OXYDATION DESHYDROGENANTE DU PROPANE EN COMPOSES OXYGENES SUR DES PHOSPHOMOLYBDATES SUBSTITUES (PMo11M ET MPMo12) M=Ni, Fe ou Co Mme TASSADIT MAZARI épse HACHI* Laboratoire de Chimie du Gaz Naturel, Faculté de Chimie, USTHB Résumé : Deux séries de sels d’ammonium (NH4)6HPMo11MO40 (PMo11M) et des sels mixtes ammonium-métal de transition (NH4)2.5MzHyPMo12O40 (MPMo12) avec M = Ni, Co ou Fe ont été préparés et caractérisés par différentes techniques d’analyse notamment par spectroscopies InfraRouge (IR) et UV-Visible, RMN du phosphore, diffraction des rayons X (DRX), thermo diffraction des rayons X (XRTD), analyse thermique (ATG, DSC) et analyse BET. Leur formulation a été vérifiée par analyse élémentaire (ICP). Les propriétés acido-basiques et rédox des sels ont été évaluées dans la réaction de conversion de l’isopropanol dans l’intervalle de température150-250°C et les performances catalytiques dans l’oxydation du propane entre 380 et 420°C avec 2 vitesses de chauffe de 5 et 9°C/min. L’analyse élémentaire a confirmé la formulation des différents sels. L’analyse par spectroscopie Infra-rouge a montré que tous les sels préparés présentent les bandes de vibration caractéristiques de l’anion de Keggin, [PMo12O40]3-. Cependant, en présence des sels PMo11M, en plus d’un léger déplacement des bandes de l’anion de Keggin vers les faibles fréquences, des épaulements sur la bande P-Oa apparaissent, confirmant ainsi la substitution de l’atome de molybdène par un métal de transition. Les diffractogrammes RX des sels, MPMo12, sont analogues à ceux du sel (NH4)3PMo12O40 qui cristallise dans une structure cubique Pnˉ3m alors que ceux des sels PMo11M sont différents de ceux du sel (NH4)3PMo12O40 et de l’acide H3PMo12O40 cristallisant dans un système triclinique. La spectroscopie UV-Visible a montré pour l’ensemble des sels, une large bande de transfert de charge oxygène-molybdène (VI) dans le domaine spectral 250-500nm. En plus de cette bande, une autre apparaît vers 620-720nm en présence des sels à base de cobalt attribuée au molybdène (V) suggérant qu’ils sont partiellement réduits. Il ressort des résultats des analyses BET que les propriétés de surface, dépendent aussi bien de la composition de l’unité de Keggin que de celle du contre-ion. Les résultats des analyses thermiques (TG-DSC) montrent que la série MPMo12 est moins stable que la série PMo11M. Les tests d’acidité ont montré que la différence de comportement entre les deux séries de sels dépend essentiellement de la température. Ainsi, à basse température (150°C), le pouvoir oxydant varie comme suit Ni>Co>Fe et à température plus élevée (200-250°C), tous les solides présentent un caractère acide prononcé. L’étude de la réactivité de ces sels dans la réaction de déshydrogénation oxydante du propane a permis de cerner l’influence des conditions opératoires (température, vitesse de chauffe) et de la nature et de la position (comme ion de coordination ou comme contre-ion) de l’élément de transition M, dans le polyoxométallate sur leur performance catalytique. Les solides présentant des comportements catalytiques différents, se sont avérés être actifs et sélectifs en propène et/ou acroléine. Les meilleurs rendements en produits sont obtenus à basse température 380°C et avec une vitesse de chauffe de 9°C/min. Parmi, les différents sels étudiés, FePMo12 se présente comme le catalyseur le plus actif et le plus sélectif en propène avec un rendement de 17,2% et un rendement en oxydes de carbone que de 3%. (*)Thèse de Doctorat Directeur de thèse : Mme Chérifa RABIA, Professeur à l’USTHB 1 I.INTRODUCTION La fonctionnalisation du propane, qui est plus abondant et moins coûteux que le propène, en oléfine, aldéhyde et acide est d’un grand intérêt industriel. Parmi, les matériaux étudiés dans l’oxydation du propane, les polyoxométalates de type Keggin ont été rapportés comme étant actifs et sélectifs. Dans le cas de l’oxydation du propane en acide acrylique, de bonnes performances catalytiques ont été obtenues par Mizuno et coll [1,2] sur le sel Cs2.5Fe0.08H1.26PMo11VO40 et Ueda et coll [3] sur le sel de pyridinium de l’acide H3PMo12O40. Des études ont montré que les tungstophosphoriques lacunaires (PW11) modifiés avec un métal de transition (Fe ou Mn) sont des catalyseurs sélectifs en oxydéshydrogénation du propane en propène [4]. Ils ont montré également que l’hétéropolyanion était stable sous les conditions opératoires, lorsqu’il se trouvait dans un état réduit. Il a été rapporté également que les sels Cs2.5H6x-yM1-xPMo11-xVMxO40 (M=Co, Fe, Ni, Ga, Sb ou Zn) sont actifs dans l’oxydation du propane dans l’intervalle de températures 340-400°C et que l’introduction d’un métal de transition dans l’unité de Keggin favorisait la formation du propène et en position de contre-ion et celle de l’acide acétique [5]. Sur les polyoxométalates de formule Cs2.5H1.5PVMo11-xWxO40 (x=0, 1, 2, 4 et 6), Dimitratos et coll [6] ont montré que les propriétés catalytiques dépendaient de la température de prétraitement et de la valeur de x. Il a été également montré par que le sel d’ammonium de l’acide H3PMo12O40 ((NH4)3PMo12O40) est un catalyseur actif et sélectif en acide méthacrylique dans l’oxydation de l’isobutane [7-10]. Dans ces travaux, il a été observé que la présence d’un métal de transition et/ou celle d’un groupement organique dans les composés phosphomolybdiques pouvait jouer un rôle déterminant dans le processus redox. Ainsi, il a été constaté qu’un état partiellement réduit du catalyseur le rendait stable sous les conditions de la réaction d’une part et que d’autre part, il conduisait à de meilleures sélectivités en produits d’oxydation partielle tout en réduisant la combustion totale de l’alcane. Dans ce travail, il nous a semblé intéressant d’introduire aussi bien des ions ammonium que des ions des métaux de transition (Ni2+, Co2+ ou Fe3+) dans des phosphomolybdates de type Keggin dans le but d’obtenir des catalyseurs actifs et sélectifs en produits valorisables en oxydation du propane. Pour atteindre cet objectif, dans la première partie de ce travail, l’atome de molybdène du système, H3PMo12O40, a été substitué par l’un des ions Fe3+, Ni2+ ou Co2+ (position anionique) et les protons par des 2 ions ammonium (position cationique). Les sels obtenus dans ce cas ont pour formule (NH4)6HPMo11MIIO40 (M:Co, Ni) et (NH4)6PMo11FeIII(H2O)O39, notés PMo11M. Dans la seconde partie de ce travail, les ions ammonium et les ions des métaux de transition (Ni2+, Co2+ ou Fe3+) sont tous les deux en position de contre-ions dans l’anion de Keggin, [PMo12O40]3-, les sels ainsi obtenus ont pour formule (NH4)2.5MxHyPMo12O40 (noté MPMo12). La composition chimique des sels a été déterminée par analyse élémentaire ICP. La structure de Keggin, correspondant à l’anion PM12O403- a été vérifiée par spectroscopie Infra-Rouge à transformée de Fourrier (IRTF) et l’état d’oxydation du molybdène ainsi que les différents transferts de charge ligand-métal par spectroscopie UVVisible. La pureté des sels préparés a été examinée par RMN du phosphore. La surface spécifique et la porosité sont déterminées par la méthode BET. La structure cristalline ainsi que son évolution en fonction de la température ont été examinées par diffraction des rayons X (DRX) et par thermodiffraction des rayons X (XRTD). Le comportement thermique des sels a été étudié par analyse thermique (ATG et DSC). Leurs propriétés acido-basiques et rédox ont été évaluées dans la réaction de conversion de l’isopropanol dans l’intervalle de température150- 250°C. Les deux séries de sels ont été testés dans l’oxydation du propane entre 380 et 420°C avec des vitesses de chauffe de 5 et 9°C/min pour le prétraitement oxydant in-situ des catalyseurs. II. SYNTHESE, CARACTERISATION ET REACTIVITE DES HETEROPOLYSELS (NH4)6HPMo11MO40 (M : Co, Ni, Fe) II. 1 Synthèse des hétéropolysels Les sels d’ammonium, PMo11M (M: Co, Ni ou Fe) ont été préparés en accord avec les données de la littérature [11]. La synthèse est réalisée à 0°C afin d’éviter la formation du 6- molybdométalate (composé de type Andersons). 250ml d’une solution de paramolybdate d’ammonium (1M) sont ajoutés à un mélange constitué de 25,2ml de H3PO4 (1M), 50ml de H2SO4 (0,5M) et de 25ml de Fe2(SO4)3 ou MSO4 (1M). Ensuite, du nitrate d’ammonium (NH4NO3) est ajouté pour précipiter les sels. Les sels à base de Ni et de Fe sont jaunes, celui à base de Co brun. Les solides sont conservés à l’abri de l’humidité pour éviter une décomposition progressive. 3 II.2 Caractérisation des solides II.2.1 Composition chimique des sels Le tableau II.1 présente les résultats de l’analyse chimique des hétéropolysels déterminée par ICP. Ils sont en bon accord avec les formules théoriques supposées pour le phosphore (1 atome par unité de Keggin) et le métal de transition (1 atome par unité de Keggin). Le nombre d’atomes d’azote par polyoxométallate est très inférieur à la valeur théorique (2,02- 2,70 contre 6). Ceci est dû à la perte des ions ammonium, en plus des ions nitrates lors du traitement thermique du solide avant analyse. Les formules des sels sont les suivantes : (NH4)6HPMo11FeO 39(H2O), (NH4)6HPMo11NiO40 et (NH4)6HPMo11CoO40.. Tableau II.2.1 : Analyse élémentaire des hétéropolysels PMo11M PMo11M Composition (%) Rapport molaire P Mo M N Mo/P M/Mo.11 N/Mo.11 PMo11Fe 1,05 57,46 3,48 1.54 11,31(11) 0,97(1) 2,02(6) PMo11Co 1,02 57,29 3,18 1,59 10,88(11) 0,89(1) 2,01(6) PMo11Ni 1,01 56,85 2,57 1.75 10,85(11) 0,81(1) 2,70(6) ( ) Coefficient stœchiométrique théorique II.2.2 31P MAS-RMN Le spectre 31 P RMN en solution du sel PMo11Ni (Figure II.2.1), présente 2 pics suggérant que le sel est un mélange de deux espèces à base de phosphore. Le premier pic à -1,15 ppm pourrait être assigné à l’espèce lacunaire [PMo11O39]7− [12] et celui à 0.00ppm au sel PMo11Ni. PMo11Fe et PMo11Co ne présentent aucun signal en 31P RMN dû à l’effet 0.0000 -1.1551 paramagnétique des ions Fe3+ et Co2+ [13]. 9 8 7 6 5 4 3 2 1 0 -1 (ppm) -2 -3 -4 -5 -6 -7 -8 -9 Figure II.2 .1: Spectre 31P RMN de PMo11Ni 4 II.2. 3 Analyse de surface Les surfaces spécifiques, le volume des pores, la surface des micropores ainsi que le diamètre des pores des différents solides sont représentés dans le tableau II.2.2. Les résultats obtenus montrent que les surfaces spécifiques des sels PMo11M sont très faible (15m2/ g) du même ordre de grandeur que celle de l’acide H3PMo12O40 (<10m2/g) et très inférieures à celle du sel d’ammonium (NH4)3PMo12O40 (222m2/g) [14]. Le diamètre des pores se situe entre 58 et 72Å, ceci indique que ces composés sont de nature mésoporeuse. Il est à noter que le sel PMo11Fe présente les paramètres les plus faibles, probablement liés à la charge de l’ion ferrique (Fe3+) par conséquent à son rayon plus petit que ceux des ions Co2+ et Ni2+. Les isothermes d’adsorption-désorption d’azote et les hystérésis des différents sels sont de types II et B respectivement. Tableau II.2.2: Surface spécifique, volume et surface des micropores et diamètre moyen des pores des sels PMo11M. solide SBET (m2/g) PMo11Fe PMo11Co PMo11Ni 1 3 5 Volume des micropores (cm3/g) 1,2 10-4 4,110-4 6,1 10-4 Surface des micropores (m2/g) 0,3 0,9 1,5 Volume des pores (cm3/g) 7,9 10-4 46,010-4 85,010-4 Diamètre moyen des pores (Å) 58,7 64,0 72,1 II.2.4 Spectroscopie UV-Visible Les spectres UV-Visible des différents sels (Figure II.2.2) présentent une large bande dans le domaine spectral 200-550nm, constituée de deux composantes situées à 200380 et 400-550nm. Ces différentes composantes seraient associées aux différents types d’atomes d’oxygène de l’anion de Keggin, aux transitions de transfert de charge interanion et à la nature du contre-ion [8, 15-17]. En plus de cette large bande, une autre de plus faible intensité est observée dans la région 600-720nm en présence de PMo11Co. Elle est attribuée soit à la bande de transition d-d des espèces d1 Mo(V) en coordination octaédrique et/ou aux espèces d6Co(III) également en coordination octaédrique [9,18-21]. Ces observations suggèrent une réduction partielle des ions Mo (VI) en Mo (V) avec un transfert de charge selon l’équation redox (1): Co2+ + Mo6+ Co3+ + Mo5+ (1) 5 Absorbance Absorbance 1,5 1,5 Fe Fe 1 1 Co Co 0,5 0,5 Ni Ni 0 0 200 200 300 300 400 400 500 500 600 600 700 700 800 800 Longeur d’onde (nm) wavelenght (nm) Figure II.2.2 : Spectres UV -Visible des sels PMo11M II.2.5 Spectroscopie Infra Rouge (FTIR) Les résultats de l’analyse par spectroscopie IR (Tableau II.2.3) montrent que les bandes de vibration caractéristiques de la structure de Keggin sont observées pour l’ensemble des sels avec des variations dans les valeurs de fréquence. Ainsi, la comparaison des fréquences des bandes de vibration IR des sels PMo11M avec celles du sel (NH4)3PMo12O40 ou avec celles de l’acide H3PMo12O40 montre une diminution de fréquence de 1063cm-1 à 1057-1043 cm-1 pour νas(P-Oa); de 961cm-1 à 951- 942cm-1 pour νas(M=Od); une augmentation de 863cm-1 à 866-879cm-1 dans le cas de νas (M-Ob-M) et de 786cm-1 à 825-803cm-1 pour νas (M-Oc-M) excepté pour PMo11Co où la bande de vibration M-Oc-M est observée à 727cm-1. Par ailleurs, des épaulements apparaissent vers 1020 cm-1 en présence des sels à base de cobalt et de nickel et d’autres à 764, 793-737 et 723 cm-1 en présence de PMo11Ni, PMo11Co et PMo11Fe respectivement. Ces différences de fréquence sont liées à la présence de l’élément de transition dans l’anion de Keggin, considéré comme un élément perturbateur, à la charge négative élevée du polyanion PMo11MO40n-, à la répulsion plus élevée entre anion-anion [22] et à la diminution de la symétrie de l’oxoanion [11 ,5 ,8]. Ces résultats en accord avec ceux observés par d’autres auteurs [1,5 ,6], montrent que la substitution d’un atome de molybdène par un atome du métal de transition a bien eu lieu. 6 Tableau II.2.3 : Fréquences (cm-1) des bandes de vibration IR de l’acide H3PMo12O40 et des sels (NH4)3PMo12O40 et PMo11M (P-Oa) Solides (M-ObM) (M-Oc-M) H3PMo12O40 1064 (NH4)3PMo12O40 1063 PMo11Fe 1057 PMo11Co 1043 (1020a) 962 961 951 946 870 863 879 866 785 786 803(723a) 727(793-737a) 1049 (1019a) 942 869 825(764a) PMo11Ni a (M=Od) indique un épaulement II.2.6 Diffraction des rayons X (DRX) Les sels PMo11M (M : Fe, Co ou Ni) présentent des diffractogrammes RX différents (Figure II.2.3).En plus, ils sont différents de ceux du sel d’ammonium (NH4)3PMo12 et de l’acide H3PMo12. Les diffractogrammes RX correspondant à l’acide H3PMo12O40,13-15H2O et au sel (NH4)3PMo12 sont caractéristiques des systèmes cristallins triclinique [23] et cubique (JCPDS 09-0412) [24] respectivement. Ces observations suggèrent que les systèmes cristallins des polyoxométallates sont très sensibles à leur composition. Ainsi, les sels PMo11M cristallisent dans des systèmes différents du triclinique et du cubique, non identifiés dans le cadre de cette étude. Ces résultats rejoignent ceux de l’analyse par spectroscopie Infra Rouge qui montrent l’effet de la substitution d’un atome de molybdène de l’anion de Keggin par un atome de métal de transition sur la structure du sel d’ammonium ou de l’acide. II.2.7 Thermodiffraction des rayons X (DRX) à température programmée L’évolution structurale des sels PMo11M et (NH4)3PMo12, après traitement thermique sous air in situ, a été examinée dans l’intervalle de température 30-510°C. Les enregistrements ont été effectués tous les 20°C. L’ensemble des résultats de cette étude montre que la structure cristalline des sels PMo11M évolue rapidement avec la température et tend vers celle du sel d’ammonium non substitué (NH4)3PMo12 dans l’intervalle de température 230-410°C. Ces observations suggèrent que l’élément de transition M migre de sa position anionique vers la position cationique. Il a été rapporté dans plusieurs travaux, que le vanadium de l’anion de Keggin, [PMo11VO40]4-, vanadyl ou molybdenyl de l’anion de Keggin [PMo12O40]3-sort de la structure du polyanion et se met en position de contre-ion dans le ployoxométallate [25]. La température de décomposition des sels 7 PMo11Fe et PMo11Co est similaire à celle du sel (NH4)3PMo12 (410°C) qui reste inférieure à celle du sel PMo11Ni (430°C). H3PMo12 (NH4)3PMo12 Fe Co Ni 6 10 20 30 2Theta 40 50 - Scale Figure II. 2.3 : Diffractogrammes RX de PMo11M, H3PMo12O40 et de (NH4)3PMo12O40. II.2.8 Analyse thermique ATG-DSC Les analyses thermogravimétrique (ATG) et calorimétrique (DSC) effectuées sur l’ensemble des solides préparés ont été réalisées sous flux d’oxygène avec une vitesse de montée en température de 5°C par minute, jusqu’à 600°C. Sur la courbe TG du sel NH4PMo12 (Figure II.2.4), une première perte de masse de 0,87% est observée entre 30-140°C, attribuée à la désorption d’une molécule d'eau hydratation. Une deuxième perte de l’ordre de 4,97% montrant le départ des ions d'ammonium ou d’azote (N2), sous forme d’ammoniac, est observée dans le domaine de températures 140440°C. Cette perte de masse correspond à 2,9 molécules d’ammoniac en accord avec la formule du sel (NH4)3PMo12. La courbe DSC de ce solide présente un petit pic endothermique à 30°C correspondant à la désorption de la molécule d’eau et un pic exothermique à 440°C indiquant la cristallisation des oxydes (P2O5, MoO3). Les courbes TG-DSC des sels substitués (non représentés) sont différentes de celle du sel NH4PMo12. Ainsi, plusieurs pertes de masse similaires et distinctes sont observées entre 30 et 425°C sur les courbes TG des différents sels. A des températures inférieures à 240°C, 8 la perte de masse est attribuée au départ de l’eau d’hydratation (8-30%), au-delà de cette température, elle est associée au départ des ions ammonium sous forme d’ammoniac ou d’azote. L’analyse par DSC montre, pour l’ensemble des sels, des pics endothermiques correspondant aux pertes de masse de l’eau d’hydratation entre 30 et 80°C, de l’ammoniac entre 250 et 395°C. Pour chacun des sels, deux pics exothermiques sont observés par analyse DSC. Le premier apparaît à 420°C ; 420°C et 415°C et le second à 440°C ; 470°C et 460°C pour PMo11Ni, PMo11Fe et PMo11Co respectivement. Il est à noter que l’intensité des pics dans le cas de PMo11Co est plus importante avec un dédoublement du premier pic (415, 420°C). Le premier pic pourrait être attribué à la modification cristallographique de PMo11M en MPMo12 suite au déplacement de l’élément M (Fe, Co ou Ni) de sa position anionique à la position cationique comme dans le cas de H4PMo11VO40 [26, 27] et le second pic à la cristallisation des oxydes (P2O5, MoO3, MO) décomposition du sel. Ces résultats rejoignent ceux provenant de la obtenus dans l’étude %massique (NH4)3PMo12 440°C 6 99 4 2 97 0 -2 -4 95 93 0 100 200 300 400 500 Heat flow(w/g) thermocristallographique. -6 600 Température (°C) Figure II.2.4: Courbes TG-DSC de (NH4)3PMo12O40. II.3 Test catalytique à l’isopropanol La technique la plus utilisée pour évaluer les propriétés acido-basique, redox et catalytique d’un solide est la décomposition des alcools (méthanol, éthanol, butanol et isopropanol). Parmi eux, l’isopropanol est l’alcool le plus utilisé [28,29]. Selon la nature du catalyseur et les conditions opératoires, l’isopropanol peut subir une déshydratation en propène et/ou en éther diisopropylique et /ou une déshydrogénation en acétone. La 9 déshydratation nécessite des sites acides et la déshydrogénation des sites redox ou basiques [30,31]. L’étude des propriétés catalytique, acido-basique et rédox des sels PMo11M a été réalisée en utilisant la réaction modèle de décomposition de l’isopropanol dans l’intervalle de température 150-250°C. La réaction a été réalisée dans un réacteur tubulaire en pyrex à lit fixe à pression atmosphérique. Avant chaque test, une charge catalytique de 200mg est prétraitée sous air avec un débit de 2l/h à la température de réaction, pendant 1 heure avec une montée en température de 6,5°C/min. L’isopropanol, contenu dans un saturateur maintenu à 0°C, est entraîné par l’air vers le réacteur. Le débit total du mélange réactionnel est fixé à 1l/h. Le réactif et les produits de la réaction (isopropanol, propène, éther diisopropylique et acétone) sont analysés par chromatographie en phase gazeuse avec un détecteur FID (Delsi ICG 121 Ml). La réaction de conversion de l’isopropanol étudiée, dans l’intervalle de température 150 -250°C sur les sels PMo11M, conduit à la formation du propène et à celle de l’acétone. L’éther diisopropylique est observé à l’état de traces. Les résultats catalytiques des sels PMo11M représentés dans le tableau II. 4 dépendent de la température de réaction. En effet, à 150 °C, le solide à base de fer est plus actif que ceux à base de cobalt et de nickel avec une conversion de 71,4% contre 68,5 et 52% respectivement. Pour l’ensemble des solides, l’activité augmente généralement avec la température de réaction et à 250°C, la conversion de l’alcool atteint 93,3 -100%. L’activité catalytique élevée obtenue avec les sels PMo11M, confirme la thèse de la phase pseudo-liquide de Misono [32]. Cette théorie suggère que la conversion de l’alcool a lieu au coeur du polyanion, par conséquent, elle est indépendante de la surface spécifique du catalyseur. La distribution des produits de décomposition de l’alcool dépend de la température de réaction et de la nature de l’élément de transition. Ainsi, à basse température (150°C), la déshydrogénation de l’alcool est la principale réaction observée pour PMo11Ni, la sélectivité en acétone atteint 93% alors qu’en présence de PMo11Fe, c’est la déshydratation qui prédomine, 72,1% de sélectivité en propène contre 22,9% de sélectivité en acétone. PMo11Co a un comportement intermédiaire, les sélectivités en propène et en acétone sont du même ordre de grandeur 54,5 et 45,5% respectivement. A 250°C, la déshydratation devient la réaction prédominante pour l’ensemble des sels PMo11M avec environ 93-98% de sélectivité en propène, ce qui traduit le caractère fortement acide de ces matériaux à haute température. 10 Les résultats du tableau II.4 montrent également les vitesses de formation du propène et de l’acétone. Elles sont définies par le rapport vx= DIso. Cx/m avec Diso le débit de l’alcool en moles par min, Cx la conversion en produit x et m la masse (g) du catalyseur. Les deux vitesses sont fonction de la nature de l’élément de transition. Ainsi, l’activité déshydrogénante de PMo11Ni est prédominante avec une vitesse de formation de l’acétone de 0,29 soit un rapport va/vp de 14,5. Contrairement à PMo11Ni, le sel à base de fer présente plutôt un caractère acide avec une vitesse de formation du propène de 0,31 lié probablement à son degré d’oxydation plus élevé (+3). Le sel à base de cobalt (PMo 11Co) a un caractère intermédiaire avec des vitesses de formation des produits voisines (vp=0,22 et va=0,18). Il ressort des résultats de l’étude de la réactivité des différents sels dans la réaction de conversion de l’isopropanol que le caractère acide suit l’ordre suivant Fe> Co> Ni. Ces résultats montrent en particulier que l’insertion du nickel dans l’unité de Keggin augmente fortement le pouvoir oxydant du solide. Contrairement à Niiyama et coll [33] aucune corrélation entre l’électronégativité de l’élément M et le caractère acide n’est observée. Cette observation rejoint celle faite par L.R.Pizzio et all [34] dans l’étude des tungstophosphates substitués avec des métaux de transition (Co, Cu, Ni, Zn). Cette étude montre également que les sels PMo11M ont simultanément des propriétés acide et rédox nécessaires à l’activation des liaisons C-H. Tableau II .3.1 : Performances catalytiques des différents solides dans la réaction de conversion de l’isopropanol (150-250°C°). solide PMo11Fe PMo11Co PMo11Ni T°C 150 200 250 150 200 250 150 200 250 Con : conversion % Con 71,4 61,0 93.3 68,5 40,4 100 52,0 67,0 100 Sel P 72,1 90,3 93,3 54,5 91,0 97,2 6 ,6 91,0 97,6 Sel Et 0 0,3 0,3 0 0,6 0 0,4 0,4 0 Sel : sélectivité % Sel Ac 22,9 9,4 6,4 45,5 9,4 2,8 93,0 8,6 2,4 VP 0,31 0,33 0,53 0,23 0,22 0,59 0,02 0,37 0,59 VAc 0 ,10 0,03 0,04 0,19 0,02 0,02 0,29 0,04 0,01 VAC/VP 0,32 0,10 0,07 0,83 0,09 0 ,03 14,09 0,09 0,02 V : vitesse de formation en mole. s-1 .m-2 II. 4 Réactivité des sels dans l’oxydation du propane L’oxydation du propane a été réalisée entre 380 et 420°C et à pression atmosphérique en utilisant un réacteur tubulaire en Pyrex à lit fixe. Le mélange réactionnel 11 est constitué de 20% en propane, 20% en oxygène et 60% en azote. Le débit total est de 40ml/min et la masse du catalyseur de 0,2g. Avant réaction, l’échantillon est prétraité insitu sous courant d’oxygène avec un débit de 40ml/min, pendant 1h à la même température, celle de la réaction. Deux vitesses de chauffe, 5°C/min et 9°C/min ont été utilisées pour le prétraitement. Le propane et les produits de la réaction ont été analysés directement par chromatographie en phase gaz avec des détecteurs FID et TCD. Les phases chromatographiques utilisées sont la Porapak R et la Carbosieve pour l’analyse FID et TCD respectivement. Les produits de la réaction dans nos conditions sont le propène (C3), acroléine (Acr), acétone (Ac), éthane, éthylène (C2) et les oxydes de carbone (COx). La conversion et les sélectivités ont été déterminées après 4 ou 5h de réaction, une fois le régime stationnaire atteint. Les propriétés catalytiques des sels PMo11M ont été examinées dans l’oxydation du propane dans un intervalle de température de 380-420°C avec 2 vitesses de chauffe différentes 5 et 9°C/min. Les trois sels montrent la même évolution de l’activité avec la température de réaction. Ainsi, la conversion obtenue à 420°C est plus élevée que celle à 380°C mais reste plus faible que celle correspondant à 400°C (Tableaux II.4.1, II.4.2). Les sélectivités en propène et en acroléine diminuent en faveur de celle des oxydes de carbone avec l’augmentation de la température de réaction. Les meilleures performances catalytiques des sels sont obtenues avec la vitesse de chauffe la plus élevée. Ainsi, les conversions varient entre 4 et 16% pour une vitesse de 5°C/min et entre 9 et 21% % pour une vitesse de 9°C/min. Il est à noter qu’une faible vitesse de chauffe favorise la formation des oxydes de carbone (32-66% contre 30-54% ; 34-74% contre 18-62% et 40-83% contre 27-67% en présence du PMo11Fe, PMo11Co et PMo11Ni respectivement). Ces résultats montrent l’importance des conditions de prétraitement sur la réactivité des catalyseurs. La nature du métal de transition influence également les performances catalytiques du solide. Ainsi, pour une vitesse de chauffe de 9°C/min, à 380°C, les sels à base de nickel et du cobalt favorisent la formation de l’acroléine avec une sélectivité de 42 et 48% respectivement contre 34% dans le cas du sel à base de fer. Ce dernier conduit à des sélectivités similaires en propène et en acroléine 36 et 34% respectivement. Il est à noter que la formation de l’acétone est favorisée particulièrement en présence de PMo11Fe, lorsque la vitesse de chauffe est de 5°C/min (9,3% de sélectivité contre 1-3%). A la température de réaction de 380°C, la structure Keggin des sels est conservée, l’intensité de la bande IR des ions NH4+ (1400cm-1) a diminué dans le cas du PMo11Co et 12 PMo11Ni et a totalement disparu dans le cas du PMo11Fe comme le montrent les spectres IR à 380°C (Figure II.4.1). Ce résultat suggère la décomposition partielle ou totale des ions ammonium dans les conditions de réaction favorise la formation du propène et celle de l’acroléine en particulier quand la vitesse de chauffe est élevée (9°C/min). Ces résultats sont en accord avec ceux obtenus par d’autres auteurs sur les polyoxomettalates. Ils notent que la présence des ions ammonium facilite la formation des composés oxygénés comme l’acide méthacrylique et la méthacroléine dans le cas de l’oxydation de l’isobutane [5, 6, 35, 36]. Il a été également rapporté que l’introduction des métaux de transition (Co, Fe, Ni, Ga, Sb or Zn) dans l’anion de Keggin favorisent la formation du propène [1,2]. La sélectivité élevée en acroléine observée en présence de PMo11Co (42-48%) peut être expliquée par la présence de plusieurs sites rédox provenant des couples Co(III)/Co(II) et Mo(VI)/Mo(V), comme l’a montré l’analyse UV-Visible et par l’élimination des ions ammonium en NH3 ou en N2 pendant le prétraitement et /ou pendant la réaction. Ainsi, il peut être conclu que la présence simultanée des ions ammonium et celle des métaux de transition (Co) sont nécessaires à la formation des produits oxygénés. A 420°C, les sels sont totalement décomposés en un mélange d’oxydes qui sont plus actifs vis à vis de l’oxydation totale du propane en COx, probablement liée à l’acidité de Lewis de l’oxyde de molybdène, MoO3. Ces résultats montrent que le couplage des ions ammonium en position cationique et des métaux de transition en position anionique dans les phosphomolybdates de type Keggin conduit à des catalyseurs actifs et sélectifs en produits valorisables (propène, acroléine) dans la réaction d’oxydation du propane à 380°C. Tableau II.4.1: Performances catalytiques des différents sels testés dans l’oxydation du propane avec une vitesse de chauffe de 5°C/min Catalyseur PMo11Fe PMo11Co PMo11Ni T(°C) 380 400 420 380 400 420 380 400 420 C3 Con. (%) 10 5 16 6 5 10 7 4 13 Sélectivité(%) C =3 Acet Acro C2 COx 30 18 16 24 20 18 22 8 10 9 * * * * * 1 3 3 29 21 18 42 28 7 37 36 4 * * * * * 1 * * * 32 61 66 34 52 74 40 53 83 13 Tableau II.4.2: Performances catalytiques des différents sels testés dans l’oxydation du propane avec une vitesse de chauffe de 9°C/min Catalyseur T (°C) C3 Con. (%) 380 400 420 380 400 420 380 400 420 PMo11Fe PMo11Co PMo11Ni 14 9 20 11 9 17 16 10 21 Sélectivité (%) C =3 Acet Acro C2 COx 36 24 22 33 28 24 31 12 21 * * 34 27 23 48 39 12 42 44 11 0 1 1 1 2 2 * 1 1 30 48 54 18 31 62 27 43 67 * * * * * * *indique des traces de produit. Conditions de réaction: C3H8/O2/N2=20/20/60, débit = 40ml. min-1, masse du catalyseur: 0.2g, prétraitement: 1h/O2, Co Fe Ni 1500 1300 1100 900 700 500 300 wave number (cm-1) (cm-1) Figure II.4.1 : Spectres IR des sels PMo11M après réaction à 380°C II.5 Conclusion L’étude sur la caractérisation des sels (NH4)6HPMo11MO40 (M : Co, Ni, Fe) a montré que la position anionique de l’élément M se traduit en spectroscopie IR par une perturbation des fréquences de vibration des bandes caractéristiques de l’anion de Keggin et par une modification du système cristallin cubique de (NH4)3PMo12O40. En plus, les sels (NH4)6HPMo11MO40 cristallisent dans des systèmes différents. Leur surface spécifique est inférieure à celle du sel (NH4)3PMo12O40 et proche de celle de l’acide H3PMo12O40. La spectroscopie UV-Visible a montré que le sel PMo11Co est dans un état partiellement réduit. La thermodiffraction des RX a montré que lors du traitement thermique, la structure 14 des sels PMo11M tend vers la structure cubique de (NH4)3PMo12O40 dans le domaine de température 230-410°C suite au départ de l’élément M de sa position anionique vers la position cationique. Le test de décomposition de l’isopropanol est très sensible à la nature de l’élément M à basse température (150°C). Ainsi, PMo11Ni conduit principalement à la déshydrogénation de l’alcool et PMo11Fe à sa déshydratation alors que PMo11Co a un comportement intermédiaire.A 250°C, la déshydratation devient la réaction prédominante pour l’ensemble des sels PMo11M. En réaction d’oxydation du propane, le couplage des ions ammonium en position cationique et des métaux de transition en position anionique dans les phosphomolybdates de type Keggin conduit à des catalyseurs actifs et sélectifs en produits valorisables (propène, acroléine) à basse température (380°C) et avec une vitesse de chauffe élevée (9°C/min). III. SYNTHESE, CARACTERISATION ET REACTIVITE DES HETEROPOLYSELS (NH4)2.5MzHyPMo12O40 (M : Co, Ni, Fe) III. 1 Synthèse des hétéropolysels Les sels mixtes d’ammonium (NH4)2.5MzHyPMo12O40 (MPMo12) ont été préparés selon la méthode décrite par Mizuno et coll. [1]. Elle consiste à ajouter, dans des rapports stœchiométriques, une solution aqueuse de M(NO3)n (0,16M) avec Mn+: Ni2+, Co2+ ou Fe3+ à une solution d’acide H3PMo12O40 (0,06M) suivie d’une solution de chlorure d’ammonium, NH4Cl (0,08M). Le précipité formé est séché à 50°C sous vide à l’aide d’un rota-vapeur. Il est ensuite récupéré tel quel sans lavage ultérieur. III.2 Caractérisation des solides III.2.1 Composition chimique des sels Les résultats de l’analyse chimique regroupés dans le tableau III.2.1 sont en accord avec les formules théoriques des sels, (NH4)2,5Ni0,16H0,18PMo12O40, (NH4)2,28Fe0,24PMo12O40, et (NH4)2,5Co0,16H0,18PMo12O40. Excepté pour FePMo12, où le nombre d’atomes d’azote analysé (1,64) est inférieur à celui correspondant à la valeur théorique (2,28). Cette différence peut être expliquée par la perte des ions ammonium pendant le traitement thermique à 300°C subit par le solide avant analyse. 15 Tableau. III.2.1 : Analyse élémentaire des hétéropolysels MPMo12 MPMo12 Composition (%) FePMo12 CoPMo12 NiPMo12 P 1.61 1.63 1.66 Rapport Mo 59.12 58.87 58.75 M 0.74 0.50 0.45 N 1.10 1.64 1.75 Mo/P 11.85(12) 11.66(12) 11.42(12) molaire M/Mo.12 0.25(0.24) 0.16(0.16) 0.15(0.16) N/Mo.12 1.64(2.28) 2.29(2.5) 2.46(2.5) ( ) Coefficient stœchiométrique théorique III.2. 2 Analyse de surface Il ressort des résultats des analyses BET (Tableau III.2.2) que les différents paramètres structuraux dépendent de la nature de l’élément métallique (M) dans le polyoxométalate. Ainsi, la surface spécifique et la surface des micropores du sel CoPMo12 (123 et 105,8m2/g respectivement) sont largement supérieurs à ceux des sels NiPMo12 (29 et 25,6m2/g respectivement) et FePMo12 (25 et 14,3 m2/g respectivement). En revanche, le volume des micropores et le diamètre moyen des pores de FePMo12 sont les plus élevés (6,210-3 cm3/g contre 1,110-2-4,610-2 cm3/g et 35,4Å contre 20,3- 21,9Å respectivement). Les isothermes d’adsorption-désorption d’azote des différents sels sont de type II et leur hystérésis de type B montrant ainsi que les sels sont mésoporeux, confirmés par la valeur du diamètre moyen du pore (20<d<500Å). Tableau. III.2.2 : Surface spécifique, volume et surface des micropores et diamètre moyen des pores des sels MPMo12. solide FePMo12 CoPMo12 NiPMo12 SBET (m2/g) 25 123 29 Volume des micropores (cm3/g) 6.210-3 4.610-2 1.110-2 Surface des micropores (m2/g) 14.3 105.8 25.6 Volume des pores (cm3/g) 2.110-2 6.810-2 1.510-2 Diamètre moyen des pores (Å) 35.4 21.9 20.3 III.2.3 Spectroscopie UV-Visible En spectroscopie UV-Visible , une large bande d’absorption de transfert de charge oxygène-molybdène (VI) est observée dans la région 250-500nm pour l’ensemble des sels MPMo12 (Fig.III.2.1) [12]. En plus de cette bande, une autre de plus faible intensité est observée dans la région 620-720nm en présence de CoPMo12 attribuée soit à la transition d-d des espèces d1Mo(V) en coordination octaédrique et / ou aux espèces d6Co(III) également en coordination octaédrique [20, 21, 37]. Ces observations suggèrent une réduction partielle des ions Mo (VI) en Mo (V) par les ions cobalt. Cette particularité du 16 sel de cobalt pourrait expliquer la valeur élevée de sa surface spécifique (123 m2/g) comparée à celles des sels à base de fer et du nickel (25-29m2/g). Absorbance 2,5 2 1,5 Ni 1 Fe 0,5 Co 0 200 300 400 500 600 700 800 wa ve le nght (nm) Figure III.2.1 : Spectres UV -Visible des sels MPMo12 III.2.4 Spectroscopie Infra Rouge (FTIR) Les spectres IR (Fig. III.2.2) des sels MPMo12 présentent les bandes de vibration caractéristiques des différentes liaisons phosphore-oxygène et métal-oxygène de l’anion de Keggin dans le domaine spectral 1200-300cm-1. La comparaison des fréquences des bandes de vibration IR des différents solides ne révèle pas une variation significative de fréquence des différentes bandes entre (NH4)3PMo12O40, H3PMo12O40 et les sels MPMo12 comme le montre la tableau III.2.3. Ce résultat est attendu vue que l’unité de Keggin PMo 12O403- n’a pas été modifiée. 120 Transmitance (%) 100 Ni 80 Co 60 40 20 Fe 0 1900 1700 1500 1300 1100 900 Nombre d'onde (cm-1) 700 500 300 Figure III.2.2 : Spectres IR des sels MPMo12 III.2.5 Diffraction des RX Les diffractogrammes RX des sels MPMo12 (Fig.III.2.3) sont isotypes de celui du sel d’ammonium, (NH4)3PMo12O40. Ce dernier cristallise dans une structure cubique 17 (JCPDS 09-0412). Ce résultat suggère que la substitution partielle des ions ammonium par l’ion du métal de transition n’a pas affecté le réseau cristallin du sel (NH4)3PMo12O40. Ni Fe Co 6 10 20 30 40 50 60 2 -Theta - Figure III.2.3 : Diffractogrammes RX des sels MPMo12 III.2.6 Thermodiffraction des rayons X (DRX) à température programmée Les évolutions structurales de (NH4)3PMo12O40 et des sels MPMo12, en fonction de la température de traitement, réalisées dans les mêmes conditions que celles de la série PMo11M (voir section II.2.7) sont similaires. A titre d’exemple, on prendra le cas du sel FePMo12. La Figure III.2.4 montre que la structure cubique de ce sel est maintenue jusqu’aux environs de 400°C. De 410 à 450°C, le sel se décompose en oxyde de molybdène avec 2 phases différentes α et β. Au-delà de 470°C, la phase β se transforme en phase α. Les deux phases α et β de l’oxyde de molybdène ont déjà été observées dans la décomposition de l’acide H3PMo12 [25] et celle des sels (NH4)x XyPMo12O40 (X : Sb, Sn et βMoO3 Bi)[38]. 430°C 7 10 20 30 40 2-Theta (deg.) Figure III.2.4:Thermodiffractogramme du FePMo12 III.2.7 Analyse thermique ATG-DSC La stabilité thermique des sels MPMo12 a été examinée par TG et DSC. Plusieurs pertes de masse similaires et distinctes sont observées entre 30 et 425° (Tableau. III.2.3). 18 A des températures inférieures à 200°C, la perte de masse est attribuée au départ de l’eau d’hydratation (8-30%), au-delà de cette température, elle est associée au départ de l’eau de coordination des ions Fe3+, Ni2+ ou Co2+ et à celui des ions ammonium sous forme d’ammoniac ou d’azote. L’analyse par DSC montre, pour l’ensemble des sels, des pics endothermiques correspondant aux pertes de masse de l’eau d’hydratation entre 30 et 80°C et de l’ammoniac et de l’eau de coordination entre 200 et 395°C. Aux alentours de 440°C, un pic exothermique intense apparaît attribué à la cristallisation des oxydes (P 2O5, MoO3, MO) provenant de la décomposition du sel. Tableau. III.2. 3 : Résultats des analyses ATG-DSC des sels MPMo12 solide FePMo12 CoPMo12 NiPMo12 Départ de l’eau d’hydratation 220 180 120 T (°C) Départ des ions ammoniums et l’eau de coordination 390 375 - Décomposition du solide 440 430 480 III.3 Test catalytique à l’isopropanol La réaction de conversion de l’isopropanol sur les sels MPMo12 a été réalisée dans l’intervalle de température 150-250°C, dans les mêmes conditions opératoires que celles correspondant aux sels PMo11M. Les résultats catalytiques sont représentés dans le Tableau III.3.1. Pour l’ensemble des sels MPMo12, la conversion et la sélectivité en propène augmentent considérablement avec la température alors que les sélectivités en éther et en acétone subissent une diminution. Ainsi, la conversion passe de 39-54% à 150°C à 93- 100% à 200-250°C et la sélectivité en propène de 62-73% à 150°C à 92-100% à 200-250°C. Les sélectivités en acétone à basse température (150°C) sont de l’ordre de 20- 33%. Il ressort des résultats de cette étude que la déshydratation de l’alcool en propène qui traduit le caractère acide du sel, avec des rapports va/vp inférieurs à 0,55, est prédominante. Il est à noter qu’à 150°C, FePMo12 et CoPMo12 ont une activité déshydratante similaire mais inférieure à celle de NiPMo12 (0,16- 0,17 contre 0,24). Parmi ces sels, celui à base de cobalt présente l’activité déshydrogénante la plus élevée (150°C), liée à la présence de sites redox CoIII/CoII et MoVI/ MoV comme le montre l’analyse par spectroscopie UV-Visible. L’acidité élevée des ces sels peut être liée à la présence des molécules d’eau de coordination de l’ion Mn+ et à celle des ions acides NH4+ 19 qui n’ont pas été évacués après prétraitement. Cette observation rejoint celle de Niiyama et coll [33] qui ont montré que l’activité déshydratante des solides peut être liée à l’eau de coordination de l’élément M qui génère des protons selon l’équation suivante : Mn+ + mH2O [M (H2O)m-1(OH)](n-1)+ + H+ (2) Tableau III .3.1 : Performances catalytiques des différents solides dans la réaction de conversion de l’isopropanol (150-250°C°). solide FePMo12 CoPMo12 NiPMo12 T°C Con Sel P Sel Et Sel Ac VP VAc VAC/VP 150 200 250 39,2 100 100 73,00 98,00 100 7,10 0,00 0,00 19,90 2,00 0,00 0,17 0,60 0,61 0,05 0,01 0,00 0,27 0,02 0,00 150 200 250 42,12 100 100 62,00 92,50 100 5,10 0,00 0,00 32,90 7,50 0,00 0,16 0,60 0,55 0,08 0 ,01 0,06 0,53 0,02 0,11 150 200 250 54,00 93,30 100 73,80 96,00 98,20 6,75 0,00 0,00 19,45 4,00 1,80 0,24 0,54 0,60 0,06 0,02 0,01 0,26 0,04 0,02 Con : conversion % Sel : sélectivité % V : vitesse de formation en mole. s-1 .m-2 III.4 Réactivité des sels MPMo12 dans la réaction de déshydrogénation oxydante (ODH) du propane Les propriétés catalytiques des sels MPMo12 ont été examinées dans l’oxydation du propane dans un intervalle de température de 380-420°C avec 2 vitesses de chauffe différentes 5 ou 9°C/min. Les produits majoritaires détectés dans nos conditions sont le propène (C3=), l’acroléine (Acr) et les oxydes de carbone (COx) et les produits minoritaires l’éthane et l’éthylène (notés C2) et l’acétone (Ac). Les résultats des tableaux III.4.1 et III.4.2, obtenus une fois le régime stationnaire atteint, montrent que les performances catalytiques des sels sont très sensibles à la vitesse de chauffe. Ainsi, la conversion du propane et les sélectivités en propène et acroléine obtenues avec une vitesse de chauffe de 9°C/min sont supérieures à celles correspondant à la vitesse de 5°C/min. En revanche, une faible vitesse de chauffe favorise la combustion du propane. Ces résultats pourraient être attribués au fait qu’une vitesse de chauffe élevée conduirait plus rapidement à un état réduit du catalyseur favorable à l’oxydation du propane en produits valorisables (propène et acroléine) et défavorable à sa combustion. Il est également probable qu’une vitesse de chauffe élevée modifierait la morphologie du solide. Il a été rapporté par Holles et coll [39] 20 que l’oxydation du propane en acide acrylique et celle du n-butane en acide maléique sur des phosphomolybdates modifiés tels que les sels de pyridinium, pyrNbPMo12 et pyrNbPMo11V dépendaient des conditions opératoires (rapport alcane/oxygène et débit réactionnel). L’activité des solides MPMo12 ne semble pas être très sensible à l’augmentation de la température de réaction de 380 à 400°C. Alors qu’à 420°C, les activités catalytiques des différents sels diminuent fortement. La conversion passe ainsi de 12-27% à 7-8% pour une vitesse de chauffe de 5°C/min et de 18-34% à 14-19% pour une vitesse de chauffe de 9°C/min. Cette diminution d’activité peut s’expliquer par le fait qu’à cette température (420°C) le catalyseur est sous d’un mélange d’oxydes (MoO3, MO ou M2O3 et P2O5) et non d’hétéropolyanion [40] Ces oxydes favorisent la réaction de combustion de l’alcane, confirmée par la sélectivité élevée en COx (71-79%). La distribution des produits de la réaction dépend de la nature de l’ion métallique M et de l’état du catalyseur comme le montrent les tableaux III.4.1 et III.4.2. A 380°C, lorsque le catalyseur est sous forme hétéropolyanionique, FePMo12 favorise la formation du propène (78- 86% de sélectivité), tandis que l’acroléine est plus favorisée en présence de CoPMo12 et NiPMo12. Le résultat le plus important de cette étude concerne le sel FePMo12 prétraité et testé à la même température de 380°C et avec une vitesse de chauffe de 9°C/min. Un rendement en propène de 17,2 % est obtenu avec un faible rendement en oxydes de carbone (3,0%). Ce comportement particulier peut être expliqué par le caractère acide de l’ion ferrique comme nous l’avons montré dans une étude antérieure [21]. Il a été également signalé [41] par Marchal-Roch et coll. que l’introduction des ions Fe3+ dans le polyoxométallate conduisait à la formation des espèces [FeOH]2+ et [Fe(OH)2]+ qui peuvent augmenter l’acidité du catalyseur favorable à l’activation de la liaison C-C. Ces résultats montrent que l’effet couplé métal de transition - ions ammonium dans le polyoxométallate peut conduire à un catalyseur actif dans l’oxydation du propane et sélectif en produits valorisants tels le propène et l’acroléine. 21 Tableau.III.4.1: Performances catalytiques des différents sels testés dans l’oxydation du propane avec une vitesse de chauffe de 5°C/min Catalyseur NiPMo12 FePMo12 CoPMo12 T(°C) Conv (%) S.C3=% S.Ac % S.Acr % S.C2 % S.COx % 380 400 420 380 400 420 380 400 420 25 27 7 10 12 7 12 12 8 20 18 25 78 28 14 38 32.6 24 * * * * * * * * * 15 9 1 5 24 15 14 15 4.6 0.1 * 0,2 13 8 6 0.1 0.4 0.4 64.9 73 74 4 40 65 47.9 52 71 Tableau. III.4.2: Performances catalytiques des différents sels testés dans l’oxydation du propane avec une vitesse de chauffe de 9°C/min Catalyseur T(°C) Conv (%) S.C3=% S.Ac % S.Acr % S.C2 % S.COx% 380 28 29 4 22 2 43 NiPMo12 400 34 24 9 16 3 48 420 15 32 * 10 2 56 380 20 86 * 12.5 0 1.5 FePMo12 400 26 48 * 20.2 0.8 31 420 19 58 * 12.1 0.9 29 380 18 45 6 20 2 27 CoPMo12 400 20 39 0.2 23 3.8 34 420 14 50 * 18 4 28 *indique des traces de produit. Conditions de réaction: C3H8/O2/N2=20/20/60, débit=40ml.min-1, masse du catalyseur: 0.2g, prétraitement: 1h/O2, III.5 Conclusion La caractérisation physico-chimique des sels mixtes (NH4)2.5MzHyPMo12O40 avec Mn+: Ni2+, Co2+ ou Fe3 a montré que les sels sont de nature mésoporeuse et que la structure de Keggin du polyanion [PMo12O40]3-- et la structure cristalline cubique du sel (NH4)3PMo12O40 sont conservées. Le test à l’isopropanol a mis en évidence les propriétés acides prédominantes de ces sels. Ces derniers se sont avérés actifs et sélectifs en propène et en acroléine dans l’oxydation du propane à 380°C en particulier avec une vitesse de chauffe de 9°C/min. Un rendement en propène de 17,2% est obtenu avec un faible rendement en oxydes de carbone (3,0%) en présence de FePMo12 à 380°C. 22 IV. CONCLUSION GENERALE Deux séries d’hétéropolysels de formule (NH4)6HPMo11MO40 (noté PMo11M) et (NH4)2,5MzHyPMo12O40 (noté MPMo12) avec M : Ni, Co ou Fe, ont été préparés et caractérisés par spectroscopies Infra-Rouge (IR) et UV-Visible, RMN du phosphore, diffraction des rayons X (DRX), thermo diffraction des rayons X (XRTD), analyse thermique (ATG, DSC) et analyse BET. L’objectif de ce travail a été d’examiner l’influence de la nature de l’élément de transition M et de sa position anionique ou cationique dans l’hétéropolysel sur ses caractéristiques physico-chimiques et ses propriétés acido-basiques, rédox et catalytique. L’analyse élémentaire a confirmé la formulation des différents sels et les principaux résultats obtenus dans les caractérisations physico-chimiques des deux séries de sels PMo11M et MPMo12 (M : Ni, Co ou Fe) ont montré leur différence, liée à la position anionique ou cationique de l’élément M dans le polyoxométallate. Ainsi, l’analyse par spectroscopie Infra-rouge a montré que tous les sels préparés présentent les bandes de vibration caractéristiques de l’anion de Keggin, [PMo12O40]3-. Cependant, en présence des sels PMo11M, en plus d’un léger déplacement des bandes de l’anion de Keggin vers les faibles fréquences, des épaulements sur la bande P-Oa apparaissent, confirmant ainsi la substitution de l’atome de molybdène par un métal de transition. Les diffractogrammes RX des sels, MPMo12, sont analogues à celui du sel (NH4)3PMo12O40 qui cristallise dans une structure cubique Pnˉ3m alors que ceux des sels PMo11M sont différents. La spectroscopie UV-Visible a montré que les sels à base de cobalt sont dans un état partiellement réduit. Il ressort des résultats des analyses BET que les propriétés de surface, dépendent aussi bien de la composition de l’unité de Keggin que de celle du contre-ion. Les surfaces spécifiques des sels MPMo12 sont largement supérieures à celles des PMo11M. Les résultats des analyses thermiques (TG-DSC) montrent que la série MPMo12 est moins stable que la série PMo11M. L’examen des propriétés acide et redox des différents sels en utilisant la réaction modèle de décomposition de l’isopropanol a montré le caractère bifonctionel de ce type de composé et également leur différence en fonction de la nature de l’élément M et de sa position dans le polyoxométallate. L’étude de la réactivité de ces sels dans la réaction de déshydrogénation oxydante du propane a permis de cerner l’influence des conditions opératoires (température, vitesse de chauffe) et de la nature et de la position (comme ion de coordination ou comme contre- 23 ion) de l’élément de transition M, dans le polyoxométallate sur les performances catalytiques. Les hétéropolysels se sont avérés être actifs et sélectifs en propène et/ou acroléine avec des comportements catalytiques différents. Les meilleurs rendements en produits sont obtenus à basse température de réaction 380°C et avec une vitesse de chauffe de 9°C/min. Parmi, les différents sels étudiés, FePMo12 se présente comme le catalyseur le plus actif et le plus sélectif en propène avec un rendement de 17,2% et un rendement en oxydes de carbone que de 3%. V.REFERENCES [1] Mizuno N, Tateishi M, Iwamoto M., Appl. Catal, 1994, A:Gen, 118: L1. [2] Mizuno N, Tateishi M, Iwamoto M., Appl. Catal, 1995, A:Gen, 128: L165. 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