SUR QUELQUES DISTIQUES BUNA* (TIMOR CENTRAL). 339
longue cérémonie, les prémices de la récolte aux ancêtres et aux génies
du lieu. Des épis frais sont attachés au grand poteau male de la
maison, pour remplacer ceux de
1'année
précédente. Enfin, les prémices
sont partagées entre les vivants: tous les présents, hötes et alliés,
recjoivent une part correspondant a leur dignité ou a leur rang. Puis
dans la nuit, s'éclairant avec des torches, gargons et filles, jeunes et
vieux, se rassemblent sur la place encore humide de la pluie de la
journée, oü ils danseront des rondes en chantant, jusqu'a
1'aurore.
Désormais, avec Ie retour progressif de la saison sèche, la vie va
changer de rythme: une succession de fêtes et de travaux joyeux va
remplacer
1'isolement
relatif de chacun durant les pluies.
Une fois achevée la récolte du maïs, et les épis serres dans les
greniers de chaque lignage, il faut préparer la récolte du padi, qui va
se dérouler, maison après maison, depuis Ie début d'avril jusqu'a la
mi-mai. Bien que 1'IPI-LETE ne soit pas une fête publique, c'est un point
culminant, la fête la plus courue de
1'année.
Elle est marquée par la
construction du BITIRAI, aire a battre protégee par un grand toit, édifié
sur Ie champ même; la récolte donne lieu a un rituel complexe de
fermeture et de protection contre les
PAN
MUK
GOMO,
les mauvais génies,
rituel auquel les ancêtres sont associés. Pendant la journée, les femmes
coupent les tiges de padi dans Ie champ, les hommes de la maison
piétinent les épis sur l'aire a battre en chantant d'anciens distiques. La
nuit, Ie travail ne cesse pas: mais
1'arrivée,
au soir, d'une foule de
jeunes gens et de jeunes filles attirés par la force magique du SUBUL
fixé au toit du BITIRAI, transfigure Ie travail en fête: on se met a
danser sur l'aire oü des mains attentives renouvellent sans cesse les
tiges de padi a égrener. Au milieu de la nuit, la maison qui regoit donne
un repas, groupe après groupe, a tous les hötes genereusement abreuves.
L'enthousiasme est tel qu'on oublie la fatigue, on danse, on chante, de
toutes ses forces. Des couples sortent discrètement, on fleurte sur la
paille, on bavarde autour du BITIRAI, pour reprendre haleine....
La récolte rentree, les champs tondus et Ie soleil bien installé, il faut
désacraliser la nouvelle récolte avant de commencer a la consommer;
c'est alors, au jour fixé par les anciens, la fête de HOHON-A, qui consiste,
comme Ie PA'OL SAU, en offrandes de prémices aux ames des ancêtres
et aux génies, suivies d'une nuit blanche oü 1'on danse et chante des
rondes puissantes ou endiablées.
Les lignages peuvent désormais disposer librement de la récolte:
certains vont alors prendre date pour la fête qu'ils donneront, pendant
la saison, a
1'occasion
de 1'achèvement d'une nouvelle maison, ou pour