ODONTOLOGIE ET PATIENTS Á RISQUE MEDICAL L’examen clinique doit prendre en compte les considérations cliniques et la prise en charge. Notion de patient à risque médical : - Patient présentant des AEG pouvant être aggravés par les actes et/ou prescriptions médicales - État physiologique nécessitant des précautions particulières (âges extrêmes : enfant, personne âgée) => Nécessité d’évaluation et d’adaptation de la conduite à tenir (cat). Objectifs de la formation : - apprendre à réaliser le bilan médical du patient savoir identifier les risques médicaux et chirurgicaux adapter la conduite à tenir odontologique en faisant référence aux différentes recommandations publiées par l’ASSFAPS, l’HAS, les sociétés scientifiques et la littérature internationale Bilan médical du patient en odontologie : Quand ? - Nouveau patient : en début de consultation, avant le recueil du motif de consultation - Patient connu : réactualisation tous les 3 à 6 mois , à chaque fois qu’on soupçonne un changement thérapeutique. Comment ? - Interrogatoire +++ - L’examen clinique en 3 temps : inspection, palpation et auscultation - Bilan para-clinique et contact avec le médecin traitant en COMPLEMENTAIRE. CONTACT AVEC LE MÉDECIN TRAITANT - Objectif : recueillir / préciser les informations médicales nécessaires à la prise en charge odontologique afin de définir la CAT - Á contacter si besoin de précision sur l'état général d'un patient ou ses traitements (patients polymédicalisés). ET NON PAS demander au médecin de préparer le patient pour un acte dont il n’a aucune expérience… Ne pas se reposer sur le médecin pour nos actes L'INTERROGATOIRE 1. COMMENT ? : Appareil par appareil : European Medical Risk Related History (correspond au type d'interrogatoire que l'on a à l'hôpital) Global : - antécédents médicaux - antécédents chirurgicaux - traitements en cours 2. FINALITE ? => Évaluation du risque médical en fonction : - de la classification ASA (American Society of Anesthesiologists) - des 4 risques médicaux : hémorragiques, infectieux, stress, prescription (allergie) CLASSIFICATION ASA ET CONDUITE A TENIR : - ASA I : en bonne santé => RAS - ASA II : avec atteinte modérée d'une grande fonction ex: HTA modérée, bronchite chronique => précautions mineures, réduction du stress - ASA III : avec atteinte sévère d'une grande fonction, limitant l'activité sans entrainer d'incapacité => précautions lors des soins, de l'exposition minimale du niveau de stress ; consultation médicale (spécialisée) éventuelle - ASA IV : avec atteinte très sévère d'une grande fonction, invalidante et mettant en jeu le pronostic vital => réaliser les soins en milieu hospitalier, consultation médicale spécialisé obligatoire - ASA V : patient morbide avec espérance vie inférieure à 24h => soins odontologiques contre-indiqués Exemple de la leucémie myéloïde aigue : (idéalement classé en ASA IV) Bilan bio : nombre de neutrophiles diminué, nombre de plaquette diminué Dent très mobile à extraire A l’examen clinique, il faut rechercher des signes spécifiques du risque hémorragique : saignement et hématome. Si ce risque est faible, on peut réaliser l’avulsion. Relation questionnaire médical - ASA = EMRRH (European medical risk related history) Ce questionnaire EMRRH peut être remplie par le patient (fiabilité évaluée). La classification ASA permet d’orienter le patient vers des médecins spésialiste ou odontostomatologie hospitalière. CEPENDANT Dr Fricain doute de sa fiabilité réelle, car elle ne permet pas une évaluation précise des risques spécifiques à l’exercice odontologique.. Dans le cas d’une crise d’angor, on pose des questions spécifiques au patient concernant par exemple la douleur à la poitrine. La classification ASA variera en fonction de la réponse (si l’activité est réduite ou si la sensation augmente récemment ou si la douleur est intense). En pratique, 3 questions à poser au patient : - Antécédents médicaux : avez-vous des problèmes de santé ou maladies particulièrement notables? - Antécédents chirurgicaux : avez-vous été opéré des dents ou autre chose? - Traitements en cours: prenez-vous des médicaments pour autre chose que les dents? => Et surtout, croiser les réponses pour rechercher les oublis ou erreurs. Compléter l’évaluation des risques médicaux par : - L’examen clinique sommaire : 1) Inspection On inspecte surtout les patients à risque hémorragique. On recherche pour cela les signes cliniques associés : hématomes localisés au niveau des zones exposées aux traumatismes ou au noveau s rones exposées aux piqûres pour réaliser les prises de sang. 2) Palpation (pouls) On palpe essentiellement lors de cardio-inhibition vagale causant un réflexe vagal avec sensation de malaise. Dans ces cas, on met en évidence le signe clinique essentiel (bradycardie) par la prise de pouls. 3) Auscultation (prise de la valeur a minima de la TA) : rare en odontologie On prend la TA chez les patients hypertendus connus ( mais il y a peu d’intérêt en absence de manifestation clinique) ou en cas de suspicion d’hypertension (avec céphalée, scotome..), auquel cas on le réfère chez un médecin référent. - L’examen paraclinique : Complémentaire de l’examen clinique, non systématiques, ils permettent de préciser les différents risques soupçonnés lors de l'examen clinique. Dans le bilan général du patient, les 2 grandes familles d'examens complémentaires sont : bilan biologique (essentiellement bilan sanguin) imagerie médicale 1) Imagerie médicale Radiographie Scanner Photographie Echographie : - imagerie peu onéreuse, rapide, sans irradiation, elle utilise les ultra-sons. - explore les tissus mous de façon grossière, examen complémentaire de 1ère intention. - indication : pathologie des glandes salivaires Scintigraphie (rayon gamma) : imagerie fonctionnelle (et non morphologique) - imagerie fonctionnelle des glandes salivaires (rarement utilisée, mais permet de mesurer le flux salivaire glande par glande) - scintigraphie osseuse (diagnostic précoce de maladie localisée au niveau de la cavité buccale mais avec des expressions à distance ; patient à nécrose osseuse due aux biphosphonates) - peut-être couplée au scanner (imagerie fonctionnelle + morphologique) Sialographie : lithiases IRM : - indication principale au niveau de la face : bilan d'extension dans la pathologie tumorale des tissus mous. - lors de certaines douleurs chroniques pour mettre en évidence des conflits artères-nerfs au niveau du cerveau (névralgie faciale essentielle) - exploration des tumeurs sur glandes salivaires - seule imagerie qui permet de voir le disque, mais peu de besoin en clinique (rare de prescrire une IRM pour un déplacement discal) - autrement, l'IRM est rarement utilisée. Doppler - exploration des flux sanguins (pathologies vasculaires, pathologies sanguines) - NB: examen de seconde intention pour explorer les malformations vasculaires artérioveineuses est l'angiographie avec injection d'un produit de contraste. Pet scan : tomographie par émission de positrons - bilan d'extension de certaines tumeurs métastatiques, tumeurs à stades précoces; indications bien précises, interprétation difficile. 2) Examens biologiques Bilan sanguin : examen de débrouillage = NFS, Formule Leucocytaire - Numération sanguine => diagnostic d'une anémie : taux d’Hb < 12g/L) - anémie microcytaire : carence en Fer - anémie macrocytaire: carence en folates ou Vit B12 Formule leucocytaire * polynucléaires neutrophiles = 50 à 75% des GB (soit entre 2000 et 7500) - neutropénie : moins de 1000 - conséquence en bouche d'une neutropénie = ulcérations * polynucléaires éosinophiles : allergie * lymphocytes : 20 à 40% des GB (entre 1000 et 3000) Biopsie : prélèvement tissulaire - Permet de poser un diagnostic par rapport à l’origine du tissu - Elle doit être corrélée avec l’examen clinique Bilan de l’hémostase : VOIR RISQUE HEMORRAGIQUE Autres examens - PCR : examen biologique qui permet de poser un diagnostic positif d’herpès : écouvillonage puis technique moléculaire - Prélèvement tissulaire ou prélèvement par écouvillonage si infection agressive, puis mise en culture des bactéries et antibiogramme Attention : peut avoir des négatifs non probant car quand lésions la charge virale est moindre. - Fonction hépatique : évaluation des transaminases, Gamma-GT et phospatases alcalines - Fonction rénale : évaluation de l'urée et calcul de la clairance de la créatinine Ces paramètres sont contrôlés chez les insuffisants hépatiques et rénaux, chez les patients âgés et les traitements au long cours. - Réalisation de sérologies lors de la recherche de maladies infectieuses : VIRUS de l'hépatite B et C, HIV suite à des manifestations buccales (polyadénopathies). - Recherche d'une diminution de l'hémoglobine (anémie) à la suite d'érythèmes linéaires au niveau de la langue qui traduisent des lésions carencielles (vitamine B12 et folates), perlèche et langue dépapillée. - Prescription d'une glycémie : si découverte de signes du diabète : polydipsie, polyurie, polyphagie. L’hémoglobine glyquée : témoin de la glycation de l’Hb, moyenne sur les 2/3mois passés, permet de savoir : - si le diabète est équilibré ou non - si le diabète est compliqué ou non - VS-CRP et ionogramme ne présentent pas d'intérêt majeur en odontologie. - En cas d'adénopathie cervicale basse, il faut suspecter un lymphome et l'électrophorèse des protides du sang doit être réalisée. En pratique, toujours se poser 5 questions : - Risque infectieux? Risque hémorragique? Risque vis-à-vis du stress? Risque vis-à-vis des prescriptions? (médicament et anesthésie) Risque spécifique propre à la maladie? Ainsi, à partir de la vision globale du patient en découlera le choix de la conduite à tenir. A. Risque infectieux (recommandations sur la prescription des AB) Risque d'infection à distance : risque d'endocardite infectieuse - prothèse valvulaire biologique ou mécanique - ATCD endocardite - cardiopathie obstructive cyanogène non opérée, insuffisance aortique Risque d'infection locale ou générale - patient diabétique non équilibré - insuffisance rénale - insuffisance hépatique - patient sous immunodépresseur (pas cyclosporine seule) (clinique : est ce que vous avez des infections ??) On a réduit les indications d'antibioprophylaxie car : - coût important pour la sécurité sociale - résistances aux AB - morbidité associée aux prescriptions médicamenteuses (choc anaphylactique) - épidémiologie s'est beaucoup modifiée - l'endocardite d'origine dentaire est due à une bactériémie répétée que l'on retrouve lors de tous les actes de la vie courante Manifestations buccales nécessitant la prescription d'examens biologiques en odontologie afin de préciser le risque infectieux : - la gingivite ulcéro nécrotique, les hypertrophies hyperhémiques ou purpuriques sans cause locale qui peuvent faire soupçonner une hémopathie maligne sont des manifestations buccales qui orientent vers la prescription d'une NFS et formule leucocytaire. - D'autre part les ulcérations buccales récidivantes qui touchent préférentiellement les sujets jeunes, de couleur et qui pratiquent peu d'activité physique nécessitent de réaliser une NFS et F leucocytaire pour mettre en évidence une neutropénie consécutive d'une margination des PNN. B. risque hémorragique EVALUATION DU RISQUE HEMORRAGIQUE : Bilan d’hémostase : patients avec risque hémorragique chez lesquels on va faire un acte sanglant patients qui saignent de manière inexpliquée et dont on cherche le diagnostic - exploration de l'hémostase primaire (dépend des plaquettes sanguines) : o numération plaquettaire (NFS) o temps de saignement TS : ce test est effectué dans le cadre d'une recherche de pathologies de l'hémostase suite à de suspicions lors de l'examen clinique - exploration de l'hémostase secondaire ou coagulation (qui dépend des facteurs de la coagulation et qui aboutit à la formation du caillot de fibrines) : o évaluation de la voie extrinsèque : INR ou TP ou Temps de QUICK o évaluation de la voie intrinsèque et commune : TCA Risque hémorragique et pathologies : maladie de WILLEBRAND : TS augmenté, TCA et TP normaux hémophilie : TCA augmenté, TS et TP normaux insuffisance hépato-cellulaire : TS, TP, TCA augmentés (atteinte des 2 temps de la coagulation) Risque hémorragique et traitements : Bilan pré-opératoire : il est fait lors qu’il y a suspicion de risque hémorragique (interrogatoire) But = évaluer le risque hémorragique avec comme examen : - INR : si patient sous AVK anti vitamine K (Préviscan, Sintrom) - TCA : si patient sous héparine (anticoagulants) - dans les deux cas on fait une NFS Patient sous anti-agrégant plaquettaire : CAT actuelle : ne pas modifier le traitement car le risque majeur est un risque thromboembolique mortel. Patient sous AVK : L'INR est mesuré la veille o si INR < 2 : il faut rééquilibrer les AVK, pas de geste immédiat : on adresse le patient au médecin traitant o si INR entre 2 et 3 : le geste opératoire est faisable, quel que soit l'acte, sans modification des AVK. Si l'acte à réaliser est à risque hémorragique modérée : - hémostase locale - acide tranexamique (Exacyl) - sutures (but = compression ; il faut donc bien se mettre à distance pour pouvoir tirer sur les berges) o si INR > 3 : prise en charge hospitalière obligatoire - si risque hémorragique faible : on peut garder les avk - si risque hémorragique fort : on donne de l'héparine en fractionnée puis on crée une fenêtre thérapeutique. o si INR > 4 : pas de geste immédiat, le patient doit revoir son médecin - risque hémorragique ++++ o si INR > 8 : hospitalisation en urgence. C. Risque vis à vis du stress - HTA : photophobie, scotome, érythrose faciale => diagnostic : prise tension lipothymie, malaise vagal : bradycardie +++ → diminution de l'oxygénation cérébrale. => On prend le pouls radial, on rassure le patient, on lui lève les jambes. si le patient est très anxieux => prémédication : atarax + valium (benzodiazépine) D. Risque lié aux prescriptions Anesthésie - CI : patient ayant une porphyrie hépatique = pas anesthésique de type amide, on utilise un esther - pas de problème sur la femme enceinte car le produit ne passe pas la barrière placentaire. - allergie rare Vasoconstricteur (=adrénaline) - CI relative : cardiopathies, psychiatriques, endocrinien : ne pas dépasser 4 carpules de 1.8ml - CI absolues : irradié dans la zone d’injection (risque d’ostéoradionécrose), phéochromocytome, asthme cortico-dépendant, prise de cocaïne, diabète non équilibré Conservateur dans l'anesthésique : - allergies aux sulfites : il existe des anesthésiques sans sulfite (ex : Primacaine) - parabens associés aux vasoconstricteurs : allergie → solution sans vasoconstricteur - les tests allergiques montrent que les malaises sont plus souvent d’origine vagale qu’allergique E. Risque spécifique propre à la maladie Exemple de la maladie de LOBSTEIN (maladie des os de verre) : risque de fractures des os maxillaires lors d'extractions dentaires.