NOUVELLES MOLECULES EN CANCEROLOGIE: DETECTER ET PRENDRE EN CHARGE DE MANIÈRE TRANSVERSALE LEURS EFFETS INDESIRABLES. Colloque Inter-3C - 6 novembre 2015 Dr E. Fougereau-Serafini Institut Paoli-Calmettes, Marseille Dr V. Casanova Pharmacie de la Cravache, marseille Que sont les « nouvelles molécules » en cancérologie? CONTEXTE: LES MEDICAMENTS LES PLUS VENDUS (1) 5,6 Md euros En ville 2001 2011 CONTEXTE: LES MEDICAMENTS LES PLUS VENDUS (2) A l’hôpital • Le marché des anticancéreux est en augmentation rapide par: – le nombre de nouvelles molécules : 2004/2012 = + 53 molécules – le nombre d’indications autorisées: 3 à 8 nouvelles AMM/an • Fort niveau d’innovation: 2007/2012: ASMR I (majeure) à III (modérée) = 30% des indications • Meilleures connaissance des mécanismes biologiques du K = mécanismes d’actions originaux : Nouvelles molécules 2004/2012 = 40% de thérapies ciblées avec accélération. Evolution du nombre de molécules mises sur le marché français depuis 2004 en cancérologie LA RETROCESSION HOSPITALIERE: UN PRÉALABLE DES SORTIES EN VILLE – DONNEES IPC Les « nouveaux médicaments anticancéreux » sont principalement des thérapies ciblées Lenalidomide Thalidomide Sorafenib Sunitinib Dasatinib Nilotinib Temsirolimus Panitumumab Lapatinib Gefitinib Everolimus Catumaxomab Pazopanib Rituximab Trastuzumab Imatinib Alemtuzumab Cetuximab Ibritumumab-tiuxetan Erlotinib Bevacizumab 19982005 20112006- 2015 2010 Ipilumumab Vandetanib Vemurafenib Axitinib Crizotinib Brentuximab-vedotin Pomalidomide Bosutinib Ponatinib Afatinib Regorafenib Dabrafenib Pertuzumab trastuzumab-emtansine Aflibercept Vismodegib Idelalisib Ibrutinib Olaparib Nivolumab Pembrolizumab Pixantrone Ceritinib Anticorps ITK Autres antinéoplasiques Immunothérapie Immunomudulateurs Molécules en développement, tendances de l’innovation Quels sont les effets indésirables de ces « nouvelles molécules » en cancérologie? Pourquoi une prise en charge transversale? Bien connaître les effets indésirables (et les interactions médicamenteuses) • Les anticancéreux per os sont le plus souvent des innovations thérapeutiques • La fréquence des effets indésirables et leurs niveaux de gravité restent élevés • Les professionnels de santé de ville (médecins spécialistes et généralistes, pharmaciens d’officine, infirmiers libéraux, etc.) sont également concernés par la PEC de ces patients. Quelques exemples Les effets indésirables caractéristiques des Inhibiteurs de Tyrosine Kinase (ITK) • Avec l’arrivée des ITK, émergence de nouvelles toxicités différentes de celles des chimiothérapies classiques, mais globalement mieux tolérées • Toxicités liées au mécanisme d’action qui touchent principalement la peau, le tube digestif et l’appareil cardiovasculaire • Se manifestent le plus souvent précocement après le début du traitement : 50% des effets surviennent dès le 1er cycle de traitement Fréquence des différentes toxicités liées aux ITK Cas de la LMC: principaux effets secondaires ITK Cytopenies/ EI cardiaques/ Asthénie/ Tox hépatique Rétention hydrique Imatinib Dasatinib Hyperglycemie /troubles métaboliques Nilotinib, Ponatinib EI cutanés Imatinib Pleural/ EI pulmonaires Dasatinib Nilotinib Imatinib Diarrhées/ Douleurs musculaires Imatinib, Bosutinib Nilotinib PAOD D’après:Le Coutre PJ Natl Cancer Inst. 2011 Sep 7;103(17):1347-8. Montani D, Circulation. 2012 May 1;125(17):2128-37. Steegmann JL, Cervantes F, le Coutre P, Porkka K, Saglio G Leuk Lymphoma 2012, 53:23512361. Adapted from the content HTAP Nilotinib, Ponatinib Dasatinib Effets secondaires et cibles probables Cytopenies Effets SI Rétention hydrique Hyperglycemie/ Troubles métaboliques BCRABL1 ABL PDGFR C-KIT C-KIT SRC SRC PDGFR SRC BTK Effets Effets cardiaques cutanés ABL C-KIT PAOD DDR VEGF DDR TEC Steegmann JL, Cervantes F, le Coutre P, Porkka K, Saglio G Leuk Lymphoma 2012, 53:2351-2361. Adapted from the content [email protected] Cas de la LLC: Ibrutinib et Idélalisib • • Très peu d’infections > gr.3 Ibrutinib: peu de gr 3-4: - Neutropénies, thrombopénies, anémies Pneumopathies Hypertension Décompensation FA Nombreux gr 1-2: - • manifestations hémorragiques cutanées Infections ORL Diarrhées arthralgies/myalgies asthénie Idélalisib: gr 3-4: – – – – – Colites, diarrhées Neutropénies Pneumopathies Cytolyses hépatiques Anémies, thrombopénies Effets indésirables de l’idélalisib et de l’ibrutinib : quelques connaissances, beaucoup de questions… L. Ysebaert* - Correspondances en Onco-Hématologie - Vol. X - n° 3 - mai-juin 2015 Cas des anticorps conjugués à un cytotoxique Exemple: Brentuximab Vedotin Cas des immunomodulateurs: Thalidomide, lenalidomide, pomalidomide Ce qui peut gêner le patient Ce que peut faire le patient, Ce qu’il doit signaler sans délai Tous sont tératogènes Cas de l’immunothérapie Exemple 1: Effets indésirables Ipilumumab • Résulte d’une augmentation de l’activité immune • Peut être sévère, voire mettre en jeu le pronostic vital; implique des organes variés • Diagnostic précoce et PEC appropriée sont essentiels pour minimiser les complications graves • Education du patient dans la détection précoce des EI • Considérer tous les symptomes à moins d’une autre étiologie • Corticoïdes hautes doses systématique si EI sévères Exemple 2: effets indésirables Nivolumab Prise en charge des EI, adaptations de doses voire arrêt Recommandations de suspension ou d’arrêt de traitement par NIVOLUMAB Pharmacien d’officine Diététicienne Kiné IDE Médecin traitant neurologue Pneumologue Psychiatre et psychologue Gastroentérologue Gynéco spécialisé reproduction Cardiologue/vasculaire Ophtalmo Endocrinologue Dermatologue Interniste néphrologue Oncologue médical, Hématologue Gériatre Gérer les effets indésirables, c’est aussi gérer les interactions médicamenteuses • Site ANSM: http://ansm.sante.fr/Dossiers/Interactions-medicamenteuses Interactions médicamenteuses ITK Liées à l’isoenzyme CYP3A4 du cytochrome P450 Interactions avec le paracétamol, les trts anti-acides, allongement du QTc et risque de torsades de pointes Les outils à notre disposition Fiches effets indésirables LE PATIENT VECTEUR DE L’INFORMATION ENTRE LES PROFESSIONNELS DE SANTE: Sécurisation de la prescription pour une meilleure prise en charge des effets indésirables et interactions med. La Démocratie sanitaire à l’IPC – Pr D.Maraninchi – Dr S. Duran La déclaration par les patients • Le parcours de soins des patients atteints de cancer a considérablement évolué: • Mise sur le marché accélérée de traitements innovants avec peu de recul sur la tolérance en vie réelle • Chronicité de la maladie, prise en charge en ambulatoire • Notifications des patients sont pertinentes et différentes des observations des soignants • Objectif: faire participer tous les acteurs du dispositif et de lui donner une transparence accrue • Freins: le manque d’information donnée aux patients, ainsi que le manque de sensibilisation sur l’utilité de déclarer Seulement 3 à 4% de déclarations effectuées par les patients 28 molécules utilisées dans 10 contextes pathologiques et concernant > 900 patients Pathologie Molécules IV Molécules per os File active estimée LLC/ lymphome Rituximab (mabthera*) Ofatumumab (Arzerra*) Idelalisib (Zydelig*) Ibrutinib (Imbruvica*) 245 patients LMC et autres SMP Clofarabine (Evoltra*) Nelarabine (Atriance*) Imatinib (Glivec*) Dasatinib (Sprycel*) Nilotinib (Tassigna*) Bosutinib (Bosulif*) Ponatinib (Iclusig*) Ruxolitinib (jakavi*) 270 patients Enquête INCA-associations de patients: ressenti vis-à-vis des effets indésirables 403 patients (53% LMC – 47% myélome multiple) - Améliorer interaction hématologue/MT - Hématologues: prendre en compte les EI au même titre que les résultats des traitements - Sentiment d’isolement, notamment en début de traitement ROLE DU PHARMACIEN DANS L’INFORMATION AUX PATIENTS CANCEREUX QUELQUES CHIFFRES • 355000 nouveaux cancers diagnostiqués en 2012 200 000 hommes 155 000 femmes • *prostate,sein,colon/rectum poumons et LMC sont les + fréquents • Population vieillissante • Évolution de la démographie médicale et de l’organisation des soins • 22 263 pharmacie en France TRAITEMENTS DES CANCERS La population qui vieillit de + en + de cancers de + en + de thérapeutie par voie orale le pharmacien de + en + sollicité tout ceci renforce la place du pharmacien dans la prise en charge du cancer DE L’HOPITAL AU DOMICILE • MEDECIN TRAITANT= référant médical légitime pour coordonner les soins au domicile du patient PHARMACIENS médecin INFIRMIERS KINES POSTE CLEF: LE COMPTOIR • LIEU D’ECHANGE: • Fidélité du patient à son pharmacien est un point très important • observance • Les effets indésirables • Interactions médicamenteuses MISSION DU PHARMACIEN OBSERVANCE: facteur important pour l’efficacité des thérapies orales • Délivrance de la prescription • Explication de la prescription En effet une explication de l’ordonnance est nécessaire car malgré celles données lors de la consultation , le patient se retrouve seul à gérer au quotidien son traitement. Explication également du traitement donné en prévention pour les éventuels effets secondaires pour que celui-ci les prennent au plus tôt • Conseils - mode d’administration - effets secondaires - interactions médicamenteuses Il est important que le pharmacien puisse disposer d’informations actualisées et complètes qui lui permettent de connaître tous les problèmes liés à l’emploi de ces thérapeutiques orales (fiches avec l’ordo par exemple) • Informations à l’entourage Le plus souvent le pharmacien connaît l’environnement du patient ce qui le place dans une situation privilégiée pour l’accompagner PRISE EN CHARGE DES EFFETS SECONDAIRES • • • • SOUVENT TRANSITOIRES PARFOIS CHRONIQUES VARIE SELON LES INDIVIDUS JOUE UN ROLE IMPORTANT DANS LE BON SUIVI DU TRAITEMENT LES EFFETS SECONDAIRES • Les plus fréquents rencontrés au comptoir sont: EFFETS CUTANES FATIGUE NAUSEES ET VOMISSEMENTS APHTES / MUCITES EFFETS CUTANES • SYNDROME MAINS PIEDS Conseils: Contrôler et retirer les callosités, hydrater et protéger • ERUPTIONS CUTANEES ET DESQUAMATION Conseils: utilisation de savons doux et de crème hydratante , pas d’exposition au soleil , pas de vêtements serrés … PRURIT ET XEROSE Conseils: maintenir une peau très hydratée • EFFETS SUR LES PHANERES ET ALOPECIE: prurit, sensation de brûlures et douleurs du cuir chevelu Conseils: utilisation de lotion visant à graisser le cuir chevelu Pour l’alopécie : selon l’individu et la perte on pourra camoufler ou porter une perruque LA FATIGUE • EFFET SECONDAIRE LE PLUS FREQUENT DU CANCER Déshydratation, malnutrition, état dépressif, anémie sont de nombreux facteurs pouvant contribuer à la fatigue CONSEILS A PRODIGUER Savoir se reposer et bien se nourrir Pratiquer une activité physique Avoir un soutien psychologique Essayer de ne pas s’isoler en continuant son activité professionnelle APHTES et MUCITES Variable selon le traitement et l’individu APHTES: par la baisse de globules blancs, rouges et plaquettes , le patient est plus sensible aux infections de la bouche et des gencives (+++lors de chimio) MUCITES: sécheresse de la bouche à l’origine d’ulcérations des muqueuses buccales (aussi nasales, gastriques, anales) CONSEILS A PRODIGUER - rdv dentiste avant le début de son traitement - hygiène bucco-dentaire - Conseils diététiques pour éviter une dénutrition NAUSEES ET VOMISSEMENTS • EFFETS LES PLUS APPREHENDES DES PATIENTS CANCEREUX :80% d’entre eux en souffriront si non pris en charge correctement: perte de poids, déshydratation, faiblesse (cf fatigue!) Surtout :signaler tout amaigrissement • CONSEILS A PRODIGUER Conseils alimentaires : Diarrhée:attention aux fibres (fruit et légumes),alimentation riche en gras et à la caféine Vomissements:alimentation et hydratation régulière mais en petites quantités, fractionner les prises Conseils pharmacologiques Éviter certains médicaments accélérateurs du transit SIGNES ET SYMPTOMES DEVANT ETRE SIGNALER SANS DELAI A SON MEDECIN • Saignements mineurs (hématomes, épistaxis): Hémogramme • Suspicion d’infection (fièvre): Hémogramme • Prise de poids anormale: Examen clinique cardiopulmonaire • Dyspnée, toux sèche: Examen clinique pulmonaire et radiographie pulmonaire • Douleurs abdominales: Dosage du taux sérique de lipase • Myalgies: Dosage des CPK selon l’intensité des symptômes INTERACTIONS MEDICAMENTEUSES* • Interactions liées à l’iso enzyme CYP3A4 du cytochrome P450 • Interactions avec le paracétamol • Interactions avec les traitements antiacides • Allongement du QTc et risque de torsades de pointes **interactions retenues avec les ITK car ils représentent la plus grande partie des traitements per os utilisés en ville • Interactions potentielles avec médecine douce INTERACTIONS LIEES A ISOENZYME CY P3A4 DU CYTOCHROME P450 les ITK sont des substrats des isoenzymes CYP3A4 du cytochrome P450 donc en cas de co-prescription d’un inhibiteur ou d’un inducteur du CYP3A4 ; cela peut augmenter (alcool, tabac, millepertuis, carbamazepine, phénobarbital) ou diminuer (amiodarone, diltiazem, verapamil…) la concentration plasmatique de l’ITK reçu par le patient. De même , les ITK peuvent augmenter la concentration plasmatique d’autres substrats de l’isoenzyme CYP3A4 du cytochrome P450 (ergotamine, dhe, amiodarone…) INTERACTIONS AVEC LE PARACETAMOL • Interactions avec le paracétamol L’imatinib pourrait diminuer le métabolisme hépatique du paracétamol ; il est donc recommandé d’être prudent en cas d’utilisation INTERACTIONS AVEC LES TRAITEMENTS ANTIACIDES • Il existe une mise en garde sur l’utilisation concomitante de certains ITK ciblant BCR-ABL avec les inhibiteurs de la pompe à proton (IPP) et les anti-H2, l’absorption de ceux-ci pouvant être influencée par le pH gastrique ALLONGEMENT QT ET RISQUE TORSADE DE POINTE • Les ITK peuvent être associés à un allongement de l’intervalle QTc sur l’ECG , à l’origine d’un risque de mort subite. Bien que ce risque soit relativement faible, il est favorisé par l’association de facteurs de risque tel que: - médicaments torsadogènes Amiodarone, amisulpiride, citalopram, escitalopram, levofloxacine, domperidone - médicaments susceptibles d’allonger le QT Alfuzosine, azithromycine, clarithromycine, clozapine.. INTERACTIONS POTENTIELLES AVEC MEDECINE DOUCE • POTENTIALISATION DES EFFETS INDESIRABLES - plantes diurétiques: pissenlit, queue de cerise.. - plantes laxatives: séné • DIMINUTION DES EFFETS THERAPEUTIQUES Ail et le millepertuis AUGMENTATION DE L’EXPOSITION AUX ANTICANCEREUX Chardon marie et ginkgo ANTAGONISATION DES EFFETS ANTI-CANCEREUX Echineacea et réglisse MESURES PREVENTIVES Effets cutanés: Application de topiques hydratants Soins pédicures avant le début du traitement Pas d’exposition solaire Effets digestifs: La prévention repose sur l’éducation du patient éventuellement aidée par une consultation diététique avant la mise sous traitement ROLE DU DOSSIER PHARMACEUTIQUE • Le DP contribue à sécuriser la dispensation des médicaments en permettant d’éviter les risques d’interaction entre médicaments et les traitements existants. Il aide le pharmacien à agir efficacement contre la iatrogénie médicamenteuse. • En effet, le Dossier Pharmaceutique permet aux pharmaciens de consulter l’historique des médicaments qui ont été dispensés au cours des 4 derniers mois (au cours des 3 dernières années pour les médicaments biologiques* et au cours des 21 dernières années pour les vaccins). CONCLUSION PHARMACIEN: ACTEUR INDISPENSABLE • Bien dispenser • • • • :ROLE PREMIER Bien expliquer Participer à un suivi thérapeutique efficace Surveiller et répondre à la survenue d’effets indésirables Créer la confiance et soutenir les patients Tout cela rentre sûrement dans la réussite de la prise en charge globale du patient cancéreux et renforce donc la place du pharmacien dans la prise en charge des malades atteints de cancer