Hallucinations et troubles du sommeil dans la maladie de Parkinson Les troubles du sommeil et la survenue d’hallucinations sont des complications fréquentes de la maladie de Parkinson et de son traitement dont la physiopathologie n’est pas complètement comprise. Si plusieurs études suggèrent une association entre hallucinations et troubles du sommeil, aucune n’avait jusqu’ici examiné leur évolution temporelle et leur lien réciproque. Afin d’évaluer ces troubles de façon prospective, une équipe américaine a réalisé une étude longitudinale sur 6 ans avec des visites à 0, 6, 18, 48 et 72 mois. Parmi les 89 patients parkinsoniens recrutés, 60 n’avaient initialement pas d’hallucination et 29 en présentaient. Différentes évaluations ont été réalisées, dont : un MMSE (Mini-Mental Sate Examination), un UPDRS moteur (Unified Parkinson Disease Rating Scale), et une version modifiée du PSQI (Pittsburgh Sleep Quality Index) pour l’évaluation du sommeil. La moyenne d’âge des patients était de 67,7 ± 9,5 ans, avec une durée moyenne de maladie de Parkinson de 10,3 ± 6,9 ans. Ce groupe comptait 54% d’hommes. Les sujets avec hallucinations avaient des scores moyens à l’UPDRS moteur plus élevés et au MMSE plus bas que les sujets sans hallucination. Après 6 ans, la proportion des patients avec hallucinations s’amplifiait : 33% au départ, 25% à 6 mois, 44% à 18 mois, 63% à 48 mois et 55% à 72 mois. Le risque d’avoir des hallucinations était augmenté d’un facteur 1,38 (IC à 95% = 1,2 à 1,6) à chaque visite successive. La gravité des hallucinations était également majorée, et le risque d’avoir des hallucinations sévères augmentait d’un facteur 1,42 (IC à 95% = 1,1 à 1,7) à chaque observation successive. Lorsqu’un patient développait des hallucinations, la probabilité qu’il en souffre encore à la visite suivante était multiplié par 5,7 (IC à 95% = de 3,1 à 10,3). Les hallucinations visuelles étaient toujours les plus fréquentes : 83% au départ, 86% à 6 mois, 72% à 18 mois, 83% à 48 mois et 89% à 72 mois. Venaient ensuite des hallucinations auditives, tactiles ou plus rarement olfactives. Contrastant avec l’évolution des hallucinations, les troubles généraux du sommeil et sa fragmentation fluctuaient fortement entre les patients et à chaque visite, sans progresser lors du suivi. Au cours de l’étude, les scores de PSQI étaient similaires pour tous les sujets, avec (5,9 ± 0,5) ou sans (5,5 ± 0,3) hallucination. La fragmentation du sommeil ne différait pas non plus entre ces deux groupes et n’avait pas de pouvoir prédictif quant au développement ultérieur d’hallucinations. La présence de rêves animés ou de cauchemars était cependant fortement associée avec la présence simultanée et la sévérité des hallucinations. Mais l’existence de rêves animés et de cauchemars chez les patients sans hallucination ne permettait pas de prédire le développement futur de ces hallucinations. L’âge, la durée de la maladie, les scores initiaux UPDRS ou MMSE, le sexe ou la prise de médicaments n’avaient pas d’effet sur la sévérité des scores d’hallucinations. Ces résultats renforcent l’association entre la présence et la sévérité des rêves animés et cauchemars et des hallucinations. Cependant, cette association ne s’étend pas aux autres troubles du sommeil, et plus précisément au problème très fréquent de la fragmentation du sommeil dans la maladie de Parkinson. Les mécanismes sous-tendant ces différents comportements sont vraisemblablement différents. Les auteurs en concluent que les troubles du sommeil et les hallucinations devraient être examinés comme des comportements distincts. C. Gauriau Successful Aging Database Au départ 48 mois 72 mois H SH g H SH g H SH g 29 60 0 41 24 22 27 22 40 U P D R S moteur 32,6 ±12,3 26,3 ±10,1 _ 35,8 ±19,5 35,7 ±16,3 _ 42,7 ±23,9 32,9± 17,8 _ MMSE 25,4 ±3,2 27,7 ±3,0 _ 22,1 ±8,9 25,3 ±7,1 _ 22,8 ±8,2 25,3 ±6,8 _ PSQI 5,9 ±4,1 5,8 ±3,6 _ 6,2 ±3,5 4,8 ±3,9 _ 5,3 ±3,4 6,0 ±4,4 _ Nombre patients de H = patients avec hallucinations, SH = patients sans hallucination, g = patients décédés ou trop atteints pour répondre aux évaluations. UPDRS moteur = Unified Parkinson Disease Rating Scale. MMSE = MiniMental Sate Examination. PSQI = Pittsburgh Sleep Quality Index. Goetz CG, Wuu J, Curgian LM, Leurgans S. Hallucinations and sleep disorders in PD. Six-year prospective longitudinal study. Neurology. 2005 ; 64 : 81-86. ©2005 Successful Aging SA Af 317-2005