Analgésie postopératoire 227
2. Les neurones nociceptifs spécifiques ne répondant qu’à des stimulations mécaniques
ou thermiques intenses. Leur rôle n’est encore qu’imparfaitement connu.
Malgré de très nombreux travaux, il est encore impossible aujourd’hui d’affirmer
quels sont les neurotransmetteurs entre les fibres afférentes périphériques et les neurones
nociceptifs spinaux [2, 4, 5]. Toutefois, parmi la vingtaine de substances libérées au niveau
de cette première synapse, les acides aminés excitateurs et les peptides exercent un rôle
prédominant. L’anatomie, l’électrophysiologie et l’immunohistochimie confirment
l’importance du L-glutamate qui agit sur de très nombreux types de récepteurs aux acides
aminés excitateurs dont ceux au N-méthyl-D-asparte ou NMDA. Ces récepteurs constituent
aujourd’hui un axe de recherche prioritaire et une cible thérapeutique d’avenir dans le
traitement antalgique. De très nombreux peptides, dont la substance P (SP) et le CGRP
(Calcitonin Gene-Related Peptide), sont synthétisés dans les fibres afférentes périphériques
et sont transportés principalement vers la périphérie et accessoirement vers la moelle où
ils peuvent aussi être libérés. La substance P apparaît aujourd’hui plus comme un
neuromodulateur que comme LE neurotransmetteur de la première synapse.
La responsabilité exacte de la SP et du CGRP n’est pas aujourd’hui clairement définie.
La colocalisation de plusieurs peptides au sein d’une même fibre afférente périphérique
complique les données : il est probable que la libération de tel ou tel peptide dépende des
caractéristiques de la stimulation périphérique. Cholécystokinine (CCK), neuropeptide
FF, opioïdes endogènes (dynorphine, enképhalines), somatostatine, neurokinine, peptide
intestinal vasoactif, arginine-vasopressine, ocytocine, peptide libérant de la gastrine,
galanine, angiotensine II, hormone corticotrope (ACTH), sont autant de substances, qui,
outre leurs effets propres, modulent les effets des neurotransmetteurs. Ils agissent sur des
récepteurs qui représentent une myriade de cibles thérapeutiques potentielles...
Les techniques récentes mettant en évidence l’activité des gènes à expression immédiate
(synthèse de la protéine FOS et études en c-Fos) permettent dans certaines conditions
expérimentales de visualiser de larges populations de neurones impliquées dans la
nociception. Ces études sont plus performantes à l’étage spinal que pour les neurones
supraspinaux. Elles permettent, en association à d’autres techniques, de quantifier l’effet
antinociceptif spinal de nombreuses molécules.
Ces dernières années, de nombreux travaux ont été consacrés aux modifications
histologiques, biochimiques et fonctionnelles induites par stimulation nociceptive (aiguë
ou chronique). Il n’est pas encore aisé d’en proposer une synthèse, en partie du fait de
conditions expérimentales trop variées (stimulation aiguë ou chronique, animaux éveillés
ou anesthésiés, spinaux ou entiers...).
Toutefois, certaines hypothèses méritent aujourd’hui d’être rapportées. Par analogie
avec le phénomène de potentiation à long terme décrit dans l’hippocampe, il est probable
que les acides aminés excitateurs jouent un rôle majeur dans les phénomènes de
sensibilisation centrale [5, 7, 8, 9]. Dans des conditions de stimulations «normales», la
stimulation nociceptive induit une libération d’acide aminé excitateur à partir des fibres
afférentes primaires dans la corne dorsale de la moelle ; ce neuromédiateur active des
récepteurs non NMDA (type AMPA par exemple).
Mais, dans certaines conditions comme une stimulation très intense ou répétée, l’ion
magnésium qui bloque le canal calcique couplé au récepteur NMDA est déplacé rendant
actif ce récepteur. L’augmentation du calcium intracellulaire modifient durablement
l’excitabilité du neurone. D’autres mécanismes comme la formation de NO ou la synthèse