Douleur et troubles du sommeil - STA HealthCare Communications

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Tout sur la toux
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le clinicien juillet/août 2011
Un hypnotique est un médicament destiné à favoriser l’endormissement et le
maintien du sommeil. La grande majorité des hypnotiques appartient à la
classe des benzodiazépines, mais leur utilisation chronique est un facteur pouvant
pertuer l’état d’insomnie. Un grand nombre de pathologies chroniques
douloureuses sont associées à des troubles du sommeil, telles que la fibromyalgie,
les céphalées, les maux de dos (pour lesquels environ deux tiers des patients souf-
frent de troubles du sommeil) et les douleurs musculaires. De plus, il a été noté
que plus la douleur est sévère, plus les chances de perturbations du sommeil sont
grandes (Lavigne et coll., 2004).
Certains analgésiques peuvent altérer l’architecture du sommeil, rendant ainsi
ce dernier plus difficile, même s’ils sont efficaces dans le traitement de la douleur.
Alors, comment pouvons-nous traiter un patient souffrant de douleur chronique
qui présente des troubles du sommeil sans aggraver ces derniers? Malheureuse-
ment, il existe peu de données quant aux effets des analgésiques sur le sommeil,
en particulier pour les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et les opioïdes,
qui sont les plus prescrits. Ainsi, à l’heure actuelle, il n’existe pas de consensus
dans la littérature internationale quant à la prise en charge des patients présentant
douleurs et troubles du sommeil.
Défis du traitement commun de la douleur
et de linsomnie
De nombreux médicaments aident au traitement de la douleur ou des troubles du
sommeil, mais leur combinaison peut être délétère et troubler l’état de vigilance
diurne ou la qualité du sommeil. Un autre défi est de savoir à quel moment admi-
nistrer les analgésiques de manière à être aussi efficace que possible, tout en
n’aggravant pas les troubles du sommeil.
Les problèmes de douleur et de sommeil sont fréquemment liés et ils ne doivent
pas être consirés isolément (Meyer-Rosberg et coll., 2001; Linton &
MacDonald, 2007). Ainsi, la prévalence des troubles du sommeil chez les patients
souffrant de douleur chronique est plus grande que dans la population générale.
Les troubles du sommeil et la douleur chronique interagissent. Un manque de
sommeil peut donc déclencher une diminution de la tolérance à la douleur et du
seuil douloureux. À l’opposé, la douleur chronique peut conduire à un sommeil non
réparateur et à une fragmentation du sommeil dont les effets principaux sont :
des changements fréquents de stades de sommeil;
une augmentation des réveils nocturnes;
Douleur et troubles du sommeil :
l’approche pharmacologique
Pierre Beaulieu, M.D., Ph.D.
Article basé sur
une présentation
donnée dans le
cadre du
Symposium 2010
sur la douleur :
Douleur et troubles
du sommeil,
organisé par
l’Université de
Sherbrooke, à
Magog-Orford, avril
2010.
Un manque
de sommeil
peut donc
déclencher
une diminu-
tion de la
tolérance à
la douleur
et du seuil
douloureux.
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Douleur et troubles du sommeil
le clinicien juillet/août 2011
une diminution du temps passé en stade 3 et 4 (sommeil profond), puis en som-
meil paradoxal ou REM (Rapid Eye Movement);
une augmentation de la durée des stades 1 et 2 (sommeil superficiel);
un plus grand nombre de mouvements du corps;
plus d’éveils.
La Figure 1 montre les périodes de perception maximale de la douleur pour
certaines maladies (Bentley, 2007).
Effets des analgésiques sur l’achitecture
du sommeil
Le patient souffrant peut, grâce au traitement de sa douleur, bénéficier des effets
sédatifs de certains analgésiques pour obtenir une meilleure qualité de sommeil
(Tableau 1). Néanmoins, peu de données dans la littérature permettent de conclure
avec certitude de l’effet des divers analgésiques sur la structure du sommeil, pas
plus que sur l’efficacité des différentes substances.
Il a été démontré que le stade 2 du sommeil non REM est celui le plus perturbé
par la douleur aiguë. Les effets sur les autres stades plus profonds (3 et 4) sont
moins marqués. De plus, les seuils de perturbation du sommeil par la douleur sont
plus élevés pendant le sommeil REM. Ces anomalies peuvent aller de brèves
périodes d’éveil (3 à 15 sec) à un réveil complet d’une minute ou plus.
Les rares études au sujet des effets des analgésiques sur le sommeil (Baker et
coll., 2002) ont montré que l’acétaminophène ne semble pas altérer la structure du
sommeil chez le sujet sain, alors que l’AAS et les AINS ont probablement un effet
plus négatif chez ces mêmes sujets (Gengo et coll., 2006).
Opides
Concernant les opioïdes, il faut mentionner la rareté des données humaines
disponibles quant à leur effet à court et long terme sur l’architecture du sommeil.
Néanmoins, dans une étude effectuée auprès de sept sujets ayant reçu, de façon
aléatoire, de la morphine ou un placebo, les données de polysomnographie ont
montré que la morphine altère l’architecture du sommeil en réduisant les stades 3
et 4 et plus ou moins le sommeil paradoxal, tout en augmentant le stade 2 du som-
meil (Shaw et coll., 2005). Des résultats identiques ont été obtenus par Dimsdale
et coll. (2007) avec la morphine en libération prolongée et la méthadone. Ainsi,
Figure 1. Périodes de perception maximale de la douleur dans certaines pathologies en fonction du nycthémère
Modifiée d’après Bentley, 2007.
Il a été
démontré
que le
stade 2 du
sommeil
non REM
est celui
le plus
perturbé
par la
douleur
aiguë.
Au réveil Midi Soirée Nuit
• Migraine Douleur cancéreuse Colique biliaire • Douleurs
Céphalées matinales Douleur du travail • Céphalées dentaires
Angine de poitrine Douleur associée à une • Pic de douleur si fibromyalgie ou Cervicalgies
Polyarthrite rhumatoïde lésion de la mœlle épinière désordre temporo-mandibulaire Dorsalgies
6 h 12 h 18 h 0 h
Dr Beaulieu enseigne au
département de pharmacologie
de l’Université de Montréal.
Douleur et troubles du sommeil
les opioïdes semblent perturber le sommeil, et ce, même en absence de
douleur. Ils semblent aussi altérer l’architecture du sommeil, ce qui est
un problème clinique significatif.
Antidépresseurs
Les antidépresseurs sont fréquemment utilisés chez les patients souffrant
de douleur neuropathique ou de fibromyalgie. Ils entraînent une sédation
(dont l’intensité varie selon les substances) et des modifications du som-
meil.
Ainsi, en ce qui concerne les antidépresseurs tricycliques, l’amitripty-
line est « intéressante » à faible dose le soir. Les inhibiteurs sélectifs de
la recapture de la sérotonine (ISRS : fluoxétine, citalopram, etc.), de la
sérotonine et de la noradrénaline (IRSN : venlafaxine, duloxétine, etc.)
augmentent plutôt l’éveil et les réveils, en entraînant une suppression du
sommeil paradoxal. Par contre, la duloxétine a donné des résultats
intéressants dans le traitement de la douleur neuropathique chez les
diabétiques.
Pour ce qui est des antidépresseurs atypiques (bupropion, trazodone
et néfazodone), ils sont moins susceptibles de perturber les stades du
sommeil et ne possèdent pas d’effets sur le sommeil REM. Finalement,
une méta-analyse a montré que l’utilisation à court terme d’amitriptyline
et de duloxétine peut être considérée pour le traitement de la douleur et
des troubles du sommeil (Häuser et coll., 2009).
Anticonvulsivants
Les sujets souffrant de douleur chronique prennent des anticonvulsi-
vants pour traiter des céphalées, des névralgies post-herpétiques ou du
trijumeau et pour toute autre douleur neuropathique. La majorité des
Tableau 1
Résumé des effets des divers analgésiques sur l’architecture du sommeil
Stades du sommeil
Médicaments Stades 1 et 2 Stades 3 et 4 Sommeil paradoxal
Acétaminophène Pas de changement Pas de changement Pas de changement
AINS* Pas de changement Diminution? Pas de changement
Opioïdes Augmentation Diminution Diminution
Antidépresseurs Fonction de la substance Augmentation Diminution
Anticonvulsivants Pas de changement Fonction de la substance Fonction de la substance
Gabapentinoïdes** Pas de changement Augmentation Pas de changement
Cannabinoïdes Augmentation Fonction de la substance Fonction de la substance
*anti-inflammatoires non stéroïdiens; ** gabapentine et prégabaline. Modifié d’après Cairns, 2007.
Les plus
anciens
anticonvulsivants
semblent avoir
des effets
négatifs sur
l’architecture du
sommeil.
Douleur et troubles du sommeil
Une bibliographie
est disponible,
joignez-nous à
l’adresse suivante :
clinicien@sta.ca
anticonvulsivants produit une normalisation et une stabilisation du sommeil qui
seraient indépendantes de l’activité antiépileptique.
Les plus anciens anticonvulsivants semblent avoir des effets négatifs sur l’ar-
chitecture du sommeil, mais les gabapentinoïdes améliorent les troubles du som-
meil associés à la douleur neuropathique, selon de nombreuses études (Sabatowski
et coll., 2004; Irving et coll., 2009; Straube et coll., 2010).
Cannabinoïdes
Le cannabis est disponible au Canada sous plusieurs formes : marijuana, atomiseur
de Δ9-tétrahydrocannabinole (THC) et de cannabidiol, nabilone et dronabinol
(composés synthétiques du THC), pour le traitement de certaines conditions
douloureuses et pour le traitement des nausées et vomissements (Desroches et
Beaulieu, 2008). Des études récentes montrent un potentiel intéressant des
cannabinoïdes dans le traitement de la douleur chronique et des troubles du som-
meil (Nurmikko et coll., 2007. Ware et coll., 2010.).
Hypnotiques
Une autre question est actuellement posée : est-ce que le traitement adéquat de
l’insomnie causée par la douleur peut soulager la douleur? Un exemple récent con-
cerne les effets de l’eszopiclone sur l’insomnie chez des patients atteints de pol-
yarthrite rhumatoïde (Roth et coll., 2009). La moitié des
patients sous eszopiclone ne souffrait pas d’insomnie après
quatre semaines vs 30 % des patients sous placebo.
L’eszopiclone était également supérieur dans des scores de
douleurs et de qualité de vie.
Synthèse des données
La relation complexe qu’entretiennent troubles du sommeil et
douleur pose le problème délicat du traitement le mieux adap-
té pour le sujet. La prise en charge des problèmes de sommeil
passe par une détection du trouble primaire, une hygiène
adéquate et, si nécessaire, une intervention pharmacologique
peut être envisagée (Tableau 2). Le but est d’obtenir une effi-
cience de sommeil ≥ 80 %. Dans tous les cas, il est important
de prendre en compte la nature de l’interaction bidirection-
nelle entre sommeil et douleur, et de traiter la douleur en pen-
sant aux troubles du sommeil possiblement induits par le
traitement. La combinaison idéale entre analgésiques et hyp-
notiques reste toujours à trouver.
Douleur et troubles du sommeil
Modifié d’après Beaulieu & Walczak, 2007.
C
Étape 1 – Détection des troubles
du sommeil primaire
Consultation avec un médecin du
sommeil pour éliminer la présence
d’apnées du sommeil, d’insomnie, de
mouvements périodiques des
membres, etc.
Étape 2 – Hygiène de sommeil
adéquate
• Temps total de sommeil
(6 à 9 heures selon le sujet);
• Environnement du sommeil
(calme < 35 dB; lit confortable, air
frais, etc.);
• Cycle d’éveil et de sommeil
(sieste < 20 minutes);
• Habitudes de vie
(contrôle de la consommation de
café, tabac, diète, exercice, etc.);
Étape 3 – Intervention
pharmacologique
À court terme
Analgésiques
• acétaminophène ± AINS
(ex. : ibuprofène) dans la soirée
Condition légère à modérée
Analgésiques
• acétaminophène ± ibuprofène dans
la soirée
Facilitateurs de sommeil
• eszopiclone
• zaléplone
• zopliclone
• zolpidem
• témazepam
Cas graves
• gabapentine ou prégabaline
• faible dose d’amitriptyline en soirée
• duloxétine
• trazodone
• néfazodone
• ± morphine
Tableau 2
Propositions pour la gestion de la douleur et des troubles du sommeil
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