INTRODUCTION
Les corps libres intrapéritonéaux sont extrêmement
rares. Leur découverte est presque toujours fortuite. Ils
sont le résultat d’une nécrose graisseuse bien organisée
d’une frange épiploïque ayant subit une torsion
spontanée [1, 2, 3]. Nous rapportons une observation
inhabituelle chez un patient dont la symptomatologie
était orientée vers des troubles urinaires d’origine
prostatique.
CAS CLINIQUE
Monsieur RA, âgé de 68 ans, ne présentant pas
d’antécédents pathologiques particuliers, avait consulté
pour des troubles urinaires minimes à type de pollakiurie
et de dysurie. L’examen physique était strictement
normal. Le toucher rectal montrait une hypertrophie
bénigne de la prostate. L’examen cytobactériologique
des urines était normal ainsi que le taux de l’antigène
spécifique de la prostate. L’échographie vésico-
prostatique révélait un résidu post-mictionnel de 50
cc, un volume de la prostate estimé à 43 cc et une
masse latérorectale droite surtout visible sur
l’échographie endorectale. Cette masse est très
hypoéchogène à centre échogène de 3,5 cm de diamètre
(fig. 1). Le scanner abdominal a montré, sur les coupes
en contraste spontané, une masse arrondie bien limitée
latéro-rectale droite, de structure tissulaire avec un
centre hypodense dont la densité mesurée à -40 unités
Hounsfield, témoin de sa nature graisseuse, il n’y avait
pas de calcifications (fig. 2). Après injection du produit
de contraste, un rehaussement homogène est retrouvé,
il n’y avait pas de signes d’invasion locorégionale, ni
de lésion viscérale ou d’adénopathie intra-abdominale.
Le rapport imprécis de la masse avec la vésicule
séminale droite avait motivé la réalisation d’une IRM
abdominale, qui avait confirmé sur les coupes coronales
l’intégrité de la vésicule séminale droite, et la nature
graisseuse du centre de la masse sur la séquence en
annulation du signal de la graisse (fig. 3). L’aspect en
hyposignal marqué en séquence T2 de la masse est en
faveur d’une nature fibreuse. Devant cet aspect, une
exploration chirurgicale coelioscopique était proposée.
Celle-ci révélait la présence d’une masse blanchâtre
dure mobile sans aucune adhérence avec le péritoine
ou aux organes de voisinage (fig. 4). Une extraction de
-31-
CORPS LIBRE INTRAPERITONEAL :
TRAITEMENT LAPAROSCOPIQUE
(A PROPOS D’UNE OBSERVATION RARE)
M. ALAMI, E. KASMAOUI, M. LEZREK, D. BASSOU, R. ZAINI, A. BEDDOUCH
Service d’Urologie de l’Hôpital Militaire Moulay Ismail, Meknès, Maroc
RESUME
Le corps libre intrapéritonéal est un incidentalome
extrêmement rare. Il s’agit d’une nécrose graisseuse
résultant de la torsion d’une frange épiploïque. Leur
découverte est fortuite, à la suite d’un bilan radiologique.
Nous rapportons une observation d’un patient âgé de
68 ans, présentant une symptomatologie dysuriante.
L’échographie endorectale avait montré l’existence
d’une masse latérorectale droite. Le complément
scanographique et IRM n’avaient pas posé le diagnostic
de certitude. L’exploration abdominale coelioscopique
avait permis l’extraction facile de la masse. L’examen
histologique était en faveur d’une nécrose graisseuse
avec fibrose réactionnelle autour. L’évolution
postoperative était favorable.
Mots clés : laparoscopie ; corps libre ; nécrose graisseuse
Correspondance : Dr. M. ALAMI, Service d’Urologie de
l’Hôpital Militaire Moulay Ismail, Meknès, Maroc. e-mail
ABSTRACT
INTRAPERITONEAL FREE-FLOATING BODY :
MANAGEMENT BAY LAPAROSCOPY. A RARE CASE
Intraperitoneal free-floating body are an extremely rare
incidentaloma. This abnormality is composed of
organized fat necrosis, resulting from torsion of appendix
epiploica. Their discovery is casual, following a
radiological examination. We report the case of 68-
year-old man presented with dysuria. Endorectal
ultrasonography showed a right laterorectal mass.
Accurately diagnosis was not made although on
computed tomography and magnetic resonance
imaging. Removal laparoscopic exploration of the mass
was performed easily. Histological examination was in
favour of fat necrosis with laminated fibrous.
Postoperative follow-up was favourable.
Key words: laparoscopy ; free-floating body ; fat necrosis
FAIT
CLINIQUE
J Maroc Urol 2007 ; 5 : 31-33
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la masse dans un sac de façon intact après élargissement
de l’incision du trocart a été réalisée (fig. 5). L’examen
anatomopathologique montrait une formation de 4,5
cm sur 4 cm de grand axe dont l’examen microscopique
était en faveur d’un foyer de stéato-nécrose avec fibrose
réactionnelle autour sans processus tumoral. L’évolution
était favorable. Le patient était amélioré sur le plan
urinaire par un alpha-bloquant.
Corps libre intrapéritonéal : traitement laparoscopique M. ALAMI et coll.
Fig. 1. Echographie endo-rectale : masse latéro-rectale droite
de 3,5 cm de diamètre, très hypoéchogène à centre échogène.
Fig. 5. Corps libre mesurant 4,5 cm de diamètre.
Fig. 3. IRM pelvienne, coupe coronale séquence T2 : masse
en hyposignal intense, centre graisseux en hypersignal,
intégrité de la vésicule séminale (flèche).
Fig. 2. TDM pelvienne, coupe en contraste spontané : masse
tissulaire latéro-rectale à centre graisseux. Rapport étroit
avec la vésicule séminale droite.
a
b
Fig. 4. Vue coelioscopique montrant la prise du corps
libre par une pince.
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DISCUSSION
Les corps libres intrapéritonéaux sont des incidentalomes
extrêmement rares. D’après les données de base
medline, le premier cas était rapporté en novembre
1956. Jusqu’au 2004, uniquement 14 cas sont publiés
dans le monde. Notre observation représente le 15ème
cas. Ces corps libres sont souvent le résultat d’une
torsion d’une frange épiploïque du côlon et rarement
du grand épiploon [1]. Cette frange épiploïque de
structure graisseuse recouverte par le péritoine subit
des troubles de la circulation sanguine conduisant à
son infarcissement. Sur le plan histologique, elle se
traduit par une nécrose graisseuse aseptique qui
s’entoure avec le temps par un tissu fibreux voire des
calcifications. La frange épiploïque peut rester appendu
ou se détacher et se perdre dans le péritoine [4].
Souvent, ces corps libres intrapéritonéaux sont de petite
taille et sont retrouvés au cours des laparotomies. Il est
exceptionnel que ces corps deviennent de taille
importante [5]. Dans la plupart des cas, ces
incidentalomes sont asymptomatiques et sont découverts
fortuitement, à la faveur d’un bilan pour une autre
pathologie. Chez notre patient, les troubles mictionnels
d’origine prostatique étaient les signes qui ont conduit
au bilan radiologique et à la découverte de la masse.
Rubenstein [5] rapporte une observation exceptionnelle
où le corps libre calcifié et mesurant 4 cm était
responsable de signes vésicaux irritatives par
compression extrinsèque. L’aspect de ces corps au
scanner et à l’IRM apparaît sous forme de masse bien
circonscrite avec dans leur partie centrale une
calcification [2, 5].Chez notre patient, il n’y avait pas
de calcification à l’intérieur de la masse et le diagnostic
différentiel pouvait se faire avec : le textilome ; celui-
ci était écarté devant l’absence d’antécédent chirurgical;
le tératome bien qu’il survient surtout chez la femme;
le myélolipome qui est souvent de siège rétropéritonéal
présacré ; le liposarcome qui se présente sous forme
de masse infiltrante volumineuse et hétérogène ; les
adénopathies et les métastases qui sont souvent multiples
et n’ont pas de composante graisseuse centrale.
L’exploration chirurgicale coelioscopique était
impérative. Celle-ci a permis chez notre patient
l’extraction de la masse avec le minimum de gestes
invasifs et avait permis d’offrir le matériel pour le
diagnostic histologique.
CONCLUSION
Le corps flottant intrapéritonéal est un diagnostic
histologique. Les diagnostics différentiels sont nombreux
et difficile à éliminer par l’imagerie.L’exploration
chirurgicale et notamment cœlioscopique est nécessaire,
permettant le geste thérapeutique, et offrant le matériel
pour le diagnostic histologique.
REFERENCES
1. Ghahremani GG, White EM, Hoff FL, Gore RM,
Miller JW, Christ ML. Appendices epiploicae of the
colon : radiologic and pathologic features.
Radiographics 1992 ; 12 : 59-77.
2. Takada A, Moriya Y, Muramatsu Y, Sagae T. A case
of giant peritoneal loose bodies mimicking calcified
leiomyoma originating from the rectum. Jpn J Clin
Oncol 1998 ; 28 : 441-2.
3. Ramdial PK, Singh B. Membranous fat necrosis in
appendices epiploicae : a clinicopathological study.
Arch Virchows 1998 ; 432 : 223-8.
4. Murat FJ, Gettman MT. Free-floating organized fat
necrosis : rare presentation of pelvic mass managed
with laparoscopic techniques. Urology 2004 ; 63:
176-7.
5. Rubenstein JN, Hairston JC, Eggener SE, Gonzalez
CM. Irritative voiding symptoms and microscopic
hematuria caused by intraperitoneal calcified fat
necrosis. Urology 2002 ; 59 : 444.
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