Le projet territorial, axe du redéploiement de l`action sociale des CAF

Sociologues
à
l'
AURES(Recherche
et
études en sciences
sociales).
••
Sociologue
au
GERS
(Groupe
d'étude, de recher-
che sociale).
Le
projet territorial, axe du redéploiement
de l'action sociale des CAF
Marc Depriester
*,
Hervé Léon * et loïc Rousselot
**
L'évolution
de
leur environnement institutionnel
met
les caisses d'Allocations
familiales en demeure d'afficher une politique d'action sociale, fondée
sur
une
philosophie du social qui réponde à
la
fois
aux
enjeux de protection sociale
et
de
solidarité,
et
qui affirme
en
même temps une continuité avec leur
tradition
historique. La référence familiale
des
CAF permet d'établir une connexion étroite
entre lien familial
et
lien social, et peut asseoir une légitimité politique
et
technique à développer des initiatives,
de
l'expérimentation
et
de l'innovation,
et
de
nouvelles formes d'intervention sociale inscrites dans
le
local, en coopération
plus étroite avec
le
secteur associatif.
1 près toute la longue période
de
"diges-
tion"
institutionnelle
des
lois
de
déœntralisation,lesCAFseretrouvent
à
un
tournant
de
leur
histoire : tandis
que
la
budgétisation
des
prestations et l'apparition
d'un
déficit
de
la branche famille
du
système
de
la sécurité sociale accentuent l'intégration
des
CAF
dans
l'appareil d'Etat,
la
montée en
puissance
des
départements
les oblige à
redéfinir
leur
place
et
leur
rôle
dans
le
partenariat local.
Des deux côtés, national
et
local, les marges de
manoeuvre semblent se restreindre, particu-
lièrement
dans
le
domaine
de
l'action sociale
les CAF
ont
toujours
eu
à conquérir leur
légitimité.
En effet,
il
n'est peut-être pas inutile
de
rappe-
ler qu'elles
ont
toujours
eu
la particularité
d'intervenir prioritairement
au
titre
de
la pro-
tection sociale
par
le biais des prestations tout
en
étant
présentes
au
titre
de
la solidarité (ou
assistance)
par
le biais
de
l'action sociale.
Le
volet <<prestations» inscrit
la
CAF
dans
le
système
de
sécurité sociale
et
lui confère sa
légitimité. Celle
de
l'action sociale,
même
si
elle s'inscrit
dans
les textes officiels (essen-
tiellement internes d'ailleurs),
est
toujours
à
conquérir, à justifier
dans
la
mesure
elle
est
beaucoup
plus
liée
aux
contextes socio-
politiques nationaux
et
locaux. Elle
ne
se
situe
pas
du
côté
de
la loi
mais
plutôt
du
côté
d'une
capacité à jouer
dans
ses interstices,
tout
autant
pour
faire évoluer l'action légale
que
pour
en
combler les
manques
; elle y
rencontre
le
secteur
associatif qui
peut
être à la fois
par-
tenaire, relais
et
sujet
de
son intervention.
cc
Neutralité, spécificité,
souplesse)) :
les atouts des CAF
Cette capacité est
cependant
relativement res-
treinte
par
la définition
de
son
public,
les
familles allocataires,
même
si le
champ
d'ap-
plication
de
la «politique familiale», fruit
d'un
compromis
entre
deux
principaux objectifs, la
redistribution sociale
et
la compensation
des
charges
de
famille,
peut
apparaître
plus
large.
Aussi, malgré leurs
atouts
résumés
par
le
23
RECHERCHES
ET
PREVISIONS
n•
39
1995
24
directeur
de
la
CAF
étudiée,
celle
de
La
Rochelle
(1)
en
trois
termes
«neutralité,
spécificité, souplesse»(2), les CAF
n'ont
pas
toujours
pu
maintenir
ou
retrouver
une
place
et
un
rôle
adaptés
aux
évolutions
du
paysage
social.
La
montée
des
situations
d'exclusion qui
ont
pu
être analysées
comme
génératrices
d'une
véritable société
duale,
constitue l'événement
marquant
de
la fin
des
années
quatre-vingts.
Générés
par
la
montée
du
chômage, ancrés
sur
des
territoires
de
plus
en
pl~scirconscrits,
symbolisés
par
la nouvelle
pauvreté
et
par
la
révolte
des
jeunes
de
banlieues, ces phénomè-
nes participent à
une
remise
en
cause fonda-
mentale
de
la place
du
social. Celui-ci
n'est
plus
situé
en
antagonisme
avec l'économique
mais
en
complémentarité
et
«l'opportunité
des
politiques sociales transversales se com-
prend
alors
par
le souci
de
réduire
cette dis-
tance
entre
le social
et
l'économique
comme
par
celui
de
dégager
entre
eux
les termes
d'une
complémentarité obligée.»(3).
Les politiques
de
lutte
contre l'exclusion se
sont ainsi focalisées
autour
des
enjeux
de
l'urbanisme,
de
l'emploi
et
de
la formation,
du
logement,
autant
de
champs
non
directement
couverts
par
la politique sociale
et
auxquels
celle-ci a
été
amenée
à
s'intégrer
dans
le
cadre
de
dispositifs
partenariaux
spécifiques (déve-
loppement
social
urbain
au
niveau commu-
nal,dispositifduRMietplansdépartementaux
pour
le
logement
des
défavorisés (POLO)
au
niveau
départemental)
qui
ont
réuni l' ensem-
ble
des
acteurs
concernés
dont
les représen-
tants
des
mouvements
associatifs.
Ces
mouvements
de
recomposition interro-
gent
directement
la place
des
CAF
dans
la
mesure
leurs
domaines
de
compétence,
situés
dans
le
cadre
de
la politique familiale
nationale, les
ont
laissées
en
marge
des
nou-
veaux enjeux
des
politiques sociales. Même
lorsqu'elles
ont
pu
y
retrouver
un
rôle, celui
ci
a
rarement
été
moteur.
C'est
ainsi
que
les
principaux dispositifs
que
sont le
RMI
et
le
POLO les
ont
plus
amenés
à se positionner
en
tant
que
gestionnaires
que
partenaires à
part
entière.
Aussi, la
modernisation
de
leur
organisation
interne est-elle
souvent
devenue
prioritaire,
RECHERCHES
ET
PREVISIONS
n•
39
1995
laissant
peu
de
place à la redéfinition
de
leurs
missions
dans
le
champ
du
social.
Par
ailleurs,
la «départementalisation» progressive
de
l'ac-
tion sociale a
amené
les conseils
généraux
à
remettre
en
cause
les conventions
régissant
l'organisation
de
la polyvalence
de
secteur,
dans
une
volonté
de
maîtrise
de
l'organisa-
tion
et
des
coûts
d'un
travail social
longtemps
considéré
comme
un
corps
étranger
dans
la
collectivité locale.
Les CAF,
souvent
présentes, parfois
motrices
du
partenariat
en
matière
de
travail social
(comme cela
est
le cas
en
Charente-Maritime),
ont
vu
remettre
en
cause
de
façon
parfois
brutale,
leur
présence
dans
la polyvalence,
principal
domaine
qui
lessituaitdans
le
champ
de
la solidarité
et
leur
donnait
un
ancrage
territorial légitime.
Face à ces évolutions, les CAF
ont
eu
les
plus
grandes
difficultés à définir, à
quelques
ex-
ceptions près,
une
véritable politique
d'action
socialequileurpermettedesortirdeladépen-
dance
dans
laquelle l'absence
d'orientation
clairement
affichée
et
l'importance
des
réorganisations institutionnelles
des
autres
acteurs les
ont
maintenues.
La
nouvelle donne : précarité,
Insertion
et
territorialisation
On assiste
dans
de
nombreux
départements
à
un
jeu
de
délimitation
de
frontières
d'inter-
vention, à
un
surinvestissement
des
enjeux
propres
aux institutions
dans
le
champ
de
l'action sociale alors
même
que
les
phénomè-
nes d'exclusion sociale
et
leurs
inscriptions
spatiales
n'ont
jamais été
aussi
aiguës.
Cette
situation
paradoxale
traduit
en
grande
partie
l'incapacité actuelle
dans
laquelle
se
trouve
le
travail social «traditionnel» et,
peut-être
plus
généralement, l'action sociale, à
répondre
aux
nouveaux
enjeux
que
circonscrit la
problé-
matique
du
lien social, indissociable
de
celle
du
territoire.
Face
aux
phénomènes
de
précarité,
de
«désaffiliation»(4)
pour
reprendre
le
terme
utilisé
parR.
Castel, les
réponses
ne
peuvent
se
situer
uniquement
en
terme
de
plus
d'allo-
cations,
plus
de
logements,
plus
de
forma-
tions
et
même plus d'emplois (surtout
si
on y
ajoute «quels qu'ils soient»).
La
déstructuration
de
certains tissus sociaux
oblige à écouter
une
autre
demande
sociale, à
étudierlesmoyensdelaprendreencompteau
niveau le plus fin
des
politiques institu-
tionnelles.
Il
est significatif
que
cette problématique
émerge
peut-être on l'attendait le moins,
c'est-à-dire
dans
le dispositif
du
RMI.
En effet, à l'intérieur
d'un
système localisé
mais non territorial, l'examen des situations
individuelles tendait à gommer les modalités
d'inscription territoriale des personnes, des
familles,
des
groupes
dans
un
processus
d'émiettement des interventions sociales.
Si
la
vague
de
fond
du
RMI
a essentiellement
conduit
à focaliser les interventionsautourde
l'aspect individuel des problèmes,
la
plupart
des
analyses convergent
pour
souligner ou
remettre
au
premier plan l'importance des
liens sociaux qui se traduisent
dans
ce cadre
en
terme
d'
«insertion relationnelle
et
1 ou so-
ciale», qu'il s'agisse des réseaux
de
proximité
ou des relations avec les institutions.
Parler
de
lien social c'est parler de territoire
qui, entre les deux pôles
de
son acception,
espace pertinent d'action des politiques pu-
bliques
et
patrimoine individuel et collectif,
peut
être le lien d'interaction entre les divers
acteurs
du
jeu social, entre les pouvoirs insti-
tués
et
les citoyens,
l'habitant se fait
acteur,
peut
s'exercer le débat démocra-
tique.
La
politique
de
la ville a essayé
de
prendre en
compte cette dimension même si celle-ci s'est
révélée certainement la plus difficile à mettre
en
oeuvre.
Comme
le dit Marcel Cauchet :
«La
valorisa-
tion
du
local comme lieu éminent
de
la politi-
que
reste entièrement à faire. Pour le moment,
nous
sommes
dans
le scénario inverse. Nous
assistons à une reféodalisation
du
territoire
(éventuellement maffieuse
dans
le sud) qui
appellera parcontrecoupunerecentralisation.
Tout est
peut
être encore possible mais on ne
voit pas
grand
chose venir
du
côté
de
la
"démocratie
de
proximité"»(5).
La
question
que
nous
nous
sommes
posée
est
de
savoir si les CAF,
et
plus
particulièrement
la CAF
de
Charente-Maritime,
pouvaient,
à
partir
de
quelle légitimité,
de
quels
moyens
et
selon quels axes,
situer
leur
action sociale
sur
ce terrain.
Le
renouveau du travail social
à la CAF de La Rochelle
Moyenne
par
sa taille
mais
située
dans
un
département
particulièrement touché
par
la
crise
(14
%
chômeurs
en
1990), la
CAF
de
La
Rochelle
n'a
que
tardivement
(en 1980) déve-
loppé
un
véritable service
d'action
sociale
inscrit
dans
l'organisation
de
la caisse.
Les responsables
de
1 'action sociale
de
la CAF
allaient très activement se situer
dans
un
cou-
rant de
renouveau
du
travail social
autour
de
l'idée
d'une
approche
généraliste
et
collec-
tive,
appuyé
par
les réflexions
menées
au
niveau national
par
la CNAF.
Ainsi, à côté
de
modes
d'interventions
tradi-
tionnels (de la gestion directe
de
centres
de
vacances aux aides financières
de
type «bons
vacances»), la CAF a
développé
une
action
sociale particulièrement centrée
sur
l'appro-
che collective
au
travers
du
soutien
aux
initia-
tivesassociatives.
Ledéveloppementdescen-
tres sociaux,
appuyé
par
la prestation
de
ser-
vice, a été ainsi particulièrement
remarqua-
ble. Vingt-cinq centres sociaux
ont
été
agréés
et
tous sont gérés
par
des
associations
aux-
quelles
la
CAF
apporte
son
soutien
et
qu'elle
encadre
au
travers
des
«projets
d'animation
globale».
Parallèlement, le service
de
travail social a
bénéficié
d'un
recrutement relativement ré-
cent
et
a
pu
porter
au
coeur
des
circonscrip-
tions d'action sociale
qu'elle
anime
(deux
cir-
conscriptions
sur
dix)
ou
auxquelles elle
par-
ticipe
une
certaine forme
d'engagement
dans
les actions partenariales
et/ou
collectives.
L'interaction
entre
l'intervention
des
centres
sociaux
et
celle
des
circonscriptions
contribue
au
«développement social
local>•,
objectif
du
service
d'action
sociale mais qui
n'a
jamais
25
RECHERCHES
ET
PREVISIONS
n•
39
1995
26
fait l'objet
d'une
orientation claire
et
affirmée
de
la CAF.
Il
s'est particulièrement traduit
dans
le développement
de
nouveaux cen-
tres sociaux
en
milieu rural, projets montés
par
les associations avec
l'appui
des
tra-
vailleurssociauxetpromusauprèsdesautres
partenaires,élusdescollectivitéslocalesessen-
tiellement.
Au niveau
du
partenariat institutionnel, la
CAF a privilégié
un
positionnement pragma-
tique
de
complémentarité avec l'action légale
plus
que
d'affirmation
d'une
politique
ap-
puyée
sur
des
objectifs
et
des moyens déter-
minés. C'est ainsi qu'elle a joué
la
carte
de
toutes les instances
de
coordination
dans
les-
quelles elle s'efforce de tenir
un
rôle central
grâceàsacapacitéd'animationetsalégitimité
reconnue
sur
le plan technique.
L'appui
sur
ses références fondées
sur
une
certaine philosophie
de
l'action sociale
et
l'al-
liance tant avec les services
de
l'Etat qu'avec
des
milieux associatifs (notamment la Fédéra-
tion
des
centres sociaux) lui
ont
permis
de
maintenir
une
place reconnue
dans
la sphère
du
social.
Une
stratégie
qui
comporte
des
faiblesses
Parallèlement, la lenteur
de
l'appropriation
par
le conseil général
de
ses responsabilités
en
matière sociale a permis à la CAF
de
pratiquer
une
stratégie
que
l'on a
pu
qualifier
de
«con-
,
tinuitéaménagée»,
pour
traduire
un
position-
nement
dont
le principal élément d'inflexion
externe était d'essayer de faire reprendre à
leur
compte,
par
les services
du
département,
lesorientationsdu travail social
en
polyvalence
de
secteur, prônées
par
le service d'action
sociale
de
la CAF.
Cette stratégie
n'a
pas été absente d'ambiguï-
tés
que
l'on
peut
voir comme
autant
de
fai-
blesses.
Qu'il s'agisse des projets
des
centres so-
ciauxou
du
contrat enfance, les
municipalit~s
sont devenues les interlocuteurs privilégiés
des
CAF.
Ce rapport obligé aux élus municipaux se fait
toujours
dans
une
confrontation, parfois
conflictuelle, entre des temporalités,
des
in té-
RECHERCHES
ET
PREVISIONS
n•
39
1995
rêts multiples
et
des
conceptions différentes,
alliant et déliant les trois
types
d'acteurs
-
professionnels, habitants
et
élus -
dans
des
configurations mouvantes
aux
enjeux politi-
ques intenses
et
mettant à
rude
épreuve
la
neutralité
et
la compétence technique
de
la
CAF.
Il
se traduit parfois
par
une
attitude
défensive vis à vis
du
politique
et
plus
parti-
culièrementdeséluslocaux, parfois
parce
qui
peut
être vécu comme
un
«abandon»
par
les
associa ti ons.
La
référence familiale
peut
entrer
en
con-
tradiction avec l'objectif
de
développement
social local dès qu'il s'agit
de
toucher
des
pub
lies di versifiés. Aucune priori
n'est
a ffi-
chée.
Il
en résulte
une
illisibilité
de
ses orien-
tations et plus généralement
de
sa politique.
Cette illisibilité est renforcée
par
l'affichage
d'une
puissance institutionnelle
et
financière
sans qu'il existe d'articulation explicite
entre
le domaine des prestations
et
celui
de
l'action
sociale.
La
territorialisation
de
l'action
de
la CAF
dépend
encore à l'heure actuelle
presque
ex-
clusivement
de
la présence
sur
le terrain
des
travailleurs sociaux en polyvalence
de
secteur
et
de
l'animation
de
deux circonscriptions
d'action sociale. Aussi, les projets
de
décon-
ventionnement
du
conseil généra
(6)
consti-
tuent-ils une véritable menace
pour
l'avenir
de
l'action sociale telle qu'elle a
pu
être conçue
par
ses promoteurs.
En
conséquence, l'évolution
de
son environ-
nement
institutionnel
met
la CAF
de
La
Rochelle en demeure non seulement d'affi-
cher
une
politique d'action sociale mais aussi
d'asseoir celle-ci
sur
une
philosophie
du
so-
cial répondant aux enjeux à la fois
de
la protec-
tion sociale
et
de
la solidarité.
Des
CAF
défricheuses
de
territoires ?
Bien que chaque CAF
ait
son histoire, ses
modalités spécifiques d'intervention
et
une
inscription particulière
dans
le tissu local,
toutes
ont
été, sont ou seront confrontées aux
mêmes types d'enjeux
que
la CAF
de
La
Rochelle. Aussi, nous sommes-nous permis
deparlerdesCAFau
pluriel même
si
toutes
ne
peuvent se reconnaître
dans
nos
propos.
Face aux besoins qu'elle peuvent recenser et
aux réponses qu'elles peuvent y apporter,
les
orientations des CAF, dans le domaine de
l'action sociale, peuvent osciller entre deux
pôles.
Leur potentiel de connaissances et
de
données
statistiques peut être développé pour quanti-
fier, mesurer et analyser les besoins de
la
populationdeleursallocatairesetdéfinirleurs
propresorientationset actions en fonction des
besoins qu'elles jugent prioritaires. Elles
se
situent dans une logique technique d'exper-
tise qui met en phase des besoins et des répon-
ses qu'elles peuvent organiser et mettre
en
oeuvre
Ainsi, les CAF peuvent proposer, avec une
démarche
de
«marketing», des services
«clefs
en
mainS>>
en particulierdanslesdomainesde
l'enfance et des centres sociaux
l'exemple
de
la
CAF
de
Marseille
pour
des équipements
de
la
petite enfance), mis en place par elles-
mêmes ou par une association prestataire de
service. Cette logique peut se développer,
dans ses domaines
de
compétence, sans autre
collaboration que celle imposée par les régle-
mentations et conduire les CAF à faire
«cava-
lier seul» dans
le
champ
de
l'action sociale.
Les interventions des CAF s'appuient sur
la
demande socialec' est-à-dire l'expression d'un
groupe social soit relayée par des travailleurs
sociaux, soit représentée
dans
des associa-
tions ou par des élus politiques. L'analyse
quantitative et qualitative des besoins expri-
mésdevientundesmoyensd'appréciationde
la
demande
inscrite
dans
une
logique
participative, démocratique de l'action.
Con-
trat et conventionnement dans
un
cadre de
collaboration, voire
de
partenariat, devien-
nent la nouvelle règle entre la CAF et
les
associations
et/ou
les municipalités.
Sur les objectifs et la façon
de
concevoir
les
interventions de développement local, les
CAF
ont une expérience, des acquis, et aussi
les
moyens d'analyse et
de
prise de recul.
En
effet, les CAF ont souvent ressenti
la
difficulté
à s'impliquer dans les dispositifs
de
dévelop-
pement local, surtout urbain,
du
fait à la
fois
de
la
prégnance dominante des élus munici-
paux et
de
leur caractère technico-politique
qui détourne souvent la logique de projet
pour l'inscrire dans le cadre
de
procédures
techniciennes,
dans
lesquelles elles
ne
peu-
vent se reconnaître.
Les CAF
ont
des
outils (travail social indivi-
duel et collectif voire communautaire, élabo-
ration et mise en place
de
projet avec la procé-
dure
d'agrément
des
centres sociaux ...
),des
compétences propres à favoriser la mise
en
place
d'une
autre démarche
de
projet per-
mettant une réelle implication
des
usagers
comme acteurs
de
la sphère civile, c'est-à-dire
«faire
autour
d'un
projet
en faisant ils
construisent à partir
de
leurs mondes vécus
leurs demandes, leurs paroles, leur identité et
du
lien social»
(7).
Le risque
de
l'cc
invisibilité))
Si
elles veulent à la fois maintenir
leur
tradi-
tion historique, se démarquer
de
la logique
de
gestion
de
services publics
ou
privés, se
maintenir en dehors des contraintes
du
mar-
ché et
de
la politique
(8),
cette nouvelle dé-
marche
de
projet offre
un
positionnement
original
dans
les relations aux usagers,
aux
associations
et
aux
collectivités locales.
Financeurs, collaborateurs, partenaires
de
l'ac-
tion sociale, les CAF s'affirment comme ac-
teur à
part
entière
dans
ce
champ
sur
des
territoires à géométrie variable tenant
compte
de
la
demande
sociale.
Cependant, la primauté accordée à la de-
mande
sociale fait encourir le
risque
de
«l'invisibilité» : comment, en effet, affirmer
son existence
quand
on attend
d'être
solli-
cité ?
Ou
celui
de
la visibilité minimale
induite
par la fonction
de
financeur : les associations
et les élus
ne
sollicitent les CAF
qu'à
la
phase
finale
de
mise en place
du
projet, cantonnant
ainsi les CAF
dans
un
rôle
de
pourvoyeur
obligé
de
fonds.
D'un
côté, la montée
en
puis-
sance
des
élus territoriaux
dans
le
champ
de
l'action sociale,
de
l'autre
l'évolution
du
sec-
teur associatif
et
de
plus l'assimilation
des
CAF à une administration d'Etat, contrai-
gnent ces dernières à s'afficher, à rendre visi-
ble leur action
pour
être connues et reconnues
dans
des
positions
et
fonctions singulières
mais multiples.
Opter
pour
la
demande
sociale et rendre visi-
ble son action, c'est-à-dire être susceptible
27
RECHERCHES
ET
PREVISIONS
n•
39
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