La participation politique

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Séquence 2
La participation
politique
« Le droit de vote permet aux citoyens d’un État de voter pour exprimer leur volonté,
à l’occasion d’un scrutin, et ainsi d’élire leurs représentants et leurs gouvernants ou de
répondre à la question posée par un plébiscite ou un référendum. C’est un droit civique
fondamental dans une démocratie. »
Wikipedia
La participation politique des citoyens ne se résume pas au fait de glisser un bulletin dans
l’urne. Il existe une pluralité de façons de participer à la vie politique, étymologiquement à la
vie de la cité. L’apparition de nouveaux canaux d’information, le développement de nouvelles
formes de prise de parole dans le débat public vient relativiser la place du vote dans la société. Cela dit, la majorité des citoyens continue de se déplacer régulièrement pour participer
aux élections. Ce comportement électoral a été abondamment étudié par la science politique :
pourquoi s’abstient-on ? Peut-on expliquer le vote pour tel candidat ? Pourquoi les individus
continuent-ils de voter alors qu’ils croient de moins en moins au pouvoir d’un bulletin de vote ?
Voici quelques-unes des questions auxquelles nous allons nous efforcer de trouver des réponses dans cette partie.
Sommaire
1. Influence de la culture politique
sur les attitudes politiques
2. Comment expliquer
le comportement électoral ?
3. Quels sont les répertoires
de l’action politique ?
Séquence 2 – SE02
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1
Influence de la culture politique
sur les attitudes politiques
Les attitudes politiques sont liées à la culture politique des individus.
Comme toute forme de culture, la culture politique fait l’objet d’une
socialisation, c’est-à-dire d’un processus d’acquisition et de réinterprétation par l’individu d’un certain nombre de règles, de valeurs, de pratiques propres aux groupes auxquels il appartient. Nous allons voir dans
ce chapitre que les groupes qui influencent les individus sont multiples,
et que les effets du contexte historique, social, médiatique doivent être
appréhendés avec précautions.
Notions à acquérir
Culture politique/civique, socialisation politique,
comportements politiques (socialisation primaire,
socialisation secondaire).
Sensibilisation
Document n° 1
Qu’est-ce qui influe sur la culture politique des individus ?
Comment démêler les effets entrecroisés de la période et de la génération, comment traiter l’imbrication de données relevant du contexte
social et politique et de données concernant les dynamiques individuelles ou familiales ? Sont-ce les individus qui changent ou bien le
contexte politique lui-même ? Les mutations sociales et politiques en
cours obligent à réviser les attendus mêmes de la socialisation politique
et à s’interroger sur ses fonctions comme sur ses contenus.
Anne Muxel, « Les temporalités et les instances de la socialisation politique »,
Cahiers Français, n° 350, La Documentation Française, mai-juin 2009.
Séquence 2 – SE02
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Document n° 2
Jeunes manifestant contre la présence de J.-M. Le Pen
au second tour de l’élection présidentielle, mai 2002
© Marcel Mochet/AFP.
Document n° 3
Enfant accompagnant ses parents dans l’isoloir
© Pierre Verdy/AFP.
Réflexion : d’après vous, qu’est-ce qui détermine les comportements
politiques ?
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Séquence 2 – SE02
A
La socialisation politique :
vote-t-on comme ses parents
ou comme ses amis ?
La socialisation est ce processus complexe et illimité qui conduit les
individus à intérioriser les normes, les valeurs, les pratiques sociales de
leurs groupes d’appartenance, tout au long de leur existence. On admet
cependant deux phases de socialisation : la socialisation primaire se
déroule pendant l’enfance et la jeunesse dans les cadres éducatifs que
sont la famille d’abord et l’école ensuite. La seconde phase prend le
relais de la première pour durer toute la vie, c’est la socialisation secondaire qui concerne les adultes.
Les pratiques politiques, comme d’autres pratiques sociales, et les opinions politiques, comme d’autres valeurs, font partie de l’identité des
individus, comme partie de leur identité sociale. Il y a une socialisation
politique qui s’opère lors de la socialisation primaire, dans le cadre familial, et qui continue pendant la socialisation secondaire tout au long du
parcours de vie des individus.
a. Le rôle de la famille dans la socialisation politique
Les premiers sociologues considéraient la socialisation comme une
transmission des agents socialisateurs vers des agents passifs qui intériorisaient, parfois sous la contrainte, les normes et valeurs. Les théories
de la socialisation politique s’en sont inspirées pour expliquer le rôle
de la famille dans la transmission des attitudes et des comportements
politiques. Du coup, les premières interprétations ont penché vers un
modèle de reproduction et de stabilité des opinions politiques au sein
d’une même famille. Les enquêtes allaient d’ailleurs plutôt dans ce sens,
démontrant que les comportements politiques paraissaient déterminés
par la transmission familiale et que les orientations politiques des individus étaient fixées relativement tôt, vers la fin de l’enfance.
Document n° 4
L’influence de la famille dans la transmission du choix politique
[La famille] reste un vecteur efficace dans la transmission des choix idéologiques et un creuset indéniable de l’identité politique des individus. Et
cette transmission se fait d’autant mieux lorsque les choix des parents
sont visibles et homogènes. Chaque famille n’a pas nécessairement les
mêmes capacités à organiser une transmission, et la socialisation politique peut emprunter des chemins de traverse. Celle-ci peut se construire
dans des logiques d’opposition et de réaction, ou encore au travers de
références non explicitement politiques. Mais la famille fournit les premiers repères ou les premières absences de repères et, par là même,
joue un rôle décisif sur la formation des choix ultérieurs. Quatre Français
Séquence 2 – SE02
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sur dix (41 %) s’inscrivent dans la continuité des choix de gauche ou de
droite de leurs parents. Si l’on rajoute ceux qui reconnaissent une filiation apolitique, et refusent donc comme leurs parents de se classer entre
la gauche et la droite, ce sont alors les deux tiers des Français (65 %) qui
se présentent comme des héritiers politiques. Les cas de vraies ruptures
restent marginaux. Seuls 8 % des Français ont changé de camp politique
par rapport à leurs deux parents, passant à gauche alors qu’ils ont deux
parents à droite (le cas le plus fréquent), ou passant à droite alors que
leurs deux parents sont positionnés à gauche.
Anne Muxel, « Les temporalités et les instances de la socialisation politique »,
Cahiers Français, n° 350, La Documentation Française, mai-juin 2009.
Résumez ce qui explique que la famille « reste un vecteur efficace dans
la transmission des choix idéologiques ».
Dans les années 1960, à l’Université du Michigan, aux États-Unis, une
équipe de chercheurs va montrer que les électeurs américains s’identifient à l’un des deux partis politiques américains, et que cette identification remonte à l’enfance et à l’éducation reçue dans les différentes
catégories sociales. En France, quelques années plus tard, les travaux
d’Annick Percheron vont, en améliorant les méthodes américaines, montrer que le clivage entre gauche et droite est relativement bien respecté
par la reproduction sociale : près d’un enfant sur deux voit ses opinions
être en accord avec celles de ses parents, si ce n’est sur la même sensibilité au moins du même côté de l’échiquier politique. Cette proportion
augmente si les deux parents partagent les mêmes orientations. Elle
augmente également si le reste de l’environnement social est homogène
du point de vue des préférences politiques.
Mais d’autres études sont venues mettre en avant la complexité de
cette transmission intergénérationnelle apparente. Il ressort que bien
d’autres agents de socialisation que les parents jouent un rôle dans la
socialisation politique des individus. De même que les transformations
sociales rapides viennent bouleverser la transmission de systèmes de
valeurs d’une génération à une autre, la transmission politique est aussi
affectée. On peut ainsi se reconnaître dans le même bord politique que
ses parents, la droite ou la gauche, sans pour autant voter comme eux :
43 % des Français reconnaissent ne pas voter pour la même organisation
politique ou le même candidat que leurs parents, et la proportion est
identique à droite comme à gauche.
Ce modèle de l’identification partisane (on s’identifierait à l’appartenance
partisane de ses parents) a donc progressivement été réfuté. La socialisation politique dans la famille serait en fait plus un mécanisme d’intériorisation des principes de base de l’organisation politique plutôt que des
orientations partisanes à proprement parler. Par l’interaction, par le rôle
d’autres instances comme l’école, par la confrontation avec le groupe de
pairs, l’individu construit son rapport au politique de façon progressive.
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Séquence 2 – SE02
b. Le rôle des autres instances de socialisation
L’école en tant qu’institution, contrairement à ce que l’on pourrait penser, ne joue pas un rôle prépondérant dans la socialisation politique des
individus. Aucune étude n’a montré que les membres de cette institution,
notamment les enseignants, pouvaient avoir une influence sur la politisation des élèves. Sur le contenu enseigné, les résultats des enquêtes
sont divergents, ce qui ne permet pas de conclure dans un sens ou dans
un autre. Par contre, des études sociologiques montrent que le choix de
l’établissement scolaire et les préférences politiques des lycéens peuvent être liés. Mais, dans ce cas, ce sont plutôt les effets de l’expérience
familiale qui sont révélés, et surtout l’influence du groupe de pairs.
Groupe de pairs
Individus qui partagent le même statut social au sein d’un groupe plus
large ou d’une institution. On qualifie souvent le groupe d’amis ou le
réseau d’interconnaissance des jeunes comme groupe de pairs.
Si la famille transmet un cadre général, des attitudes, des orientations
politiques, c’est dans la confrontation avec le groupe d’amis que la politisation des jeunes se construit. L’influence des pairs est en effet plus
directe que celle des autres instances de socialisation sur les comportements politiques actifs. Anne Muxel a étudié justement les moments de
socialisation politique des jeunes générations, et plus particulièrement
la place que prend l’expérience de la manifestation de rue. Un jeune sur
deux a déjà participé à une mobilisation collective, laquelle joue le rôle
d’initiation quasi rituelle au monde politique. En effet, participer à une
action politique crée une expérience concrète d’engagement qui laisse
des traces sur les attitudes et comportements politiques ultérieurs.
La socialisation politique par la famille conduit à une certaine reproduction des grandes orientations politiques des parents par leurs enfants :
droite, centre, gauche. Cela dit, il est rare que des enfants se situent
exactement sur la même sensibilité politique. Il apparaît que la famille,
comme l’école, transmet plus le cadre général dans lequel se développent les attitudes politiques que des orientations. Celles-ci se forment
dans la confrontation avec les pairs, dans les premières expériences
politiques, souvent des formes non conventionnelles de participation
telles que les manifestations.
Séquence 2 – SE02
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B
Quel rôle pour les médias ?
Depuis l’avènement des médias de masse (radio, télévision et aujourd’hui
Internet), la science politique cherche à mesurer l’effet des campagnes
électorales – et leur relais dans les médias – sur les électeurs.
a. Un effet limité sur les électeurs
Les premières recherches ont eu lieu aux États-Unis, effectuées par
une équipe de l’Université de Columbia menée par Paul Lazarsfeld au
milieu des années 1940. Elles ont montré que l’influence directe de la
campagne et de ses relais médiatiques était en fait assez limitée. En
effet, il ressort de ces recherches que ce sont avant tout l’origine et le
milieu social d’appartenance qui déterminent le vote (« On pense politiquement comme on est socialement »), les campagnes électorales ne
modifiant que faiblement l’orientation des votes. Lorsque Lazarsfeld étudie les élections présidentielles américaines de 1940, il remarque que
seuls 8 % des électeurs changent leurs intentions de vote entre mai et
novembre 1940.
En réalité, les médias avaient peu de prise sur le vote des électeurs, et
ce sont surtout les « leaders d’opinion » qui faisaient preuve d’efficacité pour activer les convictions politiques le temps d’une campagne
électorale. Ces leaders d’opinion sont des individus qui, dans chaque
groupe social, sont plus proches des débats politiques et plus exposés
aux médias que la moyenne des individus qui composent le groupe. On
estime leur part à 10 % d’une population observée. Ce sont eux qui peuvent influencer leurs proches, selon cette théorie du « two-step flow of
communication », la communication à deux étages. Les organisations ont
rapidement compris cela. Elles appliquent d’ailleurs toujours des techniques de recrutement de ces leaders au sein des groupes sociaux, afin
de faire pencher les électeurs volatils vers leur candidat. Il est d’ailleurs
assez intéressant de remarquer que les campagnes se focalisent souvent sur ce faible pourcentage d’électeurs susceptibles de changer leur
vote, notamment entre les deux tours d’une élection. Ce sont donc les
électeurs qui sont justement les plus éloignés de la sphère politique, et
donc les moins susceptibles de recevoir les messages énoncés pendant
les campagnes, qui sont visés par celles-ci.
Document n° 5
La mobilisation électorale des minorités aux États-Unis
En 2008, [les Noirs] ont été deux millions de plus à se rendre aux urnes
que lors des scrutins précédents. En Caroline du Nord, par exemple, où
300 000 électeurs noirs étaient allés voter pour la première fois, Barack
Obama l’avait emporté avec moins de 14 000 voix d’avance. Les sondeurs ne doutent pas que plus de 80 % des électeurs noirs soient derrière le Président, même s’ils lui reprochent de ne pas faire assez pour
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Séquence 2 – SE02
une communauté touchée par un taux de chômage (16 %) supérieur à
celui des Blancs. La Maison Blanche a entrepris de « vendre » son bilan
grâce à un rapport de 44 pages et une « opération vote » qui va cibler en
priorité les Noirs, les femmes et les Latinos pour laquelle elle a recruté
des personnalités connues dans chaque communauté.
Corine Lesnes, « État des lieux de l’électorat ayant voté démocrate en 2008 »,
Le Monde, 24-26 décembre 2011.
En quoi ce document illustre-t-il la mise en application de la théorie du
two-step flow of communication ?
Un peu plus tard, des travaux s’étant penchés sur l’effet plus particulier
de la télévision vont également conclure sur un effet limité de l’information de masse, et de l’information politique en particulier. Dans les
années 1960, des psychologues ont montré que les individus sélectionnent parmi les informations reçues celles qui viennent alimenter leurs
positions politiques d’origine. On peut citer trois éléments : la sélection
éditoriale, la réception différenciée et la mémorisation sélective. Tout
d’abord, les études ont montré que les individus ont tendance à choisir
des médias dont les traitements éditoriaux vont dans le sens de leurs
convictions politiques. Ensuite, les individus ne perçoivent pas de la
même manière le même programme qui fait intervenir des responsables
politiques : il est rare de voir quelqu’un reconnaître que l’adversaire de
son candidat a été meilleur dans le débat. Enfin, les individus ne mémorisent pas de la même manière les informations reçues de la télévision :
on a plus de mal à retenir des éléments qui viennent contredire notre
façon de penser que les éléments qui viennent la confirmer.
b. Un effet important sur le champ politique
Si les premières études ont montré un effet limité des médias et des
campagnes électorales sur les électeurs, d’autres ont mis en avant l’impact négatif des médias sur la forme que prennent les débats politiques,
sur le type d’information relayée et le contenu de celle-ci. Des politistes
américains ont relevé le fait que le traitement médiatique du politique
tendait souvent à réduire l’actualité aux rivalités de personnes et aux
scandales. L’accent serait mis sur le superficiel et non sur l’essentiel du
discours politique, sur les « petites phrases » plutôt que sur les idées
de fond. Cela viendrait expliquer une tendance à l’abstention observée
aux États-Unis depuis les années 1970-80, qui ne serait que la concrétisation d’une distance toujours plus grande entre les citoyens et leurs
représentants politiques, distance entretenue par un traitement médiatique poussant au cynisme.
En France, le sociologue Pierre Bourdieu a montré que la télévision diffuse, de par le format de ses émissions, une vision déformée de la réalité. Les sujets courts, les effets de cadrage et les choix journalistiques,
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l’uniformisation des informations sur les différents supports mettent
l’accent sur des événements qui ont parfois une faible portée politique,
et au contraire réduisent au minimum les informations qui seraient pourtant nécessaires aux citoyens pour faire un choix éclairé et exercer leurs
droits démocratiques.
Plus récemment, des travaux ont mis l’accent sur la couverture médiatique des élections. Il apparaît que les médias ont le pouvoir d’attirer
l’attention des spectateurs et des responsables politiques sur un enjeu,
de le transformer en un enjeu politique et d’imposer son traitement
dans l’agenda des réformes et des campagnes en période électorale. Du
coup, les médias jouent un rôle important, et tout l’enjeu des campagnes
électorales peut se résumer en une lutte pour hiérarchiser les thèmes et
problématiques abordés et les faire évoluer vers ceux qui sont les plus
favorables à tel ou tel candidat. Des politistes ont ainsi étudié la focalisation médiatique sur le thème de l’insécurité pendant la campagne
présidentielle de 2002. Celle-ci a permis d’avantager Jean-Marie Le Pen,
candidat de l’extrême droite française, qui a fait de l’insécurité un de ses
thèmes de prédilection.
Si les médias ne font pas l’élection, et n’influencent pas les opinions
politiques des individus, ils ont tendance à restreindre et à imposer les
acteurs et les enjeux du champ politique. L’influence n’est donc pas
directe, mais diffuse. Quoi qu’il en soit, l’impact des médias sur la formation des opinions individuelles reste difficile à mesurer.
C
Quelle place pour le contexte
social et historique ?
La socialisation politique poursuit son œuvre tout au long de la vie
des individus, dans les différents groupes auxquels ils appartiennent.
Elle n’est pas le seul fait de la famille, de l’école et du groupe de pairs
ou encore des médias, comme nous l’avons déjà vu. La socialisation
politique est en réalité renouvelée, confirmée ou remise en cause, par
d’autres groupes d’appartenance tels que les étudiants dans l’enseignement supérieur, les collègues au travail, les membres des associations
et partis auxquels on peut appartenir.
Le contexte social joue donc un rôle important dans la réception des informations politiques. À la différence des informations qui passent par le
filtre médiatique et qui font l’objet d’une sélection par l’individu qui les
reçoit, des études ont montré que l’interaction avec l’entourage était plus
efficace, l’information était mieux mémorisée. Le fait que l’échange soit
continu, et dans les deux sens, que cet échange soit connoté affectivement, car reposant sur un lien d’interconnaissance (amical, familial, militant, professionnel), donne du poids à l’information politique échangée.
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Séquence 2 – SE02
En ce qui concerne le contexte historique, historiens et sociologues montrent que l’événement politique peut socialiser de deux manières. D’abord
dans la pratique : la participation à une période pendant laquelle se
déroule un fait marquant de l’histoire politique conduit les individus –
en particulier les jeunes générations – à combler leur retard en terme
d’expérience politique. Ensuite dans les représentations, puisque ces
événements font l’objet de redéfinitions et de commémorations, et parfois
de débat autour de cette mémoire collective. Il faut donc avoir à l’esprit
que certains événements peuvent accélérer la socialisation politique, tout
en relativisant les effets « de génération ». Si, aux États-Unis, on retient
la Seconde Guerre mondiale, la guerre du Vietnam, l’assassinat de John
Fitzgerald Kennedy ou, plus récemment, les événements du 11 septembre
2001 comme des moments de socialisation politique intense, en France, il
ressort des enquêtes la Seconde Guerre mondiale, la guerre d’Algérie, Mai
68 ou le 21 avril 2002. Parfois certains journalistes généralisent les effets
potentiels d’un événement jusqu’à dénommer une génération par rapport
à ce dernier (la « génération 68 », la « génération 21 avril », la « génération
CPE »). C’est le fait que de multiples événements d’ampleur nationale ou
internationale surviennent au cours de l’existence qui façonne l’identité
politique plutôt qu’un effet mécanique lié à l’exposition à un événement
en particulier.
Conclusion
La socialisation politique perçue comme la formation d’un rapport à la
politique qu’entretient un individu est un processus complexe, comme
tout processus de socialisation. Il doit être compris comme une succession de relations interindividuelles, entre un individu et un groupe, entre
un individu et un événement. On est socialisé à la fois par ses parents,
par l’école, mais surtout par ses amis et connaissances, en particulier
ceux de notre génération qui partagent une expérience des événements
politiques en même temps que nous. Ces événements passent par le
prisme des médias dont l’impact sur les individus va lui-même varier en
fonction du degré de socialisation politique de ceux-ci. Bref, cet enchevêtrement de relations doit être pensé dans sa complexité, et pas uniquement comme le produit d’une éducation, d’un seul événement ou
d’un traitement médiatique particulier.
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Comment expliquer
le comportement électoral ?
Depuis que les scrutins existent, on cherche toujours à anticiper leurs
résultats, d’où l’omniprésence des sondages dans les médias, et à les
expliquer après qu’ils se sont produits. Les politistes ont multiplié les
modèles pour tenter d’expliquer les comportements électoraux et savoir
comment les électeurs font leur choix. Mais avant d’expliquer pourquoi
et pour qui les électeurs votent, il convient de chercher à comprendre
pourquoi certains ne votent pas.
Notions à acquérir
Participation et abstention électorale, variables
lourdes du comportement électoral, vote sur enjeu.
Sensibilisation
Document n° 6
Participation systématique aux élections de 2007
(présidentielle et législatives)
70,0
60,0
50,0
40,0
30,0
20,0
10,0
0,0
4
8-2
1
s
s
s
s
s
s
s
s
s
s
s
s
s
an 9 an 4 an 9 an 4 an 9 an
an 9 an 4 an 9 an 4 an 9 an t plu
4
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4
2
3
3
4
5
5
6
6
7
7
s
45
25
30
35
40
50
55
60
65
70
75
an
80
Cned, d’après Insee.
12
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Séquence 2 – SE02
Clé de lecture : en France, en 2007, 31 % des électeurs de 18 à 24
ans ont voté aux deux tours des élections, présidentielle et législatives.
Décrivez : quel phénomène est illustré par cette courbe ?
Imaginez : quelles hypothèses peuvent expliquer ce phénomène ?
A
Pourquoi ne se sert-on pas
de son droit de vote ?
a. L’inscription sur les listes électorales
On comptait 43,2 millions d’inscrits sur les listes électorales en France
en février 2011, d’après les chiffres de l’Insee. Pour être électeur lors
d’un scrutin en France, il faut avoir 18 ans à la veille du scrutin, jouir
de ses droits civils et être inscrit sur les listes électorales. Depuis 1997,
l’inscription sur les listes électorales est réalisée d’office pour les jeunes
qui atteignent l’âge de la majorité. En effet, lors des Journées défense et
citoyenneté, passage obligé pour tout jeune Français, le ministère de la
Défense collecte des données qu’il transmet à l’Insee. Celui-ci vérifie le
lieu de résidence et la date de naissance de chaque jeune disposant de
ses droits civils et politiques, et transmet aux services de sa commune
ces informations de manière à être inscrit d’office sur les listes électorales.
Toutefois, tout le monde n’est pas inscrit. La population des non-inscrits comprend deux catégories de personnes : celles qui ont eu plus
de 18 ans avant 1997 et qui ne se sont jamais inscrites sur les listes,
et celles qui ont déménagé et ne se sont pas réinscrites auprès de leur
nouvelle commune de résidence. Tous les ans, une commission administrative est chargée dans chaque commune de mettre à jour les listes
électorales. On estime à 10 % la part des non-inscrits dans le corps électoral potentiel (c’est-à-dire toutes les personnes majeures, françaises et
jouissant de leurs droits civils et politiques).
Lorsque l’inscription n’était pas d’office, on remarquait une très forte
disparité dans la population en fonction de l’âge. En effet, les jeunes
étaient très majoritaires parmi les non-inscrits. Cette tendance s’atténue
de fait en raison de l’inscription d’office décrite plus haut. En revanche,
il y a toujours deux types d’explications à la non-inscription qui recoupent partiellement les explications de l’abstention (les électeurs inscrits
ne votant pas). La première est d’ordre sociologique, la non-inscription
s’expliquant par les caractéristiques sociales des individus comme leur
degré d’insertion sociale, leur niveau d’études, leur position sociale. La
seconde explication est d’ordre politique, la non-inscription pouvant
être perçue comme une partie de l’abstention ou encore le vote blanc.
Il s’agit alors d’une volonté de ne pas s’exprimer, de refuser le jeu poli-
Séquence 2 – SE02
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tique ou de montrer son désintérêt. Ainsi, moins on se sent proche d’un
parti politique, moins on est inscrit. Les individus qui ne parviennent pas
à se situer sur l’échiquier politique (gauche, droite, centre, extrêmes)
s’inscrivent en général moins que ceux qui parviennent à donner leur
sensibilité politique.
Mais la non-inscription s’explique aussi par des causes sociologiques.
Les individus qui changent de domicile régulièrement doivent faire la
démarche de s’inscrire sur les listes électorales. Or la socialisation politique dans un univers social est souvent lente, et il n’est pas rare de
voir des personnes conserver leur ancienne inscription ou tout du moins
ne pas s’inscrire sur les listes de leur nouvelle commune de résidence,
comme pour garder des attaches avec l’ancienne. C’est ici l’insertion
sociale dans son environnement qui détermine l’inscription sur les listes
électorales. Par exemple, les propriétaires de leur logement ont une probabilité de changer de résidence beaucoup plus faible que les locataires,
et cela se confirme dans leur plus grande probabilité de s’inscrire sur les
listes : en effet la probabilité de ne pas être inscrit décroît à mesure que
la durée d’occupation d’un logement augmente.
À l’époque où l’inscription des jeunes n’était pas automatique, on observait une différence entre les jeunes cohabitant avec leur parents et ceux
qui étaient en situation de décohabitation. Au même âge, les enfants
majeurs vivant encore chez leurs parents avaient une probabilité de
ne pas être inscrits plus importante que ceux vivant dans leur propre
ménage : c’est bien la preuve que ce n’est pas tant l’âge biologique qui
compte mais l’âge social et l’insertion progressive dans le monde des
adultes.
Les autres explications sociologiques à la non-inscription se rapprochent
de celles de l’abstention : un faible niveau d’études entraîne plus souvent une non-inscription et une abstention lors des scrutins. Le niveau
d’études doit être rapproché du sentiment de compétence politique :
Pierre Bourdieu a ainsi montré qu’en fonction du niveau d’études les
individus intériorisent leur compétence ou incompétence personnelle à
s’exprimer sur des sujets politiques. Ce sentiment d’incompétence politique se retrouve plus souvent chez les individus faiblement diplômés.
Ainsi on retrouve une proportion d’inscrits sur les listes et de participants systématiques très importante dans la population très diplômée.
À l’inverse, l’abstention systématique décroît avec le niveau d’études,
comme le montre le document 7, page suivante.
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Séquence 2 – SE02
Document n° 7
Taux de participation aux scrutins de 2002 selon le diplôme,
au même âge
Taux de participation
moyen
Abstentionnistes
systématiques
Aucun diplôme
62 %
20 %
Certificat d’études primaires
68 %
16 %
BEPC, Brevet
72 %
11 %
CAP, BEP
70 %
13 %
Bac général
75 %
10 %
Bac technologique
ou professionnel
75 %
9%
1er cycle, BTS, DUT
77 %
8%
2e ou 3e cycle,
Grandes écoles
80 %
5%
Patrick Lehingue, « Un débat complexe et dérangeant : la volatilité électorale »,
Cahiers Français, n° 350, La Documentation Française, mai-juin 2009.
Enfin la position sociale, qui découle souvent du niveau d’études et qui
détermine le degré d’insertion sociale, n’est pas sans effet. Les chômeurs et les personnes issues d’un ménage modeste s’inscrivent généralement moins que le reste de la population. De même, ils sont plus
souvent abstentionnistes que les autres.
b. La participation aux scrutins
Si certaines causes sociologiques semblent se recouper pour expliquer
à la fois la non-inscription et la non-participation aux scrutins, il ne faudrait pas pour autant confondre les phénomènes. Il y a en effet des différences importantes entre les deux :
– L’abstention est le plus souvent ponctuelle (les individus qui s’abstiennent ne le font pas systématiquement, pour tous les scrutins). À l’inverse, et par définition, un individu non inscrit ne peut participer à aucun
scrutin.
– La non-inscription sur les listes électorales est stable : on l’évalue entre
8 et 10 % du corps électoral potentiel. L’abstention connaît, elle, pour
certains scrutins, une baisse tendancielle depuis plusieurs décennies.
– La nature des élections fait varier fortement la participation électorale, alors qu’on n’observe pas le même phénomène en ce qui concerne
l’inscription sur les listes (à l’exception peut-être de certaines élections
présidentielles qui voient l’année qui les précède enregistrer un record
d’inscription, comme en 2006 ou en 2011).
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Document n° 8
Taux de participation aux premiers tours
des élections législatives depuis 1910
85,0
80,0
75,0
70,0
65,0
60,0
55,0
2007
1993
1997
2002
1988
1978
1981
1986
1973
1962
1967
1968
1958
1946
1951
1956
1946
1932
1936
1946
1928
1910
1914
1919
1924
50,0
Cned, d’après Insee.
Illustrer : en utilisant les données de ce graphique, mesurez la baisse
tendancielle de la participation électorale aux législatives sur la période
récente.
On observe une baisse tendancielle de la participation politique depuis
quelques décennies, et plus particulièrement depuis le début des années
1990. Ce phénomène abstentionniste est souvent jugé comme étant la
conséquence d’une crise de la représentation politique. Les Français
n’ont jamais manifesté envers les hommes et les femmes politiques
une grande confiance, laquelle s’est en fait complètement effritée. En
2002, des sondages réalisés à l’occasion des élections présidentielles
montraient que seul un tiers des personnes interrogées jugeait leurs élus
honnêtes, et plus de la moitié considérait que les hommes politiques
ne se préoccupaient pas de ce qu’elles pensaient. Pour reprendre une
explication déjà donnée à la non-inscription sur les listes électorales,
une forte abstention peut être le signe d’une intégration politique insuffisante.
Mais d’autres causes peuvent être mises en avant pour expliquer ce phénomène. L’action de voter a changé de sens, notamment parce que les
valeurs se sont individualisées.
Document n° 9
Le sens du vote a changé
Le sens du vote est en train de changer. Il était autrefois perçu comme
un devoir impératif du citoyen. Un bon Français se devait d’aller voter.
Ce sentiment existe toujours mais il s’est effrité et relativisé. La force de
l’obligation s’est altérée. Le vote est aujourd’hui davantage perçu comme
un droit que l’on exerce si l’on en saisit l’intérêt. Autrefois on allait voter
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Séquence 2 – SE02
par principe, même si on ne savait pas très bien le sens de son choix.
Aujourd’hui, avant de déposer un bulletin dans l’urne, on veut avoir de
bonnes raisons de le faire, on veut être sûr de voter « utilement ». Dans
le doute, on préfère s’abstenir. Le vote est donc devenu plus raisonneur,
plus inquiet, plus fragile, moins constant et moins fidèle à une tendance
politique. (…)
La montée de l’abstentionnisme intermittent renvoie en fait au grand
mouvement d’individualisation des valeurs dans les sociétés occidentales. Le vote se rationalise et s’individualise, ce qui fait à la fois sa grandeur mais aussi sa fragilité. Lorsque les gouvernants donnent l’impression de tous proposer le même genre de programme, ce qui est fréquent
dans un univers politique mondialisé et où les groupes de pression ont
un poids grandissant, il est très difficile de convaincre quasiment tous
les citoyens qu’il est utile d’aller voter. Ils ne le font plus seulement pour
attester leur appartenance à la collectivité, sans comprendre le sens de
leur vote, comme ils le faisaient parfois autrefois.
Pierre Bréchon, « La participation politique : crise et/ou renouvellement »,
Les nouvelles dimensions de la citoyenneté, Cahiers Français, n° 316,
La Documentation Française, 2003.
La montée de l’abstention doit donc être relativisée, car celle-ci est surtout due à une montée de l’abstentionnisme intermittent. Les scrutins
importants aux yeux du corps électoral voient toujours une participation
importante. Ainsi dans notre système politique où le président de la
République est élu au scrutin universel direct, la participation au second
tour est toujours importante (environ 80 %). Une exception confirme la
règle, les élections de 1969 : elles ont vu s’affronter au deuxième tour
deux candidats du même camp (droite modérée), conduisant une partie
du camp opposé à appeler à l’abstention.
Par contre, lorsqu’il s’agit d’élire des représentants locaux, la proximité
géographique et la taille de la circonscription jouent à plein. Ainsi les
électeurs se déplacent plus pour les élections municipales que pour les
cantonales, pour les élections cantonales que pour les régionales, pour
les élections régionales que pour les européennes. Une autre raison de
l’abstention est le manque d’intérêt pour l’objet du scrutin. C’est particulièrement vrai pour les référendums : lorsque les questions posées aux
électeurs les intéressent, ou lorsqu’ils en perçoivent l’enjeu politique,
alors la mobilisation est massive. À l’inverse, lorsque la question posée
est très secondaire dans la vie quotidienne ou dans les préoccupations
politiques, alors l’abstention est grande.
Séquence 2 – SE02
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B
Les variables lourdes
du comportement électoral
Les premiers modèles de sociologie électorale étaient assez sommaires :
ils étaient basés sur le constat de certaines régularités statistiques dans
les comportements politiques des individus. On peut citer les études
d’André Siegfried, à la fois sociologue, géographe et historien français
de la première moitié du XXe siècle. Il a tenté de démontrer que certains
aspects géographiques pouvaient avoir une influence sur les modes de
vie, certains favorisant le vote à droite, d’autres le vote à gauche. Il expliquait ainsi la tendance au vote conservateur dans l’ouest de la France.
Depuis, les politistes n’ont de cesse de chercher à isoler les variables qui
permettent d’expliquer le comportement électoral.
a. L’enquête fondatrice de l’École de Columbia
Nous avons évoqué plus haut certains enseignements tirés des enquêtes
menées dans les années 1940 par Paul Lazarsfeld, de l’Université de
Columbia, aux États-Unis. Si celles-ci ont apporté beaucoup sur l’étude
de la réception des messages médiatiques et l’effet des campagnes
électorales sur les électeurs, elles ont aussi été au fondement de bon
nombre d’études qui ont mis en évidence l’importance des variables
sociologiques pour expliquer les comportements électoraux.
En effet, il ressort de ces premières études que les électeurs « pensent
politiquement comme ils sont socialement ». Sans parler d’un déterminisme absolu dont les individus ne pourraient se sortir, Lazarsfeld
et son équipe montrent que le milieu social des électeurs a tendance
à préorienter le vote. À partir de cela, la connaissance du groupe d’appartenance d’un individu permet de prédire de manière relativement
efficace son vote. En 1940, lors de l’élection présidentielle américaine,
dans l’échantillon observé par les chercheurs, seuls 24 % des électeurs
ruraux, protestants, appartenant aux classes supérieures de la société
ont voté démocrate. Cette proportion s’élevait à 86 % pour les catholiques, urbains et appartenant aux classes défavorisées. À l’époque,
l’appartenance sociale et surtout la religion étaient les attributs sociaux
les plus influents pour expliquer le vote.
De plus, d’autres enquêtes portant plus spécifiquement sur les individus
ayant des appartenances contradictoires (catholiques et upper class, ou
protestant et lower class) ont confirmé que ces derniers votaient moins,
hésitaient plus longtemps et pouvaient plus facilement changer d’avis.
Cela viendrait ainsi confirmer que certaines variables lourdes permettent d’expliquer le comportement électoral. Ainsi un acte éminemment
individuel tel que le vote peut-il être perçu, dans une certaine mesure,
comme une pratique de groupe.
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Séquence 2 – SE02
b. Les suites aux États-Unis et en France
Cette vision pour le moins déterministe va être critiquée par les chercheurs de l’Université du Michigan, cités également plus haut (voir
Chapitre 1, partie 1.a). Pour eux, le vote est avant tout expliqué par des
données psychologiques individuelles, plus que par les caractéristiques
sociales dont les individus héritent. Il ressort de leurs enquêtes que les
électeurs se prononcent en fonction de leur identification partisane,
c’est-à-dire d’un sentiment de proximité affective avec l’un des deux
grands partis qui structurent la vie politique américaine. Ainsi ceux qui
se définissent comme démocrates seront plus réceptifs aux discours
des candidats démocrates, et inversement pour ceux qui se définissent
comme républicains. Ces études sont d’ailleurs assez rudes car elles
insistent sur le fait que la grande majorité des électeurs n’est pas forcément capable d’une réflexion abstraite et idéologique. Cela dit, même
pour ces chercheurs, l’identification à un parti prend souvent sa source
dans un « héritage » familial.
En France, on doit à Guy Michelat et Michel Simon d’avoir mené une
enquête sur la place de la classe sociale et de la religion dans l’explication du comportement politique. Ils observaient la France des années
1970 et affirmaient que les variables lourdes jouaient encore leur rôle.
En effet, le clivage gauche/droite est toujours très fortement structuré
autour de l’appartenance sociale et confessionnelle. Ainsi le monde
ouvrier était encore très majoritairement tourné vers le Parti communiste.
À l’inverse, les classes moyennes catholiques, qu’elles soient rurales ou
urbaines, étaient toujours acquises aux valeurs défendues par les partis
de droite. Aujourd’hui le déclin de l’industrie, la montée du chômage,
un certain nombre d’éléments ont partiellement gommé la spécificité
du monde ouvrier. Le vote ouvrier est moins éloigné de celui de l’ensemble des salariés. Par contre on observe d’autres clivages, comme par
exemple entre salariés du privé et salariés du secteur public. Les premiers sont plus tournés vers la droite, les seconds vers la gauche.
Document n° 10
Intentions de vote pour le second tour de l’élection présidentielle
de 2007, en fonction de l’appartenance religieuse
Ensemble
des Français (%)
Catholiques
pratiquants (%)
Catholiques non
pratiquants (%)
Sans
religion (%)
Ségolène Royal
49
28
43
67
Nicolas Sarkozy
51
72
57
33
D’après une enquête d’opinion, février 2007.
Illustrer : en quoi peut-on dire que la variable religieuse peut encore
expliquer le comportement électoral ?
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Les dernières enquêtes montrent ainsi que le vote de classe tend à s’estomper sans être complètement effacé pour autant. Le comportement
électoral des ouvriers s’est dispersé. Le vote ouvrier est d’abord un
« non-vote », puisque l’abstention est devenue le premier parti ouvrier.
Mais c’est toujours vers la gauche que les ouvriers se tournent lorsqu’ils
votent, puis vers la droite et l’extrême droite. Le clivage gauche/droite
en fonction de la position sociale est toujours une réalité. La variable
religieuse est également toujours explicative des choix électoraux. Pour
autant, certains modèles explicatifs du vote s’éloignent des explications
sociologiques pour préférer expliquer les comportements électoraux par
le calcul rationnel des électeurs.
C
Vers un vote « sur enjeu » ?
Aux États-Unis, les électeurs « mobiles » ont progressivement pris une
part de plus en plus grande dans le corps électoral. Cela remettrait donc
en question les modèles qui expliquent le vote à partir de l’appartenance sociale ou de la psychologie des individus. En effet, ces dernières
ne changent pas entre deux tours ou entre deux élections rapprochées ;
comment expliquer dès lors la volatilité électorale ? Cela a favorisé l’éclosion d’une nouvelle théorie, basée cette fois sur la rationalité supposée
des individus, empruntant largement cette hypothèse aux théories économiques qui commençaient à s’imposer dans les années 1970.
a. Un Homo œconomicus en politique
Les enquêtes montrant une instabilité plus grande dans le vote des électeurs (« floating vote »), les sociologues vont réviser leurs modèles explicatifs du vote. Les variables lourdes semblent ne plus pouvoir expliquer
les comportements électoraux, en particulier pour les plus jeunes, et on
en conclut que l’électeur devient plus rationnel et plus stratège. Il serait
devenu capable de s’autonomiser vis-à-vis de ses groupes d’appartenance pour réaliser des calculs coûts/avantages à la manière du modèle
de l’Homo œconomicus des économistes néoclassiques.
On observerait ainsi une montée du vote « sur enjeu », c’est-à-dire sur
des questions et problématiques importantes aux yeux des électeurs au
moment du scrutin. Ce n’est pas le contenu idéologique ou l’étiquette
qui compte, mais la réponse apportée à tel ou tel problème qui concerne
l’électeur. Ainsi celui-ci serait prêt à voter pour untel parce qu’il apporte
telle réponse à tel problème, pas pour sa couleur politique et le fond
des idées qu’il défend. La montée de l’individualisme en tant que valeur
dans la société expliquerait donc que les variables sociales « lourdes »
perdraient de leur pouvoir explicatif.
C’est en relisant tardivement un ouvrage qu’Anthony Downs avait rédigé
à la fin des années 1950 (Une théorie économique de la démocratie) que
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Séquence 2 – SE02
les politistes américains ont défendu cette théorie de l’électeur stratège.
Comme dans la théorie économique orthodoxe, l’individu est doté d’une
capacité de calcul qui lui permet de faire des choix électoraux rationnels et
d’adapter son vote en fonction du but auquel il tend. Il choisit l’offre politique qui correspond le mieux à ses intérêts, qui maximise son utilité. Dans
ce modèle les changements politiques s’expliquent exclusivement par le
changement de l’offre, le renouvellement des candidats et des programmes.
Document n° 11
Le paradoxe du vote dans la théorie du choix rationnel
L’universalisation du calcul coûts/avantages à cette espèce à peine singulière d’Homo œconomicus qu’est l’électeur conduit à poser une question
par ailleurs pertinente : pourquoi les électeurs votent-ils ? Mais, dans les
limites étroites de la rationalité instrumentale* du modèle, la réponse à
cette question est qu’en toute logique, l’électeur rationnel devrait s’abstenir, les coûts de sa participation (informations à recueillir, perte de temps
liée au déplacement dans les bureaux de vote, etc.) l’emportant largement
sur l’utilité (bénéfices personnels attendus de la victoire de M. X), laquelle
est lourdement pondérée par la probabilité, a priori infinitésimale, pour
qu’un vote singulier décide de l’issue du scrutin. Or, même si l’on assiste
depuis le milieu des années 1980 à une baisse tendancielle des taux de
participation, une majorité relative de citoyens persiste à voter. D’où l’existence d’un « paradoxe du vote », que plusieurs dizaines de recherches
inspirées du même auteur ne parviendront pas à réellement résoudre.
*Rationalité instrumentale : il s’agit de la rationalité en finalité qui
consiste à choisir le moyen, l’instrument, le plus efficace pour atteindre
la fin, le but désiré.
Patrick Lehingue, « Les explications du vote », Nouveau manuel
de science politique, La Découverte, 2009. www.editionsladecouverte.fr
En quoi le vote apparaît-il comme paradoxal si on suppose la rationalité
parfaite des électeurs ?
b. Une rationalité limitée ?
Dans ces modèles du vote sur enjeu qui fait de l’électeur un individu pleinement rationnel, qui ne voterait pas en fonction de son histoire sociale
ou d’un attachement affectif à tel parti ou tel candidat, les chercheurs
qui les défendent rencontrent un problème. Toutes les enquêtes montrent que le niveau de connaissance du système politique n’augmente
pas. Or, pour pouvoir être rationnel et faire des choix en conscience,
encore faut-il être bien informé sur l’enjeu du scrutin, les propositions
des différents candidats, etc.
Certaines théories affirment que les électeurs, s’ils ne font pas preuve
d’une rationalité totale, sont néanmoins capables d’une rationalité
limitée, qui leur suffit à faire des choix raisonnables. L’expérience per-
Séquence 2 – SE02
21
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sonnelle passée permettrait ainsi de lire un certain nombre de microinformations (la façon de se présenter d’un candidat, les slogans, la
conformité à des stéréotypes, etc.) et de se décider alors sans avoir une
parfaite connaissance des enjeux. On rompt alors avec la représentation
première de l’électeur mobile, un individu plutôt bien informé, intéressé
par la politique, qui fait des choix rationnels allant dans le sens de ses
intérêts. Et on rejoint la réalité mesurée par les enquêtes : les électeurs
qui font des allers-retours entre la droite et la gauche ont en moyenne un
patrimoine et un niveau d’études moins élevés que le reste des électeurs.
Trois explications permettent de comprendre pourquoi ces électeurs naviguent facilement entre les deux côtés du clivage politique communément
admis. En étant faiblement informés sur l’organisation du champ politique,
ces individus ne parviennent pas forcément à percevoir les lignes de force
qui le traversent. Ensuite, il se peut que, moins intéressés par la politique,
ils ne s’efforcent pas d’apporter des réponses politiquement cohérentes lors
des enquêtes menées par les chercheurs, alors que les plus informés et les
plus intéressés cherchent à montrer un profil politique cohérent, à droite ou
à gauche. Enfin, la montée des populismes ces dernières années, en particulier à l’extrême droite, vient troubler les modèles traditionnels qui répartissent les électeurs en deux blocs. En effet, par exemple en France, une
frange des classes populaires vote pour l’extrême droite lors des premiers
tours des élections présidentielles pour émettre un vote de protestation,
mais se tourne finalement vers la gauche lors du second tour.
En revanche, en ce qui concerne les électeurs mobiles à l’intérieur d’un
camp politique (la gauche ou la droite), on retrouve des catégories de
population correspondant mieux à la théorie de l’électeur rationnel. Des
profils au niveau de diplôme plus élevé que la moyenne, et se déclarant intéressés par la politique, sont plus souvent mobiles ou en tout cas
envisagent une volatilité de leur vote sur des sensibilités différentes à
l’intérieur d’un camp idéologique.
Conclusion
La sociologie électorale montre une certaine diversité dans ses
approches. Empruntant parfois aux disciplines voisines telles que la
psychologie ou l’économie, les multiples théories permettent de rendre
compte de la complexité nécessaire pour comprendre les comportements électoraux des individus. Même si elles résultent souvent de la
rivalité entre chercheurs souhaitant imposer leurs modèles, ces explications apparaissent aujourd’hui plus comme complémentaires. Ainsi
les théories plus déterministes expliquent encore, même aujourd’hui, la
répartition globale de la population en deux blocs, la droite et la gauche,
en fonction de variables sociologiques assez bien identifiées. Mais les
théories individualistes permettent également de comprendre les comportements à la marge des électeurs se déclarant plus indépendants des
appartenances partisanes, mais plus attachés à la conjoncture politique.
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Séquence 2 – SE02
3
Quels sont les répertoires
de l’action politique ?
La forme traditionnelle de participation politique depuis l’avènement
de la démocratie électorale est bien évidemment le vote. Qu’il s’agisse
de la participation à des scrutins visant l’élection de candidat ou bien
de répondre à une question (référendum), le vote est considéré comme
la forme de participation conventionnelle. Il existe toutefois d’autres
formes de participation, dites non conventionnelles, que nous allons
étudier dans ce chapitre.
Notions à acquérir
Répertoires d’action politique.
Sensibilisation
Document n° 12
Statut de Barack Obama sur Facebook le 31 décembre 2011
Traduction : « Nous atteignons la date limite ce soir à minuit. Pouvezvous mettre 5 $ ou plus pour nous aider à construire cette campagne
pour 2012 ? »
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Document n° 13
Un vote à bulletin secret lors d’une élection en France
© Philippe Huguen/AFP.
Document n° 14
Mise en place d’un appel au boycott de produits alimentaires
© Rémy Gabalda/AFP.
En quoi ces trois documents illustrent-ils des formes de participation politique ?
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Séquence 2 – SE02
A
Le vote et les formes
conventionnelles de participation
Lorsqu’on se demande comment les citoyens peuvent intervenir directement sur la politique, on pense immédiatement au vote. L’exercice du
droit de vote est en effet une des façons d’exprimer ses idées, de faire
valoir un avis sur les décisions collectives à prendre, d’exprimer son
accord (ou son désaccord) sur les réponses apportées par les organisations politiques.
a. La désignation de représentants
Comme nous l’avons déjà vu précédemment, les Français sont régulièrement appelés aux urnes pour élire leurs représentants dans presque
toutes les assemblées politiques. Le conseil municipal, le conseil
général (département), le conseil régional, l’Assemblée nationale, le
Parlement européen sont les cinq assemblées pour lesquelles tout
citoyen doit choisir son ou ses représentants. À cela on doit ajouter
l’élection du président de la République. Il n’y a finalement qu’une
assemblée qui ne fait pas l’objet d’une élection directe par le peuple :
le Sénat. Enfin, il faut rappeler que le gouvernement n’est pas élu :
dans la Ve République, le Premier ministre est nommé par le président
de la République, qui nomme également les ministres sur proposition
du Premier ministre.
La France est ainsi la première démocratie en nombre d’élus. On
dénombre environ 600 000 positions électives (et non pas 600 000 élus
puisque certains ont plusieurs mandats) lorsque l’on additionne toutes
les assemblées politiques que compte la France. C’est surtout dû au
grand nombre de communes en France (36 782 exactement– par comparaison, c’est environ trois fois plus qu’en Allemagne qui compte pourtant
plus d’habitants). La première forme de participation conventionnelle
est donc la désignation de ces représentants.
b. Les référendums
Le référendum est une procédure de vote par laquelle tous les citoyens
sont appelés à se prononcer en même temps sur une question précise.
Celle-ci doit être posée de façon qu’il n’y ait pas de confusion possible
pour l’électeur. Il n’y a donc que deux réponses possibles : oui ou non.
Le premier référendum en France remonte à la période révolutionnaire,
en 1793. À l’époque, il est alors organisé sur deux mois ; on doute de son
caractère réellement démocratique. Il appelait les Français à se prononcer sur une Constitution. Finalement, celle-ci ne sera jamais appliquée.
Au XIXe siècle, le référendum est utilisé sous la forme de plébiscite pour
permettre à Napoléon Ier puis Napoléon III d’accéder au pouvoir et de
transformer le régime politique français en Empire. Du coup, lorsque la
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IIIe République arrive, on se méfie du référendum, et il ne figure pas dans
la Constitution. Sous la IVe République, le référendum n’a pas beaucoup
plus de succès puisqu’il ne sert qu’à titre très exceptionnel. En réalité,
après les référendums de 1945 et 1946 qui, après la guerre, ont permis
d’instaurer la IVe République, il n’y aura pas de référendum jusqu’à la
Ve République, en 1958.
Dans la Constitution de la Ve République, il est actuellement prévu quatre
types de référendums différents :
– le référendum national qui permet d’adopter une loi ;
– le référendum national qui permet de modifier la Constitution ;
– le référendum local qui porte sur une question ne concernant qu’une
collectivité territoriale ;
– et enfin le référendum qui permet de répondre à une question d’intérêt
européen.
À chaque fois c’est au président de la République de décider de recourir
ou non au référendum, à l’exception du référendum local qui est décidé
par le conseil d’une collectivité locale (conseil municipal, conseil général ou régional). Le référendum est toujours facultatif : il n’existe pas de
situation qui ne puisse être réglée que par le référendum. En revanche, à
l’exception de certains référendums locaux consultatifs, il a toujours une
valeur décisionnelle : le vote des citoyens est toujours suivi de la décision qui correspond au résultat. Mais une décision prise par référendum
peut tout à fait être revue par d’autres moyens législatifs.
c. La participation à la vie des partis politiques
Les individus entretiennent une proximité plus ou moins grande avec
les organisations politiques, les partis. Cela permet de distinguer
différents niveaux de participation. En premier lieu, il y a l’électeur,
l’individu qui vote plus ou moins régulièrement en faveur d’un parti
politique en particulier. Ensuite, on nomme « sympathisants » les individus qui ne sont pas membres d’un parti mais s’en considèrent relativement proches. Ils peuvent occasionnellement participer à certaines
activités organisées par le parti. Le simple adhérent limite sa participation politique au paiement d’une cotisation. Le militant est un adhérent
qui participe à l’organisation concrète du parti politique, aux réunions
internes, aux processus de désignation des candidats, aux divers actes
militants visant à convaincre les autres de voter en faveur de son parti.
On estime qu’en France seuls 5 % de la population adhèrent à un parti
politique.
On ne retrouve pas les mêmes types de militants dans tous les partis
politiques car ceux-ci peuvent être sommairement classés en deux catégories. Les partis dits « de gouvernement » ou « institutionnalisés » sont
ceux dont les membres les plus impliqués ont vocation à prendre le pouvoir. Ils sont rarement plus de deux ou trois, et représentent chaque bord
de l’échiquier politique : en France, on pense d’abord à l’UMP et au PS,
puis aux autres partis disposant d’élus à l’Assemblée nationale et dans
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les assemblées locales. Mais il existe une multitude de partis « outsiders », des petits partis sans représentant.
Dans les premiers, on va trouver deux types de militants : d’abord le militant « de base », bénévole, ensuite l’auxiliaire politique professionnel,
rémunéré pour seconder les élus. Il s’agit des assistants parlementaires,
des chargés de missions, des collaborateurs de cabinet, tous recrutés
pour seconder les élus dans leurs tâches politiques. Dans les seconds,
l’investissement partisan étant entièrement bénévole, il est davantage
soumis aux aléas de la vie sociale : l’engagement politique vient alors
concurrencer d’autres engagements (dans la sphère familiale, professionnelle ou associative), ce qui explique les fluctuations individuelles
dans l’investissement des militants. Autre explication, le cycle de vie des
individus. On dispose de plus de temps à consacrer au militantisme à
certains moments de sa vie : par exemple pendant les études, la retraite,
ou les moments sans évolution de carrière importante. Les investissements politiques dans ces organisations sont donc plus souvent temporaires et susceptibles d’être interrompus dès que le militant révise ses
priorités.
En ce qui concerne les partis « institutionnalisés », leurs capacités à
mobiliser les ressources de l’État ou des collectivités locales pour nommer et rémunérer des auxiliaires politiques leur permettent d’assurer
une certaine constance dans l’investissement partisan de ces militants.
Document n° 15
Les auxiliaires politiques, des militants professionnels
Au total on peut estimer à 15 000 le nombre d’auxiliaires politiques disposant de positions salariées à plein temps en France. Ces professionnels subalternes de la politique permettent aux élus de contrôler leur
parti, mais aussi d’assurer le travail politique permanent indispensable
à leur réélection. On comprend, dans ces conditions, que la pérennité de
certains partis, comme le PCF, soit étroitement dépendante de la préservation de certaines municipalités. Les succès municipaux (comme ceux
de 1977 ou 2008 pour le PS, ou ceux de 1983 pour le RPR et l’UDF) favorisent la promotion et la professionnalisation de milliers d’auxiliaires
qui, en retour, constituent autant de ressources pour assurer le contrôle
électoral de la municipalité et la notoriété électorale de l’élu.
Philippe Juhem, « Investissements et désinvestissements partisans »,
Nouveau manuel de science politique, La Découverte, 2009.
www.editionsladecouverte.fr
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B
Les formes non conventionnelles
de participation politique
a. Une mutation de l’engagement politique ?
La participation politique ne se résume pas aux seuls événements de
l’agenda électoral et à la vie des partis politiques. En effet, les mouvements sociaux, compris comme des mobilisations d’individus qui se
rassemblent dans des actions visant à modifier la société, peuvent être
considérés comme des formes de participation politique. Il s’agit bien
d’intervenir en politique, de transformer la vie de la cité.
Document n° 16
Conflits sociaux et action collective
Les conflits et « mouvements » sociaux sont inscrits dans l’histoire et
le quotidien. 1848, 1936,1968 constituent des dates de mobilisations
majuscules, entrées dans les programmes d’histoire. À une échelle plus
modeste et plus récente, on évoquera les grandes grèves de décembre
1995 contre le « plan Juppé », la longue mobilisation des enseignants
de Seine-Saint-Denis, en 1998, contre le sous-encadrement scolaire,
les barrages de routes répétés des chauffeurs routiers, les actions des
ouvriers de Moulinex contre la fermeture de leurs usines, les occupations
d’églises par des « sans-papiers », le refus concerté de certains chasseurs de respecter les calendriers relatifs au tir des oiseaux migrateurs,
l’action de médecins libéraux en 2002 pour augmenter le prix de leurs
consultations sans l’accord de la Sécurité sociale.
Erik Neveu, « Conflits sociaux et action collective »,
Les mutations de la société française, La Découverte, 2007.
www.editionsladecouverte.fr
Quels sont les points communs à toutes les actions décrites dans ce
texte ?
Si les formes traditionnelles d’engagement telles que l’adhésion à un
parti politique ou à un syndicat semblent en déclin, on voit d’autres
formes se développer. Il existe des organisations militantes différentes
des partis qui se structurent autour d’une problématique précise, plus à
même de motiver des individus que les partis qui ont vocation à intervenir sur tous les champs du débat politique. Ainsi des organisations se
sont constituées autours de certains enjeux de société comme le chômage, l’immigration, les inégalités sociales, la place des femmes, ou
encore l’environnement.
Elles proposent des mobilisations locales, impliquant une proximité permettant aux militants de se rendre plus facilement disponibles pour y
participer. Mais elles participent aussi à des réseaux plus larges, à des
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actions d’échelle nationale, européenne voire internationale pour certaines causes qui dépassent le cadre des États-nations.
De la même manière les modalités d’action évoluent. Certaines protestations prennent la forme de manifestations, de forums, d’occupation de
lieux symboliques (entreprises, préfectures, lieux publics très visibles),
mais également de pétitions, de boycotts. Les formes que prend la participation politique se diversifient et constituent ce qu’on appelle la
participation non conventionnelle, en opposition à la participation aux
élections. Si elles existaient déjà par le passé, leur nombre et donc leur
fréquence ont fortement augmenté ces quarante dernières années.
b. Quelques explications théoriques de la participation
aux actions collectives
Le sociologue américain Charles Tilly a montré que les mobilisations
collectives en France ont connu deux grands types d’action. Dans un
premier temps (du début du XVIIe siècle au milieu du XIXe siècle), les
mobilisations étaient très locales, liées à la situation particulière
dans une entreprise, une région. Puis ce n’est qu’à partir du milieu du
XIXe siècle, dans un contexte de nationalisation de la vie politique, que
les mobilisations vont devenir à la fois plus ciblées et plus autonomes :
elles ne dépendent plus toujours d’un contexte conflictuel local mais
peuvent être menées sur tout le territoire (comme en 1936, en 1968 ou
en 1995).
Ces initiatives peuvent prendre des formes diverses mais, historiquement, c’est l’institutionnalisation du conflit (la création d’organisation,
les syndicats, pour encadrer des manifestations et des protestations,
etc.) qui a permis de pacifier les actions et de protéger les protagonistes.
Ainsi la loi autorisant les salariés à se réunir sous la forme de syndicats
date de 1884. Il n’en reste pas moins que les groupes sociaux disposent
de répertoires d’actions collectives divers comme la grève, la manifestation, l’occupation de bâtiments, les grèves de la faim, les pétitions, les
boycotts, etc. Le choix de telle ou telle forme dans le répertoire à la disposition des militants dépend de la culture des groupes qui protestent,
de l’époque, mais également de la lutte avec les autorités qui cherchent
à les encadrer au maximum par la loi.
Il n’en reste pas moins qu’on peut se demander pourquoi les individus
se mobilisent collectivement alors qu’à première vue ils n’ont pas forcément intérêt à le faire. En effet, si l’on part du principe que les individus
sont rationnels et qu’ils calculent ce que leur coûte l’action collective par
rapport à ce qu’elle leur rapporte, alors ils ont intérêt à ne rien faire car
l’action collective, lorsqu’elle produit des résultats, profite à tous. Elle
produit un bien collectif qui n’est pas, par définition, individualisable :
si un syndicat parvient à négocier de meilleures conditions de travail ou
une meilleure rémunération pour les salariés, cet avantage sera distribué à tous les salariés et pas seulement à ceux qui ont conduit la négociation ou qui sont syndiqués.
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Des individus rationnels (par exemple des salariés) ne devraient théoriquement pas souscrire à l’action collective (par exemple l’action syndicale). En effet, ils devraient craindre le blâme, la perte de temps qu’il faut
consacrer à l’action, la perte d’argent en cas de grève. Par ailleurs, même
s’ils ne participent pas, ils peuvent bénéficier de son éventuel succès, ils
ont donc intérêt à adopter un comportement de « passager clandestin »
(free rider). Le comportement de free rider consiste à ne rien faire, donc à
ne pas payer le coût individuel de l’action collective, tout en bénéficiant
du résultat de celle-ci. L’agrégation de tous ces comportements individuels fondés sur la même rationalité devrait alors rendre impossible
l’action collective puisque chaque individu a intérêt à ne rien faire. C’est
pour cela que l’hypothèse d’Olson est qualifiée de paradoxale.
Alors pourquoi y a-t-il mobilisation plutôt que rien ? Ce paradoxe explique
déjà la faible implication des Français dans les organisations politiques
et syndicales, alors que dans les pays d’Europe du Nord le fort taux de
syndicalisation peut s’expliquer par le fait que l’adhésion à un syndicat
procure des avantages certains. Ensuite, certains réfutent cette vision
instrumentale de la rationalité des acteurs. Les individus peuvent être
rationnels en valeur, et leur action s’explique alors par l’attachement
à ces valeurs plus que par la poursuite d’intérêts particuliers. Enfin, la
rétribution que tire un individu de sa participation à une action collective
n’est pas uniquement matérielle. Elle peut être également symbolique,
et le militant peut tirer satisfaction dans l’acte même de sa protestation.
Le militant peut se satisfaire de défendre ses idées et ses convictions : il
améliore son estime sociale, son estime de soi. Mais il peut également
trouver dans l’action collective une certaine sociabilité (des relations
sociales) et des éléments structurants de son identité.
C
Nouveaux médias, nouvelles
formes d’action politique ?
Cela fait une quinzaine d’années que les chercheurs en sciences sociales
s’intéressent à l’effet d’Internet sur la démocratie. Comme nous l’avons
vu précédemment avec l’impact des médias traditionnels, il n’est pas
plus facile de démontrer les effets d’Internet sur la participation politique. Si certaines recherches révèlent que les individus qui utilisent
Internet pour s’informer ont déjà une connaissance politique plus importante que la moyenne des individus et une probabilité plus grande de
participer aux élections, la question est de savoir si c’est le recours à
Internet qui explique cela, ou bien plus vraisemblablement si les personnes qui s’intéressaient déjà à la politique se mettent à utiliser le net
pour continuer de s’informer.
De fait, Internet, en diversifiant l’information politique, accentue l’écart
entre les citoyens hyperinformés qui utilisent pleinement ces nouveaux
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canaux d’information et ceux qui ne s’intéressent pas à la politique et
s’en détournent encore plus. En tout cas, il ressort de certaines enquêtes
que les discussions politiques sur Internet ont souvent lieu entre personnes qui partagent déjà des opinions politiques relativement proches.
On est alors davantage, en ce qui concerne la discussion politique en
ligne, dans l’entretien d’une certaine sociabilité que dans le domaine de
la participation politique.
Quant à l’action collective, il est clair qu’Internet favorise l’organisation
d’événements politiques en réduisant les coûts liés à la coordination
des acteurs. Ainsi, des mobilisations locales comme internationales de
protestation peuvent être organisées sans que personne n’ait besoin de
se déplacer avant l’événement. Cela permet également au citoyen de
se passer de certaines institutions et de se mobiliser plus facilement
sous la forme de collectif regroupant les personnes intéressées par les
mêmes problématiques. Il est plus facile de trouver d’autres personnes
sensibles aux mêmes causes que soi avec des outils comme les réseaux
sociaux (page Facebook, blog, forum, etc.). Autrement dit, Internet est
venu agrandir le répertoire d’actions collectives à la disposition des
militants de toutes causes.
Enfin, Internet permet un nouveau type d’engagement politique dans les
structures traditionnelles que sont les partis politiques.
Document n° 17
L’utilisation d’Internet dans la campagne de Barack Obama
Si la campagne numérique d’Obama a suscité autant d’attention, c’est
parce que le candidat démocrate a su faire converser la société américaine. Son utilisation très agile des réseaux sociaux à travers le site
mybarackobama.com a permis de capter et de canaliser ces conversations pour en faire un outil de mobilisation locale. À la différence du projet de Ségolène Royal, désireuse de construire une plateforme programmatique participative (projet qui a échoué devant la difficulté d’établir
une synthèse entre points de vue contradictoires), le candidat Obama
n’a pas demandé aux internautes américains de faire son programme.
Il s’est attaché ses supporters en leur permettant de valoriser auprès
de leurs réseaux sociaux leurs contributions à la campagne. Mobilisant
largement les organisations de terrain qui maillent la société civile américaine, les outils numériques ont été mis à profit par les responsables
de la campagne, dont Chris Hugues, ex-numéro 2 de Facebook. Ils permettaient aux participants d’exposer, comme un badge sur la page de
leur réseau social, les gestes, distributions de tracts, séances de porte-àporte et réunions qu’ils avaient effectués pour participer à la campagne
électorale.
Dominique Cardon, La démocratie Internet,
La République des Idées, Le Seuil, 2010.
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Dominique Cardon met en avant le fait qu’Internet peut permettre à un
nombre plus important de personnes de s’impliquer dans une campagne
électorale, sans se plier aux exigences du militantisme traditionnel. Ainsi
il permet un engagement plus flexible, s’adaptant aux contraintes de
chacun. Certains dirigeants politiques s’inquiètent d’ailleurs du fait que
les partis politiques pourraient perdre leur rôle d’instance de débat et de
décision collective, pour ne devenir que des organisations supports pour
quelques individualités souhaitant imposer leur leadership.
Conclusion
L’arrivée de nouveaux médias renouvelant partiellement les fondements
de l’action politique et la montée des actions non conventionnelles
ne doivent pas masquer le fait que la participation conventionnelle (le
vote) a toujours une place très importante dans la vie politique des pays
démocratiques. En effet, les personnes qui utilisent Internet pour s’informer sur la vie politique ou pour agir et organiser l’action, mais aussi
celles qui se déclarent prêtes à participer à des mobilisations collectives
empruntant leurs actions dans des répertoires non conventionnels, sont
aussi celles qui sont le plus enclines à participer aux différents scrutins
de l’agenda politique. En clair, plutôt que de disperser l’action politique,
les formes de participation non conventionnelles et Internet ont plutôt
tendance à renforcer la politisation de la population, et in fine sa participation à la désignation des représentants politiques.
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Autoévaluation
Remplissez le texte ci-dessous avec les termes suivants : attitudes
politiques, socialisation politique, les manifestations, la famille, l’école,
reproduction, le groupe de pairs.
par la famille conduit à une certaine ..............
des grandes orientations politiques des parents par leurs
enfants : droite, centre, gauche. Cela dit, il est rare que des enfants se
situent exactement sur la même sensibilité politique. Il apparaît que
............................................ , comme ............................................ , transmet plus le
cadre général dans lequel se développent les ............................................ que
des orientations. Celles-ci se forment dans la confrontation avec
............................................ , dans les premières expériences politiques, souvent des formes non conventionnelles de participation telles que
............................................ .
La
............................................
.............................
Questions à choix multiples
a. En ce qui concerne la formation des opinions politiques, les médias
jouent un rôle :
¨ très important, ils conditionnent les électeurs en diffusant les programmes des candidats.
¨ assez limité, ils ne sont efficaces que si les informations sont
relayées par une personne de confiance.
¨ quasi inexistant, les individus ne sont pas réceptifs aux messages
diffusés par les médias de masse.
b. En France, l’inscription sur les listes électorales est :
¨ obligatoire sous peine d’amende.
¨ automatique la première fois lorsqu’on devient majeur.
¨ automatique dès qu’on change d’adresse.
c. La participation politique évolue en fonction de l’âge :
¨ plus on vieillit et plus on participe aux élections.
¨ plus on est jeune, plus on vote.
¨ il n’y a pas de grandes différences entre les générations.
d. L’appartenance religieuse :
¨ n’explique plus le vote.
¨ joue encore un rôle dans l’explication du clivage gauche/droite.
¨ n’a jamais été un indicateur très pertinent pour expliquer le comportement électoral.
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e. En France, les électeurs mobiles sont plutôt :
¨ issus des classes populaires.
¨ plus diplômés, intéressés par la politique.
Classez ces actions politiques dans les deux catégories suivantes :
forme conventionnelle de participation / forme non conventionnelle.
Distribuer un tract, signer une pétition, séquestrer son employeur, occuper la préfecture, voter lors d’une élection, manifester, se présenter
comme candidat à une élection, faire une grève de la faim, créer une
page Facebook de soutien à une cause, participer à un boycott.
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Corrigés des questions
Documents
nos 1, 2 et 3
Les comportements politiques sont liés à la culture politique des individus. Comme tout élément culturel, la culture politique fait l’objet d’une
socialisation (doc. 1). La socialisation est un processus qui commence
dès l’enfance, au sein de la famille puis de l’école. Elle se prolonge tout
au long de la vie. On peut alors se demander si nos comportements politiques s’expliquent par un « héritage » familial (doc. 3) ou bien par les
personnes que nous rencontrons et qui nous socialisent à divers
moments de notre existence (doc. 2).
Document no 4
La famille « reste un vecteur efficace dans la transmission des choix idéologiques » car celle-ci « fournit les premiers repères » dans le monde politique. De plus, les deux tiers des Français sont les héritiers politiques du
positionnement de leurs parents ; on est rarement en rupture complète
avec l’orientation politique de ses parents.
Document no 5
La dernière phrase du document nous indique que les équipes de campagne de Barack Obama préparent les élections de 2012 en recrutant
dans chaque communauté des « leaders d’opinion » qui pourront relayer
les positions du candidat auprès de leurs entourages. C’est bien une
illustration de la théorie de la communication à deux étages.
Document no 6
Cette courbe illustre la relation entre l’âge et la participation aux élections : plus on vieillit, plus la participation aux élections est systématique. Les personnes âgées de plus 55 ans ont été plus de 60 % à voter à
toutes les élections en 2007.
Document no 8
On passe de 82 % de participation aux élections législatives de 1978 à
60 % en 2007, ce qui veut dire que l’abstention a plus que doublé sur
cette période.
Document no 10
On peut dire que la variable religieuse est toujours prédictive en matière
de vote dans la mesure où près des 3/4 des catholiques pratiquants se
sont prononcés en faveur du candidat de droite lors d’un sondage d’opinion réalisé à quelques mois de l’élection présidentielle de 2007. À l’inverse, on remarque que deux tiers des personnes interrogées se disant
sans religion avaient une préférence pour la candidate de la gauche.
Document no 11 L’acte de voter peut apparaître comme paradoxal dans la mesure où un
individu pleinement rationnel devrait considérer que son vote est insignifiant dans une élection où plusieurs millions de personnes sont appelées à voter. À partir de ce constat, un individu rationnel devrait considérer qu’il a sûrement mieux à faire qu’à perdre son temps pour s’informer,
décider du candidat pour qui voter et se rendre au bureau de vote.
Documents
nos 12, 13
et 14 Ces documents illustrent trois façons différentes de participer à la vie de
la cité. La première illustration montre l’émergence des réseaux et d’Internet dans la vie politique, notamment dans la propagande réalisée par
les partis politiques et les candidats aux élections. La deuxième photo-
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graphie rappelle que la forme traditionnelle de participation à la vie politique n’est autre que le vote. Enfin, la troisième nous montre qu’il y a
bien d’autres actes qui permettent aux individus d’intervenir dans les
décisions politiques : ici, le cas du boycott de certains produits pour forcer des entreprises à appliquer des lois.
Document no 16
1. Ils reposent sur une action en commun, concertée et coordonnée.
2. Ils mettent en avant des revendications (hausse de rémunération,
maintien d’un site industriel) ou la défense d’une « cause ».
3. Ces revendications sont adressées à un adversaire bien identifié (employeur, caisses de Sécurité sociale, gouvernement) dans une
logique de conflit. Cette action « contre » sépare un mouvement social
d’autres mobilisations dans lesquelles les personnes agissent pour
résoudre entre elles le problème rencontré. Ce serait le cas, par exemple,
si de jeunes couples préféraient s’organiser pour faire fonctionner entre
eux une crèche parentale plutôt que de demander l’ouverture d’un tel
service à la mairie.
4. La prise de parole que matérialise un mouvement social n’est pas
enfermée dans les procédures d’expression et de représentation organisées par les pouvoirs publics ou l’autorité hiérarchique. Elle s’exprime
au-delà des seuls moments d’élection, elle peut court-circuiter les lieux
et porte-parole officiels de concertation, lorsqu’ils existent.
Corrigé de l’autoévaluation
Dans l’ordre : socialisation politique, reproduction, la famille, l’école,
attitudes politiques, le groupe de pairs, les manifestations.
a. En ce qui concerne la formation des opinions politiques, les médias
jouent un rôle assez limité, ils ne sont efficaces que si les informations
sont relayées par une personne de confiance.
b. En France, l’inscription sur les listes électorales est automatique la
première fois lorsqu’on devient majeur.
c. La participation politique évolue en fonction de l’âge : plus on vieillit et
plus on participe aux élections.
d. L’appartenance religieuse joue encore un rôle dans l’explication du
clivage gauche/droite.
e. En France, les électeurs mobiles sont plutôt plus diplômés, intéressés
par la politique.
Forme conventionnelle : distribuer un tract, voter lors d’une élection,
se présenter comme candidat à une élection. Les autres réponses sont
des formes non conventionnelles de participation politique.
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