l n’est pas dans la nature des faisceaux laser de con-
server leur taille et leur durée sur de très grandes dis-
tances de propagation, car la lumière est soumise aux
lois physiques de la diffraction et de la dispersion. On
peut cependant jouer d’astuce pour atténuer (et parfois
même compenser complètement) l’effet de ces lois en
combinant les effets non-linéaires à la dispersion et la dif-
fraction pour obtenir notamment les solitons, ou encore en
structurant adéquatement le champ transversal pour
obtenir un faisceau Bessel quasi-invariant.
Un nouveau type de paquet d’onde quasi-invariant appelé
faisceau Bessel spatiotemporel a récemment été pro-
posé [1,2]. La distribution d’intensité de ce nouveau fais-
ceau possède la propriété de ne pas subir les effets de la
dispersion ni de la diffraction. Cependant, il est impossi-
ble de générer expérimentalement une fonction de Bessel
pure étant donné les dimensions infinies de cette dernière.
Pour contourner ce problème, on a recours à une
enveloppe gaussienne, qui induit une légère variation de la
distribution du champ lors de la propagation, d’où le qua-
lificatif de faisceau quasi-invariant. La section qui suit
présente les notions de base relatives aux faisceaux Bessel
et Bessel-Gauss spatiotemporels. La troisième section est
consacrée au montage utilisé pour générer expérimentale-
ment ces faisceaux et les résultats expérimentaux sont
présentés à la dernière section.
FAISCEAUX BESSEL ET BESSEL-GAUSS
SPATIOTEMPORELS
Afin de bien comprendre la nature des faisceaux Bessel
spatiotemporels, il convient d’aborder en premier lieu les
RÉSUMÉ
On présente les éléments théoriques fonda-
mentaux relatifs à de nouveaux faisceaux
invariants, le montage expérimental permet-
tant leur génération ainsi que les résultats
confirmant leur synthèse.
I
PAR MICHAËL DALLAIRE, NATHALIE MCCARTHY ET MICHEL PICHÉ
GÉNÉRATION EXPÉRIMENTALE DE FAISCEAUX BESSEL-
GAUSS SPATIOTEMPORELS
Michaël Dallaire
<michael.dallaire.1@
ulaval.ca>, Nathalie
McCarthy
<nathalie.mccarthy@
phy.ulaval.ca>,
Michel Piché
<mpiche@
phy.ulaval.ca>,
Centre d'optique,
photonique et laser
(COPL),
Département de
physique, de génie
physique et d'op-
tique, Université
Laval, QC, Canada
G1V 0A6
faisceaux Bessel transversaux, qui ont été proposés par
Durnin et al. en 1987 [3,4]. La figure 1a présente la distri-
bution en intensité d’un faisceau Bessel transversal. On
obtient une telle distribution en intensité en faisant inter-
férer une multitude d’ondes planes uniformes dont les
vecteurs d’onde sont disposés sur un cône d’angle 2θ.
L’équation suivante représente la distribution en intensité
du faisceau Bessel transversal:
, avec (1)
J0est la fonction de Bessel de première espèce d’ordre
zéro, β0(=2π/λ0) est le nombre d’onde, α=β0θ est la com-
posante transversale du nombre d’onde, et A0est l’ampli-
tude du champ. L’éq. (1) est indépendante de la distance
de propagation z, indiquant que ce faisceau serait parfaite-
ment invariant.
Les anneaux du faisceau Bessel spatiotemporel ne se
situent pas dans le plan transversal à l’axe de propagation,
mais plutôt dans le plan
espace-temps (soit dans le
plan x-z) tel que présenté à
la figure 1b. Dans une telle
configuration, les anneaux
concentriques se déplacent
le long de l’axe z, d’où un
train d’ondes sur l’axe
optique et une distribution
spatiale au centre de l’im-
pulsion correspondant à la
fonction de Bessel. Pour
décrire une telle distribu-
tion de champ, on définit
une variable radiale spa-
tiotemporelle telle que:
,
avec T=t-z/νg(2)
test le temps, νg
représente la vitesse de
groupe, et β2est le
ARTICLE DE FOND
LAPHYSIQUE AU CANADA / Vol. 64, No. 3 ( juillet. à septembre (été) 2008 ) C123
The winners of the 2008 CAP Best Student Presentation Competitions at the CAP Annual Congress,
2008 June 8-11, in Quebec City, Quebec are listed on page 122. The extended abstracts of those
winners of the CAP and NSERC prizes who submitted them for publication are reproduced below. Ed.
Ir AJ r AJ r() ( ) ( )==
00 0
2
00
2
βθ α
rxy=+
22
ρββ=−xT
202
/
Fig. 1 Distribution d'intensité
pour a) un faisceau
Bessel transversal et
b) un faisceau Bessel
spatiotemporel.
July08-to-trigraphic-final.qxp 11/17/2008 1:46 PM Page 123
GÉNÉRATION EXPÉRIMENTALE ... (DALLAIRE ET AL.)
124 CPHYSICS IN CANADA /VOL. 64, NO. 3 ( July-Sept. (Summer) 2008 )
paramètre de dispersion du milieu de propagation, qui doit être
négatif pour que le rayon ρsoit réel pour toute valeur de xet de
T.
Comme la fonction de Bessel est une fonction infinie, on en
limite les dimensions spatiales et temporelles à l’aide d’une
enveloppe gaussienne spatiotemporelle. L’équation représen-
tant la distribution du champ d’un faisceau Bessel-Gauss spa-
tiotemporel (BGST) à l’étranglement (z= 0) est la suivante:
(3)
wst représente la taille spatiotemporelle de l’enveloppe
gaussienne et est un paramètre de modulation permettant
d’ajuster la dimension des anneaux. La présence de l’en-
veloppe gaussienne induit une variation de la distribution du
champ lors de la propagation, telle que présentée à la figure 2.
La distribution du champ avant l’étranglement peut être vue
comme une multitude d’impulsions gaussiennes, distribuées
sur un anneau, qui convergent spatialement et temporellement
vers un centre commun qui se déplace à la vitesse de groupe.
Dès que les impulsions sont suffisamment rapprochées pour
interférer, les anneaux de la fonction de Bessel deviennent vi-
sibles, jusqu’à atteindre un maximum de contraste à l’étrangle-
ment (z = 0). Il est à noter que la taille des anneaux reste la
même aussi longtemps que ces derniers sont visibles. Ainsi, la
distance de Rayleigh d’un faisceau BGST est beaucoup plus
longue que celle associée à un faisceau gaussien ayant la taille
du lobe central du faisceau BGST, d’où le qualificatif de fais-
ceau quasi-invariant. Si on laisse propager le faisceau BGST
au-delà de l’étranglement, les diverses impulsions gaussiennes
se séparent graduellement, de sorte qu’à partir d’une certaine
distance de propagation, ces dernières sont trop éloignées les
unes des autres pour interférer et il ne subsiste qu’un anneau
divergent.
MONTAGE EXPÉRIMENTAL
C’est dans la distribution du champ après (ou avant) l’étrangle-
ment que réside la clé pour générer un faisceau BGST. Dans le
champ lointain, on obtient la transformée de Fourier spatiale et
temporelle du faisceau. En effet, la distribution annulaire du
champ est constituée de toutes les impulsions gaussiennes
séparées spatialement et temporellement. La séparation spa-
tiale provient de la divergence naturelle des impulsions alors
que la séparation tem-
porelle provient de la
dispersion du milieu de
propagation. Ainsi, on
doit sélectionner les
fréquences optiques
appropriées en fonction
de la position x, tel que
présenté à la figure 3.
Cette figure représente
donc le masque à utiliser
dans un modeleur spa-
tiotemporel d’impul-
sions; ce dernier doit
effectuer la transformée
de Fourier spatiale et temporelle des impulsions.
Le montage présenté à la figure 4 a été conçu dans le but de
générer un faisceau BGST à l’étranglement en effectuant la
uz A wJa
BG
st
(, ) expρρρ== −
()
00
2
20
a
Fig. 2 Représentation de l'évolution du faisceau BGST le long de
l'axe de propagation.
Fig. 3 Masque en réflexion utilisé
dans le modeleur d'impul-
sions.
Fig. 4 Modeleur d'impulsions spatiotemporel permettant de générer
des faisceaux BGST à l'étranglement.
Fig. 5 Traces d'autocorrélation expérimentale et théorique d'un fais-
ceau BGST [1].
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GÉNÉRATION EXPÉRIMENTALE ... (DALLAIRE ET AL.)AA
LAPHYSIQUE AU CANADA / Vol. 64, No. 3 ( juillet. à septembre (été) 2008 ) C125
transformée de Fourier du masque dans les domaines spatial et
temporel de façon indépendante. Une impulsion incidente,
émise par un laser femtoseconde Ti:saphir à une longueur
d’onde centrale de 800 nm, est dispersée spatialement par un
réseau. Le masque réfléchissant sélectionne les fréquences
adéquates en fonction de la position xet le réseau en effectue
la transformée de Fourier temporelle. La propagation s’effectue
ensuite jusqu’à une lentille cylindrique (#2) qui effectue la
transformée de Fourier spatiale. Ainsi, au plan focal de cette
lentille, on obtient la distribution en intensité correspondant au
faisceau BGST recherché.
RÉSULTATS EXPÉRIMENTAUX
Afin de vérifier si les faisceaux BGST produits expérimentale-
ment correspondent au modèle théorique, on doit analyser la
structure spatiale et temporelle des impulsions générées, ce qui
ne peut se faire simultanément avec les diagnostics convention-
nels d’analyse d’impulsions laser. La structure temporelle,
présentée à la figure 5 (tirée de [1]), a été obtenue à l’aide d’un
autocorrélateur de construction maison. Il est important de
noter que les autocorrélateurs n’ont aucune résolution spatiale;
la trace obtenue est donc la convolution temporelle de l’impul-
sion intégrée sur toute son étendue spatiale. En tenant compte
de ces considérations expérimentales, les résultats obtenus cor-
respondent bien au modèle théorique.
L’analyse du profil spatial, présenté à la figure 6, permet égale-
ment de constater un excellent accord avec le modèle
théorique. En imageant spatialement le faisceau à l’aide d’une
caméra CCD (figure 6b), on obtient un profil présentant une
distribution en intensité s’apparentant à une fonction de Bessel
altérée, étant donné que l’intégration se fait sur tous les
anneaux spatiotemporels. Il en découle ainsi que les zéros de la
fonction de Bessel ne sont pas d’intensité nulle, tel qu’on peut
le voir sur les figures 6a et 6b.
De plus, on peut visualiser le faisceau BGST comme étant
constitué de trains d’impulsions dont la structure temporelle
varie selon la position x. Ainsi, on obtient une distribution
spectrale qui dépend de la position transversale, tel qu’illustré
à la fig. 7a. L’imagerie du spectre résolu spatialement présenté
à la fig. 7b, obtenue à l’aide d’un réseau et d’une caméra CCD,
concorde bien avec le modèle théorique.
CONCLUSION
L’approche présentée à la section 3, qui consiste à modeler une
impulsion femtoseconde dans les domaines spatial et temporel
de façon indépendante à l’aide d’un masque annulaire unique,
donne des résultats expérimentaux qui sont en bon accord avec
le modèle théorique, validant ainsi la notion de faisceau spa-
tiotemporel quasi-invariant. L’impact de certains paramètres,
tels l’épaisseur de l’anneau, l’étendue spectrale utilisée et la
longueur focale de la lentille #2, devra être investigué afin de
valider davantage le modèle théorique. De plus, la propagation
quasi-invariante reste à être testée en présence de dispersion
anomale.
REMERCIEMENTS
Ces recherches sont appuyées financièrement par le Conseil de
recherche en sciences naturelles et en génie du Canada
(CRSNG), le Fond québécois de la recherche sur la nature et
les technologies (FQRNT) et l’Institut canadien pour les inno-
vations en photonique (ICIP/CIPI).
Fig. 6 Profils spatiaux a) théorique et b) expérimental obtenus à
l'étranglement d'un faisceau BGST.
Fig. 7 Spectre résolu spatialement: a) modèle théorique et
b) données expérimentales.
RÉFÉRENCES
1. M. Dallaire, N. McCarthy, M. Piché, “Spatiotemporal Bessel beams”, Proc. SPIE, Vol. 6796, 67963O (2007)
2. M. Dallaire, M. Piché, and N. McCarthy, “Analysis and Generation of Spatiotemporal Bessel Beams,” Frontiers in Optics, OSA
Technical Digest, Optical Society of America, paper FWC2 (2007)
3. J. Durnin, “Exact solutions for nondiffracting beams. I. The scalar theory,” Journal of the Optical Society of America A (Optics and
Image Science) 4(4), 651-654 (1987)
4. J. Durnin, J.J. Miceli and J.H. Eberly, “Diffraction-free beams,” Physics Review Letters 58, 1499-1501 (1987)
July08-to-trigraphic-final.qxp 11/17/2008 1:47 PM Page 125
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