Mars 2013 Prise de position de l’ACIC sur la biosurveillance Introduction Les scientifiques savent depuis longtemps que notre organisme peut absorber des substances provenant de l’environnement. Aujourd’hui, grâce aux percées faites dans le domaine de la chimie analytique, les chercheurs peuvent mesurer des quantités extrêmement faibles de substances naturelles et anthropiques dans les fluides et les tissus humains comme le sang, le lait maternel, l’urine et les poils – souvent de l’ordre d’une part par milliard (l’équivalent d’une goutte d’eau dans une piscine olympique). Les études de biosurveillance utilisent les analyses sur les tissus et les fluides afin d’évaluer les expositions aux substances naturelles et anthropiques provenant de l’environnement, l’ampleur de ces expositions et – si les études sont répétées – comment ces expositions peuvent changer au fil des ans. Alors que la technologie de la biosurveillance progresse, plus d’information est offerte afin d’aider les scientifiques des secteurs public et privé, les professionnels médicaux et les décideurs politiques à améliorer la santé publique, le bien-être des communautés et la santé et la sécurité des travailleurs. Comme tous les outils potentiellement utiles, la biosurveillance a ses limites. Des quantités à l’état de traces de substances naturelles ou anthropiques peuvent pénétrer dans notre organisme de diverses façons, notamment quand nous mangeons, buvons, respirons et entrons en contact avec l’environnement. Ils peuvent aussi être produits de façon interne par des processus naturels comme le métabolisme. La biosurveillance donne un aperçu des substances présentes dans l’organisme à un point précis dans le temps, mais elle ne révèle pas d’où provient une substance détectée, quand l’exposition a eu lieu ou s’il risque d’y avoir des effets sur la santé. Cependant, la biosurveillance peut aider à améliorer les décisions sur la santé publique si elle fait partie d’une stratégie intégrée qui non seulement identifie l’exposition à une substance, mais qui évalue les risques potentiels pour la santé. C’est pour ces raisons que les données sur la biosurveillance doivent être interprétées selon le contexte. Comme l’ont souligné les Centers for Disease Control and Prevention, aux États-Unis: la présence d’un produit chimique environnemental dans le sang ou l’urine d’un individu ne veut pas dire qu’il y aura des effets ou une maladie. La toxicité d’un produit chimique est liée à sa dose ou concentration et à la susceptibilité de l’individu. De faibles quantités peuvent n’avoir aucune conséquence sur la santé, alors que des quantités plus importantes peuvent avoir des effets néfastes1. 1 Centers for Disease Control and Prevention. Fourth National Report on Human Exposure to Environmental Chemicals. CDC ; 2009. (p.2.) http://www.cdc.gov/exposurereport/pdf/FourthReport_ExecutiveSummary.pdf L’Association canadienne de l’industrie de la chimie soutient l’acquisition d’information sur l’exposition permettant d’évaluer et de gérer les risques. Notre Association soutient l’utilisation d’études de biosurveillance comme moyen d’obtenir de l’information sur l’exposition pouvant être utilisée en combinaison avec d’autres approches et méthodes pour évaluer les risques et protéger la santé publique. De plus, l’Association canadienne de l’industrie de la chimie et ses compagnies membres cherchent depuis longtemps à évaluer et à réduire les risques de façon responsable – en concevant des programmes sur la santé et la sécurité des travailleurs et des consommateurs, en prenant des mesures pour réduire les émissions, et en participant à la recherche en collaboration. L’Association canadienne de l’industrie de la chimie soutient des programmes de biosurveillance axés sur la science. En tant qu’entreprises scientifiques, les programmes de biosurveillance devraient toujours reposer sur de solides principes scientifiques et liés à la santé publique. Le but de la collecte d’information devrait être clair, et le processus de sélection de substances pour la biosurveillance devrait être fondé sur des critères scientifiques et relatifs à la santé publique reconnus, et faire appel aux spécialistes appropriés. Qu’un programme de biosurveillance vise une vaste population, une population ciblée ou une population de travailleurs, la conception, l’exécution et les résultats du programme devraient être axés sur la science, transparents et communiqués pleinement et en contexte. L’Association canadienne de l’industrie de la chimie soutient les programmes de biosurveillance gouvernementaux comme l’Enquête canadienne sur les mesures de la santé , dont la conception et l’exécution sont sujettes à l’examen public de scientifiques, et qui reposent sur des méthodes analytiques validées faites par des laboratoires respectant des procédures de contrôle et d’assurance de la qualité sévères. De plus, ces programmes fournissent de l’information claire aux participants afin de les aider à comprendre les résultats dans le contexte de la santé. L’Association canadienne de l’industrie de la chimie soutient l’utilisation responsable et appropriée de l’information de biosurveillance dans le cadre de l’évaluation des risques et de l’élaboration des politiques publiques. L’information de biosurveillance aide à définir la recherche additionnelle et, si elle est répétée, à identifier les tendances d’exposition. Cependant, une étude de biosurveillance ne fait que fournir de l’information sur la quantité d’une substance dans un échantillon à un point donné dans le temps, et ne peut donc pas en elle-même répondre aux questions sur le risque ou la sécurité de la substance (ou ses alternatives). En conséquence, les programmes de biosurveillance ne permettent pas de prendre des mesures réglementaires, de rendre des décisions sur l’interdiction d’un produit ou de recommander un produit de remplacement. Il faut utiliser un processus axé sur les risques afin d’interpréter les résultats de la biosurveillance ou d’utiliser ces données pour élaborer des réglementations ou dans le cadre d’autres processus décisionnels. Santé Canada et l’Agence de la protection de l’environnement des États-Unis (U.S. Environmental Protection Agency) soutiennent actuellement des études visant à établir des équivalents de biosurveillance – les quantités de produits chimiques dans le sang ou l’urine, ou leurs métabolites, correspondant aux valeurs d’exposition d’une substance (estimations de l’exposition qui ne devraient pas poser de risque majeur pour la santé humaine). Bien que l’établissement de ces équivalents puisse permettre aux spécialistes de la santé environnementale d’évaluer les données de biosurveillance de la population afin de déterminer les risques potentiels pour la santé, les équivalents de la biosurveillance ne visent pas à évaluer des résultats individuels, et ne doivent pas être utilisés à des fins diagnostiques. L’Association canadienne de l’industrie de la chimie soutient l’interprétation et la communication appropriées de l’information sur la biosurveillance afin de promouvoir un processus décisionnel fondé sur les risques. La simple présence de quantités à l’état de traces d’un produit chimique dans l’organisme pourrait être interprétée à tort comme créant un risque pour la santé, entraînant une alerte injustifiée. Voilà pourquoi notre Association croit qu’il incombe aux organismes gouvernementaux qui mènent des études de biosurveillance d’interpréter l’information obtenue de façon responsable, et de la communiquer dans le contexte de la santé publique. L’Association canadienne de l’industrie de la chimie encourage les efforts conjoints entre le gouvernement et le secteur privé, les associations professionnelles et les spécialistes médicaux et scientifiques afin d’atteindre cet objectif. Finalement, notre Association encourage les membres de l’industrie dont les produits sont, ou pourraient être, inclus dans un programme de biosurveillance humaine fiable de développer et de distribuer de l’information sur ces produits chimiques afin de promouvoir à la fois un processus décisionnel informé sur la santé publique, et une communication efficace et axée sur les risques au sujet de la signification des résultats de la biosurveillance.