57è CONGRÈS ANNUEL DE l’ASSOCIATION CANADIENNE DES RESSOURCES HYDRIQUES
Eau et changement climatique: comprendre pour mieux s’adapter
16-18 Juin, 2004, Montréal, Qc, Canada
Lam et al., Mise à jour des courbes d’intensité durée fréquence des pluies de courte durée du climat récent au Québec. 1
MISE À JOUR DES COURBES D’INTENSITÉ DURÉE FRÉQUENCE DES
PLUIES DE COURTE DURÉE DU CLIMAT RÉCENT AU QUÉBEC.
par
Khanh-Hung Lam1,2, Jennifer Milton1, Michel Nadeau1 et Luc Vescovi2
1 Service Météorologique du Canada, 100 boulevard Alexis-Nihon, 3e étage, Saint-Laurent, Qc, Canada
2 Ouranos, 550 Sherbrooke Ouest, 19e étage, Montréal, Qc, Canada
Introduction
Au Canada, les pluies torrentielles estivales et les crues qui peuvent en résulter constituent une des
illustrations les plus frappantes d’impacts d’événements climatiques extrêmes. Dès lors, afin de
protéger efficacement la population et les infrastructures, il est indispensable d’estimer précisément les
risques associés à ces impacts et par conséquent de fournir aux ingénieurs les éléments clés pour
construire des digues d’une hauteur appropriée aux endroits stratégiques, déterminer les zones non
constructibles, définir la périodicité des opérations d’évacuation des eaux, etc.
Dans ce contexte, et ce afin de tenir compte des récentes évolutions du climat au Québec (période
1991-2003) en matière de pluviométrie, le Service Météorologique du Canada avec le support
d’Ouranos est en train de réaliser un projet dont l’objectif est la mise à jour des courbes d’intensité
durée fréquence (IDF). Basées sur une approche probabiliste, les courbes IDF illustrent la distribution
des fréquences des valeurs maximales d’intensité de pluie sur une durée donnée. L’obtention de ces
courbes nécessite successivement (1) la transformation des valeurs brutes en une série de valeurs
maximales annuelles sur différentes durées (ie. 5, 10, 15 min…), puis (2) l’ajustement consolidé ou non
des lois de probabilité à ces séries de valeurs extrêmes. Cette dernière étape a un impact majeur sur la
validité des estimations des occurrences des extrêmes. Après consultations auprès d’experts et
d’usagers, il a été décidé d’utiliser la loi de distribution GEV/Gumbel et l’ajustement par la méthode
des moments.
Ce papier présente les différentes étapes de transformation de la donnée brute en valeur estimée
statistique. Il discute de la pertinence du modèle choisi (loi GEV/Gumbel) ainsi que des avenues
possibles d’amélioration. Il présente les premiers résultats du produit qui sera livrés aux usagers.
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Transformation des valeurs brutes
Au Québec, le Service Météorologique du Canada (SMC) d’Environnement Canada et le Ministère de
l’Environnement du Québec (MENV) se partagent les responsabilités sur la mesure de la précipitation.
Le MENV et le SMC détiennent la plupart des stations munies de pluviomètres à augets basculeurs
(TBRG - Tipping Bucket Rain Gauge) soit en tout 95 stations actives réparties sur l’ensemble du
territoire (voir Figure 1). Le SMC assure l’archivage des données d’intensité de précipitation et le
calcul des courbes IDF. Parmi les 95 stations, dont les données sont traitées dans le cadre de ce projet,
85 ont des relevés sur 10 ans et plus, et 62 stations ont des relevés sur 20 ans et plus.
Figure 1. Localisation des 95 stations équipées d’un TBRG au Québec
Les courbes d’Intensité-Durée-Fréquence (IDF) représentent pour une probabilité de non dépassement
(exprimée en terme de période de retour), la variation de l’intensité annuelle maximum des pluies à
l’intérieur d’un intervalle de temps. Elles sont utilisées entre autres pour le calcul de débits de projet via
la modélisation de pluies synthétiques et l’estimation des débits de crue.
La construction des courbes IDF consiste tout d’abord à rassembler les données sur le maximum des
pluies tombées pour différentes durées de temps. Au Québec, les périodes de temps pour lesquelles ces
données sont disponibles s’étalent du début des opérations des stations jusqu’en 1995, date importante
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marquée par (1) l’automatisation des réseaux d’observation et (2) l’arrêt de l’archivage des données des
maximums de pluie tombée par le SMC. Les données antérieures à 1995, se trouvent aux archives
nationales climatologiques du Canada. De 1996 à aujourd’hui, les données issues des TBRG sont pour
la plupart non numérisées et sont conservées sous forme de feuillet de diagramme pluviométrique au
MENV. Celui ci a d’ailleurs reçu le mandat de les numériser. Néanmoins, pour cette période la division
des sciences atmosphériques et enjeux environnementaux (DEAS), une division du SMC, détient les
messages numériques bruts (appelés CA) contenant l’information provenant des pluviomètres à augets
basculeurs pour 27 stations. Ces stations sont celles qui furent automatisées par le SMC à partir de
1996. Elles ne sont pas incluses dans le lot en cours de numérisation par le MENV. Déjà sous forme
numérique, le message provenant des TBRG automatiques du SMC peut être récupérées par un
programme développé localement par le DEAS. Une explication de la méthodologie employée pour
extraire l’information sur les maximums de pluie tombée pour différentes durées à partir des fichiers
CA est présentée ci-dessous.
La première étape du projet de mise à jours des courbes IDF a consisté a identifier les stations pour
lesquelles des fichiers numériques CA étaient disponibles et à récupérer (à partir de ces fichiers et
parmi la panoplie de paramètres climatologiques contenus) l’information relative aux TBRG et au
pluviomètre standard du type Fisher Porter (respectivement messages 400 et 160). Le TBRG enregistre
la pluie et envoie l’information dans le fichier CA qui l’enregistre au pas de temps de 1 minute. À
l’aide d’un programme de décodage du message CA (conçu par le DEAS), le maximum de pluie
tombée pour des durées de 5 minutes, 10 minutes, 15 minutes, 30 minutes, 1 heure, 2 heures, 6 heures
et 12 heures est calculé en considérant des fenêtres de temps mobiles. Ainsi, on a l’avantage (par
rapport à un intervalle de temps fixé par l’horloge) de quantifier le vrai maximum observé pendant un
laps de temps mobile. Cette procédure est celle employée du côté du MENV lors de la numérisation des
fichiers (voir ci-dessus). Les maximums de pluie pour les durées de temps correspondent
respectivement aux éléments climatologiques 125, 126, 127, 128, 129, 130, 131 et 132 des archives
nationales. Pour tenir compte des erreurs systématiques du TBRG dans les conditions de bruine très
légère ou d’averse à partir de 50 mm/h (AES, TM04-01-03, 1981), les relevés des éléments 125 à 132
sont rectifiés en multipliant par un facteur de correction qui permet de niveler les totaux journaliers
avec ceux des pluviomètres standard du type Fisher Porter. À partir des éléments validés 125 à 132, on
calcule des séries d’intensités maximum annuelles pour chaque laps de temps.
Les courbes IDF livrées aux usagers par le SMC comporte habituellement 9 séries d’intensité
maximum annuelles. Le MENV fournit 8 éléments, soit les éléments 125 à 132. Le neuvième élément
(161) qui représente le maximum de pluie tombée sur une durée de 24 heures n’est pas fourni. Pour le
besoin du projet on a estimé cet élément à partir d’un pluviomètre du type Fisher Porter. Dans ce cas la
procédure utilisant la méthode de la fenêtre mobile est appliquée sur une base de 1 heure et non 1
minute.
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Mise à jour des courbes IDF
Des résultats préliminaires à la station de Dorval sont présentés à la Figure 2 pour les durées de 15, 30
minutes, 1, 6 12 et 24 heures. Pour cette station, la série de données utilisée couvre les 60 dernières
années (1943-2002). Les mesures des hauteurs maximales de pluie tombée pour différents laps de
temps sur une base quotidienne ont été examinées et passées dans les divers programmes qui calculent
d’abord des séries d’intensités maximum annuelles et ensuite les tableaux d’intensité-durée-fréquence à
partir de la méthode GEV/Gumbel. Tel que présenté à la Figure 2, les intensité-durée-fréquence des
pluies ont été calculées sur 4 tranches de trente ans respectivement 1943-1972, 1953-1982, 1963-1992
et 1973-2002. On observe de 1943 à 1992 (les 3 premières tranches de 30 ans), une augmentation de
l’intensité des pluies pour toutes les durées à l’exception de la durée de 12 heures. Celle-ci subit une
hausse de 1942 à 1982, suivi d’une baisse de 1983-2002. Par ailleurs, on constate pour les trente
dernières années (1973-2002) une baisse de l’intensité des pluies de très courte durée (5, 10, 15, min.,
1, 2, 6h.). Cette baisse semble s’atténuer au fur et à mesure qu’on atteint les pluies de plus longue durée
12 heures et plus. L’intensité maximale pour 24 heures semble même démontrer une légère hausse à
partir des périodes de retour supérieures à 10 ans.
À cause du fait que les valeurs reste dans l’intervalle de confiance et que l’analyse est disponible que
sur une seule station (Dorval), il est difficile d’aller trop loin dans l’interprétation de ces résultats.
Discussion et conclusions
L’objectif du projet est de tenir compte de l’information récente disponible sur l’intensité des pluies au
Québec pour mettre les produits IDF opérationnels et non pas de faire une étude spécifique visant à
améliorer les lois de distribution à utiliser. Le choix d’utiliser une méthode statistique classique tient
compte de cet impératif.. Nous avons adopté la loi de distribution GEV type I plus connu sous le nom
de loi de Gumbel pour décrire la fréquence des pluies extrêmes.
Cette loi de distribution est aussi utilisée par la plupart des services météorologiques officiels (OMM,
1981). La méthode d’ajustement utilisée pour ajuster la distribution Gumbel est la méthode des
moments (Hogg et al., 1985; Lowery et al.,1970). La loi de distribution Gumbel est loin d’être une loi
parfaite, néanmoins elle représente la loi de distribution la plus utilisée dans les études sur le climat
extrême. Les statisticiens, eux-mêmes, reconnaissent qu’une loi de probabilité adéquate pour
représenter un phénomène météorologique donné doit non seulement répondre à certaines
considérations probabilistes mais aussi tenir compte des divers aspects liés au processus physique et au
problème décisionnel (Haché et al., 1998). La loi de Gumbel a l’avantage d’être très connue par les
ingénieurs qui l’utilise dans le cadre de travaux sur la fiabilité des infrastructures. D’un point de vue
théorique le domaine d’attraction de Gumbel intègre beaucoup de lois usuelles dont la loi
exponentielle, normale, lognormale, Weibull, Gamma et Gumbel. Pour des raisons de simplicité
mathématique, il est beaucoup plus facile d’estimer (à partir de la moyenne et l’écart-type) deux
paramètres (loi de Gumbel) que trois paramètres et plus. Pour des raisons pratiques, la possibilité de
représenter visuellement les quantiles sous forme linéaire offre un atout majeur pour les ingénieurs. Il
est alors possible de tracer la droite qui passe le mieux par ces points et d'en déduire les deux
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paramètres a et b définissant la loi. Chose qui n’est pas possible avec la loi de distribution de Fréchet
où l’équation ne peut pas être linéarisée.
Au stade actuel du projet, les recommandations suivantes peuvent être émises pour les prochaines
étapes :
finaliser l’étude sur le réseau au complet (95 stations).
étendre le calcul des maximums des pluies au delà de 24 heures.
faire une validation exhaustive de l’effet du changement d’instruments sur le calcul des maximums
des pluies de courtes (-24h) et longues (+24h) durées.
Finalement, plusieurs axes de développement futurs dont l’étude du comportement des pluies de fortes
intensités depuis les trente dernières années, peuvent être entrevus.
Bibliographie
Environment Canada, (1981): TM04-01-03, Technical manual : Tipping Bucket Rain Gauge System ,
Atmospheric Environment Service, Downsview, Ontario, Canada.
Lowery, M.D., and J.E. Nash 1970: A comparison of methods of fitting the double exponential
distribution. J. of Hydrology, 10 (3), 259–275.
M. Haché, L. Perreault, L. Rémillard and B. Bobée 1999: Une approche pour la sélection des
distributions statistiques : application au bassin hydrographique du Saguenay – Lac St-Jean, Can. J.
Civ. Eng. 26: 216–225.
W.D. Hogg, D.A. Carr and B. Routledge 1985: Rainfall intensity-duration frequency values for
Canadian locations, Environnement Canada.
WMO, 1981 : Selection of distribution types for extremes of precipitation by B.Sevruk and H. Geiger,
World Meteorological Organisation, Op. Hydrol. Report No.15, WMO– No.560,64p.Geneva
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