour, le lopéramide
peut être pris de façon habituelle, soit deux com-
primés immédiatement, puis un comprimé
après chaque selle liquide. Si le patient a de quatre
à six selles molles par jour ou de la diarrhée noc-
turne, la posologie devra être augmentée à un
comprimé toutes les deux heures durant la jour-
née et à deux comprimés toutes les quatre heures
pendant la nuit (jusqu’à des selles normales pen-
dant 12 heures). Lorsque la diarrhée ne peut être
maîtrisée après 24 heures, le patient doit être
adressé rapidement au médecin.
Au niveau cutané, l’apparition et les manifesta-
tions du syndrome palmo-plantaire sont dié-
rentes de celles provoquées par la capécitabine.
Sous sunitinib, les lésions ont tendance à être sen-
sibles, localisées, avec contour rouge et accompa-
gnées d’un épaississement de la peau10,30. Habi-
tuellement, la réaction apparaît au cours des deux
à quatre premières semaines du traitement et elle
est d’intensité faible à modérée. Cependant, envi-
ron 5 % des patients présentent une réaction
importante nuisant aux activités de la vie quoti-
dienne. Les mesures préventives reposent essen-
tiellement sur la réduction de l’exposition des
mains et des pieds à l’eau chaude et à la friction, et
sur l’emploi d’une crème hydratante quatre fois
par jour. La prise en charge du syndrome palmo-
plantaire, tirée du guide ONCible, est détaillée au
tableau IV 10. Un autre eet cutané possible, la
coloration jaune de la peau, peut s’expliquer par la
couleur jaune du médicament et semble être liée
à la dose24. Une dépigmentation des cheveux et de
la barbe peut apparaître après cinq à six semaines
et après deux à trois semaines respectivement. Le
changement de couleur de la peau ou des che-
veux est généralement mineur et réversible deux
à trois semaines après la diminution du médica-
ment ou dès son arrêt24. Chez certains patients, il
peut y avoir une alternance entre la décoloration
des cheveux (quatre semaines de traitement) et la
couleur normale (deux semaines d’arrêt) lors des
cycles de traitement. En outre, le sunitinib et ses
métabolites causent une coloration jaune de
l’urine lors de l’élimination. La fonction thyroï-
dienne (dosage de T4 et TSH) doit être mesurée
avant le début du traitement et avant chaque cycle
chez tous les patients en vue d’une intervention
de type pharmacologique s’il y a hypothyroïdie
ou hyperthyroïdie. Des désordres électrolytiques
mineurs (hypo/hyperkaliémie ou hypo/hyper-
natrémie) peuvent nécessiter une prise en charge.
Le sunitinib est métabolisé de façon impor-
tante au niveau du CYP3A4 et est sujet à plu-
sieurs interactions. Lorsqu’utilisé avec un inhibi-
teur important du 3A4, le sunitinib doit être
réduit à 37,5 mg dans le GIST ou le cancer rénal
et à 25 mg dans les tumeurs neuroendocrines du
pancréas. Bien que cela soit rarement fait en cli-
nique, on peut hausser la dose initiale du médi-
cament selon la tolérance en présence d’un
inducteur important du CYP3A4. En cas d’eets
indésirables graves, il est également possible
d’ajuster la dose à la baisse (voir I ). Chez les
patients avec une insuffisance rénale ou une
insuffisance hépatique légère ou modérée
(Child-Pugh A ou B), aucun ajustement initial
de la dose n’est recommandé. Le sunitinib est
remboursé par le RGAM en tant que médica-
ment d’exception pour le cancer rénal métastati-
que en première intention, pour le GIST en
deuxième intention en cas d’intolérance ou de
résistance à l’imatinib, et en première intention
pour le cancer pancréatique neuroendocrine
métastatique. Les demandes sont valides pour
une durée maximale de six mois.
Le patient 2 (suite)
Malgré vos conseils et l’ajout de clobétasol, le
traitement de M. Paré a été diminué à 37,5 mg
au deuxième cycle. Il a souffert d’un syn-
drome palmo-plantaire de grade III nécessi-
tant l’arrêt du traitement. Il revient avec une
ordonnance d’évérolimus 10 mg DIE. Il vous
demande s’il risque à nouveau d’avoir un syn-
drome palmo-plantaire et s’il doit continuer à
suivre sa tension. Que lui répondez-vous ?