l a r o t t i l u d n o i L'urbanisat 201 0 0à 0 8 1 e d e u iq n Étude diachro Réseau d'Observation du Littoral Normand et Picard La litturbanisation est le terme défini par Gérard-François Dumont afin de caractériser le « développement du peuplement des espaces littoraux et sublittoraux » et la multiplication des infrastructures servant de support à ce développement. En 2008, la densité moyenne de population au sein des communes littorales de Normandie et Picardie était de 517 habitants/ km² (de 68 pour le département de l'Eure à 620 pour la Seine-Maritime). Contexte de l'étude Depuis près de deux siècles, le littoral normand et picard est à la croisée de pressions à la fois naturelles et anthropiques. Il est d'une part soumis aux processus météo-marins (vent, température, précipitations...) affectant la mobilité du trait de côte, et d'autre part, à une pression foncière marquant de plus en plus le territoire. Ces dynamiques antagonistes ne sont pas sans poser le problème de la gestion des vulnérabilités en milieu littoral. Deux ans après la tempête Xynthia et ses conséquences catastrophiques sur les côtes atlantiques, le ROLNP a souhaité faire le point sur l'évolution historique de l'étalement urbain le long des trois façades littorales de Normandie et de Picardie. L'urbanisation de l'estuaire de la Dives (Calvados) Crédit photo : J-M Pasquon©, 2008 Un territoire à enjeu C. Meur Ferrec et al., « Protection contre la mer ou repli stratégique : quelles stratégies face aux risques d’érosion-submersion », 2004 > Historique Rétrospective du phénomène p.2 1 A l'heure des préoccupations liées au changement climatique et à l'élévation globale du niveau marin, quelle attitude adopter face aux risques conjoints de submersion marine et d'érosion côtière ? Les enjeux sont particulièrement importants sur un territoire pouvant s'avérer à la fois attractif et hostile pour l'homme et ses multiples activités (immobilier, tourisme, industrie, transport, activités portuaires...). L'espace disponible, déjà limité par nature, se raréfie d'autant plus avec la densification du bâti s'accentuant depuis les années 1950 et la dynamique de recul touchant 25% de nos littoraux. Les régions Normandie et Picardie suivent la tendance nationale avec pas moins de 11,7% de la population vivant dans les communes littorales, alors que ces dernières ne représentent que 4,7% du territoire des trois régions. > Cartographie Les supports de diffusion de l'étude p.3 > Perspectives Des utilisations diverses p.4 Historique de l'urbanisation Une étude retraçant plusieurs siècles d'urbanisation littorale > EXPLOITATION DES DONNÉES MAJIC Cette étude a été réalisée à partir des fichiers mis à disposition par le CETE Nord-Picardie issus de la base « Majic III » de la Direction générale des finances publiques. Ces fichiers renseignent, entres autres informations, les dates de construction de la plupart des parcelles cadastrales des communes littorales. Au préalable anonymisés, ils ont permis de caractériser la date de construction de la majorité des bâtiments des communes côtières de Normandie et de Picardie par correspondance spatiale entre le bâtiment et la parcelle référente. Ces fichiers permettent, pour les parcelles les plus anciennes, de dater certains bâtiments depuis le XIIIème siècle, mais de façon plus fine, depuis le début du XIXe siècle. 85% des bâtiments ont ainsi pu être renseignés. Une grande partie des parcelles nonrenseignées concerne des bâtiments à vocation industrielle. Évolution de la surface urbanisée des communes littorales par département et par décennie entre 1900 et 2010 CHIFFRES CLÉS : 290 061 bâtiments datés entre 1200 et 2010 (soit 3 331,26ha urbanisés), dont : - 25 152 antérieurs à 1800 (291,68ha) - 96 786 antérieurs à 1900 (973,67ha ) - 147 476 antérieurs à 1950 (1 396,42ha) - 227 624 antérieurs à 1980 (2321,48ha) > TENDANCES ET PREMIERS CONSTATS Deux pics d'urbanisation De l'analyse des résultats obtenus, des grandes tendances se sont dégagées. D'une manière générale, on observe une urbanisation assez dispersée jusqu'au début du XXe siècle avec des villes qui se développent quelques peu dès la seconde moitié du XIXe siècle. Cependant, le processus s'accélère nettement à partir des années 1920 avec la démocratisation des vacances et le développement des grandes stations balnéaires. On observe d'autant plus ce « pic » d'urbanisation en Somme, mais surtout dans le Calvados et en Seine Maritime, territoires où le tourisme, l’hôtellerie et les activités balnéaires se sont vite répandues, devenant le territoire privilégié des vacanciers franciliens. Ces activités induisent un rapprochement considérable des habitations et infrastructures au front de mer. Après une période d'accalmie conséquente durant les années 1940 due au gel des constructions en période de guerre, la croissance reprend de plus belle pour atteindre son apogée dans les années 1970. Ce phénomène est dû aux effets conjoints d'un accroissement massif des activités balnéaires et d'un développement résidentiel en direction de la côte. Ces résidences, généralement principales auprès des grandes agglomérations, deviennent secondaires à mesure que l'on s'éloigne des pôles urbains. On relèvera tout de même le cas particulier de la Seine-Maritime, seul département ayant connu ce second pic d'urbanisation précoce, dès les années 60 (cf : graphique ci-après). 2 Une taille des bâtiments qui augmente La base de données ainsi constituée étant requêtable à toutes les échelles, il devient également possible de caractériser les évolutions internes aux communes. Plus que l'évolution du nombre de bâtiments ou la superficie urbanisée, nous sommes capable de caractériser des indicateurs tels que l'évolution de la taille moyenne des bâtiments (cf. graphique ci-dessous). Un premier constat laisse entendre une diminution progressive de cette surface moyenne jusqu'aux années 50, avant une nette phase de progression semblant se poursuivre de nos jours. Ce phénomène se remarque de façon plus ou moins homogène dans les grandes villes des trois régions et semble pouvoir s'expliquer de deux manières : l'industrialisation croissante depuis l'après-guerre et d'autre part, la construction d'habitations collectives de type « HLM », caractéristiques des années 1960, période à laquelle on remarque l'accroissement le plus remarquable. Évolution de la taille moyenne des bâtiments de quelques villes du littoral normand et picard entre 1900 et 2010 Les supports de diffusion de l'étude Une mise en valeur de la donnée par les cartes > LES VIDÉOS D'EXTENSION URBAINE Une représentation dynamique La base de données générée permet donc de faire des statistiques à toutes les échelles : IRIS, commune, département, région ou tout autre découpage administratif. Cependant la finalité de ce travail est, plus encore que de pouvoir déterminer une évolution temporelle, de spatialiser les données à disposition. Une cartographie évolutive a ainsi été réalisée, permettant de comprendre aisément les dynamiques spatiales d'extension urbaine ayant affecté le territoire. Le référentiel spatial étant le bâtiment, il a été choisi de travailler à l'échelle de la commune et de réaliser des vidéos d'extension urbaine. Cet outil didactique permet de comprendre les processus sans avoir besoin d'ouvrir une base de données ou une table attributaire. Parmi l'ensemble des communes littorales, une centaine a fait l'objet d'une vidéo (mais cette démarche peut-être réalisée pour l'ensemble des communes). Il s'agit des communes ayant : ● des enjeux économiques et humains jugés importants ● fait l'objet de submersions ou d'effondrements ● une proportion importante de bâtiments en zone basse. Communes du littoral normand et picard ayant fait l'objet de vidéos Les vidéos d'extension urbaine concernent : - 42 communes de la Manche - 29 communes du Calvados - 21 communes de Seine-Maritime - 8 communes de la Somme Toutes ces vidéos permettent de caractériser la croissance urbaine des communes concernées entre 1800 et 2010 avec des pas de temps différentiels. En effet, de 1800 à 1900, le pas de temps choisi est celui de la décennie, les dates renseignées étant souvent arrondies pour cette période (visible par une accélération importante du nombre de nouvelles constructions au passage de chaque nouvelle décennie). En revanche, le pas a été réduit à l'année entre 1900 et 2010, période pour laquelle les dates de construction sont plus précisément renseignées. > LA PLATEFORME WEB DU ROLNP Ces données ont pour vocation d'être visualisées et diffusées via la plateforme web du ROLNP (www.rolnp.fr, rubrique ressources/vidéothèque), dans un but de mise à disposition le plus large possible. Les flux d'information (WMS et WFS) pourront être intégrés dans d'autres Systèmes d'Information géographique (SIG) et ainsi être mis à contribution dans le cadre d'études futures. Image extraite de la vidéo d'extension urbaine de la commune de Dieppe (Seine-Maritime), ROLNP 2012 Une densité mise en valeur La densité du bâti a également été déterminée afin de faire ressortir les zones les plus denses et de caractériser l'éventuelle création de bourgs secondaires près du trait de côte. Selon la définition du CERTU (Centre d’études sur les réseaux, les transports, l’urbanisme et les constructions publiques), deux bâtiments font partie d'une même « tache urbaine » lorsqu'ils sont séparés de moins de 100m. L'environnement proche des bâtiments dans ce même rayon a donc été étudié et cinq seuils de densité ont été définis : ● Densité très faible : 1 à 15 bâtiments dans le rayon de 100m ● Densité faible : 16 à 30 bâtiments ● Densité moyenne : 31 à 60 bâtiments ● Densité forte : 61 à 120 bâtiments ● Densité très forte : plus de 120 bâtiments 3 Illustration de la plateforme web du ROLNP (www.rolnp.fr) L'avenir des données produites Exemples de travaux potentiellement réalisables Depuis 2010, une nouvelle politique nationale de gestion des vulnérabilités territoriales en milieu littoral a émergé. Avec elle est née une volonté de connaissance des dynamiques ayant affecté les espaces à risque potentiel. Dans cette optique, les informations générées au travers de la présente étude prennent une place de choix. Elles permettent en effet de créer de la connaissance à différentes échelles temporelles et spatiales. > COMPRÉHENSION DES DYNAMIQUES URBAINES DANS LA BANDE DES 100M > COMPRÉHENSION DES DYNAMIQUES URBAINES EN ZONES BASSES Dans le cadre des travaux engagés par l'État, des démarches ont été menées afin de caractériser les évolutions dans les zones littorales potentiellement à risque. C'est par exemple le cas des zones dites « basses », potentiellement soumises aux submersions marines. L'étude réalisée peut ainsi permettre de mieux comprendre les dynamiques ayant affecté ces espaces, de déterminer l'évolution du nombre de bâtiments présents dans ces zones à risque année après année et ainsi de mettre en avant des seuils d'urbanisation au sein de ces espaces vulnérables. Ce type d'étude devient d'autant plus intéressante et fiable avec l'intégration progressive de modèles numériques de terrain issus des données lidar dans la détermination de zones submersibles. Étalement urbain dans la bande des 100m en Basse-Normandie entre 1900 et 2010 La base de donnée constituée lors de cette étude étant spatialement interrogeable, il devient possible de caractériser les évolutions dans des secteurs spécifiques et soumis à gestion particulière. C'est par exemple le cas des bâtiments construits dans la bande littorale de 100m protégée par la loi littoral de 1986. La figure ci-dessus permet par exemple d'affirmer que le développement urbain de ces espaces a été particulièrement important entre 1955 et 1980 en Basse-Normandie. Il importe désormais de comprendre les raisons de cette urbanisation si proche du trait de côte, et surtout de déterminer la nature des constructions étant intervenues depuis 1986. > DE NOMBREUSES AUTRES POSSIBILITÉS Urbanisation et zones basses à Saint-Germain-sur-Ay (Manche) en 2010, ROLNP 2012 Ces données pourraient donc servir à d'éventuels travaux futurs et les possibilités sont grandes quant à leur utilisation. Il est en effet imaginable de les croiser avec des couches d'informations issues de divers organismes et permettant de ce fait, de créer une donnée nouvelle et de caractériser des dynamiques qui le sont tout autant. Là est bien le rôle du ROLNP : faciliter l'accès à la donnée et mutualiser les efforts et les résultats dans un but de valorisation de la connaissance scientifique. Perspectives Les applications potentielles de cette étude sont nombreuses. Ce travail a d'ailleurs pour vocation de servir de base aux études qui seront réalisées à l'avenir. Elle ne constitue donc absolument pas une fin en soi. Il serait intéressant de compléter les fichiers produits de façon à intégrer des éléments tels que les infrastructures temporaires comme celles des campings qui constituent une véritable source de vulnérabilité face aux risques littoraux. De la même manière, il apparaît essentiel de mettre à jour les fichiers en intégrant au fur et à mesure les bâtiments nouvellement construits mais également de renseigner les bâtiments qui n'ont pu être datés par l'intermédiaire des données Majic. THIRARD Guillaume Octobre 2012 4 Chargé d'étude Géomatique ROLNP Un camping menacé par l'érosion, Lion-sur-Mer (Calvados) Crédit photo : C.Coutinho©, 2007 Réseau d'Observation du littoral Normand et Picard 9, rue Pémagnie - 14 000 CAEN [email protected] - www.rolnp .fr