INSUFFISAENCE CARDIAQUE DU SUJET AGE Dr A.KHELIFA, juin 2009 I/ DEFINITION L’insuffisance cardiaque est définie comme l’incapacité du cœur à assurer dans des conditions normales, un débit sanguin nécessaire aux besoins métaboliques et fonctionnels des différents organes. II/ EPIDEMIOLOGIE : L’épidémiologie de l’insuffisance cardiaque est peu connue en France malgré son impact économique considérable sur le système de santé. L’incidence de l’insuffisance cardiaque augmente de façon exponentielle avec l’âge, dans l’étude de Framingham l’incidence annuelle est de 3/1000 dans la tranche d’âge 35-64 ans, et atteint 10/1000 chez ceux de 65-74 ans avec une véritable explosion dans la décennie 85-94 ans. L’étude Epicale concernant des patients stade III et IV de la NYHA effectuée en Lorraine a estimé l’incidence à 225 /Million d’habitants avec une prévalence de 500 000 cas avec le même constat d’élévation avec l’âge de (0,8% entre 50-59 ans à 9,1% entre 80-89 ans) La mortalité à un an varie de 5% chez les sujets asymptomatiques à 40% chez les patients symptomatiques. III/ Etiologies de l’insuffisance Cardiaque (IC) Maladie coronarienne (60-70% des patients avec IC)_______ HTA (risque d’IC augmenté de 3 fois)__________________ Diabète (risque d’IC augmenté de 2 à 5 fois)_____________ Cardiomyopathie dilatée non ischémique (20% des cas d’IC) Primitives Familiales éthyliques Carentielles Post-chimiothérapie Fibrose sous endocardique Amylose Myocardiopathies hypertrophiques Valvuloplasties Myocardites Troubles du rythme IV/ PHYSIOPATHOLOGIE A/ Vieillissement cardio-vasculaire normale : Pour aborder la pathologie du sujet âgé, il est indispensable de connaître son état normal, le vieillissement physiologique du système cardio-vasculaire s’accompagne de modifications structurales et fonctionnelles (tab ci-dessous) Modifications cardiovasculaires physiologiques chez le sujet âgé Hypertrophie ventriculaire gauche Diminution du remplissage ventriculaire gauche Augmentation de la contribution auriculaire au remplissage Augmentation de la rigidité artérielle Augmentation de l’impédance aortique Diminution de la sensibilité des baroréflexes Diminution de la réponse aux catécholamines Augmentation des résistances vasculaires périphériques B/ Mécanismes physiopathologiques d’adaptation cardiovasculaire 1) Activation neuro-humorale a) Activation du système sympathique : • augmentation de la contractilité myocardique (effet transitoire) • augmentation de la résistance systémique et de la poste charge • tachycardie avec risque ischémique accru b) Activation du système Rénine-Agiotensine-Aldostérone • augmentation de la résistance systémique due à l’effet vasoconstricteur de l’Angiotensine II • Rétention hydrosaline induite par l’Aldostérone c) Activation de nombreux autres systèmes régulateurs • hypersécrétion d’endothéline et des peptides natriurétiques (ANP et BNP), • activation de certaines cytokines de type « inflammatoire » tel le TNF (Tumor Necrosis Factor) 2) Mécanismes régis par La loi de FRANK-STARLING En présence d’une cardiopathie, contrairement a la situation physiologique, l’augmentation de la pré charge n’induit pas une augmentation de la contractilité myocardique. Le ventricule gauche défaillant utilise comme mécanisme compensateur l’hypertrophie et la dilatation. • L’hypertrophie compensatrice augmente certes le nombre d’unités contractiles disponibles, ce qui dans un premier temps semble contribuer au maintien de la fonction systolique du ventricule gauche. Cette hypertrophie trouve cependant vite ses limites : elle est coûteuse en oxygène, altère la fonction diastolique et gêne le remplissage du ventricule gauche. • La dilatation augmente le volume télé diastolique et permet donc dans un premier temps, à fraction d’éjection constante, de maintenir le volume d’éjection systolique. Là aussi, ce mécanisme compensateur à un coût : la dilatation de la cavité ventriculaire gauche augmente la tension pariétale (loi de Laplace) ce qui contribue à augmenter les besoins en oxygène et en énergie du myocarde, phénomène particulièrement délétère lorsque la cardiopathie est d’origine ischémique, éventualité de loin la plus fréquente, tout du moins dans les pays développés. V/ FACTEURS FAVORISANTS Pour faire une insuffisance cardiaque, en plus des effets du vieillissement sur le cœur, il faut une cardiopathie sous-jacente et un facteur déclenchant (1+2+3 de Bouchon), qui peut être peu de choses chez une personne âgée Un écart de régime, une absorption inhabituelle de sel (eau pétillante, médicaments effervescents, huîtres du réveillon, charcuterie ou aliments à base de poissons salés, repas au restaurant ou séjour chez des proches…) Les facteurs de décompensations à rechercher systématiquement : Ecart de régime ou de traitement Infection systémique, infection pulmonaire Poussée hypertensive Cause iatrogène [anti arythmiques, inotropes (-)] Anémie Troubles de rythme et/ou de conduction Embolie pulmonaire Abus d’alcool Insuffisance rénale VI/ CLASSIFICATIONS DE L’INSUFFISANCE CARDIAQUE A Classification fonctionnelle de la New York Heart Association (NYHA) Sur le plan clinique on distingue 4 stades de l’insuffisance cardiaque : Stade I Stade II Stade III Stade IV absence de symptômes symptômes survenant au cours d’une activité courante symptômes survenant aux petits efforts symptômes survenant au repos Diseases of the Heart and Blood Vessels. Nomenclature and criteria for Diagnosis. Boston, Little, Brown and Co ; 1964 , P114 Cette classification n’est pas utilisable et n’a que peu d’intérêt chez le sujet âgé compte tenu des atypies et de la mobilité réduite rencontrées au grand âge. B Une nouvelle classification a été récemment proposée par l’American college of Cardiology et l’American Heart Association.Elle est basée davantage sur l’évolution et la progression de l’affection : Stade A : présence de facteurs de risque de développer une insuffisance cardiaque sans atteinte structurelle ou fonctionnelle Stade B : présence d’anomalies structurelles ou fonctionnelles sans symptômes d’insuffisance cardiaque Stade C : présence de symptômes d’insuffisance cardiaque et d’anomalies cardiaques structurelles et fonctionnelles Stade D : insuffisance cardiaque terminale résistante au traitement conventionnel (Source : JACC, vol 38 n°72001 : 2101-13) C- Les différentes formes cliniques d’insuffisance cardiaque 1) Insuffisance cardiaque gauche, droite ou globale a) Pour l’insuffisance cardiaque gauche le signe fonctionnel est la dyspnée. Celle ci peut être déclenchée à l’effort, spontanée parfois nocturne, paroxystique. Les signes physiques sont : la tachycardie, un bruit de galop, un souffle d’insuffisance mitrale, des râles crépitants. b) Pour l’insuffisance cardiaque droite les signes comprennent le foie cardiaque (congestion hépatique, la turgescence des veines jugulaires l’œdème des membres inférieurs et l’oligurie). c) L’insuffisance cardiaque est dite globale devant l’association des signes gauche et droite. 2) Insuffisance cardiaque aiguë ou chronique a) Insuffisance cardiaque aiguë Les mécanismes d’adaptation n’ont pas le temps de se mettre en place (exemple : infarctus du myocarde, bloc auriculo-ventriculaire aigu, rupture de cordage mitral, embolie pulmonaire…). b) Insuffisance cardiaque chronique L’insuffisance cardiaque peut être longtemps bien tolérée grâce aux mécanismes d’adaptation. Des facteurs surajoutés peuvent déclencher une décompensation aiguë (infection, trouble du rythme, arrêt de traitement…). 3) Insuffisance cardiaque de bas débit ou de haut débit Une baisse du débit cardiaque au repos ou à l’effort caractérise l’insuffisance cardiaque apparaissant dans la plupart des formes de cardiopathies (congénitale, valvulaire, hypertensive, coronarienne, cardiomyopathie…).Un certain nombre d’affections sont responsables d’insuffisance cardiaque à haut débit : thyréotoxicose, fistule artério-veineuse, Béribéri, maladie de Paget, anémie…etc. 4) Insuffisance cardiaque systolique ou diastolique L’insuffisance cardiaque peut être due à une anomalie de la fonction systolique, conduisant à un défaut d’expulsion du sang (insuffisance cardiaque systolique) ou à une anomalie de la fonction diastolique, conduisant à un défaut de remplissage ventriculaire (insuffisance cardiaque diastolique).Sur le plan clinique, il peut s’avérer difficile de faire la différence entre un dysfonctionnement ventriculaire systolique et diastolique ; le tableau ci-dessous résume leurs principales caractéristiques. Caractéristiques cliniques de l’insuffisance cardiaque systolique et diastolique Insuffisance cardiaque Antécédents Examen clinique Rx thorax Systolique Diastolique IDM ancien ou aigue HTA ; OAP, ischémie myocardique aigue Cardiomégalie, Galop B3, Insuffisance Taille du cœur normal ou modérément mitrale chronique ou aortique agrandie, galop B4, souffle systolique d’éjection cardiomégalie Taille du cœur normal Fraction d’éjection < 40 % > 40 % et E/A < 0,60 (normale >0,75) Echocardiographie Cavités dilatées avec parois VG fines VG à parois épaisses hyper dynamiques Traitement Digitaliques, IEC, Diurétiques Diurétiques*, Inhibiteurs calciques, B bloquants ; IEC VII/ PARTICULARITES CLINIQUES DE L’INSUFFISANCE CARDIAQUE AU GRAND AGE L’insuffisance cardiaque est un syndrome clinique dû à une anomalie de la fonction ventriculaire dont le diagnostic est souvent facile à établir, si le contexte est évocateur. Mais plus délicat chez un patient présentant une forme fruste ou atypique tel est le cas du sujet âgé où les symptômes sont souvent intriqués du fait de l’existence de pathologies associées (respiratoire, anémie, déconditionnement physique…). A/ Signes fonctionnels 1) La dyspnée : La dyspnée d’effort est souvent difficilement interprétable chez les patients âgés dont la mobilité est souvent limitée (causes pulmonaire et cardiaque peuvent coexister). La dyspnée de repos peut être absente ; l’orthopnée reste un bon argument en faveur de l’origine cardiaque de la dyspnée. 2) Signes de bas débit : L’asthénie est un deuxième symptôme fréquemment retrouvé souvent en rapport avec un bas débit ou une hypotension artérielle. Certains signes généraux non spécifiques tels que la confusion mentale, les troubles du comportement, la désorientation temporo-spaciale, les troubles du sommeil, les chutes, la perte d’autonomie, peuvent parfois représenter la seule manifestation clinique de l’insuffisance cardiaque chez le sujet âgé. 3) Oedèmes périphériques : Ils sont fréquents chez les personnes âgés et non spécifiques. L’insuffisance cardiaque doit être évoquée au même titre que d’autres pathologies fréquentes (pathologie rénale, malnutrition, insuffisance ou compression veineuse, lymphoedème). B Signes physiques 1) Râles pulmonaires : Les râles pulmonaires inspiratoires (crépitants) sont souvent retrouvés en dehors de toutes pathologies cardiovasculaires. Il faut les rechercher après la toux du fait d’une hypoventilation alvéolaire fréquente. Une fibrose pulmonaire peut également être responsable de crépitants chez les sujets âgés. En outre l’œdème pulmonaire peut s’accompagner d’un bronchospasme aboutissant à une véritable dyspnée asthmatiforme pouvant orienter à tort vers une origine pulmonaire. L’absence de râle pulmonaire rend moins probable l’existence d’une insuffisance cardiaque gauche. 2) Signes d’insuffisance cardiaque droite : Les signes témoignant de l’élévation des pressions de remplissage droite sont : l’hépatomégalie plus ou moins douloureuse, le reflux hépato-jugulaire, les œdèmes des membres inférieurs et la turgescence des jugulaires. Ces signes peuvent simuler une pathologie abdominale. 3) La tachycardie : Elle manque souvent chez le sujet âgé du fait de la coexistence fréquente de troubles de la conduction ou d’une sensibilité particulière aux médicaments bradycardisants. 4) Les bruits du cœur: Le B4 n’a pas de valeur diagnostique chez la personne très âgée, le B3 est souvent difficile à retrouver ; l’auscultation est surtout utile pour rechercher une étiologie notamment un rétrécissement aortique calcifié suspecté devant l’existence d’un souffle systolique ancien, la survenue d’un souffle récent d’insuffisance mitrale fait suspecter une rupture de cordage. La présentation atypique de l’insuffisance cardiaque chez le sujet âgé doit faire rechercher systématiquement les co-morbidités qui modifient les signes cliniques notamment : * Le syndrome confusionnel est souvent une réponse clinique au stress fréquent chez le sujet âgé en présence de lésions cérébrales dégénératives ou vasculaires et/ou de prise de médicaments qui altèrent la vigilance, ainsi l’aspect psychiatrique risque d’orienter à tort le patient vers des services non cardiologiques. * Le syndrome dépressif est présent dans 24 à 42% des décompensations cardiaques chez le s âgé * Les syndromes démentiels dont la prévalence est également croissante, sont un facteur limitant de la prise en charge. Ils peuvent masquer le diagnostic d’insuffisance cardiaque via les difficultés de communication. A l’inverse l’insuffisance cardiaque peut être un facteur d’aggravation d’une démence préexistante et parfois même présenter la circonstance de découverte d’une démence jusque là non connue, certains auteurs ont analysé l’association pathologique insuffisance cardiaque et démence et ont trouvé une co-existence chez 50% des insuffisants cardiaques âgés. Il faut noter par ailleurs que les deux syndromes partagent les mêmes facteurs de risque en particulier l’hypertension artérielle. * Affection de l’appareil locomoteur et de l’équilibre : ces affections souvent intriquées sont responsables d’une inadaptation à l’effort. La perte d’autonomie peut masquer la dyspnée d’effort, à l’inverse, un effort apparemment peu important peut s’accompagner d’une dyspnée majeure. VIII/ PRISE EN CHARGE DE L’INSUFFISANCE CARDIAQUE CHEZ LE SUJET AGE • Le texte intégral des recommandations européennes a été publié dans l’archive des maladies du cœur et des vaisseaux, tome 97, n° 7/8 juillet- août 2004 et dans La revue de Gériatrie, tome 29, n° 08 Octobre de la même année. PLAIDOYER POUR UNE APPROCHE GERIATRIQUE GLOBALE La prise en charge de l’insuffisance cardiaque du sujet âgé doit s’accompagner d’une évaluation gérontologique standardisée ayant fait ses preuves en matière de réduction de la morbimortalité et du nombre d’hospitalisations, elle est indispensable pour apprécier les éléments médicaux et psychosociaux, elle doit permettre par l’utilisation de tests simples, un dépistage rapide des pathologies associées, une évaluation de la dépendance et de la situation sociale. Il faut souligner aussi l’importance du dépistage des éléments de fragilité exposant au risque de décompensation d’organes en cas de situation de stress par réduction des capacités de réserves fonctionnelles. Dans les situations complexes une évaluation gériatrique standardisée faite par une équipe spécialisée doit être proposée. L’élaboration des recommandations européennes représente un travail énorme dont on espère recueillir un double bénéfice, à savoir l’optimisation de l’homogénéisation de la prise en charge diagnostique et thérapeutique de l’insuffisance cardiaque en Europe. La pratique française est très facilement adaptable à ces recommandations, sous réserve de se référer également aux AMM des différents médicaments indiqués dans le traitement de cette maladie. 1) RECOMMANDATIONS DIAGNOSTIQUES Les Méthodes diagnostiques misent à la disposition du médecin sont nombreuses, les signes cliniques sont parfois difficiles à appréhender, souvent recueillis avec subjectivité, avec une faible valeur prédictive et une forte variabilité inter observateurs. Les examens recommandés pouvant contribuer au diagnostic sont : a)-L’Electrocardiogramme : non spécifique, seule la comparaison de tracés, si un tracé antérieur de référence existe, peut avoir une valeur contributive. b)-La radiographie thoracique : son analyse peut être difficile chez le sujet âgé, elle est rarement réalisée dans des conditions optimales (elle ne peut être interprétée sur un cliché pris au lit) et il existe la plupart du temps une pathologie broncho-pulmonaire ou une déformation thoracique associée. La cardiomégalie peut aider pour le diagnostic mais elle manque en cas d’insuffisance cardiaque diastolique c)-L’échocardiographie: elle doit être systématique mais elle reste sous utilisée dans la pratique courante surtout chez les personnes âgées, c’est l’examen de choix pour préciser l’existence, le type et l’étiologie de l’insuffisance cardiaque. La fraction du ventricule gauche (FEVG) est mesurée au mieux en bi-dimentionnel. On parle de dysfonction ventriculaire systolique quand la FEVG est < 40% dans ce cas le VG est souvent dilaté, lorsque la FEVG est > 40%, on parle de fonction systolique conservée, le ventricule gauche est ici généralement hypertrophié. L’échocardiographie aide aussi au diagnostic étiologique en permettant le diagnostic et la quantification d’un rétrécissement aortique ou d’une autre valvulopathie d)-La ventriculographie isotopique: sa faible disponibilité et son coût en font un examen de deuxième intention. e)-La coronarographie: cet examen est recommandé en l’absence de contres indications, en vue d’une éventuelle intervention de revascularisation coronaire. f)-Les examens biologiques : les examens suivants doivent être demandés de façon systématique : Une NFS, un ionogramme sanguin, créatininémie, glycémie, bilan hépatique, une C-réactive protéine, Albuminémie, TSH, troponine et un ECBU. Il s’agit de dosages indispensables à la recherche d’un facteur déclenchant ou de décompensation (anémie, dysthyroïdie notamment sous amiodarone, un diabète méconnu, un facteur ischémique, une infection Le dosage de la créatinine permet d’adapter les différents traitements, avec de la formule de Cockcroft. Clairance de la créatinine(ml/mn)=poids(kg).(140-âge).k/créatinémie(µmol/l) K=1,04 chez la femme et 1,23 chez l’homme En ce qui concerne le dosage plasmatique des peptides natriurétiques (BNP, pro- BNP…) aucune étude n’a pour l’instant évalué leurs valeurs diagnostiques dans des populations de plus de 75 ans. 2) RECOMMANDATIONS THÉRAPEUTIQUES Les objectifs définis dans les recommandations de la société européenne de cardiologie restent applicables au sujet âgé c’est l’amélioration de la qualité de vie des patients par : • la réduction des symptômes • la réduction du nombre d’hospitalisations • la réduction de la mortalité • le ralentissement de la progression de la maladie Chez la personne âgée l’amélioration des symptômes doit être l’objectif prioritaire pour restaurer la meilleure qualité de vie possible. Le rapport bénéfices/risques des associations thérapeutiques, doit être soigneusement pesé chez le sujet âgé sur une base individuelle et faire l’objet de réévaluations régulières et ce d’autant plus que le patient est fragile et /ou a des facteurs co-morbide associés. Fautes d’études spécifiquement consacrées l’insuffisance cardiaque du sujet âgé ou très âgé, la majorité des recommandations sont extrapolées à partir des preuves thérapeutiques obtenues sur des populations plus jeunes a) Traitement de l’insuffisance cardiaque systolique Depuis le traitement régime désodé et digitalo-diurétique, le traitement de l'insuffisance cardiaque a évolué avec les nouvelles recommandations européennes • Les inhibiteurs de l'enzyme de conversion sont devenus le médicament de première intension car ils améliorent les symptômes mais ont également démontré une diminution de la mortalité. Les posologies initiales sont faibles après contrôle de la kaliémie et ont augmenté progressivement. Selon les résultats de l'enquête européenne de pratiques, les IEC sont prescrits chez 60% des patients français mais malheureusement à des doses trop faibles. L'amélioration de l’état de santé des patients passe par des prescriptions d'IEC à forte dose et la baisse de la TA ne doit pas faire diminuer les doses si elle est asymptomatique. L'accent doit également être mis sur l'éducation du patient qui doit connaître les signes d'alerte et la gestion des médicaments. Chez les patients porteurs d'une dysfonction systolique ventriculaire gauche asymptomatique, ils réduisent la mortalité et empêchent la constitution d'une IC clinique. • Les antagonistes de l'angiotensine II ont montré dans les ELITE I et II versus captopril une action équivalente et synergique avec les diurétiques. Leur place demande encore à être précisée. Pour le moment, les AAII sont une alternative chez les patients développant des effets secondaires sous IEC. • Les diurétiques de l'anse en luttant contre la rétention hydrosodée restent indiqués mais ils nécessitent une surveillance biologique régulière. En cas de réponse insuffisante, il a été proposé d'associer des diurétiques thiazidiques si la fonction rénale le permet. • La spironoloactone à faible dose (25 à 50 mg) a montré un bénéfice sur la mortalité dans l'insuffisance cardiaque sévère (stades III et IV) en association avec un IEC (Etude RALES : baisse de 30% de la mortalité et des hospitalisations). La surveillance de la kaliémie et de la fonction rénale sera particulièrement nécessaire • Les digitaliques sont efficaces en cas de FA. Pour les patients en rythme sinusal, ils améliorent indiscutablement la tolérance à l'effort et diminuent le nombre d'hospitalisations pour OAP mais au prix d'un risque accru de troubles du rythme (et de mortalité..). • Les bêta-bloquants ont été longtemps contre-indiqués. Ils sont désormais le deuxième traitement (en association avec les IEC et/ou les diurétiques) et sont généralement cliniquement très bien tolérés s'ils sont introduits à doses très progressives et par palier de 15 jours. Ils augmentent la fraction d'éjection en réduisant les pressions dans le ventricule gauche. Le bénéfice sur la mortalité a été démontré pour le bisoprolol, le métoprolol et le carvédilol.Selon l'étude Mérit-hf portant sur des patients au stade II et III (cf. tab n°6), ils réduisent la mortalité globale de 34%, les morts subites de 41% et les décès liés à des complications de l'insuffisance cardiaque de 49%. • L'étude COPERNIC US devrait étendre l'indication au stade IV . Ces bénéfices ne se sont pas démontrés chez les sujets de plus de 70 ans. • Les nitrés améliorent la tolérance à l'effort et restent utiles quand la gêne persiste malgré un traitement optimum. • Les antiarythmiques augmentent la mortalité globale (classe IC) et ne paraissent plus indiqués à l'exception de l'amiodarone qui dans l'étude GESICA a montré son intérêt ( 300 mg/J) dans l'IC congestive sévère en diminuant les morts subites ( probablement par trouble du rythme ) et le nombre d'hospitalisations. • Faut-il associer plus systématiquement un antiagrégant plaquettaire type aspirine ? Le oui semble être la réponse. En effet, les épisodes de troubles du rythme même asymptomatique sont une complication (outre l'IDM) fréquente • Le régime sans sel reste important mais ne doit pas être trop strict (sauf stade IV) et ne pas induire une dénutrition en particulier chez la personne âgée. Il suffit généralement de très modérément saler lors de la cuisson et de fournir au patient une liste d'aliments riches en sel. Les épices, sels de régime peuvent être utilisés. b) Traitement de l’insuffisance cardiaque diastolique La dysfonction diastolique est particulièrement fréquente chez les sujets âgés. Environ 50 % des patients hospitalisés pour insuffisance cardiaque aiguë ont une fonction systolique conservée ; le traitement demeure cependant empirique, ces patients étant généralement exclus des grands essais contrôlés. Ainsi, les stratégies thérapeutiques employées dans l’insuffisance cardiaque diastolique sont basées sur des données concernant des petits groupes de patients, des expériences cliniques et des concepts physiopathologiques. C) CHIRURGIE CARDIAQUE ET CARDIOLOGIE INTERVENTIONNELLE L’âge, à lui seul, n’est pas une contre-indication à la chirurgie de pontage aorto-coronaire ou de remplacement valvulaire. D’une façon générale, l’examen préopératoire doit prendre en compte les grandes fonctions de l’organisme et les co-morbidités. Le recours à l’angioplastie coronaire est de plus en plus utilisé chez le patient âgé ; cette technique de revascularisation s’avère utile lorsqu’elle est possible .Toute indication chirurgicale, qu’il s’agisse d’une revascularisation coronaire ou d’une chirurgie valvulaire repose sur l’analyse du rapport bénéfice (amélioration de la survie et/ou de la gêne fonctionnelle)/risque opératoire. Ce dernier reste plus élevé chez le sujet âgé en dépit des progrès de l’anesthésie et du suivi postopératoire. D) LA RESYNCHRONISATION MULTISITE La resynchronisation dans l'insuffisance cardiaque n'est plus au stade de l'expérimentation. Elle a actuellement des indications bien validée et d'autres encore discutée. Les études les plus anciennes avaient déjà démontré un effet de la resynchronisation sur l'amélioration des symptômes et de la qualité de vie, sur l'allongement de la distance de marche (test de marche de 6 mn), sur l'amélioration de la fraction d'éjection, de l'insuffisance mitrale, et de la VO2 max" Les études ont démontré un intérêt pour les patients ayant une fraction d'éjection inférieure ou égale à 35%. De même, concernant les diamètres ventriculaires qui ne sont pas précisés dans les recommandations européennes, il faut rappeler que les patients inclus dans les études randomisées avaient des diamètres télé diastoliques ventriculaires gauches augmentés IX/ PRÉVENTION DE L’INSUFFISANCE CARDIAQUE La prévention de l’IC repose sur la prise en charge précoce et efficace des facteurs étiologiques. Cela s’applique particulièrement à l’hypertension artérielle et à l’ischémie myocardique.