Influence de la résistance aux hallucinations auditives

Pour
citer
cet
article
:
Monestès
JL,
et
al.
Influence
de
la
résistance
aux
hallucinations
auditives
sur
la
dépression
:
étude
au
moyen
du
questionnaire
révisé
des
croyances
à
propos
des
voix.
Encéphale
(2014),
http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.01.006
ARTICLE IN PRESS
Modele +
ENCEP-679;
No.
of
Pages
7
L’Encéphale
(2014)
xxx,
xxx—xxx
Disponible
en
ligne
sur
www.sciencedirect.com
ScienceDirect
journal
homepage:
www.em-consulte.com/produit/ENCEP
MÉMOIRE
ORIGINAL
Influence
de
la
résistance
aux
hallucinations
auditives
sur
la
dépression
:
étude
au
moyen
du
questionnaire
révisé
des
croyances
à
propos
des
voix
Influence
of
resistance
to
voices
on
depression
J.L.
Monestèsa,,
J.
Vavasseur-Desperriersb,
M.
Villattec,
L.
Denizotd,
G.
Loase,
S.
Rusinekf
aEA
4556,
pôle
de
santé
mentale,
laboratoire
Epsylon,
CHU
de
la
Réunion,
allée
des
Topazes,
97405
Saint-Denis
cedex,
Réunion
bEPSM
Lille-Métropole,
104,
rue
du
Général-Leclerc,
59280
Armentières,
France
cEvidence
Based
Practice
Institute,
Seattle,
États-Unis
dPôle
de
santé
mentale,
CHU
de
la
Réunion,
Réunion
eUniversité
libre
de
Bruxelles
(ULB),
cliniques
universitaires
de
Bruxelles,
hôpital
Erasme,
Bruxelles,
Belgique
fUDL3,
PSITEC,
université
Charles-de-Gaulle,
Lille
3,
université
Lille,
Nord-de-France,
rue
du
Barreau,
59650
Villeneuve-d’Ascq
cedex,
France
Rec¸u
le
25
avril
2013
;
accepté
le
20
janvier
2014
MOTS
CLÉS
Hallucinations
auditives
;
Croyances
à
propos
des
voix
;
BAVQ-R
;
Résistance
aux
voix
;
Dépression
Résumé
Objectifs.
Cette
recherche
vise
à
étudier
l’influence
de
la
résistance
aux
hallucinations
audi-
tives
sur
la
dépression
dans
un
groupe
de
patients
atteints
de
schizophrénie,
au
moyen
de
la
version
francophone
du
Beliefs
About
Voices
Questionnaire
Revised.
Méthode.
Trente-huit
patients
souffrant
de
schizophrénie
et
présentant
des
hallucinations
auditives
ont
été
évalués
à
l’aide
de
l’échelle
des
syndromes
positifs
et
négatifs
(PANSS),
de
l’échelle
de
dépression
de
Calgary
(CDSS)
et
du
questionnaire
révisé
des
croyances
à
propos
des
voix
(BAVQ-R),
qui
mesure
les
dimensions
de
Malveillance,
de
Bienveillance,
d’Omnipotence,
de
Résistance
et
d’Engagement
dans
le
rapport
des
patients
à
leurs
hallucinations
auditives.
Résultats.
Les
dimensions
Résistance
et
Malveillance
sont
fortement
corrélées
à
la
dépres-
sion.
Mais
la
résistance
aux
voix
est
la
seule
dimension
qui
influe
sur
la
dépression.
Par
ailleurs,
les
patients
déprimés
résistent
davantage
à
leurs
hallucinations
auditives.
De
plus,
la
résis-
tance
émotionnelle,
contrairement
à
la
résistance
comportementale,
est
responsable
de
la
Auteur
correspondant.
Adresse
e-mail
:
(J.L.
Monestès).
http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.01.006
0013-7006/©
L’Encéphale,
Paris,
2014.
Pour
citer
cet
article
:
Monestès
JL,
et
al.
Influence
de
la
résistance
aux
hallucinations
auditives
sur
la
dépression
:
étude
au
moyen
du
questionnaire
révisé
des
croyances
à
propos
des
voix.
Encéphale
(2014),
http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.01.006
ARTICLE IN PRESS
Modele +
ENCEP-679;
No.
of
Pages
7
2
J.L.
Monestès
et
al.
dépression
chez
les
patients
souffrant
d’hallucinations.
La
version
francophone
du
BAVQ-R
pré-
sente
une
consistance
interne
satisfaisante
et
de
bonnes
validités
concourante
et
de
construit.
Elle
retrouve
les
corrélations
entre
les
dimensions
Malveillance
et
Résistance,
et
entre
les
dimensions
Bienveillance
et
Engagement.
Conclusion
La
résistance
aux
voix,
particulièrement
la
résistance
émotionnelle,
constitue
un
facteur
important
de
la
symptomatologie
dépressive
chez
les
patients
souffrant
de
schizophrénie.
La
version
francophone
du
BAVQ-R
présente
des
propriétés
psychométriques
satisfaisantes.
©
L’Encéphale,
Paris,
2014.
KEYWORDS
Auditory
hallucinations;
Beliefs
about
voices;
BAVQ-R;
Resistance
to
voices;
Depression
Summary
Objective.
Beliefs
about
voices
and
reactions
to
voices
have
been
proposed
as
important
variables
influencing
the
course
of
depression
in
schizophrenia.
Consequences
of
auditory
hal-
lucinations
are
different
according
to
identity,
goals,
omnipotence,
omniscience,
and
meanings
attributed
to
voices
by
the
client.
Ten
to
15
%
of
the
general
population
experience
auditory
hallucinations
during
lifetime
without
any
distress
or
need
for
medical
care.
In
addition,
neither
frequency
of
voices,
nor
their
topography,
influence
the
emotional
consequences
of
auditory
hallucinations
experiences,
but
the
relationships
to
voices.
The
Revised
Belief
about
Voices
Questionnaire
analyzes
voices
along
5
dimensions:
malevolence,
benevolence,
omnipotence,
resistance,
and
engagement.
Malevolent
voices
are
related
to
depression,
whereas
benevolent
voices
engender
more
positive
emotions.
Subjects
usually
engage
with
benevolent
voices,
and
resist
to
malevolent
voices.
But
resistance
strategies
are
barely
efficient
and
often
back-
fire.
Patients
resisting
to
their
voices
consider
them
more
malevolent
and
present
with
more
depressive
symptoms.
This
research
aims
at
studying
the
influence
of
resistance
to
auditory
hal-
lucinations
on
depression
in
a
group
of
patients
suffering
from
schizophrenia
and
experiencing
auditory
hallucinations,
using
the
Revised
Beliefs
About
Voices
Questionnaire
(BAVQ-R).
It
also
provides
a
study
of
the
psychometrics
properties
of
the
French
language
version
of
the
BAVQ-R.
Method.
Thirty-eight
patients
suffering
from
paranoid
schizophrenia,
undifferentiated
schi-
zophrenia
or
schizoaffective
disorder,
have
been
tested
with
the
French
versions
of
the
Revised
Beliefs
About
Voices
Questionnaire
(BAVQ-R),
the
Positive
and
Negative
Syndrome
Scale
(PANSS),
and
the
Calgary
Depression
Scale
for
Schizophrenia
(CDSS).
Each
patient
presented
with
audi-
tory
hallucinations
during
the
week
before
evaluation,
with
a
minimum
score
of
3
on
P3
item
of
PANSS.
Mean
age
was
39.39
years
(SD
11.33);
mean
duration
of
symptoms
was
13.92
years
(SD
10.81),
and
patients’
mean
history
of
hospitalizations
was
7.66
(SD
9.24).
Each
patient
was
receiving
an
antipsychotic
medication
at
the
time
of
evaluation,
with
a
mean
chlorproma-
zine
equivalent
dose
of
806.69
mg/d
(ET
539.51);
18.5
%
of
patients
were
receiving
serotonin
reuptake
inhibitor,
and
31.57
%
once
committed
a
suicide
attempt.
Results.
The
French
version
of
the
BAVQ-R
presents
with
a
satisfying
internal
consistency
(Cronbach’s
alpha
=
0.74).
Similar
to
the
original
version,
Malevolence
and
Resistance,
and
Benevolence
and
Engagement
dimensions
are
strongly
correlated
(r
=
0.73,
and
r
=
0.90,
P
<
0.05,
respectively).
The
BAVQ-R
scores
correlate
with
the
CDSS
(r
=
0.40,
P
<
0.05)
and
the
PANSS
Gene-
ral
Psychopathology
subscale
scores
(r
=
0.44,
P
<
0.05),
but
not
with
the
Positive
and
Negative
subscales.
(r
=
0.17,
and
r
=
0.13,
P
>
0.05,
respectively).
Correlations
and
forced
entry
mul-
tiple
regressions
analyses
show
that
Resistance
and
Malevolence
are
both
strongly
correlated
to
depression,
but
Resistance
is
the
only
dimension
that
influences
depression.
Moreover,
clients
presenting
with
depressive
symptoms
resist
more
to
their
auditory
hallucinations.
Finally,
emo-
tional
resistance,
in
comparison
to
behavioral
resistance,
is
responsible
for
depression
in
people
suffering
from
auditory
hallucinations.
Conclusion.
Emotional
resistance
to
auditory
hallucinations
constitutes
the
most
important
variable
influencing
depression
in
schizophrenia
comparing
to
what
the
voices
say
or
are
suppo-
sed
to
know,
their
malevolence
or
benevolence.
Demonstration
of
the
influence
of
resistance
to
voices
on
depression
would
help
the
development
of
new
therapeutic
practices.
©
L’Encéphale,
Paris,
2014.
Pour
citer
cet
article
:
Monestès
JL,
et
al.
Influence
de
la
résistance
aux
hallucinations
auditives
sur
la
dépression
:
étude
au
moyen
du
questionnaire
révisé
des
croyances
à
propos
des
voix.
Encéphale
(2014),
http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.01.006
ARTICLE IN PRESS
Modele +
ENCEP-679;
No.
of
Pages
7
Résistance
aux
hallucinations
et
dépression
3
Introduction
Au-delà
de
la
fréquence
d’apparition
et
du
contenu
des
hallucinations,
le
rapport
que
les
patients
entretiennent
avec
«
leurs
voix
»
a
été
proposé
comme
déterminant
de
la
symptomatologie
dépressive
[1].
Les
émotions
et
les
comportements
déclenchés
par
les
hallucinations
découle-
raient
avant
tout
du
sens
donné
par
le
sujet
aux
voix
qu’il
entend.
En
effet,
les
répercussions
des
hallucinations
sont
différentes
en
fonction
de
l’interprétation
du
phénomène,
de
l’identité
attribuée
à
la
voix,
de
ses
buts,
de
son
omni-
potence
et
omniscience
supposées
[2].
Ce
modèle
est
étayé
par
la
variété
des
réponses
émotionnelles
et
comportemen-
tales
face
aux
hallucinations
:
la
plupart
des
patients
sont
effrayés
et
tentent
d’échapper
à
ces
voix,
mais
d’autres
trouvent
l’expérience
intrigante,
voire
agréable.
De
plus,
ni
la
forme
des
voix,
leur
fréquence,
ou
la
valence
des
propos
entendus,
n’ont
d’influence
sur
les
répercussions
émotion-
nelles
et
comportementales
[1—3].
Il
semble
que
se
soient
les
relations
entretenues
avec
la
voix,
et
les
croyances
à
son
propos,
qui
déterminent
les
répercussions
des
halluci-
nations.
On
distingue
plusieurs
dimensions
du
rapport
aux
hallucinations
auditives.
Elles
concernent
d’abord
les
inten-
tions
attribuées
à
la
voix,
selon
qu’elle
est
considérée
bienveillante,
cherchant
par
exemple
à
protéger,
ou
malveillante,
cherchant
par
exemple
à
punir.
Les
voix
jugées
malveillantes
engendrent
plus
de
symptômes
dépres-
sifs
;
celles
jugées
bienveillantes
engendrent
généralement
des
émotions
positives
[1,3].
Une
autre
dimension
est
l’omnipotence,
le
pouvoir
attribué
à
la
voix.
Les
données
sont,
sur
ce
point,
contradictoires.
Certaines
recherches
repèrent
une
association
entre
les
symptômes
dépressifs
et
l’omnipotence
[4—6].
D’autres
ne
retrouvent
pas
cette
association
une
fois
prises
en
compte
la
bienveillance,
la
malveillance,
la
durée
de
la
maladie
ou
les
capacités
d’insight
[3].
Deux
dernières
dimensions
concernent
les
réactions
émotionnelles
et
comportementales
face
aux
voix,
selon
qu’on
leur
résiste
et
cherche
à
s’en
débarrasser,
ou
au
contraire,
qu’on
essaie
d’entrer
en
contact
avec
elles.
Une
corrélation
a
été
retrouvée
entre
la
bienveillance
et
l’engagement
vis-à-vis
de
la
voix
[1,7].
À
l’inverse,
le
carac-
tère
malveillant
est
associé
à
la
résistance
à
la
voix
[1,8].
Considérer
les
voix
comme
malveillantes
conduit
à
chercher
à
les
faire
disparaître
[8].
Les
stratégies
d’évitement
des
voix
sont
proposées
comme
facteur
de
maintien
des
interprétations
de
leur
caractère
malveillant
[9].
De
plus,
la
résistance
aux
voix
est
évoquée
comme
prédictive
d’une
plus
grande
souffrance
psychologique,
notamment
de
la
dépression.
Deux
études
suggèrent
que
les
stratégies
de
résistance
aux
voix
pour-
raient
être
directement
source
de
symptômes
dépressifs
[10,11].
Cependant,
l’étude
des
répercussions
de
la
résis-
tance
aux
voix
est
encore
trop
marginale
pour
affirmer
leur
influence
sur
la
symptomatologie
dépressive.
La
présente
recherche
vise
donc
à
avancer
dans
l’évaluation
des
liens
entre
la
dépression
et
la
résistance
envers
les
hallucinations
auditives.
La
plupart
des
recherches
sur
les
relations
des
patients
à
leurs
hallucinations
auditives
utilisent
le
«
Beliefs
About
Voices
Questionnaire
»
(BAVQ
[12],
forme
révisée,
BAVQ-R
[13])
construit
pour
évaluer
les
différentes
dimen-
sions
du
rapport
aux
hallucinations.
Des
traductions
ont
été
utilisées
dans
deux
recherches
incluant
des
populations
francophones
[7,14],
mais
l’étude
des
propriétés
psychomé-
triques
du
BAVQ-R
en
langue
franc¸aise
fait
défaut.
Cette
recherche
a
également
pour
but
d’évaluer
les
propriétés
de
la
version
francophone
du
BAVQ-R.
Patients
et
méthode
Population
L’échantillon
était
composé
de
38
patients
(25
hommes,
13
femmes),
34
répondant
aux
critères
de
schizophrénie
de
type
paranoïde
(F20,0
×
),
1
de
type
indifférencié
(F20,3
×
),
et
3
de
trouble
schizo-affectif
(F25
×
)1.
Tous
présen-
taient
des
hallucinations
auditives
la
semaine
précédant
l’évaluation
(score
minimum
à
l’item
P3
de
la
PANSS
>
3).
La
participation
à
l’étude
a
été
proposée
à
45
patients,
7
ont
refusé
de
participer
ou
ont
interrompu
leur
partici-
pation.
Trente-trois
patients
étaient
hospitalisés,
5
étaient
suivis
en
ambulatoire.
L’âge
moyen
était
de
39,39
ans
(ET
11,33)
;
la
durée
moyenne
des
troubles
depuis
le
début
de
la
maladie
était
de
13,92
ans
(ET
10,81).
Le
nombre
moyen
d’hospitalisations
était
de
7,66
(ET
9,24).
Tous
les
patients
recevaient
un
traitement
neuroleptique
ou
anti-
psychotique.
La
dose
moyenne
(équivalent
chlorpromazine)
était
de
806,69
mg/j
(ET
539,51)
[15].
L’âge
moyen
du
pre-
mier
traitement
par
neuroleptique
était
de
25,92
ans
(ET
6,34)
;
18,5
%
des
patients
recevaient
un
antidépresseur
(IRS),
et
31,57
%
avaient
déjà
fait
une
tentative
de
suicide.
Procédure
Procédure
générale
Les
évaluations
ont
été
réalisées
par
un
des
auteurs
(JVD)
au
cours
d’un
entretien
unique.
Treize
patients
ont
été
évalués
par
un
deuxième
investigateur
(JLM)
afin
de
calcu-
ler
un
accord
inter-observateurs
pour
la
PANSS
(coefficient
intra-classes
=
0,93).
On
proposait
aux
patients
de
parti-
ciper
à
cette
recherche
lors
des
derniers
jours
de
leur
hospitalisation,
ou
lors
d’une
rencontre
au
centre
médico-
psychologique
ils
étaient
pris
en
charge.
Un
entretien
semi-structuré
était
réalisé
pour
la
PANSS
et
la
CDSS,
puis
le
patient
remplissait
le
BAVQ-R
en
présence
de
l’investigateur.
Traduction
du
BAVQ-R
Le
Beliefs
About
Voices
Questionnaire-Revised
a
été
tra-
duit
par
deux
des
auteurs
(JLM
et
JVD)
avec
l’accord
de
l’auteur
principal
de
la
version
originale,
puis
rétro-traduit
en
anglais
par
une
traductrice
professionnelle.
Les
deux
versions
ont
été
comparées,
ce
qui
a
donné
lieu
à
des
ajus-
tements
minimes.
Mesures
Les
patients
étaient
évalués
à
l’aide
des
instruments
sui-
vants
:
1Cette
recherche
a
rec¸u
l’autorisation
du
comité
de
protection
des
personnes
sous
la
référence
03H32.
Pour
citer
cet
article
:
Monestès
JL,
et
al.
Influence
de
la
résistance
aux
hallucinations
auditives
sur
la
dépression
:
étude
au
moyen
du
questionnaire
révisé
des
croyances
à
propos
des
voix.
Encéphale
(2014),
http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.01.006
ARTICLE IN PRESS
Modele +
ENCEP-679;
No.
of
Pages
7
4
J.L.
Monestès
et
al.
le
questionnaire
révisé
des
croyances
à
propos
des
voix
(BAVQ-R,
[13])
:
auto-questionnaire
de
35
affirmations,
avec
réponses
sur
une
échelle
de
Likert
en
4
points
(de
0
=
«
pas
d’accord
»,
à
3
=
«
pleinement
d’accord
»).
Ce
questionnaire
se
décompose
en
cinq
sous-échelles.
Les
trois
premières
explorent
les
significations
don-
nées
aux
hallucinations
auditives
(«
Malveillance
»,
«
Bienveillance
»,
«
Omnipotence
»),
les
deux
autres
sous-échelles
évaluent
les
réactions
émotionnelles
et
comportementales
aux
hallucinations,
selon
que
les
patients
tentent
de
résister
aux
voix
(«
Résistance
»)
ou
qu’ils
les
écoutent
activement
(«
Engagement
»).
Cinq
items
de
la
sous-échelle
Résistance
mesurent
la
résis-
tance
émotionnelle
(par
exemple
«
Ma
voix
m’effraie
»),
et
quatre
la
résistance
comportementale
(par
exemple
«
J’essaie
de
l’enlever
de
mon
esprit.
»).
Les
sous-échelles
du
BAVQ-R
présentent
de
bonnes
consistances
internes
(alphas
de
Cronbach
entre
0,74
et
0,88,
moyenne
=
0,86)
;
l’échelle
de
dépression
de
Calgary
(CDSS,
[16])
:
évalue
la
symptomatologie
dépressive
dans
la
schizophrénie.
La
CDSS
est
une
hétéro-évaluation
qui
comprend
9
items
:
Dépression,
Désespoir,
Autodépréciation,
Idées
de
réfé-
rence
associées
à
la
culpabilité,
Culpabilité
pathologique,
Dépression
matinale,
Éveil
précoce,
Suicide,
Dépression
observée.
La
cotation
de
chaque
item
va
de
0
(absent)
à
3
(sévère)
;
l’échelle
des
syndromes
positifs
et
négatifs
(PANSS,
[17])
:
hétéro-évaluation
en
30
items,
répartis
en
trois
sous-
échelles
:
positive,
négative,
et
de
psychopathologie
générale.
Chaque
item
est
noté
de
1
(absence
du
symp-
tôme)
à
7
(symptôme
extrêmement
présent).
Démarche
statistique
La
consistance
interne
du
BAVQ-R
et
de
ses
cinq
sous-
échelles
est
évaluée
au
moyen
de
coefficients
alpha
de
Cronbach.
Des
coefficients
de
corrélation
de
Pearson
sont
calculés
pour
estimer
les
relations
entre
les
sous-échelles,
ainsi
qu’entre
chacune
de
ces
sous-échelles,
la
CDSS,
et
les
différentes
composantes
de
la
PANSS.
L’influence
des
sous-
échelles
du
BAVQ-R
et
de
la
PANSS
sur
le
score
à
la
CDSS
est
évaluée
au
moyen
d’analyses
de
régressions
linéaires
multiples
avec
entrées
forcées.
Les
scores
à
la
sous-échelle
Résistance
de
la
BAVQ-R
sont
comparés
entre
les
partici-
pants
recevant
un
score
pathologique
ou
non
à
la
CDSS
au
moyen
d’une
analyse
de
variance
unifactorielle.
Toutes
les
analyses
statistiques
sont
effectuées
avec
le
logiciel
SPSS
16.
Résultats
Propriétés
psychométriques
de
la
version
francophone
du
BAVQ-R
Consistance
interne
Pour
le
questionnaire
dans
son
ensemble,
l’alpha
de
Cron-
bach
est
de
0,74.
Il
se
révèle
également
satisfaisant
pour
les
sous-échelles
Malveillance
(0,74),
Bienveillance
(0,81),
Résistance
(0,75)
et
Engagement
(0,89),
mais
présente
une
valeur
plus
faible
pour
la
sous-échelle
Omnipotence
(0,40).
Dans
l’étude
originale
[13],
chaque
sous-échelle
présen-
tait
un
alpha
supérieur
à
0,70,
la
sous-échelle
Omnipotence
recevant
la
valeur
la
plus
faible
(0,74),
néanmoins
supé-
rieure
à
celle
obtenue
pour
la
version
francophone.
Validité
de
construit
Le
BAVQ-R
décompose
les
diverses
croyances
et
consé-
quences
émotionnelles
et
comportementales
en
regard
des
hallucinations
auditives.
Chaque
sous-échelle
mesure
une
dimension
particulière
;
il
est
donc
nécessaire
d’examiner
les
diverses
corrélations
entre
les
sous-échelles
afin
de
véri-
fier
que
les
constructions
théoriques
sont
fondées.
Une
forte
corrélation
[18]
existe
entre
les
sous-échelles
Mal-
veillance
et
Résistance
et
les
sous-échelles
Bienveillance
et
Engagement
(respectivement
r
=
0,73
et
0,90,
p
<
0,05).
Ces
résultats
sont
identiques
à
ceux
de
la
version
originale
du
questionnaire
(respectivement
r
=
0,68
et
0,80,
p
<
0,01).
La
sous-échelle
Omnipotence
est
fortement
corrélée
à
la
sous-échelle
Bienveillance
(r
=
0,43,
p
<
0,05)
et
à
la
sous-
échelle
Engagement
(r
=
0,47,
p
<
0,05).
En
revanche,
on
ne
retrouve
pas
de
corrélation
entre
la
sous-échelle
Omnipo-
tence
et
les
sous-échelles
Malveillance
(r
=
0,09,
p
>
0,05)
et
Résistance
(r
=
—0,02,
p
>
0,05).
L’étude
originale
[13]
retrouve
une
forte
corrélation
entre
l’Omnipotence
et
les
sous-échelles
Malveillance
et
Résistance,
mais
une
absence
de
corrélation
avec
les
sous-échelles
Bienveillance
et
Enga-
gement.
Pour
les
autres
sous-échelles,
les
relations
entre
les
dimensions
mesurées
sont
comparables
à
celles
de
la
version
originale.
Ces
résultats
sont
en
cohérence
avec
les
hypothèses
théoriques
et
témoignent
d’une
bonne
validité
de
construit.
Validité
concourante
Le
BAVQ-R
est
fortement
corrélé
avec
la
CDSS
(r
=
0,40,
p
<
0,05)
et
la
sous-échelle
de
psychopathologie
générale
de
la
PANSS
(r
=
0,44,
p
<
0,05).
Les
corrélations
entre
le
BAVQ-
R
et
les
sous-échelles
négatives
et
positives
de
la
PANSS
se
révèlent
non
significatives
(respectivement
r
=
0,17
et
0,13,
p
>
0,05).
Les
corrélations
entre
les
sous-échelles
du
BAVQ-
R
et
la
CDSS
ne
présentent
une
significativité
que
pour
la
Malveillance
(r
=
0,37,
p
<
0,05)
et
la
Résistance
(r
=
0,54,
p
<
0,05).
Par
ailleurs,
seule
la
sous-échelle
Engagement
est
corrélée
au
score
de
psychopathologie
générale
de
la
PANSS
(r
=
0,41,
p
<
0,05).
Il
n’existe
pas
de
corrélation
significa-
tive
du
BAVQ-R
avec
la
sous-échelle
de
symptomatologie
positive
de
la
PANSS,
vraisemblablement
en
raison
de
la
variété
des
symptômes
évalués
par
cette
sous-échelle.
Au
final,
l’analyse
des
propriétés
psychométriques
de
la
ver-
sion
francophone
du
BAVQ-R
met
en
évidence
une
bonne
consistance
interne
ainsi
qu’une
validité
de
construit
et
une
validité
concourante
satisfaisantes.
Les
coefficients
de
cor-
rélations
entre
toutes
les
échelles
sont
rassemblés
dans
le
Tableau
1.
Influence
de
la
résistance
aux
voix
Les
scores
aux
sous-échelles
du
BAVQ-R,
de
la
PANSS,
ainsi
que
le
score
total
à
la
CDSS
sont
rassemblés
dans
le
Tableau
2.
Afin
de
tester
l’influence
de
la
résistance
aux
voix
sur
la
dépression
en
comparaison
des
autres
dimensions
du
BAVQ-R,
une
analyse
de
régression
linéaire
multiple
avec
entrée
forcée
a
été
réalisée,
avec
les
scores
à
la
CDSS
Pour
citer
cet
article
:
Monestès
JL,
et
al.
Influence
de
la
résistance
aux
hallucinations
auditives
sur
la
dépression
:
étude
au
moyen
du
questionnaire
révisé
des
croyances
à
propos
des
voix.
Encéphale
(2014),
http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.01.006
ARTICLE IN PRESS
Modele +
ENCEP-679;
No.
of
Pages
7
Résistance
aux
hallucinations
et
dépression
5
Tableau
1
Coefficients
de
corrélation
entre
la
CDSS,
les
sous-échelles
de
la
PANSS,
les
sous-échelles
du
BAVQ-R
et
le
score
total
au
BAVQ-R.
PANSS
positive
PANSS
négative
PANSS
générale
CDSS
BAVQ-R
Total
0,13
0,17
0,44*
0,40*
Bienveillance
0,11
0,24
0,31
0,12
Malveillance
0,01
0,05
0,09
0,37*
Omnipotence
0,09
0,22
0,17
0,19
Résistance
0,11
0,04
0,03
0,54*
Engagement
0,21
0,11
0,41*
0,00
CDSS
:
Calgary
Depression
Scale
for
Schizophrenia
;
PANSS
:
Posi-
tive
and
Negative
Syndrome
Scale
;
BAVQ-R
:
Revised
Beliefs
About
Voices
Questionnaire
;
*
:
p
<
0,05.
comme
variable
dépendante
et
les
scores
aux
sous-échelles
du
BAVQ-R
comme
variables
indépendantes.
Le
modèle
pré-
sente
un
bon
ajustement
(r
=
0,60).
La
valeur
du
r2permet
d’estimer
que
36
%
de
la
variance
du
score
de
dépression
est
expliquée
par
la
combinaison
des
sous-échelles
du
BAVQ-R.
L’analyse
des
coefficients
bêta
pour
chaque
sous-échelle
de
la
BAVQ-R
met
en
évidence
que
la
sous-échelle
Résis-
tance
est
la
seule
contribuant
significativement
au
modèle
(t
=
2,92,
p
<
0,05).
Contrairement
aux
autres,
la
sous-
échelle
Résistance
permet
d’expliquer
le
score
obtenu
à
la
CDSS.
Malgré
la
corrélation
entre
les
sous-échelles
Mal-
veillance
et
Résistance,
nos
résultats
montrent
que
la
dimension
Résistance
est
la
seule
qui
prédit
le
score
de
dépression.
En
intégrant
dans
le
calcul
de
régression
mul-
tiple
les
scores
de
la
sous-échelle
de
psychopathologie
générale
de
la
PANSS
comme
variable
indépendante,
le
pour-
centage
de
la
variance
expliquée
passe
de
36
%
à
40
%,
mais
la
sous-échelle
Résistance
reste
la
seule
variable
contri-
buant
significativement
au
modèle
(t
=
0,20,
p
<
0,05).
Par
ailleurs,
lorsqu’on
sépare
l’échantillon
sur
la
base
du
score
seuil
à
la
CDSS
retenu
pour
qualifier
la
dépression
(supérieur
ou
égal
à
6
[16]),
les
9
participants
déprimés
présentent
un
Tableau
2
Scores
moyens
(écarts-types)
aux
différentes
échelles
et
sous-échelles.
Échelles
et
sous-échelles
Moyenne
(écart-type)
BAVQ-R
Score
total
(de
0
à
105)
47,32
(14,80)
Score
échelle
malveillance
(de
0
à
18)
8,60
(5,26)
Score
échelle
bienveillance
(de
0
à
18)
6,00
(5,57)
Score
échelle
omnipotence
(de
0
à
18)
9,71
(3,87)
Score
échelle
résistance
(de
0
à
27)
14,23
(7,02)
Score
échelle
engagement
(de
0
à
24)
8,76
(8,05)
PANSS
Score
total
(de
30
à
210)
84,84
(15,40)
Score
échelle
positive
(de
7
à
49)
24,37
(5,92)
Score
échelle
négative
(de
7
à
49)
19,34
(6,72)
Score
échelle
générale
(de
14
à
98)
41,13
(8,77)
CDSS
score
total
(de
0
à
27)
4,63
(3,48)
score
moyen
à
la
sous-échelle
Résistance
statistiquement
supérieur
aux
29
non
déprimés
(Z
=
—3,01,
p
<
0,05),
ce
qui
n’est
le
cas
pour
aucune
autre
des
sous-échelles
du
BAVQ-
R.
Enfin,
la
sous-échelle
Résistance
se
décompose
en
deux
groupes
d’items
mesurant
la
résistance
comportementale
émotionnelle.
Ces
deux
groupes
d’items
présentent
une
bonne
consistance
interne
(respectivement
alpha
=
0,70
et
0,62)
et
sont
fortement
corrélés
(r
=
0,46,
p
<
0,05).
Les
9
participants
déprimés
présentent
des
scores
statistique-
ment
plus
élevés
pour
ces
deux
groupes
d’items
(résistance
comportementale
:
Z
=
—2,76,
p
<
0,05,
résistance
émotion-
nelle
:
Z
=
—2,69,
p
<
0,05).
Cependant,
lorsqu’on
intègre
comme
variables
indépendantes
ces
deux
groupes
d’items
aux
autres
sous-échelles
du
BAVQ-R
l’exception
de
la
sous-échelle
Résistance),
seule
la
résistance
émotionnelle
contribue
significativement
aux
variations
des
scores
à
la
CDSS
(b
=
0,40,
t
=
2,18,
p
<
0,05).
Discussion
Afin
d’étudier
l’influence
de
la
résistance
aux
hallucinations
auditives,
les
propriétés
psychométriques
de
la
version
fran-
cophone
du
Beliefs
About
Voices
Questionnaire-Revised
ont
été
étudiées.
Ce
questionnaire
présente
une
consistance
interne
satisfaisante
et
de
bonnes
validités
concourante
et
de
construit.
Sa
version
francophone
permet
de
distin-
guer
les
différentes
dimensions
du
rapport
d’un
sujet
à
ses
voix.
Nos
résultats
confirment
la
corrélation
entre
les
sous-échelles
Malveillance
et
Résistance
et
entre
les
sous-
échelles
Bienveillance
et
Engagement.
Malgré
la
corrélation
entre
les
sous-échelles
Malveillance
et
Résistance,
nos
résultats
montrent
que
la
dimension
de
Résistance
est
la
seule
qui
influence
significativement
les
scores
de
dépression.
Les
participants
déprimés
résistent
statistiquement
davantage
à
leur
voix
que
les
participants
non
déprimés.
Ces
résultats
complètent
les
études
pré-
cédentes
à
propos
de
la
Résistance
[10,11],
qui
mettent
en
avant
les
tentatives
directes
de
changement
ou
de
résistance
aux
voix
comme
déterminantes
des
souffrances
psychologiques
des
patients.
De
plus,
nos
résultats
montrent
que
seule
la
résistance
émotionnelle
a
un
effet
significatif
sur
la
dépression.
Les
items
de
Résistance
comportementale
portent
sur
les
démarches
actives
du
patient
pour
se
débarrasser
des
voix
;
ceux
de
Résistance
émotionnelle
concernent
les
répercussions
des
voix
sur
les
ressentis
du
patient.
Ces
deux
groupes
d’items
sont
fortement
corrélés.
Aussi,
le
fait
que
seuls
les
items
de
Résistance
émotion-
nelle
ont
un
effet
significatif
sur
la
dépression
pourrait
refléter
le
désarroi
des
patients
face
à
l’inefficacité
de
la
résistance
comportementale.
Cette
dernière
pourrait
leur
apparaître
comme
la
seule
relation
possible
aux
voix
qu’ils
jugent
insupportables.
Ce
ne
serait
donc
pas
la
résistance
aux
hallucinations
en
elle-même
qui
augmenterait
la
symp-
tomatologie
dépressive
mais
l’impossibilité
de
mettre
en
place
une
résistance
efficace.
Nos
résultats
appuient
les
stratégies
thérapeutiques
ciblant
la
résistance
aux
voix.
À
l’opposé
des
straté-
gies
de
coping
contre
les
hallucinations,
mises
en
place
intuitivement
par
les
patients
et
systématisées
en
théra-
pie
comportementale
et
cognitive
[19,20],
des
stratégies
d’acceptation
et
de
pleine
conscience
commencent
à
être
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