CABINET Forum Med Suisse No42 17 octobre 2001 1061
Tableaux cliniques particuliers
Occlusion de l’artère centrale
En cas d’occlusion de l’artère centrale de la ré-
tine, la fibrinolyse supersélective par cathéter
de l’artère ophtalmique effectuée par les oph-
talmologues en collaboration avec les inter-
nistes doit toujours être considérée [1–3]; si
bien que le non-ophtalmologue lors d’anam-
nèse évocatrice est en devoir d’adresser le pa-
tient, après discussion avec les spécialistes,
dans les plus brefs délais dans une clinique
ophtalmologique profitant de cette modalité
thérapeutique, ce qui est actuellement le cas
pour les cliniques ophtalmiques de Berne, Ge-
nève et Zurich.
Si les conditions internistiques le permettent*
et si le patient informé est d’accord avec ce trai-
tement*, une fibrinolyse peut être effectuée
dans les 12 heures après apparition des symp-
tômes d’une occlusion avérée de l’artère cen-
trale. Les critères d’exclusion comprennent: la
suspicion d’une étiologie vasculitique (artérite
temporale, Wegener, etc.); un mauvais état gé-
néral, un état post infarctus du myocarde, une
insuffisance cardiaque, une endocardite lente,
une fibrillation auriculaire, un anévrysme de la
paroi cardiaque, une diathèse hémorragique,
une cirrhose hépatique, une hypertension non-
contrôlée et une anticoagulation.
Il n’est pas adéquat que le non-ophtalmologue
essaie de corroborer le diagnostic au moyen
d’un ophtalmoscope. Il se déroule quatre à six
heures avant l’apparition d’un œdème, d’une
pâleur rétinienne et d’une tache maculaire cen-
trale rouge cerise, ce qui représente trop de
temps perdu. Le défaut pupillaire afférentiel
démontre déjà auparavant la présence d’un
trouble de la conduction sévère.
Jusqu’à ce que le patient soit admis à la clinique
ophtalmologique, les modifications classiques
de la rétine sont généralement déjà survenues.
Les emboles peuvent être visualisés au moyen
de l’ophtalmoscope. Ils se répartissent rapide-
ment à la périphérie et constituent le substrat
de l’amaurose fugace, équivalent d’AIT.
L’occlusion de l’artère centrale conduit dans
une majorité des cas à une perte d’acuité vi-
suelle et une vision nettement inférieure à 0,1
[3]. Il existe cependant des évolutions sponta-
nément favorables, ce qui nécessiterait de pro-
céder à une étude randomisée contrôlée afin
d’examiner l’efficacité de la fibrinolyse cathé-
térisée. Une telle étude multicentrique à la-
quelle des douzaines de cliniques de l’Alle-
magne, d’Autriche et de Suisse vont participer
est actuellement concrètement en voie de pla-
nification. Des séries rétrospectives indiquent
que la fibrinolyse donne de meilleurs résultats
que les traitements prodigués jusqu’alors, p.ex.
baisse de la pression intraoculaire avec ouver-
ture de la chambre antérieure, puis acétazola-
mide (Diamox) et traitement par mélange O2-
CO2[1–3].
Les causes d’occlusion de l’artère centrale et de
ses branches sont presque toujours emboliques
(fig. 1a). La première source emboligène est
l’artère carotide suivie par le cœur. En se déci-
dant pour une fibrinolyse par cathéter on peut
anticiper l’angiographie carotidienne néces-
saire. Par ailleurs, le patient qui a présenté une
occlusion de l’artère centrale nécessite en tous
cas un suivi internistique cardiologique.
Neuropathie optique
ischémique antérieure
L’évolution, l’âge et l’image ophtalmoscopique
permettent de différencier la neuropathie op-
tique ischémique antérieure d’une occlusion de
l’artère centrale, d’une papille de stase et de la
papillite en règle générale. Certes, la neuropa-
thie optique ischémique antérieure athérosclé-
reuse hypertensive n’est actuellement pas trai-
table, cependant comme dans environ 1⁄3des
cas la neuropathie optique ischémique anté-
rieure est provoquée par une artérite à cellules
géantes, rarement par une panartérite noueuse
ou plus rarement encore par une syphilis ou
une vasculite d’un autre type, une évaluation en
urgence et, en cas d’artérite à cellules géantes
de Horton ou d’un panartérite, la prescription
de corticoïdes à haute dose est impérative
(schéma thérapeutique, voir l’encadré). Cepen-
dant, une amélioration de l’acuité visuelle de
l’œil atteint semble dans ce cas peu probable;
en revanche, il s’agit bien davantage d’éviter
que l’autre oeil ne soit atteint lui aussi [4]. Les
symptômes généraux permettent de poser le
diagnostic: fatigue, céphalées, douleurs en se
peignant ou à la mastication, artères tempo-
rales douloureuses à la palpation, antécédents
de polymyalgia rheumatica, aidés par les exa-
mens de laboratoire: élévation de la vitesse de
sédimentation, élévation de la CRP et fréquem-
ment thrombocytose.
La vérification histopathologique par biopsie
artérielle (après examen Doppler afin de ne pas
ligaturer une éventuelle dernière anastomose
entre l’artère carotide externe et le polygone de
Willis) devrait également toujours avoir lieu [5].
Lors de suspicion clinique, la corticothérapie
devrait déjà être instaurée avant la biopsie.
Traitement de la neuropathie optique
antérieure ischémique en cas d’artérite à
cellules géantes
4 250 mg de méthylprednisolone i.v. en
courte perfusion de 24 h pendant 1 à 3 jours;
puis prednisolone p.o. 1,5–2 mg/kg de poids
corporel pendant au moins 2 semaines.
Réduction lente de 10% de la dose toutes les
1–2 semaines en fonction de l’évolution cli-
nique (symptômes généraux, VS);
* Les directives internes et fiches
explicatives concernant
le traitement de ces pathologies
peuvent être obtenues auprès
de Mme PD Dr K.L. Landau.