Chapitre 4
Problèmes paraboliques
4.1 Aperçu des méthodes
Equation de la chaleur dans IR N, solutions classiques
Soit N1et u0C(IRN,IR ) . On s’intéresse ici à chercher des solutions classiques au problème suivant
ut(x, t)u(x, t)=0,xIR N,tIR
+
u(x, 0) = u0(x),xIR N.(4.1.1)
Par “solution classique", on entend une fonction uC2(IR ×IR
+,IR ) C(IR ×IR +,IR ) solution de (4.1.1) au
sens classique de la dérivation et de la condition initiale. La notation utdésigne la dérivée partielle par rapport au
temps u/tet udésigne la somme des dérivées secondes par rapport aux composantes de x.
On commence par un petit calcul formel (le terme “formel" signifiant souvent en mathématiques“non nécessai-
rement justifié"). On suppose qu’on peut utiliser pour la condition initiale et pour la solution la transformée de
Fourier (en espace). On retient comme formule pour la transformée de Fourier d’une fonction intégrable sur IR N
la formule suivante :
ˆ
f(ξ)= 1
(2π)N
2eix·ξf(x)dx.
Si uest solution de (4.1.1), on obtient ainsi (si on est autorisé à utiliser la transormée de Fourier)
ˆut(ξ,t)+|ξ|2ˆu(ξ,t)=0,pour ξIR N,t>0,et ˆu(ξ,0) = ˆu0(ξ),pour ξIR N,
ce qui donne
ˆu(ξ,t)=e|ξ|2tˆu0(ξ),pour ξIR N,t0.
En choisissant g(t)L1(IRN)t.q.
g(t)(ξ)=e|ξ|2t, on a donc ˆu(·,t)=
g(tu0pour tout t0et donc (en
utilisant le fait que la transformée de Fourier transforme la convolution en produit,
ˆu(·,t)=(2π)N
2
g(t)u
0pour t0.
ou encore
u(·,t)=(2π)N
2g(t)u
0pour t0.
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4.1. APERÇU DES MÉTHODES CHAPITRE 4. PROBLÈMES PARABOLIQUES
Il reste à calculer g(t). Comme
g(t)L1(IRN)pour t>0, le théorème d’inversion de Fourier nous donne
g(t)=
g(t)(·), c’est-à-dire
g(t)(x)= 1
(2π)N
2eix·ξe|ξ|2tdξpour xIR N,t>0.
Le changement de variable ξ=η/2tdonne alors
g(t)(x)= 1
(2π)N
2
1
(2t)N
2eix·η
2te|η|2
2dηpour xIR N,t>0.
Finalement, on obtient
g(t)(x)= 1
(2t)N
2
e(x
2t)21
2=1
(2t)N
2
ex2
4tpour xIR N,t>0,
Ce qui donne
u(x, t)= 1
(4πt)N
2e(xy)2
4tu0(y)dy pour xIR N,t>0.(4.1.2)
Il est maintenant possible de donner des conditions sur u0pour lesquelles (4.1.2) donne une solution classique de
(4.1.1). Voici deux exemples de conditions suffisantes pour lesquelles udonné par (4.1.2) est une solution classique
de (4.1.1) :
Exemple 1 :
u0(L1(IRN)+L(IRN)) C(IRN,IR ) .
Exemple 2 :
u0C(IRN,IR ) et CIR et pIN t.q. u0(x)C(1 + |x|p)pour tout xIR N(4.1.3)
.
On a ainsi obtenu des résultats d’existence d’une solution classique pour (4.1.1). A-t-on alors unicité de la solution ?
On n’a pas de résultat d’unicité si on ne met que des hypothéses sur u0, puisqu’on peut construire un contre exemple
pour u0=0. Par contre, si on rajoute une hypothèse de croissance sur la solution, on a unicité.
Théorème 4.1 Sous l’hypothèse (4.1.3), il existe une et unique fonction uvérifiant :
1. uest solution classique de (4.1.1).
2. T>0,CTIR ,P
TIN ; |u(x, t)|CT(1 + |x|PT),xIR N,t[0,T].
Sans la deuxième condition sur udonnée dans le théorème 4.1, il n’y a pas unicité de la solution. En effet, on peut
trouver uC([0,+[×IR N),u=0et t.q.
utu=0dans IR +×IR N
u(x, 0) = 0 xIR N
Un exemple est donné dans le livre de Smoller 1La démonstration de l’unicité dans le théorème 4.1 se fait par
Fourier en remarquant que dans ce cas uS
, où Sest le dual de l’ensemble Sdes fonctions Cà décrois-
sance rapide (avec sa topologie naturelle). Notons que raisonnement par analyse de Fourier est limité à IR Net au
laplacien.
1. J. Smoller, Shock waves and reaction-diffusion equations. Second edition. Grundlehren der Mathematischen Wissenschaften [Funda-
mental Principles of Mathematical Sciences], 258. Springer-Verlag, New York, 1994. xxiv+632 pp. ISBN : 0-387-94259-9.
EDP, Télé-enseignement, M2 61 Université Aix-Marseille 1,R. Herbin, 21 février 2011
4.1. APERÇU DES MÉTHODES CHAPITRE 4. PROBLÈMES PARABOLIQUES
Solutions classiques, équation de diffusion, ouvert bor
Soit un ouvert borné de IR N, on considère A=, et D(A)={uH1
0(); uL2()}. Pour uD(A),
on pose Au=u, et on considère le problème.
utu=0 dans
u(x, 0) = u0(x)et u|=0 (4.1.4)
On rappelle qu’il existe une base hilbertienne de L2()(c’est à dire une famille orthonormale dense dans L2()),
notèe (en)nIN , formée de fonctions propres de l’opérateur A. La suite (en)nIN vérifie
en=λnen
enD(A)
avec λn+lorsque n+. Soit u0L2(), on peut écrire u0=
+
n=1
(u0|en)2en.On a
+
n=1
(u0|en)2
2en=
u02
2<+.On pose, pour t>0,
u(t)=
+
n=1
eλnt(u0|en)2en,
qui est une série convergente dans L2() : u(t)L2(IRn). La fonction uest dérivable, et
u(t)=du
dt =
+
n=1
(λn)eλnt(u0|en)2en.
On rappelle que u(t)D(A)car la série
+
n=1
λneλnt(u0|en)=Au(t)est convergente.
On a uC1(]0,+[,L
2)et u+Au=0sur ]0,+[.On peut aussi montrer grâce aux propriétés des séries,
et en utilisant les outils d’analyse spectrale du chapitre 2 que
uC([0,+[,L
2()),et u(t)u0lorsque t0.
On a ainsi trouvé une solution au problème au sens suivant :
uC1(]0,+[,L
2()) u(t)+Au(t)=0 t>0
uC([0,+[L2()) u(0) = u0L2((),
et cette solution est unique. Pour verifier l’unicité, montrons que si uest solution du problème avec donnée initiale
nulle : uC1(]0,+[,L
2()) u+Au=0sur ]0,+[
uC([0,+[L2)u(0) = 0,
alors ureste nulle pour tout temps : u(t)=0 t0.Soit t>0; comme u(t)+Au(t)=0L2()),
en prenant le produit scalaire avec u(t)L2(), on obtient : (u(t)|u(t))2+(Au(t)|u(t))2=0,et comme
(Au(t)|u(t))2=|u(t)|2dx, on a donc (u(t)|u(t))2=|u(t)|2dx 0.
Soit ψl’application définie par t→ ψ(t)=u(t)L2. L’application ψest dérivable, et ψ(t)=(u(t)|u(t))20.
L’application ψest donc décroissante sur IR
+, et comme ψ(0) = 0, on en déduit que ψ(t)0t0. Donc
ψ(t)=0t>0, et donc u(t)=0t0.
EDP, Télé-enseignement, M2 62 Université Aix-Marseille 1,R. Herbin, 21 février 2011
4.1. APERÇU DES MÉTHODES CHAPITRE 4. PROBLÈMES PARABOLIQUES
Remarque 4.2 (Généralisation) On peut remplacer upar
i,j
Dj(aij Diu), avec aij L()sous l’hy-
pothése de coercivité α>0; α|ξ|2aij ξiξj,ξIR N,ppsur et ajouter un terme source f
C([0,[,L
2())
Solutions classiques par semi-groupes
Soit Eun espace de Banach réel, et A:D() EEun opérateur m-accrétif, c’est à dire qui vérifie :
(i) D(A)est dense dans E
(ii) λ>0,(I+λA)est inversible et d’inverse continue.
Remarque 4.3 (Opérateur maximal monotone) Si Eest un espace de Hilbert réel, et A:D(A)E. les
hypothèses (i)-(ii) sont équivalentes à
(Au|u)E0uD(A).
(Id +A)injectif.
Dans le cas d’un espace de Hilbert, on dit que Aest maximal monotone.
Exemple : Le laplacien Si est un ouvert borné de IR N,D(A)={uH1
0(); uL2()}l’opérateur A
défini par Au=uest un opérateur m-accrétif (ou maximal monotone puisqu’on est dans le cas d’un Hilbert.
Remarque 4.4 (Graphe d’un opérateur m-accrétif) Le graphe d’un opérateur m-accrétif est fermé. En ce sens,
il est maximal, d’où le "m" dans m-accrétif.
On admettra le théorème suivant :
Théorème 4.5 (Hille-Yosida) Soit Eun espace de Banach, Aun opérateur m-accrétif et u0D(A). Alors il
existe un unique u:IR
+Etel que
uC1([0,+[,E),(4.1.5a)
u(t)D(A),t0,(4.1.5b)
u(t)+Au=0 sur IR
+,(4.1.5c)
u(0) = u0.(4.1.5d)
La démonstration de ce théorème peut s’effectuer par une discrétisation en temps : on considére le problème
elliptique un+1un
δt+Aun+1 =0, qui s’écrit encore un+1 =I+1
tA1un,δt > 0est le pas de la
discrétisation. On effectue ensuite un passage é la limite δt0.
Définition 4.6 (Semi-groupe) Pour u0D(A)et t0, on pose S(t)u0=u(t), où uest l’unique fonction
vérifiant (4.1.5). Alors l’opérateur S(t)est un opérateur linéaire continu de D(A)Edans Equi vérifie
S(t+s)=S(t)S(s)pour t, s 0;
S(0) = Id
S(t)u0ECtu0E.
On dit que S(t)un semi-groupe.
EDP, Télé-enseignement, M2 63 Université Aix-Marseille 1,R. Herbin, 21 février 2011
4.1. APERÇU DES MÉTHODES CHAPITRE 4. PROBLÈMES PARABOLIQUES
Comme D(A)=E, pour tout t0, l’opérateur S(t)se prolonge de manière continue à tout E, en un opérateur
S(t)L(E,E).
Définition 4.7 (Solution "mild") Soit u0L2(), la fonction u(t)=S(t)u0, définie de manière unique, s’ap-
pelle solution mild du problème parabolique
ut+Au=0
u(0) = u0.
En quel sens cette solution satisfait-elle (4.1.4) ? On verra qu’elle est solution en un sens faible. Cependant il
n’y a pas d’équivalence entre la notion de solution mild et de solution faible, car la solution mild est unique,
malheureusement il n’y a pas unicité de la solution faible.
Dans le paragraph qui suit, nous nous intéressons à un problème elliptique pour lequel nous montrons que la
solution obtenue par densité, à la manière de la solution mild introduite ci-dessus, est unique alors qu’on n’a
pas unicité des solutions faibles. Ceci montre en particulier que dans le cas parabolique, il n’y a non plus pas
équivalence entre solution mild et solution faible (par exemple en considérant les solutions stationnaires). Notons
qu’on ne connaît pas à ce jour de condition sur a solution faible qui caractérise la solution mild.
Le Laplacien avec donnée L1On considère un ouvert borné de IR N,aij L()satisfaisant l’hypothèse
de coercivité habituelle :
α>0;
i,j
αij ξiξjα|ξ|2p.p, ξIR N,
et A=(aij )i,j =1,...,N.On sait (Lax-Milgram) que pour tout fL2(), il existe un unique usolution de
uH1
0(),
Au.vdx=fv vH1
0().(4.1.6)
On considère le même problème avec une donnée moins régulière fL1().
Etape 1 - Estimation, cas régulier. Pour tout 1q< N
N1, on montre qu’il existe CqIR tel que si uest solution
de (4.1.6) avec fL2()alors uW1,q
0()CqfL1().
Etape 2 - Solution mild Pour tout 1q< N
N1, l’application Tqde L2()dans W1,q
0()définie par : f→
Tq(f)=uest continue de L2()muni de la norme de L1()dans W1,q
0()(muni de sa norme naturelle). On
peut donc prolonger Tqde manière unique par densité sur tout L1()(car L2()est dense dans L1()). On
appelle Tqce prolongement. On remarque alors que Tq1f=Tq2fq1,q
2;1q1<q
2<N
N1. On peut ainsi
définir l’opérateur T:L11q< N
N1W1,q
0().
Définition 4.8 (Solution mild pour un problème elliptique à donnée L1)Soit fL1(),Tf est la solution
mild de div(Au)=fdans
u=0sur .(4.1.7)
Etape 3 - Quel sens donner à la solution mild ? Il est naturel de se demander quel rapport il y a entre la solution
mild u=Tf et une solution faible du problème de Dirichlet homogène ? Il est assez facile de montrer que uest
EDP, Télé-enseignement, M2 64 Université Aix-Marseille 1,R. Herbin, 21 février 2011
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