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Séquence 2 – SE02
sur dix (41 %) s’inscrivent dans la continuité des choix de gauche ou de
droite de leurs parents. Si l’on rajoute ceux qui reconnaissent une filia-
tion apolitique, et refusent donc comme leurs parents de se classer entre
la gauche et la droite, ce sont alors les deux tiers des Français (65 %) qui
se présentent comme des héritiers politiques. Les cas de vraies ruptures
restent marginaux. Seuls 8 % des Français ont changé de camp politique
par rapport à leurs deux parents, passant à gauche alors qu’ils ont deux
parents à droite (le cas le plus fréquent), ou passant à droite alors que
leurs deux parents sont positionnés à gauche.
Anne Muxel, « Les temporalités et les instances de la socialisation politique »,
Cahiers Français, n° 350, La Documentation Française, mai-juin 2009.
Résumez ce qui explique que la famille « reste un vecteur efficace dans
la transmission des choix idéologiques ».
Dans les années 1960, à l’Université du Michigan, aux États-Unis, une
équipe de chercheurs va montrer que les électeurs américains s’iden-
tifient à l’un des deux partis politiques américains, et que cette identi-
fication remonte à l’enfance et à l’éducation reçue dans les différentes
catégories sociales. En France, quelques années plus tard, les travaux
d’Annick Percheron vont, en améliorant les méthodes américaines, mon-
trer que le clivage entre gauche et droite est relativement bien respecté
par la reproduction sociale : près d’un enfant sur deux voit ses opinions
être en accord avec celles de ses parents, si ce n’est sur la même sensi-
bilité au moins du même côté de l’échiquier politique. Cette proportion
augmente si les deux parents partagent les mêmes orientations. Elle
augmente également si le reste de l’environnement social est homogène
du point de vue des préférences politiques.
Mais d’autres études sont venues mettre en avant la complexité de
cette transmission intergénérationnelle apparente. Il ressort que bien
d’autres agents de socialisation que les parents jouent un rôle dans la
socialisation politique des individus. De même que les transformations
sociales rapides viennent bouleverser la transmission de systèmes de
valeurs d’une génération à une autre, la transmission politique est aussi
affectée. On peut ainsi se reconnaître dans le même bord politique que
ses parents, la droite ou la gauche, sans pour autant voter comme eux :
43 % des Français reconnaissent ne pas voter pour la même organisation
politique ou le même candidat que leurs parents, et la proportion est
identique à droite comme à gauche.
Ce modèle de l’identification partisane (on s’identifierait à l’appartenance
partisane de ses parents) a donc progressivement été réfuté. La socialisa-
tion politique dans la famille serait en fait plus un mécanisme d’intério-
risation des principes de base de l’organisation politique plutôt que des
orientations partisanes à proprement parler. Par l’interaction, par le rôle
d’autres instances comme l’école, par la confrontation avec le groupe de
pairs, l’individu construit son rapport au politique de façon progressive.
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