
Sécurité en anesthésie 77
3. NOMBRE DE CAS DE TRANSMISSION DU VIH EN MILIEU DE SOINS
Le nombre total de contaminations VIH après AES chez des soignants était fin 1997
de 264 cas [16]. Parmi eux, 94 cas (35,6 %) sont des cas prouvés de séroconversion
après un AES. Des infirmières ou du personnel de laboratoire réalisant des prélève-
ments sont concernés dans un peu plus de 50 % des cas, 10 % sont des médecins non
chirurgiens, et 5,7 % des chirurgiens. Quatre cas (1,7 %) sont survenus chez du person-
nel de dialyse. Deux cas sont rapportés en anesthésie : un cas chez un «anesthesiology
technician» aux Etats-Unis après un accident percutané, et un cas chez une infirmière
de bloc opératoire après coupure avec du matériel orthopédique. Le nombre de cas en
France est de 42 cas, dont 13 cas prouvés, le dernier cas documenté étant survenu chez
une interne au décours d’une piqûre après gaz du sang.
3.1. RISQUE DE TR ANSMISSION DU VIH D ANS UNE STRUCTURE DE SOINS
Le risque de transmission du VIH est fonction de plusieurs variables : densité des
gestes, fréquence des AES, caractéristiques des AES, type de matériel employé, préva-
lence de sujets infectés par le VIH dans le service.
Les AES survenant au bloc opératoire sont à faible risque de transmission car ils
incriminent largement des aiguilles pleines à travers des gants ou des expositions cuta-
néo-muqueuses par porosité des gants ou des projections. Néanmoins, un nombre
important des cas de transmission sont survenus au bloc. Ceci peut être expliqué par la
très forte fréquence des AES au bloc opératoire et par la survenue de quelques acci-
dents à haut risque, tels que des coupures profondes avec des lames de bistouri
lourdement souillées avec du sang.
Les infirmiers paient un lourd tribut. Les prélèvements par ponction directe,
notamment artériel, les poses et déposes de perfusion, sont des gestes techniques com-
plexes à risque élevé de se compliquer d’un AES. Ce sont, en outre, des gestes très
courants, quotidiens pour certains patients, très denses en nombre pour une IDE dans
une seule journée dans certains services. Ils utilisent du matériel à haut risque de trans-
mission : aiguilles creuses, ayant servi pour des prélèvements sanguins (la lumière de
l’aiguille contenant du sang). L’association de gestes fréquents, souvent compliqués
d’AES, et de risque élevé de transmission potentielle du VIH, explique que plus de la
moitié des cas de contamination aient été rapportés chez des infirmiers.
La prévalence de l’infection par le VIH est de 0,11 % en Ile de France. Il est
couramment accepté que la prévalence dans les services de médecine et de chirurgie est
basse, mais celle-ci peut atteindre 80 à 90 % dans certains services de maladies infec-
tieuses. Les services à forte prévalence de patients infectés par le VIH sont à risque
accru lorsqu’aucune politique de lutte contre les AES n’y a pas été instaurée.
La méconnaissance du statut VIH des patients hospitalisés ou au bloc opératoire ne
pose pas de problème en soi. Le respect des règles de prévention des AES doit être
systématique, pour tous les patients et dans tous les secteurs de soins : médecine,
chirurgie, réanimation, et bloc opératoire. C’est le respect des mesures universelles de
prévention. Le dépistage systématique préopératoire n’est pas seulement contraire à la
déontologie. Il est surtout économiquement non rentable et n’a pas démontré son inté-
rêt en termes de réduction des AES au bloc opératoire. Certaines études ont même mis
en évidence une fréquence accrue d’AES peropératoires chez les chirurgiens informés
du statut VIH positif de leur patient. Enfin, le fait de prendre plus de précautions chez
un patient séropositif pour le VIH sous-entend qu’on en prend moins pour les patients
VIH négatifs, mais qui peuvent être porteurs d’autres agents non recherchés ou encore
à découvrir.