Les oubliés de l`Alzheimer » : état des lieux et réflexion autour de la

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IFPEK
Institut de Formation Ergothérapie de Rennes
« Les oubliés de l’Alzheimer » : état des lieux et
réflexion autour de la prise en charge en
ergothérapie
UE 6.5.S6
Évaluation de la pratique professionnelle et recherche
Bourdeau Cora
24 MAI 2013
Selon le code de la propriété intellectuelle, toute reproduction intégrale ou partielle faite sans le
consentement de l'auteur est illégale.
IFPEK
Institut de Formation Ergothérapie de Rennes
« Les oubliés de l’Alzheimer » : état des lieux et
réflexion autour de la prise en charge en
ergothérapie
UE 6.5.S6
Évaluation de la pratique professionnelle et recherche
Sous la direction de Madame DIPLAS Caroline
Bourdeau Cora
24 MAI 2013
Remerciements:
J’adresse toute ma gratitude aux personnes qui m’ont aidée dans la réalisation de ce
mémoire.
Tout d’abord, je remercie Mme DIPLAS, directrice de mémoire, pour sa disponibilité,
ses conseils avisés et son accompagnement tout au long de ce travail.
Je remercie également, Mme SILVESTRE pour m’avoir fait part de son savoir, ainsi
que l’ensemble des professionnels qui ont pris le temps de répondre à mes questions.
J’adresse une pensée particulière pour Chloé TARDIVEL et mes proches pour leur
écoute, leurs encouragements et corrections.
Enfin, à mes futurs collègues et amis de promotion je leur dis merci pour leur soutien
et ces trois années de formation.
« Il n’est pas encore démontré que l’oubli existe ; tout ce que nous savons, c’est qu’il n’est
pas en notre pouvoir de nous ressouvenir. »
Friedrich NIETZSCHE, Aurore,1881.
« Le regard que l’on porte, les mots que l’on utilise sont importants, vous en conviendrez, le
poids des mots est énorme… […]
Mais avant d’être une malade de plus, je suis avant tout une personne, complètement,
entièrement. Comme chacun d’entre vous, j’ai des rêves, et par-dessus tout j’aime la vie. Et
certes, j’ai une particularité, une petite distinction, un petit plus…une foutue maladie qui va
peu à peu me faire disparaître à vos yeux.
Peu à peu, on va parler de moi en ma présence, sans même avoir la décence de me
consulter ou de baisser la voix, on m’animera, on m’infantilisera. Car je vais disparaître
derrière cette maladie. »
Association France Alzheimer, Paroles de malades « jeunes », Mars 2012
SOMMAIRE
INTRODUCTION ................................................................................................................................................ 1
1.
PROBLÉMATIQUE ..................................................................................................................................... 2
1.1
1.1.1
L’expérience des stages ..................................................................................................................... 3
1.1.2
Les représentations sociales de la maladie d’Alzheimer ................................................................... 4
1.2
2.
PRÉSENTATION DES CONCEPTS....................................................................................................................... 7
1.2.1
Maladie d’Alzheimer : entre la notion de démence et les avancées contemporaines ..................... 7
1.2.2
Maladie d’Alzheimer et le sujet âgé de 55 à 65 ans ........................................................................ 14
1.2.3
Prise en charge actuelle de la maladie d’Alzheimer ........................................................................ 17
ELÉMENTS DE RECHERCHE ..................................................................................................................... 27
2.1
METHODOLOGIE GENERALE DE LA RECHERCHE ................................................................................................ 27
2.2
MODALITÉS DU RECUEIL DE DONNÉES ........................................................................................................... 27
2.2.1
Outils utilisés ................................................................................................................................... 27
2.2.2
Choix de la population ..................................................................................................................... 28
2.3
3.
L’ORIGINE D’UNE RECHERCHE ........................................................................................................................ 2
ANALYSES DES DONNÉES ............................................................................................................................ 28
2.3.1
Entretiens ........................................................................................................................................ 28
2.3.2
Questionnaires ................................................................................................................................ 38
DISCUSSION ........................................................................................................................................... 43
3.1
VALIDATION DES HYPOTHÈSES DE RECHERCHE ................................................................................................. 43
3.2
CONCLUSION DE LA RECHERCHE ................................................................................................................... 44
3.3
REFLEXION AUTOUR DE LA PRISE EN CHARGE EN ERGOTHERAPIE ......................................................................... 45
3.4
RETOUR CRITIQUE DE LA RECHERCHE............................................................................................................. 47
3.5
OUVERTURE DE LA RECHERCHE .................................................................................................................... 48
CONCLUSION .................................................................................................................................................. 50
BIBLIOGRAPHIE .............................................................................................................................................. 51
ANNEXES ............................................................................................................................................................
GLOSSAIRE .........................................................................................................................................................
INTRODUCTION
Depuis une dizaine d’année, la maladie d’Alzheimer touche de plus en plus de
personne. En France, selon l’INSERM1 en 2007, on estime en moyenne 860 000 personnes
atteintes et 225 0002 nouveaux cas par an. En effet, que ce soit à travers les médias, par
notre entourage proche ou éloigné, nous entendons fréquemment parler de cette pathologie.
Mais savons-nous réellement à quoi correspond-elle et qui touche-t-elle ?
Aujourd’hui, deux courants de recherche se dessinent dans la course à l’origine de cette
pathologie. Certains y voient une des facettes inéluctables de l’augmentation de l’espérance
de vie et donc du vieillissement cérébral. Pour d’autres, comme son nom l’indique, la
maladie d’Alzheimer reste avant tout une pathologie et non un phénomène physiologique.
Reconnue problème de Santé Publique, la maladie d’Alzheimer a été intégrée au groupe
des affections de longue durée, et les soins sont pris en charge entièrement par la sécurité
sociale. En effet, l’Etat fait avancer depuis quelques années les recherches sur les
traitements, les modalités de prise en charge et sur l’information autour de cette maladie,
notamment par la mise en place depuis 2001 de divers « Plans Alzheimer ».
Progressivement, l’on voit apparaître au sein de ces derniers des mesures consacrées à
l’accompagnement des malades Alzheimer jeunes. Mais qui sont-ils ? Comment le système
actuel de santé intègre ce public encore peu connu dans les soins ?
Sur le plan épidémiologique, le diagnostic de la maladie d’Alzheimer chez des adultes
de moins de 55ans est en augmentation. Selon les chiffres actuels issus de la Fondation
pour la recherche sur Alzheimer, on recense environ 200003 personnes de moins de 65 ans
atteintes de la maladie d’Alzheimer en France. Le centre national de référence des malades
Alzheimer jeunes, estime en 2011 l’incidence chez les moins de 60 ans à 2000 nouveaux
cas de maladie d’Alzheimer, et maladies apparentées, par an.
C’est autour de cette thématique que va se consacrer ce mémoire.
Dans un premier temps, une réflexion personnelle enrichie d’apports théoriques va être
présentée. L’analyse des échanges avec les professionnels constituera la deuxième partie
de cet écrit. Enfin, un bilan de la recherche conclura ce mémoire.
1
Insitut National de la Santé et de la Recherche Médicale
2
Fondation recherche Alzheimer. http://fondation-recherche-alzheimer.com/category/comprendre-la-maladie/chiffres/.
Consulté le 27/01/2013.
3
Chiffres issu du site web http://fondation-recherche-alzheimer.com/category/comprendre-la-maladie/chiffres/. Consulté
le 07/01/2013
1
1. PROBLÉMATIQUE
1.1 L’ORIGINE D’UNE RECHERCHE
C’est au cours de ma formation en ergothérapie que j’ai décidé de me pencher plus
particulièrement sur cette pathologie encore mystérieuse pour les scientifiques.
Cette maladie dite dégénérative m’a amenée à m’interroger sur le rôle de
l’ergothérapeute face à ces personnes dont nous savons que la guérison à l’heure actuelle
n’est pas possible : comment adapter sa prise en charge ? De quelles manières rester
rassurant et stimulant pendant toute la durée de son intervention alors que nous savons que
les fonctions des personnes diminuent petit à petit?
Pour les thérapeutes, l’intervention auprès de personnes ayant une pathologie
dégénérative demande beaucoup d’énergie et de remise en cause. « L'ergothérapeute est
un professionnel de santé qui fonde sa pratique sur le lien entre l'activité humaine et la
santé. L'objectif de l'ergothérapie est de maintenir, de restaurer et de permettre les activités
humaines de manière sécurisée, autonome et efficace. Elle prévient, réduit ou supprime les
situations de handicap en tenant compte des habitudes de vie des personnes et de leur
environnement. L'ergothérapeute est l'intermédiaire entre les besoins d'adaptation de la
personne et les exigences de la vie quotidienne en société. »4
Ainsi, dans le cas d’un suivi d’une personne ayant une pathologie dégénérative,
l’ergothérapeute en lien avec le patient se doit de penser au présent, mais également de
prévoir l’avenir en adaptant l’environnement de la personne progressivement. Dans ce
contexte, notre intervention n’a pas pour but de rééduquer, d’augmenter les performances
mais plus d’aménager, de maintenir les capacités restantes.
Sur le plan personnel, l’ergothérapeute est « face à ses limites », il ne peut contrer
l’évolution de la maladie malgré tout ce qui pourra être mis en place : c’est l’image du
professionnel même de santé en tant que « sauveur », « guérisseur » qui est remise en
cause. C’est sous cette première facette que la maladie d’Alzheimer m’a interpellée.
Par la suite, lors de cours théoriques sur la gériatrie, une intervenante nous a
informée sur la maladie d’Alzheimer et sur les adultes jeunes qui pouvaient également en
être atteints. Comme beaucoup, j’associais alors la maladie d’Alzheimer à la personne âgée,
au vieillissement ainsi qu’aux troubles de la mémoire, à la désorientation temporelle et
spatiale. Savoir que des personnes encore professionnellement actives et en pleine force de
4
Définition issu du site web de l’ANFE
http://www.anfe.fr/index.php?option=com_content&view=article&id=47&Itemid=64. Consulté le 07/01/2013
2
l’âge pouvaient être touchées par la maladie Alzheimer m’a interpellée sur mon rôle de future
professionnelle. En effet, que savons-nous vraiment des problématiques qui concernent
cette population d’adultes jeunes ? Les cas précocement diagnostiqués sont-ils nombreux ?
Existe-t-il une spécificité dans l’expression de la maladie ? Comment les malades Alzheimer
jeunes sont-ils pris en charge dans le milieu médical aujourd’hui? Comment se positionne
l’ergothérapeute dans la prise en charge de ces personnes ?
1.1.1 L’EXPERIENCE DES STAGES
Toutes ces interrogations et ces doutes quant aux malades Alzheimer jeunes se sont
accrus au cours de l’un de mes stages au sein d’une équipe spécialisée Alzheimer se
déplaçant au domicile des personnes. Ces équipes ont été conçues dans le cadre du
troisième plan Alzheimer, mesure 6 «Renforcement du soutien à domicile, en favorisant
l’intervention de personnels spécialisés ». Pendant ma période de stage, nous avons reçu
une demande d’intervention au domicile d’une personne âgée tout juste de 60 ans et pour
qui le diagnostic d’une maladie d’Alzheimer venait d’être posé. Cette femme, pédopsychiatre
de métier s’est trouvée dans l’incapacité de continuer sa profession au vue de l’aggravation
des troubles. Lorsque l’ergothérapeute et moi-même avons reçu cette demande, nous avons
été surprises et un peu démunies au regard de l’âge de la personne.
De nouvelles questions ont fait surface : Comment pallier l’arrêt de la profession ?
Quelles ressources sont à la disposition de l’ergothérapeute ? Existe-t-il des structures
adaptées? Comment accompagner l’entourage qui parfois concerne également des enfants,
des adolescents ? Quelles réactions adopter, comment se positionner dans la relation
thérapeutique alors que la précocité de l’atteinte renvoie des émotions, des craintes au
thérapeute ?
Ces questions ont été renforcées par une autre expérience, lors d’une réunion de
coordination au sein d’un accueil de jour, le suivi d’une personne atteinte de la maladie
d’Alzheimer dans cet établissement avait du être interrompu. Cette personne âgée de 62
ans, refusait de rester à l’accueil de jour, elle était attristée et tentait de fuguer. L’une des
explications données à cette réaction est l’effet miroir, c’est « la réflexion de soi à travers le
regard de l’autre(…) il peut être utilisé chez l’autre par le biais de l’observation »5. Ainsi, cette
femme se retrouvait face à des personnes plus âgées dans le centre d’accueil et pour
certaines à des stades plus avancés dans la pathologie ce qui était probablement
5
Margot Phaneuf, inf. PhD.L’effet miroir médiateur de connaissance et d’image de soi. Conférence prononcée dans le cadre
du congrès de philosophie et d’éducation d’Evora, Portugal, février 2005.
3
insupportable. La directrice du centre nous a fait part de son sentiment d’impuissance face à
cette situation, et que, malgré tout ce qui avait été mis en place, rien n’avait fonctionné.
En tant que future professionnelle, je pense qu’il est intéressant et important de se
pencher sur ce type de spécificité d’accompagnement qui peut parfois déstabiliser même les
professionnels du milieu médical. La société, y compris le corps médical, paraît trop peu
sensibilisée à cette population pouvant être touchée par la maladie d’Alzheimer. Alors que,
paradoxalement l’information autour de cette pathologie est de plus en plus médiatisée au
sein de la société, la maladie d’Alzheimer souffre toujours d’une image négative que nous
allons tenter d’appréhender.
1.1.2 LES REPRESENTATIONS SOCIALES DE LA MALADIE
D’ALZHEIMER
Tout comme l’évolution de la recherche autour de cette pathologie, la notion de maladie
d’Alzheimer a également évolué que ce soit dans les termes employés (démence sénile,
démence de type Alzheimer, maladie d’Alzheimer) comme dans les mentalités. La maladie
d’Alzheimer est une pathologie autour de laquelle beaucoup de fausses idées, de
représentations sociales, la plupart du temps négatives, s’installent. Nous entendons par
représentation sociale« une forme de connaissance socialement élaborée et partagée,
ayant une visée pratique et concourant à la construction d'une réalité commune à un
ensemble social ». D. Jodelet (1993)6. Ces représentations, ces croyances influencent le
comportement de chacun, il est donc important de les cerner pour mieux les atténuer.
Nous allons à présent mettre en avant les représentations sociales de la maladie
d’Alzheimer notamment en France, pour le grand public mais aussi pour les professionnels
de santé. Pour cela, nous nous sommes notamment appuyés sur un rapport7 faisant un état
des lieux de ces représentations et de leurs impacts auprès des personnes Alzheimer
précoces.
POUR LE GRAND PUBLIC
La maladie d’Alzheimer est souvent restreinte par l’opinion publique à une perte de
mémoire accompagnant « naturellement » la vieillesse. En effet, les troubles mnésiques,
présents aux phases initiales de la pathologie, sont souvent considérés comme un
phénomène inévitable du vieillissement physiologique de la personne. Bien souvent, les
6
http://www.psychoweb.fr/articles/psychologie-sociale/128-representations-sociales-definition.html.consulté le
31/12/2012.11h30.
7
O. Douville (2008)
4
autres troubles cognitifs (des difficultés d’organisation, de planification des tâches,
d’orientation temporo-spatiale, etc.), associés à la maladie d’Alzheimer sont placés au
second plan, bien que leurs impacts sur la vie quotidienne soient non négligeables. Cette
fausse idée fait parfois reculer le diagnostic et donc la prise en charge de la personne.
Aujourd’hui, quand on parle de la maladie d’Alzheimer, la société, dans sa quasitotalité, y associe les termes de « personne âgée », « grabataire », de « mauvaise
vieillesse », « la maladie du vieux », mais également de « folie ». Comme Ngatcha-Ribert a
pu le mettre en avant en 2008, « la maladie d’Alzheimer demeure la figure archétypique de
la mauvaise vieillesse et une étiquette désignant le naufrage sénile, où se côtoient folie,
déraison, aliénation, pertes, déchéance, mort psychique et sociale »8.
Au vu de ses représentations sociales, nous pouvons donc imaginer que les personnes
jeunes sont difficilement intégrées et considérées par les autres. Selon Fabrice GZIL et
Emmanuel HIRSCH (2012. p90), « Le terme est à ce point connoté « vieillesse » que la
question des malades jeunes pose problème. Sont –ils des vieux avant l’heure (…) et/ou
interrogent-ils, fragilisent-ils nos représentations sociales ? ».
Dès lors, les personnes atteintes de la pathologie à cette âge se trouvent, au fur et
mesure, privées de leurs droits, de leurs capacités d’expression et de décision. Selon
Fabrice GZIL et Emmanuel HIRSCH (2012. p92), « le malade a une conscience affûtée de
son affection et, en même temps, se trouve privé de ses conduites adaptatives et
intégratives, parce que les professionnels et les proches les lui confisquent et se les
approprient en définissant les stratégies qui conviennent. Le malade ne s’appartient plus !
Posons-nous la question de la protection de qui, pour qui. ».
Les sociétés occidentales « hypercognitives » ne laissent pas de place aux personnes
présentant des incapacités cognitives. Discréditées, elles sont bien souvent reléguées au
second plan, perçues comme non-conscientes, et ayant perdues toute intelligence et
capacité d’intention. Ce sont des termes forts mis en avant dans un article de presse par
Scodellaro C. et Al (Décembre 2008).
Ainsi, la perception de l’opinion publique laisse supposer que même dans le milieu
médical, les professionnels de santé ont des représentations, des aprioris au regard de la
maladie d’Alzheimer qui peuvent influencer leur pratique dans le cas de l’accompagnement
d’une personne jeune. Comment ces personnes trouvent-elles leur place dans la société
actuelle ? Comment sont-elles perçues et reçues dans le milieu du soin ?
8
Ngatcha-Ribert L. (2008). Evolution récentes de l’image de la maladie d’Alzheimer, Réalité Familiales, p.85-87.
5
POUR LES PROFESSIONNELS DE SANTE
Comme nous avons pu l’avancer ci-dessus, la maladie d’Alzheimer est étiquetée. Pour
l’opinion publique, tout comme pour des professionnels du milieu médical : la maladie
d’Alzheimer est associée, à défault, uniquement à la personne âgée.
Selon le rapport O.Douville, à l’initiative de la Fondation Médéric Alzheimer, (Mars 2006)
intitulé « Recherche sur les représentations de la maladie d’Alzheimer auprès des
professionnels soignants et aidants », les inquiétudes et images des accompagnants des
personnes porteuses de cette pathologie ont été rescencées.
Ce rapport se base sur des entretiens d’un échantillon de 40 professionnels pouvant
côtoyés des personnes touchées par la maladie d’Alzheimer. D’après cet écrit, cette
pathologie fait peur aux soignants, quelque soit leur fonction, catégorie professionnelle. Elle
est perçue par 32 des professionnels comme étant « l’expression la plus complète de la
perte de soi, la plus radicale, la plus brutale, la plus cruelle. […]. En effet pour beaucoup (17
sujets), cette peur est aussi une peur de subir leur propre vieillissement « comme » le
subissent les patients. La maladie d’Alzheimer souvent définie comme une perte quasi-totale
de la capacité de se souvenir et de se représenter est elle-même de l’ordre du non
représentable. ».
Dans le monde médical, ces représentations sont d’autant plus importantes à prendre
en compte qu’elles peuvent nuire à la relation soignant-soigné. Comme Scodellaro. C. et Al
(Décembre 2008) a pu le mettre en avant dans un article « la honte s’installe : les personnes
malades présentent leur maladie comme un sujet tabou, dont elles répugnent à parler même
avec des professionnels de santé ».
Les représentations sociales portent atteinte de différentes manières à ces personnes, à
leur vécu de la pathologie et à son acceptation. Cette image de la maladie est présente dans
l’esprit d’une majorité de la population, mais également chez des professionnels du milieu
médical. Ainsi, en tant que professionnel, et malgré le fait que cela doit être évité, ces
représentations vont inéluctablement influencer notre entrée en relation et notre
accompagnement de ce public. Dans le cas de personnes atteintes de la pathologie avant 65
ans, comment la prise en charge peut elle être optimale si même les professionnels du
milieu médical ont des difficultés, des réticences à prendre en charge ces personnes ?
L’équipe soignante se doit aussi d’être accompagnée et soutenue lors de la prise en soin de
personnes atteintes précocement de la maladie d’Alzheimer
6
L’IMPACT DE CES REPRESENTATIONS POUR LES MALADES ALZHEIMER JEUNES
Cette pathologie stigmatise les personnes qui en sont porteuses, favorisant une
exclusion sociale. Dès lors, la qualité de vie des « Alzheiler jeune » est impactée
négativement, « Un malade Alzheimer, pour le grand public, c’est quelqu’un de grabataire,
qui ne parle plus, qui ne reconnaît plus son entourage, qui ne connaît plus ni son nom ni son
prénom, qui neconnaît plus rien quoi et qui est un légume. C’est pour cela que nous,
malades « jeunes », par rapport à cette image, on n’est pas du tout crédible »9,
Il est important que ces représentations changent surtout dans le milieu médical, c’est
un réel besoin exprimé par ces personnes, « C’est une maladie dégénérative, on le sait. Ce
qui est fait est fait mais après on peut se battre pour garder un minimum, pour être dans la
société, dans la vie. On ne passe pas forcément de la vie à la mort cérébrale ! » 10 . La
précocité de l’atteinte fait que l’opinion publique et le monde médical ont des difficultés à se
représenter cette population et à comprendre leurs particularités. Cependant, aujourd’hui
avec les témoignages des personnes Alzheimer jeunes et la publication de rapport, la
société commencent à laisser la parole et à comprendre ceux qui ont été pendant
longtemps « les oubliés de l’Alzheimer » (Fabienne PIEL, 2009, p.12).
En effet, la prise en compte de ces représentations et l’évolution de la perception autour
de la maladie d’Alzheimer a été incluse dans le troisième axe du plan Alzheimer 2008-2012
« se mobiliser pour un enjeu de société », et il correspond à la mesure 37 visant à améliorer
la « connaissance du regard porté sur la maladie ».
1.2 PRÉSENTATION DES CONCEPTS
1.2.1 MALADIE D’ALZHEIMER : ENTRE LA NOTION DE DEMENCE
ET
LES AVANCEES CONTEMPORAINES
HISTORIQUE
La maladie d’Alzheimer est une pathologie connue depuis plus d’un siècle, découverte
par Alois Alzheimer11 en1906, elle a été le centre d’intérêt des grands chercheurs tels que
Nissl, Kraepelin, Alzheimer, etc. Cette pathologie a été diagnostiquée pour la première fois à
9
Témoignage issu d’une brochure de l’Association France Alzheimer, « Ecoutez-nous autrement » : paroles de malades
jeunes, Mars 2012, page 12.
10
Issu du journal des adhérents de France Alzheimer, n°98, Février 2012, Edition de l’union nationale des associations
Alzheimer et maladies apparentées. Page 14 « zoom sur… l’étude malade jeune ».
11
Alois Alzheimer (1864-1951), médecin psychiatre, neurologue et neuopathologiste allemand, célèbre pour sa découverte
sur la maladie d’Alzheimer.
7
partir de l’étude de cas de démences préséniles, et pendant une grande partie du 20ème le
terme de « maladie d’Alzheimer » était attribué aux adultes. Progressivement, le terme de
démence de type Alzheimer a regroupé sous son appellation un large panel de démences de
tpyes séniles. Ce n’est que depuis une trentaine d’années que la société a fait le lien entre la
maladie d’Alzheimer et celle que l’on nommait la démence présénile.
LA DEMENCE
La maladie d’Alzheimer est une des démences les plus fréquentes. La démence est
définie selon la CIM 10 chapitre V, F00-03 comme étant « un syndrome dû à une maladie
cérébrale, habituellement chronique et progressive, caractérisé par une altération de
nombreuses fonctions corticales supérieures, telles que la mémoire, l'idéation, l'orientation,
la compréhension, le calcul, la capacité d'apprendre, le langage et le jugement- Le syndrome
ne s'accompagne pas d'un obscurcissement de la conscience- Les déficiences des fonctions
cognitives s'accompagnent habituellement (et sont parfois précédées) d'une détérioration du
contrôle émotionnel, du comportement social ; ou de la motivation- Ce syndrome survient
dans la maladie d'Alzheimer, dans les maladies vasculaires cérébrales, et dans d'autres
affections qui de manière primaire ou secondaire, affectent le cerveau ».
La démence est donc une notion large qui regroupe des pathologies diverses telles que
la maladie d’Alzheimer, la démence à corps de Lewy, les démences vasculaires, les
démences mixtes, etc.
DEFINITION DE LA MALADIE D’ALZHEIMER
On parle ainsi de démence de type Alzheimer, cette dernière est définie selon la CIM 10
comme étant « une maladie cérébrale dégénérative primitive d'étiologie inconnue dont la
neuropathologie et la neurochimie sont caractéristiques- Elle débute habituellement de façon
insidieuse et progresse lentement mais régulièrement en quelques années ». Cette
pathologie est également décrite dans le DSM IV (ANNEXE 1).
Afin d’éttoffer, nous allons nous référer à l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), qui
définie la maladie d’Alzheimer comme étant une maladie neuro-dégénérative caractérisée
par « l’altération progressive de la mémoire et de l’idéation suffisamment marquées pour
handicaper la vie quotidienne » de la personne. Pour parler de maladie d’Alzheimer, l’atteinte
mnésique doit être associée au minimum à un autre trouble cognitif (atteinte du langage, des
fonctions exécutives12, l’altération de la pensée abstraite, modification de la personnalité.).
L’ensemble de ces troubles, présents depuis au moins six mois, sont suffisamment marqués
12
Exemples de fonctions exécutives : inhibition, flexibilité, attention divisée, planification, organisation…
8
pour impacter le quotidien des personnes et nécessiter la présence d’une aide. En d’autres
termes, c’est l’autonomie de la personne qui diminue progressivement.
LA MALADIE D ’ALZHEIMER : NEUROANATOMIE ET MECANISMES NEUROLOGIQUES
D’une manière générale, au niveau neurologique, la maladie d’Alzheimer se caractérise
par une détérioration progressive et durable des neurones dans certaines zones du cerveau.
Les neurones sont des composantes principales du cerveau humain. C’est par
l’intermédiaire de l’activité de ces cellules cérébrales que le cerveau fonctionne. Cet organe
est l’unité centrale, c’est la commande principale chez l’être humain. Chaque lobe cérébral
est responsable de fonctions précises (ANNEXE 2). Ainsi, toute atteinte d’un des lobes
entraîne des conséquences plus ou moins visibles sur la personne que ce soit sur son
comportement,
sur le plan moteur, sensitif, cognitif, visuel, etc. La maladie est ainsi
responsable de la dégradation des fonctions cognitives, intellectuelles et de la perturbation
du comportement de l’individu.
Chez la personne souffrant de la maladie d’Alzheimer, les neurones les plus atteints se
situent au niveau de l’hippocampe (une des régions essentielles de la mémoire, permet la
consolidation, atteinte initialement dans la maladie d’Alzheimer), du cortex temporal, certains
noyaux de l’amygdale (ayant un rôle dans la mémoire et l’émotion) et le noyau basal de
Meymert (structure du système limbique* ayant un rôle dans la mémoire, l’attention et
l’apprentissage).
La mort neuronale entraîne également une atrophie des zones touchées et en
conséquence une diminution du volume du cerveau. La dégénérescence des neurones est
responsable à long terme de la mort de la cellule. Cette mort neuronale est un mécanisme
physiologique du vieillissement cérébral. Elle devient pathologique lorsqu’elle est présente
en quantité massive dans des zones définies, habituellement saines ou moins atteintes dans
le vieillissement physiologique de l’être humain.
Dans le cas de la maladie d’Alzheimer, il existe deux mécanismes différents qui
conduisent à la mort du neurone.
Le premier se traduit par un développement de plaques séniles, dû à un dépôt de la
protéine Béta Amyloïde autour du neurone. Ce dernier « étouffe » et prive progressivement
le neurone de son activité, ce qui le conduit inéluctablement à sa mort. À l’heure actuelle, les
traitements médicamenteux ne peuvent inhiber ce processus.
Le second mécanisme s’attaque à l’activité du neurone en elle-même. Un surplus de
protéine TAU engendre, par l’intermédiaire de sécrétion de protéines nouvelles et de
mécanismes de rétroactiviation, un déficit en acétylcholine (neurotransmetteur). Ce dernier
9
conduit à une hypoactivation du neurone et au long terme à sa mort. C’est sur celui-ci que
les thérapies médicamenteuses ont un impact.
Les recherches actuelles ont mis en évidence des marqueurs biologiques, tel que le
marqueur TAU (par l’analyse du liquide céphalo-rachidien), qui permettent de renforcer la
précision du diagnostic de la pathologie du patient de son vivant. Cependant, le diagnostic
certain de la maladie d’Alzheimer est post mortem. Seule une analyse du tissu cérébral
permet de certifier que les troubles observés étaient en lien avec cette pathologie.
ETIOLOGIE DE LA MALADIE D ’ALZHEIMER
La maladie d'Alzheimer est une maladie complexe, d’origine multifactorielle, qui résulte
de l’interaction entre des facteurs génétiques et environnementaux, en fonction de l’âge et
du sexe de la personne. A l’heure actuelle, les chercheurs ne connaissent pas l’origine du
déclenchement de cette pathologie. Cependant, les facteurs de types génétiques seraient
prédominants (60% à 80%13 selon le CNR-MAJ), mais leur expression est favorisée par un
contexte environnemental plus ou moins délétère. Ce dernier regroupe des facteurs internes
(stress, personnalité, mode de vie, de consommation) ou externes (produits chimiques, etc.).
Ces derniers peuvent être répartis en trois catégories en fonction de la véracité de leur
influence14 : les facteurs de risques définis ; les facteurs de risques probables ; les facteurs
de riques possibles. Le tableau présenté en ANNEXE 3 regroupe les facteurs de risques les
plus « populaires ».
De cette analyse, nous pouvons retenir toute la complexité qui règne autour de cette
maladie, rendant la prise en charge de patient tout aussi complexe. Comme Harry Cayton
(2004 cité dans Peter J. Whitehouse, 2009, p 83.) a pu l’avancer, « La maladie d’Alzheimer,
telle que la science tente de l’appréhender, semble nous glisser entre les doigts. Les
interactions complexes entre la neurochimie, la génétique, l’environnement, l’histoire de vie
et la personnalité jouent toutes un rôle dans la manière dont les individus font l’expérience
de la démence. Aucune approche unique n’expliquera tout. »
SEMIOLOGIE DE LA MALADIE D ’ALZHEIMER
La maladie d’Alzheimer est une pathologie cérébrale à expression multiple. Nous
entendons, en ce sens, que la dégénérescence neuronale atteint différentes fonctions
cérébrales de laquelle résulte des troubles spécifiques.
13
Chiffres issue sur centre national de référence pour les malades Alzheimer de Lille. http://www.centre-alzheimerjeunes.com/alzheimer.php?id=1. Consulté le 02/02/2013.
14
« Du vieillissement cérébral à la maladie d’Alzheimer. Autour de la notion de plasticité. » deSchenk ; Leuba ; Büla. Edition
de boeck 2004.
10
A présent, l’ensemble de ces troubles vont être énoncés. Tous ne sont pas
systématiquement présents chez les personnes, et leur apparition est éparse dans le
développement de la pathologie. La maladie d’Alzheimer étant dégénérative, les troubles
initialement présents vont s’intensifier et se diversifier au cours de l’évolution de la maladie.
Les troubles de la mémoire sont généralement les premiers repérés. Il n’existe en
réalité pas une mémoire mais plusieurs mémoires ayant chacune une spécificité. La
première touchée est nommée mémoire épisodique, elle concerne les faits personnels, le
vécu de la personne et est en lien avec le contexte spatio-temporel.Par la suite, ce sont les
faits anciens qui sont omis, ceci traduisant la dégradation des autres mémoires
(sémantique* ; procédurale* ; autobiographique*). A long terme, les fonctions mnésiques
sont atteintes massivement. Celle qui est souvent nommée mémoire de travail, résulte d’un
processus attentionnel. C’est un phénomène actif, rapidement atteint lors du développement
de la pathologie, et qui permet d’établir un lien entre les informations stockées et
l’environnement.
Les troubles de l’orientation temporo-spatial évoluent parallèlement à l’avancée de la
pathologie. Souvent considérée comme un trouble à part entière, la désorientation temporospatiale est une des conséquences de la dégradation de la mémoire. Les personnes ne
savent plus se repérer dans le temps (quel jour ? quel mois ? quelle année ?), parfois elles
peuvent être comme figées dans une période antérieure de leur vie. Au niveau spatial, c’est
le même raisonnement, les personnes ont des difficultés à se repérer, voire dans des stades
avancés, ne savent plus où elles sont.
Les troubles des fonctions exécutives sont également présents. Les fonctions
exécutives regroupent les capacités de planification, de flexibilité mentale, de maintien de
l’attention, d’inhibition, de raisonnement. Concrètement ces fonctions permettent à l’être
humain de s’adapter face à des situations nouvelles ou complexes. L’atteinte des fonctions
exécutives peut amener les personnes à une incapacité à réaliser certaines tâches, bien
qu’elles en soient physiquement aptes, c’est leur raisonnement qui est altéré. Le maintien de
l’attention sur des activités devient alors difficile la personne est distractible. Sur le plan
comportemental, la personne peut être désinhibée, c'est-à-dire avoir un comportement
inadapté, rendant le quotidien et le maintien des relations sociales compliqué pour elle et son
entourage.
Des troubles du langage sont possibles. La personne peut développer une aphasie
progressive qui impacte en premier lieula production du langage puis sa compréhension.
Autrement dit, tout d’abord la personne comprend mais n’arrive plus à retrouver au niveau
cérébral le mot correspondant, elle aura ainsi des difficultés à trouver ses mots, à s’exprimer
(souvent les mots sont remplacés par des « mots valises », passe partout. Puis dans un
11
second temps, la personne ne comprend plus ce qu’on lui dit, elle n’associe plus les mots à
leur signification. L’aphasie peut mener la personne à un mutisme progressif.
Les troubles praxiques sont définis comme étant une incapacité à effectuer un geste
alors que les fonctions sensorielles et motrices sont intactes. Ils ont un impact important sur
la perte d’autonomie de la personne. Il existe différents types d’apraxie telles que l’apraxie
reflexive*, visuoconstructrice*, idéomotrice*, de l’habillage*.
Les troubles gnosiques sont une difficulté, voire une incapacité de la personne à
reconnaître, identifier des objets malgré des fonctions sensorielles intactes. Il existe
différents types d’agnosies (visuelle, spatiale, tactiles, auditives, etc.). Sur le long terme, la
personne peut ne plus reconnaître ses proches, c’est ce que l’on nomme la prosopagnosie.
Les troubles comportementaux peuvent également apparaître au cours de l’évolution
de la pathologie. Ils se traduisent différemment en fonction de chaque individu et de
l’évolution de la pathologie. Les troubles du comportement peuvent être en lien avec une
forme d’apathie, la personne ne prend plus d’initiatives, se replie sur elle-même, le plaisir et
l’émotion semblent être absents. Parfois, les personnes ont des phases délirantes avec des
hallucinations, des idées délirantes à titre de persécution, préjudice, jalousie, etc.
La
personne peut présenter un état d’agitation verbale ou motrice. Cela se caractérise par
une incapacité de la personne à rester en place. De plus, les besoins primaires tels que
l’alimentation, le sommeil, le sexe peuvent progressivement être mis de côté. Le cycle
circadien de veille/sommeil peut être bouleversé, la personne présente alors des troubles du
sommeil, elle se retrouve à dormir le jour et à déambuler la nuit.
A un stade avancé de la maladie, des troubles neurologiques peuvent apparaître. Ils
se traduisent par des troubles de la marche, une rétropulsion* de la personne, favorisant les
risques de chutes.
L’EVOLUTION DE LA MALADIE D’ALZHEIMER
L’évolution de la maladie d’Alzheimer est interprétée et analysée de plusieurs façons
dans certains ouvrages. Cependant même si le nombre et les noms des stades ne sont pas
similaires, l’évolution globale de la pathologie est commune à tous.Selon l’ouvrage
d’OLLIVET C ; HERVYM.P. ; MOULIAS R. « Alzheimer et maladies apparentées : traiter,
soigner et accompagner au quotidien », la maladie d’Alzheimer évolue en deux phases. La
limite entre les phases est dépendante du niveau d’autonomie de la personne.
La première nommée phase pré-démentielle se compose de deux stades. Le stade préclinique caractérisé par l’apparition de plaintes de mémoire importantes auxquelles
s’associent un léger déclin cognitif non décelable lors de tests neuropsychologiques. Par la
12
suite, les troubles cognitifs augmentent mais sans engendrer de retentissement significatif
sur l’autonomie de la personne dans son quotidien.
Vient ensuite la phase démentielle, durant laquelle, les perturbations cognitives et
comportementales sont considérées comme pathologiques et impactent significativement la
participation de la personne dans ses activités de vie quotidienne. L’ensemble de ces
perturbations ont été décrites dans le paragraphe ci-dessus.
THERAPIES ACTUELLES POUR MALADIE D ’ALZHEIMER
Actuellement, la recherche n’a pas encore pu mettre en place un traitement
médicamenteux curatif contre la maladie d’Alzheimer. Les thérapies médicamenteuses ont
dans un premier temps, été le centre des recherches, mais petit à petit l’intérêt s’est porté
sur les thérapies dites non-médicamenteuses.
Les traitements médicamenteux, présents aujourd’hui sur le marché, agissent sur
l’aspect symptomatique de la pathologie. Il existe deux grandes catégories de médicaments
aujourd’hui. Les inhibiteurs de l’acétylcholinestérase, comprenant le Donépézil
15
, la
Rivastigmine, la Galantamine. Ils permettent de ralentir le déclin cognitif voir même
d’améliorer certains troubles comportementaux tel que l’apathie et les phénomènes
hallucinatoires. La Mémantine quant à elle, renforce l’action des inhibiteurs à acétylcholine,
elle est préconisée dans les stades modérés à avancés de la pathologie.
Concernant les prises en charge non-pharmacologiques, ces dernières ont pour
objectifs de stimuler et donc de favoriser le maintien des capacités restantes de la personne.
Un bon nombre de thérapies diverses ont été crées ces dernières années, mais leur
efficacité n’a pas pu être prouvée par manque d’études. Il existe des thérapies non
médicamenteuses d’approches cognitives, psychosociales, sensorielles (l’art-thérapie ; la
luminothérapie ; le concept snoezelen (basé sur une stimulation sensorielle et multisensorielle) ; l’aromathérapie ; stimulation comportementale, etc.
CONCLUSION AUTOUR DU CONCEPT DE LA MALADIE D’ALZHEIMER
Pour conclure, la maladie d’Alzheimer est une maladie neurodégénérative connue
depuis plus d’un siècle, mais dont les causes et les traitements ne sont pas encore
clairement définies et établies.
L’ensemble de ces troubles sont très anxiogènes et peuvent favoriser les troubles du
comportement quand ils ne sont pas bien compris ou gérés. Chez les personnes qui en sont
porteuses, la dégradation progressive des fonctions cognitives impute progressivement leur
autonomie* et leur indépendance*. Cette personne devient alors progressivement
15
Molécules médicamenteuses présentent sur le marché pharmacologique
13
dépendante d’une aide extérieure dans la gestion de son quotidien et pouvant l’amener à un
état de grabatisation au long terme.
Cependant, il est nécessaire de maintenir la place de la personne au centre de la prise
en charge. Bien que ce soit compliqué, il faut continuer à stimuler la personne et à la laisser
maître de ses actions, de ses envies.
Un point important est à mettre en avant : il n’existe pas une maladie d’Alzheimer à
expression unique. Lorsque l’on parle de maladie d’Alzheimer, il existe en réalité de multiples
expressions de la pathologie. C’est ce qui va nous amener à présent à nous intéresser à
l’expression de la pathologie chez les personnes de 55 à 65 ans.
1.2.2 MALADIE D’ALZHEIMER ET LE SUJET AGE DE 55 A 65 ANS
Cette idée de multiples expressions de la pathologie a été abordée au cours d’un
entretien avec une neuropsychologue. En effet, cette rencontre m’a permis de mieux cibler la
population concernée par ma recherche.
Chez les personnes atteintes précocement par la maladie d’Alzheimer, les adultes de
moins de 50 ans environ, ne sont pas pris en charge par le réseau actuel de la gériatrie. Ces
personnes sont généralement suivies par des services de neurologie spécialisés. Les cas
étant très rares, cela aurait été compliqué de rencontrer des professionnels spécialisés. Ce
mémoire s’intéressera aux personnes âgées de 55 à 65 ans porteuses d’une maladie
d’Alzheimer.
Pour cette population donnée, la recherche actuelle tend à mettre en évidence une
spécificité
dans
l’expression
clinique
de
la
pathologie
(imagerie
cérébrale ;
symptomatologie). La maladie d’Alzheimer serait alors dite « de type focale ». Ce terme
n’est pas encore référencé cependant il est abordé dans les articles récents sur la recherche
de la maladie. D’après des études récentes16 sur des cerveaux malades post mortem, ces
syndromes sont bien en lien avec la maladie d’Alzheimer.
LES SPECIFICITES DE LA MALADIE D ’ALZHEIMER A FORME FOCALE
D’après les dernières recherches, l’évolution et les atteintes initiales de la pathologie
chez les 55-65ans seraient différentes de la maladie d’Alzheimer communément entendue
chez la personne âgée.
16
« Focal cortical presentations of Alzheimer’sdisease”, the Author (2007) S.Alladi, J.Xuereb, P. Nestor, J.knibb, K. Patterson
and J.R. Hodges
Research criteria for the diagnosis of Alzheimer’s disease : revising the NINCDS-ADRDA criteria ; B. Dubois, Howard H
Feldman Vol 6 Août 2007
14
Les mécanismes neurologiques ne sont pas différents de ceux présentés dans la
maladie d’Alzheimer du sujet âgé. Cependant, la maladie d’Alzheimer à forme focale
présente des lésions neurologiques ciblées sur des zones cérébrales spécifiques,
auxquelles s’associent une atrophie cérébrale ou un hypométabolisme isolé. Les zones
d’atteintes étant différentes, il en va de même pour l’expression clinique de la pathologie.
Concernant l’étiologie de la maladie chez ce public jeune, il n’y aurait pas de différence
avec la maladie déclarée chez la personne âgée.

Sémiologie
Nous allons à présent présenter un à un les trois syndromes focaux présents chez des
personnes âgées de 55-65ans porteuses de la maladie d’Alzheimer.
L’atrophie Corticale Postérieure (ACP)
Egalement nommée atrophie corticale occipito-pariétale, ce syndrome se traduit sur le
plan clinique de deux manières.
La forme ventrale ou l’atteinte du « quoi », s’exprime par une dégénérescence
neuronale ciblée sur la zone occipito-temporale qui a un rôle notamment dans l’association
d’image visuel, la lecture, l’écriture, etc.
Les troubles qui en découlent sont regroupés dans un syndrome appelé le syndrome de
Benson. Ce dernier regroupe des troubles cognitifs précis tel qu’une agnosie associative*,
une agraphie*, une alexie*, simultagnosie (incapacité d’appréhender le sens d’une scène
complexe globale, alors que les différents éléments isolés qui la constituent sont bien
reconnus), une désorientation spatiale, une anomie des doigts*, une acalculie*, des formes
d’apraxies* (idéomotrice et de l’habillage). Une personne ayant cette forme d’ACP va
présenter des difficultés dans l’élaboration de ces gestes, dans l’exécution de certaines
activités courantes telles que l’écriture et la lecture. L’autonomie de la personne va
rapidement diminuer bien qu’elle ait conscience de ses troubles.
Une seconde forme clinique dite corticale, l’atteinte du « où », est localisée au niveau
de la région occipito-pariétale qui a pour fonction proncipale les praxies* et les gnosies*.
Cette forme est caractérisée par la présence du syndrome de Balint, regroupant des
troubles majoritairement d’ordre visuo-spatiaux tels que l’ataxie optique*, la paralysie
psychique du regard et le déficit de l'attention spatiale. Concrètement, ce syndrome
s’apparente chez une personne à une perte des capacités visuelles, comme si la personne
devenait malvoyante. Alors que ces capacités visuelles sont intactes. Ces troubles sont
anxiogènes car la personne a des difficultés à appréhender, analyser et comprendre son
environnement.
15
L’Aphasie Primaire Progressive logopénique (APP)
Ce syndrome est caractérisé par une atteinte de la zone pariéto-temporale ayant pour
fonction principale le langage.
Sur le plan clinique l’altération de cette zone du cerveau engendre des troubles du
langage et parfois de certaines fonctions exécutives. En effet, cette forme focale de la
maladie d’Alzheimer crée un manque de mot isolé mais fréquent chez la personne, le
discours reste pendant un temps fluide grâce à des compensations mais la communication
verbale devient progressivement difficile. De plus, les personnes ont des troubles de la
planification qui apparaissent progressivement. Concrètement cela se traduit par un
ralentissement de la personne dans le faire, des problèmes de compréhension syntaxique, et
une disgression progressive (c'est-à-dire que la personne a des difficultés à organiser sa
pensée.).
Le Syndrome Amnésique ou Syndrome Hippocampique
Comme son nom l’indique, les atteintes neurologiques sont situées au niveau de
l’hippocampe.
L’hippocampe est une structure cérébrale jouant un rôle dans le système limbique. Elle
a un rôle dans l’acquisition des connaissances, la concentration. L’hippocampe a une
fonction importante dans le contrôle de l’humeur ainsi que dans la mémorisation (acquisition
d’informations nouvelles).
L’atteinte de l’hippocampe laisse donc penser que les troubles principaux seront d’ordre
mnésique. Chez une personne porteuse de ce syndrome, les informations perçues sont
difficilement intégrées dans la mémoire* et un bon nombre d’informations vont ainsi être
oubliées.
D’une manière récurrente, la personne va présenter des difficultés d’accès aux
informations cela peut se traduire par le manque du mot qui va altérer le langage de la
personne et donc sa capacité à communiquer. Un phénomène d’intrusion peut être présent,
la personne va alors enregistrer de mauvaises informations. Ce syndrome est en lien avec
une atteinte de la mémoire antérograde qui est un processus d’acquisition d’informations
récentes. Concrètement, ce processus fait appel à des mécanismes spécifiques tels que
l’encodage*, la consolidation* et le stockage* (ces mécanismes font partie du mécanisme de
la mémoire) (cf ANNEXE 4), et qui permettent à la personne d’intégrer les informations
rencontrées au quotidien.
16

Evolution de la pathologie
La maladie d’Alzheimer à forme focale évolue également en deux temps. La perte
d’autonomie qui sert de repère pour déterminer l’évolution de la pathologie, varie en fonction
du syndrome focal (maintien de l’autonomie plus important pour une forme APP qu’une
forme atrophie corticale postérieure).
La première phase aurait une durée moyenne de deux ans. Au cours de celle-ci, les
zones de dégénérescence neuronale restent confinées à certains endroits du cortex. Les
troubles alors perçus sont caractéristiques des syndromes décrits lors de la sémiologie de la
maladie.Durant cette phase, les personnes restent assez autonomes, sauf pour les formes
d’ACP dont la perte d’autonomie va être plus importante car elle s’apparente à une
malvoyance progressive.
La seconde phase qui pourrait s’apparenter à la phase démentielle, se déclenche lors
de la diffusion progressive des troubles de la dégénérescence neuronale. Dès lors, les
troubles deviennent beaucoup plus importants et touchent toutes les zones du cerveau
indistinctement. La perte des capacités et de l’autonomie de la personne sont rapides.
Pour conclure, la forme focale de la maladie d’Alzheimer présente chez les 55-65 ans
montre des spécificités sur le plan clinique et sur l’évolution de la maladie. Cette dernière est
plus rapide, cependant dans la première phase les personnes, bien qu’ayant certaines
capacités atteintes, ont encore des facultés cognitives exploitables pour favoriser
l’adaptation de la personne à son environnement. Il faut que la prise en charge soit la plus
efficace et la plus rapide possible afin de mettre en place au plus tôt des éléments de
réadaptation. Les personnes ont des troubles cognitifs ciblés dont elles ont conscience.
L’aspect psychologique des personnes et de leur famille est essentiel à prendre en compte
pour un accompagnement optimal. Souvent, les personnes porteuses de cette pathologie
souhaitent être actrices de leur prise en charge, et leur motivation est essentielle.
1.2.3 PRISE EN CHARGE ACTUELLE DE LA MALADIE D’ALZHEIMER
Au
cours
d’un
échange
avec
une
neuropsychologue
travaillant
en
équipe
pluridisciplinaire, le rôle de l’ergothérapeute auprès des adultes de 55-65 ans porteur de la
maladie d’Alzheimer a été abordé. N’ayant à ce moment là pas été confrontée à une prise en
charge réelle d’une personne Alzheimer jeune, je me questionnais sur la place de
l’ergothérapeute et son rôle auprès d’elle. L’ergothérapeute a-t-il les compétences
spécifiques, nécessaires au regard de cette pathologie et de la précocité de l’atteinte des
personnes? Les types de prises en charge actuelles en ergothérapie de la maladie
d’Alzheimer sont-ils en lien avec les problématiques des personnes Alzheimer jeunes ?
17
Avec tout ce qui a pu être mis en avant jusqu'à présent, nous pouvons imaginer
l’importance de la présence et de l’action de l’entourage au quotidien. L’entourage tout
comme le patient doit être accompagné par des professionnels de santé formés, afin de les
aider à comprendre et à gérer ce quotidien nouveau. Afin de mieux concevoir la prise en
charge de ces personnes, nous allons commencer par comprendre les grandes lignes de la
prise en charge globale de la personne porteuse de la maladie d’Alzheimer.
LES GRANDS AXES DE LA PRISE EN CHARGE PLURIDISCIPLINAIRE
La prise en charge de la personne porteuse de la maladie d’Alzheimer est faite par une
équipe pluridisciplinaire, au sein de laquelle chaque professionnel exerce avec sa spécificité
et dont le médecin généraliste est défini comme coordinateur principal. Selon l’HAS, la prise
en charge globale suit donc des axes variés, contribuant à prendre en compte l’ensemble
des troubles et à assurer l’accompagnement le plus optimal possible.
Ces derniers comportent un volet « médicamenteux », pour lequel des professionnels
clairement définis (neurologue, psychiatre, gériatre) sont habilités à prescrire des traitements
médicamenteux, et à en assurer le suivi avec le médecin traitant.
Une intervention non médicamenteuse est également préconisée. C’est au sein de celleci que l’ergothérapeute a son action la plus importante. Ce volet de la prise en charge est
assuré par des professionnels paramédicaux qui interviennent sur prescription médicale soit
au domicile de la personne, soit au sein d’institution. Afin d’assurer cette intervention,
différents types de prise en charge sont abordés.
Une prise en charge psychologique et psychiatrique est proposée, notamment par le
biais du psychologue ou du psychiatre. Celle-ci s’axe notamment sur la gestion des troubles
de l’humeur, du comportement (dépression, agressivité, douleur, angoisse, …). Le traitement
des troubles du comportement perturbateur comporte un volet de recommandations à eux
seuls.
Une prise en charge rééducative composée de différents axes d’interventions est
également assurée :
- une intervention sur le langage par le biais d’une orthophoniste ;
- une intervention sur les capacités cognitives portant sur une actioncognitivo-psychosociale écologique en lien avec les situations de vie quotidiennes de la personne. Ce type de
prise en charge peut être proposé aux différents stades de la pathologie. Les professionnels
y participant sont des ergothérapeutes, psychologues, psychomotriciens, orthophonistes
ainsi que des aidants au domicile qui permettent d’effectuer le relais. La revalidation
18
cognitive est une méthode de rééducation neuropsychologique qui cherche à compenser le
déclin des fonctions cognitives, en lien avec l’évolution de la maladie.
- Une intervention sur l’activité physique favorisant les stimulations motrices afin de
prévenir le risque de chutes, entretenir les fonctions motrices et les aptitudes fonctionnelles,
stimuler certaines fonctions cognitives
Une prise en charge portant sur la qualité de vie est également présente. Elle est
conditionnée par un confort physique et psychique, et un environnement adapté, pour lequel
l’ensemble des professionnels peuvent intervenir en fonction de leurs compétences.
Enfin l’HAS établi avec importance l’intervention auprès des aidants familiaux et
professionnels, leur formation sur la pathologie et la prise en charge est essentielle. En tant
qu’aidants principaux, ils sont amenés à vivre au quotidien avec les malades Alzheimer.
Cependant parfois, les réactions de cet autre qu’il connaissait si bien sont incomprises et
donc mal acceptées. Tout ceci favorise l’épuisement la culpabilité et l’isolement de l’aidant.
Ainsi, la personne atteinte de la pathologie et son entourage sont suivis par une équipe
pluridisciplinaire qui se doit d’informer, de soutenir, de mettre en place le réseau et les
moyens nécessaires pour rendre le quotidien plus agréable et limiter le déclin de l’autonomie
de la personne.
La maladie d’Alzheimer est une pathologie dégénérative. Le maintien au domicile ne
peut durer qu’un temps. Dès lors, la question de l’institutionnalisation doit être abordée et
préparée avec la personne et son entourage afin d’éviter les situations d’urgence souvent
traumatisantes.
Au sein de cette équipe pluridisciplinaire, l’ergothérapeute est un professionnel à part
entière qui se doit de respecter les recommandations officielles. Nous allons à présent
aborder dans les grandes lignes et en lien avec ce mémoire, cette profession qu’est
l’ergothérapie.
L’ERGOTHERAPIE
L’ergothérapie est une profession récente, née au début du 20ème siècle en Amérique du
Nord, suite à l’utilisation de l’activité comme moyen thérapeutique, par des psychiatres. Cette
profession arrive en France dans les années 50. Aujourd’hui l’ergothérapie connaît un réel
essor en lien avec les avancées médicales et la découverte de nouvelles pathologies, mais
aussi par l’augmentation de l’espérance de vie et donc de la part importante de personnes
âgées dans notre société.
Le terme ergothérapie vient du grec ergon qui signifie action/travail et de therapeuien qui
signifie soigner/soigneur. L’ergothérapie est donc une technique de rééducation basée sur le
travail et plus globalement sur l’activité. En effet, « L’ergothérapie, en tant que pratique
basée sur le développement de la performance dans les activités, est une réponse
19
essentielle aux problèmes de la personne âgée et de son entourage. Par une démarche
préventive et réhabilitative, elle permet d’éviter les désadaptations et d’améliorer la qualité
de vie sur les lieux d’habitation des personnes (institution ou domicile) et accompagner
l’entourage (professionnel ou familial) à travers une action éducative. »17. Cette profession
fait partie du secteur du paramédical et les actes en ergothérapie sont soumis à une
prescription médicale.
L’ergothérapeute a une place importante dans la prise en charge pluridisciplinaire de la
personne âgée. La maladie d’Alzheimer étant reconnue comme l’une des pathologies les
plus fréquentes chez le sujet âgé, nous allons à présent appréhender les prises en charges
possibles en ergothérapie pour ce public.
PRISE EN CHARGE ERGOTHERAPIQUE DE LA PERSONNE PORTEUSE DE LA
MALADIE D ’ALZHEIMER
Il n’existe pas de plan type de prise en charge de cette pathologie, comme nous
pouvons parfois le trouver en rééducation pour d’autres maladies.
Comme dans tout début de prise en charge, l’ergothérapeute procède à une phase
d’évaluation, par le biais de bilans normés, d’observation, d’entretiens au cours desquels le
thérapeute apprend à connaître la personne, son histoire, ses habitudes de vie, ses envies,
etc. Bien souvent, l’entourage est également sollicité afin d’obtenir des informations
supplémentaires, c’est un partenaire privilégié dans la prise en charge.
Par la suite deux modes de prise en charge sont possibles, soit en individuel, soit en
groupe.
Dans le cas d’une prise en charge individuelle, l’ergothérapeute axe ses actions
autour de problématiques spécifiques au besoin de la personne, en lien avec ses habitudes
de vie et de ses capacités restantes. Par exemple, si la personne déclare des troubles de
l’orientation
temporo-spatiale.
L’ergothérapeute
peut
intervenir
en
aménageant
l’environnement de la personne, en la mettant en action lors d’une mise en situation tel que
l’apprentissage de trajet. D’autres objectifs sont également visés comme la stimulation des
fonctions cognitives, des fonctions motrices et le maintien de l’autonomie.
L’ergothérapeute a, à sa disposition pour répondre à ses objectifs, un ensemble de
moyens qu’il se doit d’adapter en fonction des goûts, des habitudes de vie et des capacités
de la personne. Il est important pour l’ergothérapeute de trouver des activités significatives
pour la personne afin de favoriser son adhésion à la prise en charge.
17
Extrait de « Ergothérapie en gériatrie : approches cliniques ».par Eric Trouvé. Edition Solal 2009.
20
L’accompagnement relationnel est aussi un but de l’ergothérapeute. En effet, l’on
remarque souvent un isolement social progressif autour du couple aidant-aidé. Le thérapeute
doit alors favoriser le maintien des contacts sociaux, il se doit aussi de favoriser les temps
d’écoute et d’échange avec la personne et son entourage.
Dans le cas de prises en charge de groupe, l’ergothérapeute rassemble des
personnes en fonction d’objectifs communs à travailler. Ces types de prises en charge
notamment pratiquées au sein d’institutions (EHPAD, accueil de jour, PASA, etc.), favorisent
le lien social des personnes. Des ateliers tels que les ateliers mémoire, créatifs, chants,
cuisine, etc., sont souvent mis en place.
D’une manière générale, l’ergothérapeute ne peut se baser uniquement sur des objectifs
généraux prédéfinis. C’est en lien avec la personne et sa famille que des objectifs plus
personnalisés sont décidés. Notre travail auprès de personnes porteuses de la maladie
d’Alzheimer demande de la patience, de l’écoute, de la créativité pour réussir à entrer et à
maintenir une relation avec le patient, qui parfois devient compliquée. L’ergothérapeute a un
rôle important dans le maintien de l’autonomie des personnes, que se soit en sécurisant
l’environnement ou en stimulant les fonctions restantes. De plus, l’ergothérapeute, en lien
avec la famille, et les autres professionnels de santé, apportent le soutien et l’aide
nécessaire à l’entourage (conseils en aides techniques et humaines, information autour des
réseaux disponibles ; orientation vers des professionnels pour les aides financières, etc.).
Ce professionnel de santé intervient au sein d’une équipe pluridisciplinaire, que ce soit
au domicile de la personne (Equipe Spécialisé Alzheimer), dans des structures d’accueil
(hôpitaux de jour, accueils de jour.), ou dans des structures d’hébergements temporaires ou
définitifs (EHAPD, Unité de Soins de Longue Durée, Foyer d’hébergement.).
Mais qu’en est-il de l’accompagnement médico-social des malades Alzheimer jeunes ?
Quel est leur statut, leur reconnaissance au niveau juridique, professionnel ? Existe-t-il des
recommandations nationales quant à leur prise en charge ?
PRISE EN CHARGE DE LA PERSONNE ATTEINTE DE LA PATHOLOGIE ENTRE 55 ET
65 ANS.

Problématique de la prise en charge des adultes jeunes
Tout d’abord, les personnes précocement atteintes de cette pathologie se trouvent à
l’heure actuelle suivies dans différents secteurs. Certaines d’entre elles sont prises en
charge en psycho-gériatrie, d’autres dépendent de services de gériatrie (dans les institutions,
des accueils de jour, des équipes spécialisées, etc.) ou encore de la neurologie (des centres
21
mémoire, dont certains sont spécialisés dans l’accompagnement des personnes atteintes de
démences rares). Que signifient ces différences d’accompagnement ?
Les réseaux médico-sociaux et les acteurs spécialisés pour le suivi de personnes
porteuses de la maladie d’Alzheimer commencent à émerger. Le problème réside dans la
complexité d’entrer dans ces réseaux pour les personnes jeunes notamment de moins de
60ans. Légalement, on considère l’adulte devenu âgé à partir de 65 ans et la limite des 60
ans est souvent définie pour bénéficier de prestations (Prestation de Compensation du
Handicap, pension d’invalidité, Allocation Adulte Handicapé, ..) ou pour entrer en
établissement de soins pour personnes âgées. Les admissions sont possibles mais
nécessitent une dérogation et donc des démarches administratives longues.
Bien qu’il existe actuellement des structures et des équipes formées pour
l’accompagnement de personnes Alzheimer, la précocité de l’atteinte tend à montrer une
certaine faille dans le système actuel.
Selon un rapport de la Fondation Médéric Alzheimer publié en 2011 et ayant pour
thématique l’observation « des dispositifs de prise en charge et d’accompagnement de la
maladie d’Alzheimer », ce dernier souligne le fait qu’une majorité des structures existantes,
estiment, non adapté l’accueil des personnes Alzheimer jeunes dans leurs locaux. Les
figures 1 et 2 (ANNEXE 5), mettent en avant les pourcentages des établissements s’estimant
non adapté pour l’accueil des personnes jeunes (Figure 1). Ce sentiment d’incapacité est
présent pour différentes raisons (locaux inadaptés ; équipe non formée ; soins trop
important ; etc.) qui vont être exposé dans la figure 2.
Dans cette partie du rapport dirigé par Laëtitia Ngatcha-Ribert, laissant la parole aux
établissements (p.10) « on n’aborde pas quelqu’un de moins de 60 ans comme quelqu’un de
80 ans. La singularité de l’individu reste essentielle avant tout au regard de sa pathologie ».
De plus, l’absence d’écrit de référence tel que des recommandations de la Haute
Autorité de Santé, met en avant un flou concernant la prise en charge de ces personnes.
Cette incertitude est-elle due à une absence de réflexion sur ce sujet ? Les démarches de
soins élaborées en interne au sein des structures, équipes sont-elles efficientes ? Les
problématiques mises en avant ci-dessus ne sont abordées dans les écrits officiels, ce qui
laisse planer ce flou autour de l’accompagnement des personnes jeunes atteintes de la
maladie d’Alzheimer. Cependant, l’on voit émerger depuis peu divers rapports, enquêtes à
l’initiative de l’Etat ou de certaines associations importantes (Fondation Médéric Alzheimer,
France Alzheimer, etc.) qui se penchent sur le sujet.
22

Spécificités de la prise en charge
L’accompagnement de ces adultes change le contexte habituel de prise en charge de la
maladie d’Alzheimer, des particularités sont présentes et vont influencer les modalités de la
prise en charge (médicale, sociale, économique). Les difficultés sont ainsi d’ordres
familiales, sociales, professionnelles, financières, juridiques auxquelles s’ajoute un impact
psychologique d’autant plus important. L’ensemble de ces difficultés va être explicité cidessous.
Sur le plan professionnel, l’arrêt de l’activité professionnelle peut favoriser l’apparition
d’un sentiment d’inutilité chez la personne et donc augmenter la souffrance psychologique.
En effet, la perte de l’activité entraîne la perte d’une identité professionnelle, d’un rôle social
et donc une baisse de l’estime de soi. Il faut essayer de favoriser le maintien dans l’activité
professionnelle en adaptant le poste, en parlant de la pathologie au sein de l’entreprise et
surtout aux professionnels de la médecine du travail.
L’arrêt de la profession pose aussi un problème financier. Des aides sont possibles
pour les personnes jeunes en fonction de l’âge. La question des finances est aussi un point
qui doit être pris en compte. Selon leur âge, certaines personnes géraient les papiers,
l’argent
des
courses…).
Cependant,
quand
cette
activité
devient
compliquée
l’ergothérapeute peut apporter du soutien à la famille ou trouver des compensations.
Sur le plan familial, par rapport à la personne âgée, la pathologie déclarée chez la
personne jeune modifie les rôles et les codes familiaux habituels. Parfois le conjoint perd
progressivement sa place d’époux/épouse pour prendre celle du soignant. Ce dernier se doit
de gérer son activité professionnelle en plus de son rôle familial. Les enfants peuvent se
retrouver à devoir gérer des situations anormales pour leur âge et parfois ont le rôle d’aidant
principal. Un problème se pose aussi pour les parents des personnes, pour qui l’apparition
de cette pathologie est un choc, dû notamment à un saut de génération.
Sur le plan social, les personnes et leur entourage peuvent se renfermer sur ellesmêmes. Il est important d’entretenir les relations sociales pour limiter l’isolement et favoriser
l’intervention des soignants au domicile des personnes. En effet au regard de l’âge des
personnes l’intervention d’équipe soignante n’est pas toujours bien perçue par la personne et
son entourage. La question de la conduite doit aussi être abordée. En somme, les devoirs et
les responsabilités de l’adulte peuvent être remis en cause par l’apparition de la pathologie. Il
faut maintenir un rôle actif de la personne, ne pas lui enlever ses activités mais réaménager
son environnement pour le laisser agir en sécurité dans la mesure du possible.
Enfin sur le plan juridique, la protection de la personne ainsi que ces droits doivent être
discutés avec la personne et son entourage proche. La pathologie étant dégénérative, la
23
question du patrimoine, le choix d’une personne de confiance, les directives anticipées sont
des éléments qui peuvent être abordés avec la personne tant qu’elle en a les capacités.
Les problématiques mises en avant ci-dessus vont être appréhendées différemment en
fonction de l’environnement de la personne, de sa personnalité et de son entourage.
L’impact psychologique d’un tel diagnostic est majoré à cet âge pour la personne mais aussi
pour le conjoint et les enfants. Il est donc essentiel de le prendre en compte dans
l’accompagnement et ce d’autant plus que l’apparition de cette pathologie à cet âge est
difficilement entendable puisque souvent associée au vieillissement. Un autre élément est
important à mettre en avant : l’activité. Pour toute personne, la perte de la capacité à faire les
choses, à être en activité est difficilement supportable. L’homme crée son rôle, sa situation
au travers de l’activité qu’elle soit professionnelle, familiale, sociale, etc. Pour ces personnes
le maintien de la participation à l’activité quelle qu’elle soit est essentiel, « On veut tellement
se battre qu’on cherche le moindre petit truc qui peut nous servir ! Et faire des travaux
manuels, et bien ça nous motive, on est content d’avoir fait ça, c’est beau ! Parce que moi,
pendant que j’en suis encore capable, je veux en faire profiter tous les gens que j’aime, qu’ils
aient au moins quelque chose de moi que j’ai fait de mes propres mains ! Parce que ça, j’y
tiens ! Et c’est gratifiant ! » (Brochure Paroles de malades « jeunes » : Ecoutez-nous
autrement, p16) N’y-a-t-il pas de professionnel plus spécialiste de l’activité que
l’ergothérapeute ?

Généralités sur la prise en charge en ergothérapie pour une personne de
55-65 ans porteuse de la maladie d’Alzheimer
L’ergothérapeute est un professionnel de santé qui axe son action par le biais de
l’activité, sur l’autonomie de la personne afin de lui permettre dans son quotidien de faire
seule au maximum comme à son habitude. L’un des principes de cette prise en charge en
ergothérapie est le respect des habitudes de vie de la personne, de son environnement.
Posant un regard global sur la personne, l’ergothérapeute intervient dans tous les
domaines qui gravitent autour d’elle (professionnel ; sociale ; familiale, etc.). Dans le cas du
suivi de ces personnesde 55-65 ans porteuses de la maladie d’Alzheimer, l’objectif de
l’ergothérapeute n’est pas le gain ni la performance des capacités cognitives de la personne
puisque la pathologie est dégénérative. L’ergothérapeute peut intervenir lors de la première
phase de la pathologie en mettant en place des aides (aménagement de l’environnement ;
aides techniques ; stimulations des capacités restantes, etc.) qui lui permettront de maintenir
au mieux son autonomie au quotidien. Les différentes problématiques citées ci-dessus vont
être appréhendées par l’ergothérapeute et l’ensemble de l’équipe pluridisciplinaire
(assistante sociale ; psychologue ; neuropsychologue ; etc.).
24
A l’heure actuelle, il n’existe pas de prise en soins optimale de ces personnes et elles se
retrouvent « ballotées » au sein du système de santé tout comme dans la société. La prise
en charge des adultes jeunes est parsemée d’obstacles. Du fait du diagnostic tardif, le suivi
des personnes se met en place au moment de la dégradation de leur état de santé. Le
contexte institutionnel non favorable et les lacunes de formation des équipes soignantes
engendrent un parcours de soins non adapté. Selon un article du Centre National de
Référence des Malades Alzheimer Jeunes, « ces spécificités rendent donc plus que jamais
indispensable l’information sur cette pathologie pour faire évoluer les représentations ; la
maladie d’Alzheimer, considérée comme une pathologie du vieillissement est sous
diagnostiquée chez les sujets de moins de 60 ans, alors qu’elle nécessite une prise en
charge adaptée pour freiner le déclin cognitif et la perte d’autonomie, et permettre au patient
et à sa famille de vivre dans la dignité 18».
Actuellement, la prise en charge de cette pathologie est au cœur de multiples réflexions.
Les professionnels de santé et la société cherchent à revoir cette prise en soin pour qu’elle
corresponde au mieux aux attentes et besoins d’adultes de 55 à 65 ans. C’est pourquoi, en
tant que future ergothérapeute j’ai décidé de m’interroger sur l’accompagnement
ergothérapique de ces personnes.
La question de recherche qui découle de cette réflexion est donc :
La maladie d’Alzheimer déclarée chez des adultes de 55-65 ans implique-t-elle une prise
en charge spécifique en ergothérapie ?
Dans le cadre de mon mémoire, le terme « spécifique », sous entend, que la prise en
charge envers les personnes Alzheimer jeunes serait une conception nouvelle. Autrement dit
18
Centre National de Référence pour les Malades Alzheimer Jeunes, la maladie d’Alzheimer des personnes
jeunes, [en ligne], http://www.centre-alzheimer-jeunes.com/alzheimer.php?id=1.
25
avec des principes, des objectifs, des moyens propres, différents de ceux préconisés chez la
personne âgée.
Les hypothèses actuellement avancées sont :

1ère hypothèse : au regard de la précocité de l’atteinte, la prise en charge en
ergothérapie de personnes Alzheimer jeunes nécessite une réévaluation du modèle
actuel de prise en charge afin de répondre au plus près aux attentes et besoins des
personnes. Il y aurait donc, une spécificité de prise en charge.

2ème
hypothèse :
d’accompagnement
en
des
prenant
en
personnes
compte
atteintes
l’ensemble
de
la
des
possibilités
maladie
d’Alzheimer
(accompagnement au domicile, famille d’accueil, institutionnalisation, etc.), le suivi au
domicile paraît être le meilleur dans le cas de personnes Alzheimer jeunes.
26
2. ELÉMENTS DE RECHERCHE
2.1 METHODOLOGIE GENERALE DE LA RECHERCHE
L’objectif de la recherche est d’établir un état des lieux sur les prises en charge faites
pour les personnes de 55-65ans porteuses de la maladie d’Alzheimer et de recenser les
difficultés, les spécificités dans l’accompagnement de ces personnes par rapport à ce qui se
fait pour la personne âgée. Une autre partie de la recherche s’axe plus particulièrement sur
la pratique de l’ergothérapeute auprès de ces personnes. La méthodologieglobale de cette
recherche se réfère à une méthode par résolution de problème couplé à une méthode
systémique.
2.2 MODALITÉS DU RECUEIL DE DONNÉES
2.2.1 OUTILS UTILISES
Afin de comparer les apports théoriques à la réalité de la pratique sur le terrain, nous
avons choisi deux outils de recherche : des entretiens semi-directifs et un questionnaire.
LES ENTRETIENS SEMI -DIRECTIFS
Dans un premier temps, des entretiens semi directifs ont été menés. Cet outil amène un
flux d’informations de qualités. Au cours de l’entretien, il est possible de creuser certaines
thématiques et de rebondir au fur et à mesure des réponses. Dans le cadre de ce mémoire,
les entretiens ont permis de sonder les différents secteurs côtoyant des personnes
Alzheimer jeunes et de questionner la pratique des professionnels. La grille est située en
ANNEXE 6.
LES QUESTIONNAIRES
Dans un second temps, un questionnaire a été envoyé à neuf ergothérapeutes. Le choix
d’établir un questionnaire auprès des ergothérapeutes s’est fait dans un souci de gain de
temps. Cet outil a pour but d’amener une quantité d’information plus importante. Dans notre
situation, les ergothérapeutes travaillant auprès de personnes Alzheimer de 55-65ans sont
peu nombreux. Cependant, ces questionnaires permettent de détailler la pratique qui se fait
actuellement par ces professionnels quelque soit leur secteur d’activité. Des questions
ouvertes, fermées et dirigées composent ce questionnaire. La grille est présentée en
ANNEXE 7.
27
2.2.2 CHOIX DE LA POPULATION
POUR LES ENTRETIENS
Les critères d’inclusion sont des professionnels de santé ayant pris en charge des
personnes de 55 à 65ans ayant déclarées une maladie d’Alzheimer. Les professionnels
rencontrés travaillent dans différents secteurs : psychiatrie (un médecin psychiatre); gériatrie
(une ergothérapeute d’une équipe spécialisée Alzheimer, une ergothérapeute d’un accueil
de jour, une cadre de santé d’un établissement pour personnes âgées dépendantes) et
neurologie (un ergothérapeute d’un centre mémoire). Leur exercice se déroule soit en
institution soit en ambulatoire. Ce choix de professionnels est à mettre en lien avec les
apports conceptuels. En effet, suite aux différentes lectures, les trois secteurs (gériatrie,
psychiatrie et neurologie) peuvent être aménés à prendre en charge ces personnes.
POUR LES QUESTIONNAIRES
Les critères d’inclusion sont des ergothérapeutes ayant pris en charge au minimum une
fois une personne de 55-65ans porteuse de la maladie d’Alzheimer. Les ergothérapeutes en
question exercent soit en gériatrie ou en neurologie, dans des établissements divers
(EHPAD ; CHU ; ESA ; CMRR ; accueil de jour). Ce choix de professionnel s’est un peu
imposé. La pratique en ergothérapie auprès de ce public étant rare, un mail de recherche a
été envoyé sur des forums. Seul neuf professionnels ont répondu au mail et cinq ont rempli
le questionnaire.
2.3 ANALYSES DES DONNÉES
2.3.1 ENTRETIENS
PRESENTATION DU PANEL DE POPULATION
L’ensemble des professionnels ont été présenté dans le tableau 1.
Les entretiens auprès de ce panel de professionnels vont apporter une vision globale
de leur pratique auprès des personnes Alzheimer jeunes aujourd’hui. Certains exercent une
pratique spécifique dédiée à l’accompagnement de ce public, tandis que d’autres travaillent
dans le milieu institutionnel. Au sein de ce panel de professionnel, on peut distinguer deux
groupes. Le premier regroupant Mme P ; Mme N ; Mme E ; Mme A intervenant auprès de
personnes résidant encore au domicile, que nous appellerons groupe 1. Et le second
seulement avec Mme C qui représentera l’accompagnement fait en institution.
Les retranscriptions d’entretien seront en ANNEXE 8
28
Tableau 1 : Présentation du panel de professionnels
Profession et
ancienneté
Secteurd’activité
Connaissance
de la maladie
d’Alzheimer
Connaissance
des « malades
Alzheimer
Jeunes
Mme C
Cadre de santé
11 ans
EHPAD*
Au cours du
cursus scolaire
6 ans lors de
préparation de
cours pour des
étudiants
infirmiers
Mme P
Médecinpsychiatre
20 ans
Unité mobile de
psychogériatrie
Au cours du
cursus scolaire
Au cours du
cursus scolaire
Mme N
Ergothérapeute
15 ans
Centre mémoire
de Ressources
et Recherche
15 ans
7 ans
Mme E
Ergothérapeute
20ans
ESA*
Depuis 20 ans
2 ans
Mme A
Ergothérapeute
4 ans
EHPAD* et
accueil de jour
spécialisé
9 mois
7 mois
LA FREQUENCE DES RENCONTRES ENTRE LES PROFESSIONNELS ET LE PUBLIC
ALZHEIMER DE 55-65ANS
Sur les cinq professionnels interviewés, trois d’entre eux constatent une augmentation
de leur intervention auprès de personnes de 55-65 ans atteints de la maladie d’Alzheimer.
Ces trois professionnels exercent tous leur pratique auprès d’un public qui réside encore au
domicile. Selon eux, la recrudescence de ce public de 55-65ans, serait liée à une évolution
des connaissances et des pratiques auprès de cette population.
L’un des professionnels, n’a pas perçu d’augmentation de la fréquence de ce public
dans sa pratique. Le lieu d’exercice de se professionnel étant l’EHPAD*, son intervention se
situe à un stade plus avancé de la pathologie. Ainsi, le nombre de personnes « Alzheimer
jeune » présent dans les établissements d’hébergement n’a pas augmenté. Dans ces
structures la tendance est plus à l’accueil de personnes de plus en plus âgées et
dépendantes. Ce recul de l’entrée en institution est à mettre en lien avec le développement
d’équipe ambulatoire (qui permettent de préserver le maintien au domicile des personnes)
ainsi qu’avec une problématique financière (les établissements d’hébergement tel que les
EHPAD*, ne perçoivent pas de subventions pour les personnes de moins de 65 ans).
Enfin, 1/5 des professionnels n’ont pu répondre à la question.
29
UNE ENTREE DANS LE SOIN QUI PRESENTE DES PARTICULARITES
Autour de cette thématique, nous avons cherché à savoir si l’accompagnement initial de
ce public et donc de l’entrée dans le milieu du soin présentait une complexité.
Tout d’abord, nous avons cherché à savoir si l’entrée en relation avec les personnes et
leur entourage était plus compliquée. L’une des professionnelles exerçant en accueil de jour
n’a pu assister à des entrées et donc n’a pu répondre à cette question. Pour trois des
professionnels, l’accueil de ces personnes n’a pas été compliqué. Seule une personne a
décrit des difficultés importantes.
Pour trois professionnels sur cinq, l’amorce de l’accompagnement ne s’est pas déroulé
dans un contexte compliqué en soi, bien que des difficultés nouvelles ont été repérées. Ces
trois professionnels exercent leur pratique auprès de personnes qui sont encore à leur
domicile. Selon eux, ces difficultés s’axent surtout autour du manque de « prévention » et
donc d’une intervention des équipes de soins qui est tardive.
Pour le professionnel représentant le milieu institutionnel, cette entrée en relation a été
très mal vécue, « ca a été catastrophique pour sa famille et pour nous ». L’évolution rapide
et le stade avancé de la personne dans la pathologie sont les causes principales de la
complexité de l’accompagnement.
Pour préciser cette réflexion, nous avons cherché à savoir si l’accueil de ce public a
nécessité des aménagements spécifiques. A l’unanimité, l’accueil de personnes Alzheimer
de 55-65ans, n’a pas nécessité des aménagements des infrastructures. Concernant les
équipes des adaptations ont du être faites notamment sur le plan de la formation (demande
de formation à l’accompagnement des personnes jeunes ; temps de formation informelle).
Ainsi, autour de ces questionnements, il en ressort que le milieu institutionnel se
retrouve plus démuni face à l’amorce de l’accompagnement et de l’accueil du public de 5565ans porteur de la maladie d’Alzheimer. Pour les professionnels du groupe 1, exercant au
domicile ou en institution, l’accueil et le suivi des personnes de 55-65 ans porteuses de la
maladie d’Alzheimer n’est pas complexe en soi. Seul des formations d’équipe en interne ont
été initiées pour l’accueil de ces personnes.
DEUX GRANDS AXES DE L’ACCOMPAGNEMENT DES PERSONNES ALZHEIMER
PRECOCES SE DESSINENT

1er axe: le maintien au domicile au sein duquel trois secteurs
interviennent
30
L’accompagnement en psychiatrie
C’est
un
accompagnement
en
« ambulatoire »,
effectué
par
une
équipe
« multidisciplinaire ». « La prise en charge globale » proposée permet d’intervenir sur
l’ensemble des difficultés rencontrées par les personnes Alzheimer jeunes encore au
domicile. L’accompagnement par cette équipe mobile en psychiatrie nécessite donc que la
personne suivie présente des troubles de l’humeur, des troubles psychiatriques. « On est
vraiment dans quelque chose de psychiatrique qui peut basculer vers la démence »
Cette prise en charge comporte plusieurs grands points :
- Une « consultation-évaluation » est faite dans un premier temps par un médecin
psychiatre et un infirmier. Puis, « une évaluation à domicile écologique » peut être proposée
et certains bilans peuvent être approfondis par la suite.
- « la prise en charge rééducative » est proposée aux personnes en fonction de leurs
besoins (prise en charge orthophonique ; séances de psychomotricité ; aménagement
d’environnement ; etc.). Celle-ci permettrait « une très nette amélioration des patients suivis
régulièrement sur le plan psychiatrique et cognitif ». Certains patients ont même réussi à
« stabiliser leurs symptômes ».
L’accompagnement en neurologie
Cet accompagnement se fait au sein d’un service de « neurologie » spécialisé, dont
l’« action se situe essentiellement sur l’évaluation, l’annonce du diagnostic et sur la mise en
place de relais. ». C’est une équipe pluridisciplinaire qui accompagne la personne et son
entourage suite à l’annonce du diagnostic. Différentes étapes sont présentes dans la prise
en charge neurologique des personnes Alzheimer de 55 à 65 ans :
- « une consultation mémoire » : la personne est « adressée par son médecin traitant
pour pouvoir établir un diagnostic ». Elle est reçue par « la neurologue et la
neuropsychologue qui déterminent un complément de bilans en hospitalisation »
- « sur
le
temps
de
l’hospitalisation »,
un
temps
d’évaluation
par
l’équipe
pluridisciplinaire est établi avec la passation de bilans divers. La personne porteuse de la
maladie d’Alzheimer revoit un panel de professionnels de santé afin d’effectuer un
complément des bilans initiaux le« neuropsychologue », le« psychiatre […] s’il y avait des
troubles de l’humeur […] mais également au regard du risque de dépression qui est plus
élevé », « l’ergothérapeute, l’assistante sociale, si besoin la kinésithérapeute ou la
diététicienne ».
- « le temps de l’annonce du diagnostic avec la famille et la personne »
- Les « propositions de thérapeutiques médicamenteuses »
- La prise en charge personnalisée avec la mise en place de relais. En fonction des
besoins de la personne une prise en charge rééducative peut être initiée. Par exemple une
31
« prise en charge en orthophonie », « une intervention du SAMSAH » peut être amorcée
« lorsque les personnes sont isolées ». une « équipe spécialisée Alzheimer » peut
également intervenir « pour une intervention plus courte » au domicile de la personne. [….].
L’accompagnement de la personne et de son entourage dans l’amorce des démarches
administratives (en lien avec l’assistante sociale) peut également est fait.
- « le suivi » soit en parallèle avec le neurologue de ville, « nous on les revoit une fois
par an pour une hospitalisation de trois à cinq jours». Soit « ils sont seulement suivis par […]
le CMRR19, ils sont revus une fois par an pour le même bilan et tous les six mois pour une
consultation avec le neurologue. »
L’accompagnement en gériatrie :

Au domicile (Equipe Spécialisée Alzheimer)
Dans cette équipe, l’ergothérapeute intervient « au domicile » des personnes
porteuses d’une maladie d’Alzheimer ou maladies apparentées. C’est une prise en charge
ponctuelle sur quinze séances, en binôme avec une assistante de soins en gérontologie
(ASG). Plusieurs grands objectifs ont pu être mis en avant.
Un premier objectif est « l’accompagnement auprès de personnes malades », dans
le but d’une part de « maintenir sa participation dans les activités de vie routinières. […] en
associant plusieurs techniques et en intervenant dans plusieurs domaines. ». Par exemple,
l’intervention « sur l’environnement matériel […] pour entretenir l’autonomie ou pour
sécuriser l’environnement et limiter les troubles du comportement. ». Les professionnels
travaillent aussi pour « renforcer les compensations sensorimotrices, cognitives […]
améliorer le rendement mnésique. »
Un second objectif concerne plus particulièrement l’accompagnement des aidants
« pour améliorer son savoir-faire, son savoir-être, pour essayer de l’accompagner et de
trouver des solutions de répit lorsqu’il est épuisé. ».
« Enfin, il y a tout un travail de
partenariat que l’on fait avec la mise en place de relais […] aux services existants. » pour
favoriser le «maintien de stimulation […] ». Les solutions qui peuvent être proposées sont
« des accueils de jour » afin de « mettre en place des temps de répit […] mettre en place des
compensations humaines. ».
19
Centre Mémoire de Ressource et de Recherche
32
L’ergothérapeute se charge de toute la partie évaluation et détermine le plan de prise en
charge. Puis, ce sont les ASG20 qui se rendent au domicile pour mettre en place les objectifs
et les moyens décidés en amont par l’équipe, la personne et son entourage.

En institution (Accueil de jour spécialisé)
Au sein de cette structure, une journée par semaine a été dédiée à l’accueil de
personnes Alzheimer jeunes. Dans l’accueil de jour, les personnes sont « prises en charge
dans le sens accompagnées toute la journée ». L’équipe pluridisciplinaire est composée de
d’une AMP21, d’une AS22, d’une AVS23 qui proposent divers activités et ateliers soit au sein
de l’établissement, soit en extérieur : « Plusieurs activités et animations leur sont proposées
[…] des sorties au cinéma, jardin, zoo, bowling, des activités sociales […] des activités au
sein de l’accueil de jour comme la lecture du journal, des activités artisanales, des ateliers
cuisines, etc. ». Pour compléter cet accompagnement des professionnels extérieurs
« l’animateur, la psychologue une fois toutes les deux semaines en alternance avec
l’ergothérapeute » interviennent ponctuellement sur le temps d’accueil des personnes
Alzheimer jeunes.

2ème axe : l’institutionnalisation
Cet axe se réfère à l’accompagnement fait au sein d’Etablissement d’Hébergement pour
Personnes Agées Dépendantes(EHPAD). « Ici on a une unité Alzheimer de onze lits qui a
été crée en interne », les « résidents » sont placés dans ces établissement lorsque le
maintien au domicile n’est plus possible et que l’aidant ne peut plus assouvir son rôle. Les
EHPAD*24 sont des lieux d’hébergement, des lieux de vie pour les personnes qui sont ici
chez elles. L’équipe soignante présente apporte les soins nécessaires au bien-être des
personnes. Des activités diverses peuvent être proposées au cours de la journée.
Pour résumer, l’accompagnement des personnes de 55-65 ans porteuses de la maladie
d’Alzheimer se dessinent en deux grands axes en fonction du niveau d’autonomie de la
personne et donc de son maintien ou non au domicile. Lorsque celui-ci est possible, trois
secteurs sont actuellement prédisposés à prendre en charge ce public, chacun ayant
développé des objectifs d’accompagnement qui lui sont propres.
20
Assistant de Soins en Gérontologie
AMP : Aide Médico-Psychologique
22
Aide Soignante
23
Auxiliaire de Vie Sociale
24
Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes
21
33
Afin de synthétiser les accompagnements existant aujourd’hui pour les personnes de
55-65 ans porteuses de la maladie d’Alzheimer, un tableau récapitulatif a été élaboré cidessous.
Psychiatrie
Neurologie
Type de
structure
Domicile
Equipe mobile
psychogériatrie
X
évaluation ; prise en charge rééducative
troubles
cognitifs
et
psychiatriques ;
aménagement de l’environnement
X
diagnostic ;
évaluation ;
traitements
médicamenteux ; établissement de relais
pour une prise en charge rééducative
X
évaluation ; prise en charge rééducative
dans un but de maintien au domicile /
stimulation
des
capacités
restantes/
développement de compensations ; mise en
place de relais ; accompagnement de
l’aidant.
X
Accompagnement à la journée ; activités
sociales ;
stimulation
des
fonctions
cognitives ; temps de répit de l’aidant
CMRR*
Institution
ESA*
Gériatrie
Accueil de jour
EHPAD*
X
Objectifs
Lieux de vie ; soins ; maintien des capacités
par le biais de stimulation (activité de
groupe ; mise en situation écologique)
L’ACCOMPAGNEMENT D’UN PUBLIC NOUVEAU QUI DEMANDE DE FAIRE FACE A
CERTAINES DIFFICULTES
Au sein de cette thématique, nous avons cherché à savoir si les équipes
pluridisciplinaires avaient exprimé une certaine réticence à l’accompagnement du public de
55-65 ans porteur de la maladie d’Alzheimer.
Exerçant depuis peu dans sa structure (accueil de jour), l’ergothérapeute n‘a pu
répondre. En majorité, les professionnels du groupe1 n’ont pas perçu de réticence de la part
de leur équipe. Seul, un des professionnels a exprimé clairement une réticence des
professionnels à l’accompagnement de ce public.
Pour la majorité des professionnels (3/5), l’aisance décrite auprès de l’accompagnement
de ce public est en lien avec une intervention des professionnels plus régulière auprès d’un
public jeune. En effet, certaines structures accueillent « des personnes âgées mais aussi
des adultes jeunes handicapés ». Pour d’autres, l’accompagnement de personnes jeunes est
34
l’essence même de leur pratique, « la culture neurologique » au sein d’équipes, fait qu’elles
sont habituées « à travailler auprès de personnes jeunes ». Le professionnel ayant perçu les
réticences appartient au groupe 2, il représente donc l’institution. Dans les EHPAD*, la prise
en charge de personnes jeunes reste exceptionnelle. C’est ce caractère exceptionnel de
l’accompagnement couplé à une absence de prise en considération des inquiétudes et de la
souffrance de l’équipe face à la complexité de l’accompagnement, qui en serait la cause.
Par la suite, la recherche autour des difficultés d’accompagnement de ces personnes a
été abordée. Autour de cette question, de l’existence ou non de difficultés nouvelles lors de
la prise en charge des personnes de 55-65ans porteuses de la maladie d’Alzheimer, les
professionnels acquiescent à l’unanimité.
L’origine des difficultés et leur intensité est variable en fonction de chaque secteur et des
professionnels interrogés.
- le profil différent des patients jeunes est une difficulté nouvelle pour quatre
professionnels sur cinq. Pour eux, l’évolution rapide de la pathologie a été une difficulté
importante. Une symptomatologie différente de la pathologie a été également constatée,
« certains accompagnements sont plus complexes parce qu’il y a une entrée dans la
pathologie atypique […] qui demande des actes et des connaissances plus pointues ».
- L’environnement socio-familial est plus complexe. Des lors, « on ne mesure pas
tout l’accompagnement des familles et notamment dans la prise en charge des enfants
jeunes. Pour l’ensemble des professionnels, la précocité de l’appariation de la maladie
d’Alzheimer chez ces personnes rend difficile l’acceptation de la pathologie:« les gens
aidant ont justement du mal à intégrer » le fait « qu’il ne faille plus faire confiance à la
personne en quelque sorte ». C’est toujours au sein de l’EHPAD que la difficulté la plus
intense a été perçue « ça a favorisé l’éloignement familial ».
- Une acceptation des soins plus compliquée au regard de l’âge des personnes est
mise en évidence par les professionnels interrogés. En effet, l’« acceptation de la perte de
l’autonomie et donc de l’intervention d’une aide extérieure » est une problématique souvent
posée. De plus les équipes sont « souvent confrontées à ce déni de la maladie, de la
conscience objective du trouble.»
- La difficulté à trouver des relais adaptés : ceux-ci sont « parfois difficiles à mettre en
place au vue de l’âge de la personne ». « Il y a quand même cette barrière de l’âge » qui
rend « difficile de trouver des structures adaptées ».
- La difficulté à gérer la proximité d’âge et donc pour le professionnel à gérer ses
ressentis « l’équipe se retrouve face à des situations qu’elles ont du mal à gérer que se soit
au niveau professionnel ou personnel ». Parfois l’accompagnement de certaines personnes
35
peut faire émerger chez les professionnels des émotions, des réticences en lien avec leur
vécu, « les patients étant jeunes cela peut faire échos à des parents proches ».
Que ce soit en neurologie, en psychiatrie ou gériatrie, les professionnels doivent faire
face à des difficultés nouvelles. Ces dernières sont à mettre en lien avec une
symptomatologie différente de la pathologie, un environnement socio-professionnel et
familial plus actif et sollicité, une précocité de l’atteinte rendant l’acceptation des soins et
l’entrée en relation plus compliquée, et un manque de structures relais adaptées. Il a
également été remarqué que le milieu institutionnel perçoit de nouveau des difficultés qui
sont plus intenses et au sein duquel des réticences des équipes à l’accompagnement de ce
public ont été constatées.
UN ACCOMPAGNEMENT DE LA PERSONNE DIFFERENT
Ce dernier serait différent mais n’est pas spécifique pour tous les professionnels.
A l’interrogation principale de cette recherche, qui est l’existence ou non d’une spécificité
de prise en charge des personnes de 55-65 ans porteuses de la maladie d’Alzheimer, seul
trois professionnels sur cinq y répondent oui. Cependant, les deux professionnels ayant
répondu non, nuancent leur propos« En théorie il n’y a pas de différence mais avec du recul
on voit que la prise en charge est accélérée ».
D’un point de vue général, tous les professionnels, quelque soit leur secteur et leur
structure d’exercice, s’accordent sur des particularités présentes dans l’accompagnement de
personnes Alzheimer de 55 à 65 ans. En effet, pour ces personnes, il n’y a « pas les mêmes
problématiques, les mêmes ressources temporelles, financières, etc. ».
Nous avons donc cherché à établir les particularités de l’accompagnement qu’ont pu
repérer les différents professionnels.
- Un profil de la pathologie variable : les troubles mnésiques ne sont pas
nécessairement présents au départ ; l’évolution rapide de la pathologie est constatée par
l’ensemble des professionnels. De plus, la symptomatologie initiale de la maladie peut
également être différente (absence de troubles mnésiques ; troubles praxiques ; syndrome
de Benson …).
- Un environnement global différent : la prise en charge des personnes de 55-65
ans porteuses de la maladie d’Alzheimer nécessite de prendre en compte « des
problématiques sociales, familiales et professionnelles qui ne sont pas les mêmes » que
celles présente chez un public âgé. Pour cette génération d’adulte, les personnes ont « une
vie sociale dynamique, plus, que chez la personne âgée ».
36
De plus, concernant l’entourage, l’aidant principal, souvent le conjoint, est « plus jeune,
par contre il travaille donc est moins disponible ». La présence d’enfant encore à charge au
domicile est une situation possible.
- Des ressources différentes : concernant le patient lui-même, les ressources
physiques sont plus importantes et peuvent rendre l’accompagnement plus compliqué à des
stades avancés de la maladie, « des capacités motrices qui ont rendu l’accompagnement
difficile ». En effet, lors des stades avancés, les déambulations, les troubles du
comportement sont fréquents. Pour la personne, la gestion de ces troubles peut être plus
compliquée sachant que pour cette tranche d’âge les capacités motrices, la force, sont plus
importantes. Cependant, ces ressources physiques sont aussi un atout. Les capacités
motrices des personnes étant plus mobilisables, des activités plus physiques peuvent être
proposées au patient.
- Un impact psychologique plus important du fait « du risque de dépression qui est
plus élevé car il y a des répercussions dans le quotidien qui sont importantes car il y a
souvent un problème familial, professionnel, etc. ».
- Le passage de relais et les structures adaptées sont une difficulté importante
que constate l’ensemble des professionnels. Ils doivent revoir leurs partenariats habituels,
« on a des données autres par rapport aux ressources, aux services partenaires », ce qui
pour eux demande un nouveau démarchage, « il faut que je me réfère à d’autres
professionnels et ça c’est plus chronophage pour moi ».
Globalement, même si la
prise en charge de ce public n’est pas perçue comme
spécifique par tous, des particularités d’accompagnement ont été mises en avant. Les
variations de réponses à la question principale sont à mettre en lien avec la pratique
professionnelle des interviewés. En effet, les professionnels ayant répondu non, travaillent
au sein d’équipes mobiles (gériatrique ou psychiatrique). Ici, les modalités de la prise en
charge et les grands principes de prise en charge sont similaires à ceux rencontrés chez la
personne âgée, « mais on n’axera pas les objectifs sur les mêmes types d’activités ». C’est
une intervention ponctuelle, personnalisée pour des patients vivant encore à leur domicile.
Pour les deux des trois professionnels qui ont répondu positivement, leur exercice s’effectue
au sein d’établissement spécifique à l’accueil de la personne jeune. Enfin, pour la dernière,
représentant le milieu institutionnel, l’écart de l’âge avec la population accueillie rend la
structure inappropriée. C’est pour cela que selon ces professionnels une prise en charge
spécifique à la personne jeune doit être instaurée.
37
LES RESSOURCES A LA DISPOSITION DES PROFESSIONNELS
Par le biais de l‘avis des professionnels, nous avons tenté de mettre en avant
les
critères de la prise en charge qui aujourd’hui sont le plus adaptés au public jeune. Pour les
professionnels, « Aujourd’hui il n’en existe pas. » dans le sens où aucun des
accompagnements proposés (neurologie, psychiatrie ou gériatrie) ne convient pleinement à
ce public.
Globalement, pour l’accompagnement le plus adapté toutes les professionnelles
s’accordent. C’est un maintien au domicile qui est à privilégier le plus longtemps possible.
Des structures, des équipes ont été développées, cependant chacune possède encore à
l’heure
actuelle
des
limites
(intervention
à court
terme,
manque
de
structures
relais adaptées ; manque d’adaptation des formations et de l’information sur la pathologie
pour les professionnels et l’entourage). Puis dans un second temps, lorsque la vie au
domicile n’est plus possible, c’est la question du placement en institution qui se pose et
aujourd’hui aucune réponse adaptée n’a été trouvée puisque « Aucune structure actuelle qui
ne convient à la personne Alzheimer jeune qui ne peut plus résider à son domicile ».
Nous avons cherché à savoir si l’organisation du système de santé actuel permet aux
professionnels de santé d’accompagner de manière efficace et globale ce public de 55-65
ans atteint de la maladie d’Alzheimer. Ace sujet, les professionnels soulignent l’existence de
solutions pour ce public mais aussi les efforts nécessaires à faire notamment en matière
d’hébergement. L’adaptation, la personnalisation de l’accompagnement sont les maîtres
mots, pour une prise en charge optimale. La prise en considération de la personne doit donc
être à garder en tête pour ne pas laisser de côté les spécificités liées à leur âge « je ne veux
pas être pris pour un vieux ». Bien qu’il existe des moyens utiles aux professionnels, les
ressources humaines et matérielles sont encore insuffisantes pour l’accompagnement de
ces personnes
2.3.2 QUESTIONNAIRES
Les ergothérapeutes ayant répondu au questionnaire exercent leur profession dans
deux types de secteurs (gériatrie ou neurologie) et dans des structures diverses (hôpital ;
institution) ou au sein d’équipe mobile (ESA).
38
PRESENTATION DU PANEL DE PROFESSIONNEL
Années de pratique de
l’ergothérapie
Années de pratique
auprès de personnes
Alzheimer
Structures
Fréquence du public
Alzheimer jeune
E1
E2
E3
E4
E5
+10 ans
+10 ans
5-10 ans
+10 ans
1-5 ans
+10 ans
+10 ans
1-5 ans
+ 10 ans
1-5 ans
CHU
EHPAD+ ESA+
HDJ
Accueil de jour
Alzheimer
CMRR, CHU
neurologie,
ESA
5
Une dizaine
4
15
5
LES POINTS PRINCIPAUX DE LA PRISE EN CHARGE MENEE EN ERGOTHERAPIE

L’expression clinique de la pathologie
Considérez-vous que l'expression clinique de la pathologie à
cet âge est différente?
20%
Oui
Non
80%
Pour les 80% de Oui, la différence serait due à un tableau clinique plus sévère avec une
évolution rapide ; une entrée dans la pathologie différente (Atrophie corticale postérieure ;
moins de troubles mnésiques). Pour les 20% de non, cette réponse m’a paru étonnante. En
effet, aujourd’hui des articles paraissent de plus en plus affirmant que chez les personnes
jeunes il y a une expression particulière de la pathologie (maladie d’Alzheimer à forme
focale).

Une spécificité d’accompagnement ?
La prise en charge en ergothérapie des personnes de 55-65
ans est-elle spécifique?
Oui
Non
40%
60%
Concernant l’interrogation principale, sur l’existence d’une spécificité de la prise en
charge des personnes de 55-65ans porteuses de la maladie d’Alzheimer, les 60% de OUI,
39
estiment que les problématiques étant différentes chez l’adulte, la prise en charge varie tout
autant. Pour les 40% de NON, les objectifs sont similaires à l’accompagnement fait auprès
de la personne âgée.

Les grandes lignes de la prise en charge en ergothérapie
Secteur
Neurologie
Gériatrie
Objectifs
-
Evaluation des troubles cognitifs et de leurs répercussions au quotidien
Entretien des compétences (aménagement de l’environnement, mise
en place d’activité de stimulations cognitives et motrices
Accompagnement de l’aidant
Etablissement de relais
-
Evaluation à domicile
Maintien de l’autonomie dans les activités instrumentales
Gestion de la problématiqueprofessionnelle
Accompagnement de l’entourage
Quelque soit le secteur interrogé, l’on remarque au travers de ce tableau, que les grands
axes d’une prise en charge faite en ergothérapie de ce public sont respectés. Ce qui est
surprenant, c’est qu’au vu de l’âge des personnes suivis (55-65 ans), la problématique
professionnelle n’a été soulevée que par un seul des ergothérapeutes.
A présent nous allons en quelques grands points résumer l’accompagnement fait en
ergothérapie de ces personnes.
- Les grands principes de l’accompagnement des adultes de 55-65ans atteints de la
maladie d‘Alzheimer ne sont pas différents de ceux respectés chez la personne âgée. « le
respect du choix de vie de la personne et de son entourage » est un principe partagé par
tous les ergothérapeutes ; l’accompagnement de la famille (parent, conjoint, enfant) est une
notion qui ressort également.
- L’évaluation faite auprès des personnes de 55-65ans porteuses de la maladie
d’Alzheimer est pour la majorité des ergothérapeutes, similaire à celle utilisée chez la
personne âgée.Seul 20% des professionnels utilisent une évaluation nouvelle, tels que des
« bilans cognitifs maison pour avoir une idée de la répercussion dans le quotidien ».
- Des problématiques nouvelles dans l’accompagnement sont observées par 100%
des ergothérapeutes.Les grandes problématiques qui ressortent concernent « la gestion de
la vie professionnelle et familiale » pour la personne et son conjoint ; le « choix du relais » et
les difficultés à trouver des structures adaptées ; l’aspect image de la pathologie qui
nécessite une « éducation thérapeutique de l’entourage environnemental ».
40
- Des moyens innovants, dans 80% des cas les ergothérapeutes font appel ou
souhaiteraient utiliser des moyens nouveaux. Ces moyens sont encore trop peu nombreux
pour certains. Le manque de structures relais, de formation externe pour les professionnels
et les familles, de suivis psychologiques, etc.
- Des difficultés nouvelles sont rencontrées par
les ergothérapeutes dans
l’accompagnement de ces personnes.
Fréquence des difficultés perçues dans l'accompagnement des
personnes de 55-65ans porteuses de la maladie d'Alzheimer
0%
40%
Difficultés faibles
Difficultés moyennes
Difficultés importantes
60%
Les difficultés présentes sont au minimum moyennes, les professionnels de chaque
secteur font face à des difficultés au cours de la prise en charge. Le manque de moyens
adaptés et la difficulté relationnelle avec la personne ou la famille sont celles qui ont été le
plus exprimées.
La prise en charge en ergothérapie des personnes de 55-65ans porteuses de la maladie
d’Alzheimer n’est pas considérée comme spécifique par tous les professionnels. Cependant
tous s’accordent pour dire que des problématiques nouvelles spécifiques à cette tranche
d’âge sont à prendre en compte, rendant l’accompagnement plus compliqué. L’utilisation de
moyens nouveaux serait souhaitée par la majorité d’entre eux mais ces derniers sont rares.
Quand aux principes d’accompagnement, ces derniers ne se modifient pas par rapport à la
personne âgée : le respect des habitudes de vie, de la fatigabilité et la considération globale
de l’individu.
Les problématiques spécifiques, le manque de moyens, de structures adaptées pour
mettre en place des relais pertinents sont soulevés. Cependant, quel type de structure les
professionnels imaginent-ils pour l’accompagnement de ces personnes ?
LES CARACTERISTIQUES D ’UNE PRISE EN CHARGE OPTIMALE
En comparaison avec les prise en charge éffectuée actuellement, les professionnels
se prononcent quant aux caractéristiques d’une prise en charge optimale.
41
Selon vous, quel serait le secteur de prise en charge en
ergothérapie le plus adapté?
Gériatrie
0%
20% 20%
60%
Neurologie
Création d'un secteur
spécifique
Psychiatrie
Pour 60 % des ergothérapeutes, le suivi en neurologie serait donc le secteur le plus
propice à l’accompagnement des personnes de 55-65 ans porteuses de la maladie
d’Alzheimer.
Quelle modalité d'accompagnement serait la plus adapté?
0%
Institution
40%
60%
Domicile
Les deux
Selon les professionnels interrogés l’accompagnement le plus adapté associe un
maintien au domicile dans les premiers temps, avec au long terme un accompagnement vers
des structures d’hébergement.
L'organisation actuelle du système de santé permet-elle une prise en
charge optimale de ces personnes?
20%
Non
Oui
80%
Pour les 80%, les raisons principales évoquées sont toujours en lien avec l’absence ou
le manque de structures adaptées, ainsi que la « problématique de financement d’aides à
domicile ».
Enfin, pour 100% des professionnelles la création d’une prise en charge spécifique pour
les 55-65 ans porteurs de la maladie d’Alzheimer est concevable.Les idées proposées
consistent soit en la création de structuresd’accueil spécifique (accueil de jour ; de nuit…)
avec du personnel formé à l’accompagnement de ces personnes ; de créations d’activités
adaptées.
L’un des ergothérapeutes a soulevé l’idée d’une Equipe spécialisée au domicile qui
s’adaptera aux « difficultés rencontrées par la personne sur le lieu de travail, dans les
relations sociales, loisirs, etc. ».
42
3. DISCUSSION
3.1 VALIDATION DES HYPOTHÈSES DE RECHERCHE
Par l’intermédiaire de ce travail de recherche, j’ai souhaité mettre en avant un public
encore peu connu de la société et du monde médical. Et c’est notamment par mon regard de
future professionnelle que j’ai souhaité aborder cette thématique. Suite au questionnement
de départ, autour de l’existence d’une spécificité de prise en charge chez de 55-65ans
porteuses de la maladie d’Alzheimer, deux hypothèses avaient été établies. Le recueil de
données effectué auprès de professionnels de santé a permis d’apporter des éléments de
réponses.
Concernant l’hypothèse 1 : Au regard de la précocité de l’atteinte, la prise en charge en
ergothérapie des personnes Alzheimer jeunes nécessite une réévaluation du modèle actuel
de prise en charge afin de répondre au plus près aux attentes et besoins des personnes. Il y
aurait donc, une spécificité de prise en charge. La réalité est à nuancer puisqu’une prise en
charge nouvelle et spécifique ne fait pas l’unanimité auprès des professionnels.
Sur la totalité des professionnels interrogés (entretiens et questionnaires), 60%
s’accordent à dire que la prise en charge est spécifique. Pour eux, l’accompagnement de la
personne de 55-65 ans n’est pas comparable et ne peut être calqué sur celui de la personne
âgée, au regard des rôles familiaux, sociaux, professionnels, des capacités motrices et
cognitives davantage mobilisables. Les moyens adaptés sont rares ce qui complexifie cet
accompagnement. Enfin, chez les personnes 55-65 ans, la pathologie ne présente pas les
mêmes caractéristiques cliniques puisqu’on parle bien de maladie d’Alzheimer à forme
focale.
Pour les 40% de NON, bien que l’accompagnement des personnes de 55-65 ans
amènent des problématiques et des contraintes nouvelles, les grands principes de la prise
en charge restent identiques à ceux de la personne âgée : le respect des habitudes de vie ;
la prise en compte de l’environnement ; la stimulation de fonctions restantes dans un but de
maintien de l’autonomie, etc.
Cependant, à l’unanimité tous s’accordent pour dire que leur intervention demande une
imagination et une créativité. Ceci dans le but de pallier aux difficultés nouvelles, aux
manques de moyens et de structures adaptés.
Des spécificités sont présentes dans l’accompagnement de cette population, ce qui
permet de valider notre première hypothèse.
43
Concernant la seconde hypothèse : En prenant en compte l’ensemble des possibilités
d’accompagnement des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer (accompagnement
au domicile, famille d’accueil, institutionnalisation, etc.), le suivi au domicile paraît être le
meilleur dans le cas de personnes Alzheimer jeunes.
Les expériences de terrain exposées par les professionnels au cours des entretiens et
des réponses aux questionnaires, démontrent que le maintien au domicile est la solution
privilégiée. Cependant, au vue de l’évolution de la maladie, la personne et son entourage
doivent être préparées à la possibilité de l’institutionnalisation. L’hypothèse 2 est donc
validée toutefois, celle-ci doit être nuancée puisque inévitablement le maintien au domicile
ne pourra perdurer indéfiniment.
3.2 CONCLUSION DE LA RECHERCHE
Les moins de 65 ans touchés par la maladie d’Alzheimer, font de plus en plus parler
d’eux, (interviews sur des chaines de télévision, livres, témoignages etc.), mais leur prise en
charge par le secteur médical et para-médical n’est pas encore optimale, faute d’y trouver
réellement leur place. A l’heure actuelle, les secteurs de la psychiatrie, de la gériatrie et de la
neurologie ont mis en place des prises en charge qui fonctionnent, mais toutes révèlent des
limites. En effet, l’émergence de témoignages, les réactions des professionnels ainsi que les
différents rapports de recherche,
mettent en
avant
un
dysfonctionnement
dans
l’accompagnement de ces personnes et de leur entourage.
La confrontation aux avis de professionnels a permis de conforter l’idée qu’aujourd’hui
une majorité de professionnels se sent un peu démunie face à la prise en charge des
personnes jeunes. Cependant, ce n’est pas l’absence de compétences adaptées qui en est
la cause première, comme nous pourrions être amenés à le croire. En effet, pour beaucoup,
l’essence même de la pratique s’appuie sur les habitudes de vie, les spécificités de la
personne et de son environnement. Les professionnels et notamment l’ergothérapeute a
donc les compétences pour prendre en charge ces personnes. L’accompagnement de ces
personnes déstabilise, du fait de la précocité de l’atteinte et des modalités nouvelles de cette
prise en charge. La maladie d’Alzheimer à forme focale, se traduit dans la phase initiale par
l’expression de trois syndromes. Son évolution souvent plus rapide, ne suit pas le schéma
clinique habituellement rencontré chez la personne âgée.
L’information autour de la prise en charge de ces personnes étant rare, ces
professionnels sont en demande d’un retour de la pratique de chacun.
44
La question de l’institutionnalisation est une problématique qui a été fréquemment
abordée par les professionnels. Aucune structure n’étant actuellement adaptée à l’accueil de
ces personnes et de leur famille, celle-ci reste sans réponse. En effet, aujourd’hui lorsque les
personnes ne peuvent plus rester au domicile, elles peuvent intégrer des EHPAD*
(moyennant des dérogations) ou encore des MAS. Peut-on espérer dans les années à venir,
une création de structure spécifique pour l’hébergement de ces personnes ? La mise en
place de « maisons d’accueil », au sein desquelles les patients seraient accueillis en petit
groupe et avec des soignants en nombre suffisant et avec des petits groupes de patients
serait idéale. Cependant à l’échelle nationale, les personnes Alzheimer jeunes représentent
un faible pourcentage.
J’ai fait le choix d’amener une reflexion autour des représentations sociales de la
pathologie puisque, pour moi, elles peuvent impacter la pratique professionnelle. Notre
exercice professionnel s’applique à l’humain, à l’individu. Nous restons avant tout des
personnes avec nos propres représentations, nos sensibilités et notre personnalité. Exercer
dans une profession paramédicale demande un certain recul et une autocritique de sa
pratique, afin d’assurer un accompagnement optimal. Dans le cas du suivi de personnes de
55-65 ans porteuses de la maladie d’Alzheimer, les entretiens ont mis en avant l’impact du
paradoxe entre la pathologie et l’âge des personnes sur les professionnels. Cela n’empêche
pas les professionnels d’exercer leur pratique, mais tous ont eu au moins une réflexion à ce
sujet. Pour certains cela a créé des difficultés d’accompagnement.
3.3 REFLEXION AUTOUR DE LA PRISE EN CHARGE EN
ERGOTHERAPIE
L’accompagnement des personnes de 55-65ans porteuses de la maladie d’Alzheimer
est complexe. La maladie étant dégénérative, l’ergothérapeute doit réajuster au fur et à
mesure ses moyens et ses objectifs, afin qu’ils ne soient ni trop élevés ni en deça des
capacités de la personne.
Dans la pratique, la profession doit respecter des grands principes :
- La prise en charge globale en ergothérapie prend en compte l’ensemble les
habitudes de vie et des aspects environnementaux qui gravitent autour de la personne que
se soit au niveau humain, financier, matériel, etc. Cette approche bio-psycho-sociale est
d’autant plus importante dans le cas de personnes de 55-65 ans, car les problématiques et
les ressources sont différentes de celles habituellement rencontrées dans le cas d’une
personne âgée. Les habitudes varient d’un individu à l’autre et le contraste est d’autant plus
45
important entre générations. Pour ces adultes, les activités sociales sont plus nombreuses, il
y a également un rôle familial et professionnel qui est à préserver au maximum.
- L’adaptation est un autre mot d’orde de la prise en charge en ergothérapie.
L’ergothérapeute doit quotidiennement prendre en compte l’environnement, les besoins, les
envies et les capacités de la personne afin d’adapter son accompagnement. Cette notion
d’adaptation est à mettre en lien avec une prise en charge spécifique, des objectifs
personnalisés et des moyens adaptés.
Nous avons précisé auparavant, que la prise en charge à domicile était la solution la
plus adaptée, pour les personnes de 55-65 ans porteuse de la maladie d’Alzheimer. Nous
allons à présent tenter de mettre en avant les éléments important de la prise en charge en
ergothérapie.
Le temps d’évaluation initial est important, car il permet de bien cibler les capacités de la
personne, de déceler les schémas d’apprentissage les plus performants et de déterminer les
objectifs de la prise en charge. Chez cette population, les atteintes sont, pendant un temps,
ciblées sur certaines fonctions (langage ; mémoire ; praxie), ceci permet au thérapeute
d’utiliser les ressources cognitives davantage préservées afin de mettre en place des
moyens de compensations. Concernant ces derniers, l’ergothérapeute peut s’appuyer sur la
domotique et les aides techniques qui sont plus facilement acceptées par ce public. La
précocité de la prise en charge favorise l’apprentissage et donc la mise en place de
compensations.
Concernant la formation-information des personnes et de leur famille, l’ergothérapeute
doit rechercher les outils adaptés, voir en créer lui-même, puisqu’à l’heure actuelle, les
plaquettes d’information et certaines formations elle-même sont axés sur la personne âgée.
Suite au retour des professionnels, des grandes problématiques spécifiques aux
personnes de 55-65 ans ont été mise en avant.
- Autour de la question professionnelle, sans maintenir la personne dans un « rêve »
d’une poursuite professionnelle sans encombre, il est important, si les capacités de la
personne le permettent, d’adapter le poste de travail, de l’entraîner sur des techniques, pour
essayer de maintenir l’activité de la personne. Cependant, à ma surprise, la question
professionnelle n’a pas été abordée systématiquement par les ergothérapeutes.
- Autour de la question de la conduite : l’ergothérapeute se doit d’informer la personne
et la famille des risques qui peuvent être présents quant à la reprise de la conduite. Si l’ârret
de la conduite n’est pas accepté par la personne, le professionnel pourra l’accompagner
pour faire un bilan de conduite auprès d’une auto-école, afin de l’aider à entendre et
accepter cette décision.
46
- Autour du maintien de la personne dans sa participation aux activités sociales, et aux
loisirs : ces derniers sont plus importants à cet âge. La limite est que les lieux habituels de
soins pour les personnes porteuses de la maladie d’Alzheimer ne sont pas adaptés aux
personnes jeunes. Le développement d’accueil de jours spécialisés permettra de pallier en
partie ce manque. L’ergothérapeute doit alors trouver des ressources nouvelles qui
malheureusement sont encore trop peu nombreuses. Si tel est le souhait de la personne et
de sa famille, l’ergothérapeute peut, en lien avec la famille, démarcher des associations
locales afin d’apporter des conseils sur l’accompagnement et la gestion des troubles de ces
personnes.
- Autour de l’accompagnement des aidants : le développement de la formation des
aidants jeunes pourrait être un concept intéressant. Il est donc important de s’informer des
réseaux existants (association ; bistrot mémoire, psychologue) qui permettent aux aidants
d’exprimer leur ressentis, de partager leurs interrogations, leurs inquiétudes et de trouver du
soutien.
Certes, l’accompagnement des personnes jeunes est spécifique mais pas impossible.
Actuellement, Les professionnels ont développé des choses intéressantes, mais la limite
vient surtout du fait que cette population est encore peu connue. Des structures existent,
mais les prises en charge sont axées vers la personne âgée, ce public étant en majorité
touché par cette pathologie.
3.4 RETOUR CRITIQUE DE LA RECHERCHE
La thématique de mon mémoire étant récente, les recherches bibliographiques ont été
complexes car, j’ai au départ eu des difficultés à cerner mes lectures. De plus, un nombre
important de littérature étant en anglais je n’ai pu, au regard de mon niveau, en profiter
comme je l’aurais souhaité.
Concernant le recueil de données, la difficulté s’est essentiellement concentrée sur le
recensement de professionnels exerçant auprès de ce public. Les structures et les équipes
qui accompagnent les personnes porteuses de la maladie d’Alzheimer sont aujourd’hui en
plein essor. Les personnes jeunes sont suivies dans différents secteurs de santé, par des
professionnels qui ne sont pas nécessairement formés à ce type de prise en charge.
Concernant la gériatrie, les professionnels interrogés exercent dans différents types de
structures au sein d’institution ou en ambulatoire. Ceci apporte une certaine richesse et un
aperçu complet de la pratique. N’ayant pas trouvé de professionnels exercant dans un
hopital psychiatrique, je n’ai pu mener d’entretien dans ce type d’établissement, ce qui
aurait apporté un regard différent sur la prise en charge en psychiatrie.
47
De plus, l’analyse des résultats d’entretiens s’est vue complexifiée, du fait des
différences de pratique et de statut des professionnels, qui ont amené des réponses
divergentes. C’est un élément que je n’avais pas appréhendé lors de mon choix de la
population à interroger. La pratique auprès des personnes jeunes étant peu courante, j’ai
privilégié la diversité des professionnels plus que l’approndissement d’une pratique précise,
afin de pouvoir établir un état des lieux.
Au regard du nombre de réponses peu élévée aux questionnaires ainsi qu’au panel
restreint de professionnels interviewés, la pertinence des résultats est à relativiser.
3.5 OUVERTURE DE LA RECHERCHE
La prise en charge des personnes de 55-65 ans est parsemée d’obstacles et ces
derniers sont majoritairement dus aux manques d’informations de la société sur ce public.
Une intensification de l’information à leurs égards permettra peut être d’atténuer certains
problèmes tels que le retard de diagnostic. Pour expliquer celui-ci, différentes causes sont
possibles. Soit les médecins traitants ne pensent pas à cette maladie au vue de l’âge des
personnes, soit les personnes elles-mêmes tardent à consulter. Dans tous les cas,
l’information autour de la maladie d’Alzheimer chez les moins de 65 ans doit être plus
importante envers le grand public, le secteur médical, le milieu professionnel, etc.
Néanmoins, la société va en ce sens car depuis le début de ma recherche je vois davantage
d’articles publiés en français s’intéressant à ce sujet.
Pour résumer, si l’information était plus importante, le diagnostic plus précoce, les
professionnels pourraient également intervenir plus précocément et donc mettre des choses
en place avant une perte trop importante de l’autonomie. Si le grand public était informé, la
question professionnelle, le maintien des loisirs, etc. serait également facilités. La question
de l’hébergement pourrait également être abordée en amont et préparée afin d’éviter les
situations d’urgences traumatisantes. Dans cette optique, l’ergothérapeute aurait toute sa
place. Ne pouvant s’assimiler à de l’éducation thérapeutique, l’ergothérapeute a un rôle
d’information et d’éducation de la personne, de sa famille proche et de l’entourage, même si
celles-ci ne peuvent s’assimiler à de l’éducation thérapeutique. Ainsi, des plaquettes
d’informations pourraient être créées avec une équipe pluriprofessionnelle ; des temps
d’information, des démarchages dans les structures et médico-sociales, mais aussi dans les
entreprises, etc.
48
La création d’équipes spécialisées dans l’accompagnement des personnes jeunes
porteuses de la maladie d’Alzheimer pourrait être une idée interessante. Ces équipes
pourraient ainsi approfondir les thématiques spécifiques à cette population telle que la
question professionnelle, sociale, familiale. Mais cette création est-elle réalisable ? La mise
en place d’équipe ou de structure spécialisées parrait utopique au vue du nombre de
patients Alzheimer jeunes à l’échelle nationale. Plusieurs instances telles que le centre
national de référence des malades Alzheimer jeunes se penchent sur le sujet, et des
solutions seront peut être élaborées dans quelques années.
A l’heure actuelle, l’ergothérapie est une profession qui se développe dans le secteur
libéral.
Ces
professionnels
libéraux
pourraient-ils
intervenir
dans
le
cadre
de
l’accompagnement des personnes de 55-65 ans porteuses de la maladie d’Alzheimer ? En
effet, cela éliminerait les contraintes de temps présentes dans les équipes spécialisés
Alzheimer. Exercant sur un secteur géographique définis, chacun connait les structures de
son territoire, les partenaires, etc. Ainsi, l’augmentation du nombre de professionnels en
libéral pourrait permettre de répondre à cette demande.
Cependant, la limitation des remboursements des actes libéraux des ergothérapeutes
n’expliquerait-elle pas la limite du recours à ces professionnels?
49
CONCLUSION
Pour conclure, cette recherche autour de l’accompagnement des personnes de 55-65
ans porteuses de la maladie d’Alzheimer a tenté d’amener des pistes de réflexion autour de
leur prise en charge dans le milieu du soin et notamment en ergothérapie.
La maladie d’Alzheimer à forme focale présente des particularités cliniques, qui
couplées aux problématiques sociales, familiales, professionnelles en lien avec leur âge,
ainsi qu’avec un manque de structures adaptées, rend l’accompagnement de ces personnes
complexe. Bien que la pathologie soit dégénérative, la personne doit être stimulée au
maximum afin de lui permettre de maintenir ces rôles sociaux et son estime d’elle. « Nous
avons encore des capacités. Même à un stade avancé de la maladie des compétences
peuvent ressurgir, bien que nous perdions certaines notions, nous pouvons développer de
nouvelles sensibilités. Nous avons avant tout besoin d’exister, d’être heureux et d’être
comme tout le monde. »25.
Sur le plan personnel, ce mémoire m’a conforté mon intérêt pour
la profession
d’ergothérapeute. Les recherches théoriques m’ont permis d’approfondir les connaissances
de la maladie et les spécificités cliniques présentes chez les 55-65 ans. J’ai pu appréhender
de plus près l’accompagnement de la personne porteuse de la maladie d’Alzheimer et ainsi
consolider mes connaissances. Les échanges avec les professionnels ont été très riches
pour la construction de ma recherche mais également pour ma pratique future.
L’exemple des malades Alzheimer jeunes remet en cause le principe d’équité dans le
monde du soin. Ce concept peut être défini comme étant « une qualité consistant à attribuer
à chacun ce qui lui est dû par référence aux principes de la justice naturelle. »26, et il est
couramment employé pour faire référence à des notions de justice et d’égalité sociale.
Or dans le cas de l’accompagnement de ce public, la société actuelle française n’a pas
mis à la disposition de ces personnes et des professionnels les structures de soins
adaptées. Ainsi, elles se retrouvent défavorisées du fait de leur âge.
25
26
Brochure de l’Association France Alzheimer, Ecoutez-nous autrement, p.20
Dictionnaire de français Larousse en ligne.
50
BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages
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(consulté
le
26
septembre 2012).
53
ANNEXES
ANNEXE 1 : Critères de diagnostic de la maladie d’Alzheimer du DSM IV
ANNEXE 2 : Tableau des fonctions des lobes cérébraux
ANNEXE 3 : Tableau des facteurs de risques de la maladie d’Alzheimer
ANNEXE 4 : Schéma du mécanisme de la mémoire
ANNEXE 5 : Figure 1 et 2
ANNEXE 6 : Grille d’entretien
ANNEXE 7 : Grille de questionnaire
ANNEXE 8 : Retranscription des entretiens
Annexe 1 : Critères diagnostiques de la démence de type Alzheimer, DSM-IV-TR
A. Apparition de déficits cognitifs multiples, comme en témoignent à la fois :
1.
une
altération
de
la
mémoire
(altération
de
la
capacité
à
apprendre
des
informationsnouvelles ou à se rappeler les informations apprises antérieurement) ;
2. une (ou plusieurs) des perturbations cognitives suivantes :
a. aphasie (perturbation du langage)
b. apraxie (altération de la capacité à réaliser une activité motrice malgré des
fonctionsmotrices intactes)
c. agnosie (impossibilité de reconnaître ou d’identifier des objets malgré des
fonctionssensorielles intactes)
d. perturbation des fonctions exécutives (faire des projets, organiser, ordonner dans
letemps, avoir une pensée abstraite).
B. Les déficits cognitifs des critères A1 et A2 sont tous les deux à l’origine d’une altération
significative dufonctionnement social ou professionnel et représentent un déclin significatif
par rapport au niveau defonctionnement antérieur.
C. L’évolution est caractérisée par un début progressif et un déclin cognitif continu.
D. Les déficits cognitifs des critères A1 et A2 ne sont pas dus :
1. à d’autres affections du système nerveux central qui peuvent entraîner des déficits
progressifs de la mémoire et du fonctionnement cognitif (par exemple : maladie
cérébrovasculaire,maladie
de
Parkinson,
maladie
de
Huntington,
hématome
sous-
dural,hydrocéphalie à pression normale, tumeur cérébrale) ;
2. à des
affections
générales
pouvant
entraîner
une démence (par
exemple :
hypothyroïdie,carence en vitamine B12 ou en folates, pellagre, hypercalcémie, neurosyphilis,
infection parle VIH) ;
3. à des affections induites par une substance.
E. Les déficits ne surviennent pas de façon exclusive au cours de l’évolution d’un syndrome
confusionnel.
F. La perturbation n’est pas mieux expliquée par un trouble de l’Axe I (par exemple : trouble
dépressifmajeur, schizophrénie).
Codification fondée sur la présence ou l’absence d’une perturbation cliniquement significative
ducomportement :
Sans
perturbation
du
comportement
:
si
les
troubles
cognitifs
ne
s’accompagnent
d’aucuneperturbation cliniquement significative du comportement.
Avec perturbation du comportement : si les troubles cognitifs s’accompagnent d’une
perturbation cliniquement significative (par exemple : errance, agitation) du comportement.
Préciser le sous-type :
À début précoce : si le début se situe à 65 ans ou avant.
À début tardif : si le début se situe après 65 ans.
ANNEXE 2 : Tableau résumant les principales fonctions des lobes cérébraux
Fonctions
Lobe
frontal
-Fonctions spécifiques : fonctions motrices et
cognitives complexe ; affectivité et émotion
-Fonction dévolues à l’ensemble des systèmes :
Fonctions associatives et exécutives
Lobe
pariétal
Concerne la sensibilité primaire et secondaire
Gnosie
Praxie
Fonctions sensorielles (olfactives et gustative) ;
Lobe
temporal Fonctions auditives ; langage (versant sensoriel
aire de Wernicke) ; sens vestibulaire ; rôle dans le
comportement et la conscience ;
Rôle dans les fonctions viscérales et la mémoire.
Lobe
occipital
Fonctions principale sont la réception et l’analyse
visuelle
Si atteinte…
Troubles de la
personnalité et des
émotions (exemple,
troubles du
comportement,
troubles thymiques)
Agnosie ; apraxie ;
troubles de la
sensibilité
ANNEXE 3 : Tableau facteurs de risques
Issu « Du vieillissement cérébral à la maladie d’Alzheimer. Autour de la notion de plasticité. »
deSchenk ; Leuba ; Büla. Edition de boeck 2004.
Facteur de risque
Type de risque
Age
Défini
Sexeféminin
Possible
Traumatisme crânien avec perte de conscience
Probable
Exposition à l’aluminium
Peu possible
Consommation de tabac
Possible
Ménopause/déficit en œstrogènes
Probable
Andropause/déficit en androgènes
Possible
Stress/élévation du cortisol
Probable
Consommationd’anti-inflammatoires
Protecteur
Consommationd’anti-oxydant
Protecteur
Consommationd’alcool
Possible ou protecteur (dépend de ladose)
Facteursvasculaires
Probable
Polymorphisme Cyp46 (Cholestérol)
Probable
Dépression
Probable
Faibleniveauéducatif
Probable
Les facteurs de risques définis : concerne les facteurs de risques pour lesquels l’ensemble des
études menées valide leur influence.
Les facteurs probables : concernent des éléments pour qui la majorité des études menées
s’accordent sur leur influence dans l’expression des troubles neurologiques.
Les facteurs possibles : regroupent des facteurs qui sont susceptibles de favoriser la pathologie
et pour lesquels des études sont en cours.
ANNEXE 4 : Mécanisme de la mémoire
ENCODAGE
CODAGE
CONSOLIDATION
Mémoire
immédiate et
attention
sélective
Mémoire de
Travail
Mémoire à court terme ;
maintient de l’attention et
processus de contrôle
RECUPERATION
Organisation de la
concentration et
importance du contexte
STOCKAGE
Mémoire à long terme
ANNEXE 5 : FIGURE 1 ET 2
Graphique issu de Lettre De L’Observatoire des dispositifs de prise en charge et
d’accompagnement de la maladie d’Alzheimer N°21 - septembre 2011 - Hébergement des
malades Alzheimer jeunes en structure collective en France 2011, Fondation Médéric
Alzheimer ; p 8-9.
Figure 1
Figure 2
ANNEXE 6: Grille d’entretien

Profil du professionnel
-
Est-ce vous pouvez vous présenter brièvement (nom, prénom, âge, profession)
-
Depuis combien de temps travaillez-vous auprès de personnes Alzheimer ?
-
Depuis combien de temps avez-vous entendu parler des personnes Alzheimer Jeunes ?
 Ces questions permettent de cibler la population interrogée et au vue de l’expérience de constater
la pertinence des réponses.

Entretien de professionnels de secteurs différents :
-
Avez de plus en plus ce type de public en prise en charge ?
Oui
Non
Pourquoi
 Cette question permet de constater si au vue de l’augmentation de l’incidence de la pathologie pour
cette tranche d’âge, les professionnels rencontrent-ils dans leur pratique de plus en plus de personne
de 55-65ans porteuses de la maladie d’Alzheimer.
-
Pouvez- vous m’expliquer les grandes lignes de la prise en charge qui a été mise en
place pour ces personnes?
 Cette question cherche à mettre en avant l’existence de similitude autour de la pratique, des
problématiques que peuvent rencontrer les professionnels.
-
Dans quel contexte cet accompagnement s’est-il déroulé ?
 Cette question d’appréhender le contexte initial de l’accompagnement de ces personnes, le
déroulement de l’entrée dans le soin.
-
Avez-vous eu besoin d’effectuer des aménagements nécessaires pour l’accueil ce
public ? (locaux, équipes, …)
 Si non :
Sur quoi vous êtes vous appuyé au sein de votre structure ?
 Si oui :
Où vous êtes vous renseigné ?
Quels types d’aménagements avez-vous fait ?
 L’objectif de cette question est de savoir si l’accueil des personnes de 55-65ans porteuses de la
maladie d’Alzheimer nécessite des aménagements spécifiques qui seraient susceptibles d’expliquer
des difficultés pour leur prise en soin.
-
Au sein de vos équipes, il y a t-il eu des réticences à l’accompagnement de ces
personnes ?
 Si oui / non : pourquoi ?
 Cette piste de réflexion est à mettre en lien avec le concept des représentations sociales développé
dans la partie théorique.
-
Avez-vous rencontré des difficultés dans l’accompagnement de ces personnes ?
Non
Si oui, lesquelles.
 Cette question permet de savoir si pour les professionnels de santé l’accompagnement de ce
public est complexe et de pouvoir établir un listing des références rencontrées.
-
Selon vous, peut-on dire qu’il y a une prise en charge spécifique, différente de chez la
personne âgée pour ce public de 55-65ans, atteint de la maladie d’Alzheimer ?
 Si oui :
En quoi ?
Avez-vous pu mettre en avant des problématiques spécifiques à ce public ?
Si non :
Pourquoi ?
Quelles justifications ?
 Cette interrogation est le cœur de ce mémoire. Elle sert un peu de questionnent final, de résumé.
Son but est de savoir si la prise en charge est spécifique ou pas et d’y associer les justifications des
professionnels en fonction de sa spécificité.
- Selon vous, quel type d’accompagnement pourrait être au plus proche des besoins
des personnes Alzheimer jeunes ?
 L’objectif de cette question est de mettre en avant si à l’heure actuelle il y a un type
d’accompagnement qui tend à se démarquer des autres. Et ainsi de tenter d’établir l’accompagnement
idéal pour les personnes de 55-65ans porteuses de la maladie d’Alzheimer.
- L’organisation actuelle du système de santé permet-elle de répondre de manière efficace
à l’accompagnement de ces personnes ?
 L’objectif est voir si globalement le contexte favorise une prise en charge optimale, si les moyens
existants sont suffisants et efficaces.
ANNEXE 7 : Grille de questionnaire
Titre du formulaire
Questionnaire sur l'accompagnement des "malades Alzheimer jeunes" en
ergothérapie.
C’est dans le cadre d’un mémoire de recherche en ergothérapie que je me permets de vous
solliciter en tant que professionnel. En effet, cette démarche de recherche a pour objectif
d’interroger les ergothérapeutes sur l’existence ou non d’une spécificité d’accompagnement
des personnes de 55 à 65 ans atteintes de la maladie d’Alzheimer en ergothérapie. Les
questions suivantes vont porter sur les modalités de prise en charge que vous avez mis en
place pour ces personnes.
En vous remerciant par avance pour le temps que vous accordez à ce questionnaire.
Depuis combien d'années exercez-vous votre profession d'ergothérapeute?

1-5 ans

5-10

+ de 10 ans
Depuis combien de temps travaillez-vous auprès de personnes porteuses de la
maladie d'Alzheimer?

Moins de 1 an

De 1 à 5 ans

De 5 à 10 ans

Plus de 10 ans
Dans quel type de structure avez-vous travaillé? Les structures dans lesquelles vous
avez rencontré des personnes porteuses de la maladie d'Alzheimer

EHAPD

EquipeSpécialisée Alzheimer

Psychiatrie



Autre :
- Avez-vous déjà pris en charge des personnes de 55-65 ans atteintes de la pathologie
d'Alzheimer?
Oui
Non
Si oui, pouvez-vous estimer le nombre de personnes de 55-65 ans porteuses de cette
pathologie, que vous avez rencontrées au cours de votre pratique professionnelle?

1

2

3

4

5




6
Autre :
- Considérez-vous que l’expression clinique de la pathologie à cet âge est différente ?
Oui
Non
Quelles sont les informations qui vous permettent d'avancer cela?
- Pouvez-vous expliquer les grandes lignes de la prise en charge que vous avez
menées pour ces personnes?
- Quelles sont selon vous les grands principes de cette prise en charge ?
- Avez-vous utilisé des nouvelles évaluations dans l’accompagnement de ces
personnes ?


Oui
Non
Si oui, lesquelles?
Si non, pourquoi?
-Avez-vous eu des problématiques nouvelles à prendre en compte ?


Oui
Non
Si oui, lesquelles
- Avez-vous eu besoin de ressources, de moyens nouveaux pour cette prise en charge
?


Oui
Non
Si oui, lesquelles
-Avez-vous eu des difficultés dans l’accompagnement de ces personnes?

Aucune

Difficultéslégères

Difficultésmoyennes

Difficultésimportantes
Quelle en était la cause? Vouspouvez cocher plusieurs réponses

Manque de moyensadaptés

Difficultérelationnelle

Manque de connaissance sur la pathologie

Autre :
Au regard de la précocité de l’atteinte, avez-vous eu une réticence avant
d’accompagner cette personne ?


Oui
Non
Quelles en sont les raisons selon vous?
- Considérez-vous que l’accompagnement des personnes âgées de 55 à 65 ans
porteuses de la maladie d’Alzheimer, demande une prise en charge
spécifique/nouvelle en ergothérapie ?


Oui
Non
Comment pouvez-vous le justifier?
En quoi cet accompagnement diffère t-il de celui mis en place pour la personne âgée?
- Selon vous, au regard des secteurs d’accompagnement quel est aujourd’hui celui
qui vous semble le plus adapté pour les personnes de 55-65ans porteuses de la
maladie d’Alzheimer?

Gériatrie

Psychiatrie

Neurologie

Création d'un secteurspécifique

Autre :
Selon vous, en tant qu’ergothérapeute, entre l’institutionnalisation et le domicile, quel
environnement de prise en charge est le plus adapté pour cette population?

Institutionnalisation

Domicile

Les deux

Aucun
Pouvez-vous argumenter votre réponse?
- L’organisation actuelle du système de santé permet-elle de répondre de manière
efficace aux problématiques rencontrées dans l’accompagnement de ces personnes ?


Oui
Non
Comment le justifiez-vous?
- Est-il concevable de créer une prise en charge (structure, équipe) spécialement pour
ces personnes ?


Oui
Non
Quelles en seraient les caractéristiques?
ANNEXE 8 : Retranscription des entretiens
ENTRETIEN N°1 : Mme A
Pouvez vous vous présentez brièvement ?
Mme A : « J’ai 26 ans diplômée depuis juin 2009. Je travaille au sein de l’Ehpad, dans l’accueil de
jour, depuis septembre 2012, j’avais déjà travaillé auparavant dans un ehpad pendant 9 mois mais
dans un milieu hospitalier public, différent d’ici car ici on est dans un ehpad privé à but non lucratif.
C’est la première fois que j’accompagne des personnes atteintes de la
maladie d’Alzheimer ou
apparentées et j’interviens notamment à l’accueil de jour qui accueille des personnes Alzheimer
jeunes depuis novembre 2012 à hauteur d’une matinée une fois toutes les deux semaines. Je propose
des activités ateliers divers.
La maladie d’Alzheimer je connaissais par le biais de mes études, de mes stages, et en ehpad avant.
Mais c’est vrai que la population Alzheimer jeune est une population particulière que je n’avais pas du
tout vu. C’est la première fois que je rencontre des personnes si jeunes atteintes de la maladie
d’Alzheimer et c’est une découverte pour moi. »
Avez-vous de plus en plus ce type de public en prise en charge ?
Mme A : « En accompagnement oui, dans la mesure où on reçoit de plus en plus de demandes pour
participer à une journée à l’accueil de jour. De ce que j’entends de l’administration, il y a des nouvelles
demandes une fois par mois au moins. La on tourne à 8-9 personnes qui viennent une journée par
semaine dans le groupe Alzheimer jeune. Elles sont évaluées par le médecin coordonateur et par la
neuropsychologue. Mais oui La demande est en augmentation. »
Pourquoi ?
Mme A : « Je pense que maintenant on arrive mieux à déterminer le profil, on a peut être une
meilleure connaissance sur la maladie d’Alzheimer des études ont été menées. L’information circule
et que maintenant au niveau du diagnostic les médecins sont plus au courant. Je ne pense pas que la
maladie d’Alzheimer a explosé chez la personne âgée du jour au lendemain, c’est surtout
qu’aujourd’hui on a une meilleure information qui circule mieux. Il y a des choses avérées, évidentes
mais que derrière les moyens ne suivent pas donc il faut que l’on fasse quelque chose. »
Pouvez- vous m’expliquer les grandes lignes de la prise en charge qui a été mise en place pour
ces personnes?
Mme A : « Le type d’accompagnement c’est à l’accueil de jour. Ils arrivent le matin entre 9-10h. Ils
sont pris en charge dans le sens accompagnés toute la journée jusqu'au retour 16h30-17h soit ils
repartent par leur propres moyens (seul en moyens de transport ou une personne vient les chercher)
ou le taxi ou service âge d’or ( de transport pour personnes à mobilité réduite) Au sein de cette
journée plusieurs activités et animations qui leur sont proposées. L’équipe est composée d’amp, as,
avs, qui leur propose des sorties. Pour eux aussi c’est tout nouveau. L’équipe n’a pas l’habitude
d’accompagner ce type de population. Ils se confrontent aussi à leurs propres limites, donc ils
essaient de trouver des nouvelles idées pour accompagner ce public particulier. Ils proposent
notamment des sorties au cinéma jardin, zoo, bowling, des activités sociales par rapport aux activités
proposées aux personnes âgées et donc à des personnes plus dépendantes. Ils font aussi des
activités au sein de l’accueil de jour comme la lecture du journal, des activités artisanales, des ateliers
cuisines, etc. en fonction de la semaine. Il y a des intervenants extérieurs divers qui viennent apporter
aussi leurs compétences. Donc il y a l’animateur, la psychologue une fois toute les deux semaines en
alternance avec l’ergothérapeute. Et donc moi-même je propose un atelier qui allie à la fois les
fonctions cognitives, exécutives, motrices en lien avec les activités de la vie quotidienne, le ludique, le
jeu. J’essaie de faire un mis un peu de tout cela pour proposer quelque chose d’adapté. »
Dans quel contexte cet accompagnement s’est-il déroulé ?
Mme A : « Je ne pourrai pas te répondre parce que ca ne fait pas suffisamment longtemps que je suis
dans la structure. »
Avez-vous eu besoin d’effectuer des aménagements nécessaires pour l’accueil ce public ?
(locaux, équipes, …)
Mme A : « Non. Disons que ca reste un accueil de jour donc les gens viennent de leur domicile. A
priori au niveau des locaux non car ce sont des gens qui sont assez autonomes au niveau des
déplacements déjà, qui sont continents qui mangent de façon autonome. Ici on ne réalise pas de
toilette, de change, c’est vraiment un lieu de vie, un lieu d’accueil convivial avec l’équipement
classique. Et au niveau de l’équipe, bientôt il va y avoir une réunion avec la direction pour qu’on
soumette nos idées de formation et une formation sur l’accompagnement des personnes Alzheimer en
fait partie. Je ne sais pas s’il existe encore une formation sur l’accompagnement des personnes
Alzheimer jeunes, mais en tout cas une sensibilisation devrait être faite.»
Au sein de vos équipes, y a t-il eu des réticences à l’accompagnement de ces personnes ?
Mme A : « Je ne pourrai pas trop te répondre dans la mesure où je ne connais pas trop l’historique.
Mais je sais qu’à l’heure actuelle, au niveau de l’équipe ça se passe plutôt bien. Mais elle a
conscience de ces difficultés et de leurs limites d’accompagnement. »
Avez-vous rencontré des difficultés dans l’accompagnement de ces personnes ?
Mme A : « Parfois l’équipe se retrouve face à des situations qu’elles ont du mal à gérer que ce soit au
niveau professionnel ou personnel. En effet, au niveau des transferts, les personnes étant jeunes cela
peut faire échos à des parents proches, à ses propres parents qui ont plus ou moins le même âge, le
même profil physique, social… il y a beaucoup de choses qui interviennent dans ce type de relation.
Voila ce sont des difficultés au quotidien dont l’équipe a besoin de parler. Donc il y a des groupes
d’analyse de pratique, un suivi qui sont organisés par les psychologues. Cela vient juste d’être mis en
place à la demande de l’équipe.»
Selon vous, peut-on dire qu’il y a une prise en charge spécifique, différente de chez la
personne âgée pour ce public de 55-65ans, atteint de la maladie d’Alzheimer ?
Mme A : « Oui, oui et oui. C’est vraiment totalement différent, on ne peut pas du tout comparer une
personne âgée atteinte de la maladie d’Alzheimer à une personne jeune. Tout d’abord parce que le
profil même de la maladie est différent. Chez la personne Alzheimer jeune c’est tellement plus
complexe, la maladie évolue beaucoup plus vite. Il y a aussi un contexte social, familiale à prendre en
compte. On a ici des personnes qui sont parents de jeunes adolescents, qui vivent encore à la
maison, dont il y a tout cela à prendre en compte. Donc c’est très très compliqué.
De plus, au niveau de l’accompagnement lors des ateliers on est confronté à des difficultés qu’on n’a
pas l’habitude avec des personnes âgées atteintes de la maladie d’Alzheimer. Notamment au niveau
des comportements inadaptés comme l’euphorie, l’apathie, les aphasies, les apraxies ou alors des
déambulations excessives… chez des personnes jeunes on n’a vraiment pas l’habitude parce qu’on a
aussi une représentation sociale de la maladie. C’est vraiment un nouveau public que l’on doit
accueillir et il y a encore un gros travail à faire pour les accompagner au mieux. Il y a vraiment des
problématiques familiales, sociales à prendre en compte, et nous en accueil de jour en plus nous
n’avons qu’un tout petit point de vue de la vie de la personne. Alors que en tant qu’ergothérapeute on
doit s’intéresser à la globalité de la personne(le travail, le cadre social, familiale, ses habitudes de
vie…). C’est vrai que ça serait intéressant de pouvoir partager avec les familles et les intervenants à
domicile. »
Selon vous,
quel type d’accompagnement/ de structure pourrait être au plus proche des
besoins des personnes Alzheimer jeunes ?
Mme A : « Je ne sais pas quel type de structure conviendrait. Pour ma part, je pense qu’il n’y a
aucune structure actuelle qui convient à la personne Alzheimer jeune qui ne peut plus résider à la
maison seule, ou pour qui l’accompagnement même avec des aidants familiaux et extérieurs devient
trop problématique. L’EHAPD clairement n’est pas adapté par rapport à l’âge des personnes, les
dérogations pour les moins de 60 ans restent exceptionnelles. Après dans des unités protégées, c’est
plus pour le contexte familial, social, qui fait que c’est un gros bouleversement pour les familles et la
personne qui va côtoyer des personnes âgées beaucoup plus dépendantes que ce soit sur le plan
physique ou cognitif. Après autre type, la psychiatrie, bien sûr que non ! C’est malheureusement
souvent le cas parce que ce n’est plus gérable à la maison et que le médecin n’a plus de solution à
proposer donc un séjour en psychiatrie c’est pour calmer les choses en attendant. Pour moi cet
accompagnement ne convient pas du tout, d’ailleurs on n’aurait pas l’idée de mettre une personne
âgées atteinte de la maladie d’Alzheimer en psychiatrie, donc pourquoi les jeunes y vont.
Après les accueils de jour quand ils sont dédiés aux personnes jeunes sont des super
typesd’accompagnement, dans la limites des connaissances et des compétences actuelles de
chacun.
Tout l’enjeu c’est de créer une structure adaptée pour ces personnes là. Peut-être des foyers de vie,
quelque chose de plus adapté, de sur-mesure. Selon moi, c’est quelque chose à créer à adapter pour
les personnes Alzheimer jeunes. »
L’organisation actuelle du système de santé permet-elle de répondre de manière efficace à
l’accompagnement de ces personnes ?
Mme A : « Question qui n’est pas facile… déjà à la base il y a le diagnostic médical qui pose
problème. Est-ce que les médecins traitants sont suffisamment formés, informés pour diagnostiquer
les personnes ayant une maladie d’Alzheimer jeune. Après il y a les médecins gériatres, les centres
d’évaluation gériatrique ont un point de vue plus globalsur la pathologie. C’est un peu d’actualité en ce
moment on en parle de plus en plus chez la personne jeune. C’est tout nouveau aussi, dont il y a des
efforts à faire de tous les côtés. »
ENTRETIEN N°2 : Mme C
Pouvez vous vous présentez brièvement ?
Mme C : « Je suis cadre de santé depuis 2002. J’ai été cadre de santé en cardiologie dans un centre
hospitalier. Apres j’ai fait de la formation, j’ai été enseignante à l’école d’infirmière pendant deux ans
et demi. Et je suis maintenant sur l’EHAPD depuis Février 2011, ca fait 2ans.
Je vais avoir 50 ans. Je suis donc de base infirmière, j’ai exercé en cardiologie, maternité,
néonatologie. »
Depuis combien de temps travaillez-vous auprès de personnes Alzheimer ?
Mme C : « Depuis 2ans. »
Depuis combien de temps avez-vous entendu parler des personnes Alzheimer jeunes ?
Mme C : « Depuis que je suis dans l’enseignement, parce que quand vous enseignez en IFSI vous
avez des modules avec des choses bien particulières à enseigner et en fait j’avais une grosse partie
sur le droit, l’éthique, la dignité. Donc j’ai commencé à en entendre parler à ce moment la, en 2007 à
peu près. C’est dans le cadre de mes recherches personnelles pour préparer mes cours que j’ai pris
connaissances de l’existence de la maladie d’Alzheimer chez des personnes jeunes. »
Avez-vous de plus en plus ce type de public en prise en charge ?
Mme C : « Non. Ici on a une population vieillissante. La problématique des ehpad maintenant c’est
qu’on développe les structures, les équipes pour maintenir le plus longtemps possible les personnes à
leur domicile. Nous ici on propose un accueil de jour Alzheimer, donc les personnes viennent à la
journée, ce qui permet de soulager les aidants et donc de garder le plus longtemps leur conjoint ou
parents à domicile. On a aussi du temporaire, 15-3semaines pour soulager les aidant parce qu’ils
partent en vacances ou on, des problématiques particulières. Donc ces annexes permettent aux gens
de rester chez eux et donc l’entrée en maison de retraite.
L’étiquette de cette pathologie fait aussi que les gens (conjoint, enfants) culpabilisent énormément à
mettre leur parents en résidence…donc ils vont jusqu'au bout de leurs possibilités et donc souvent
quand on accueille des gens c’est en situation d’urgence, dans la précipitation.
Pour les Alzheimer la problématique pour les jeunes est aussi de l’ordre du financement. C’est à dire
que quand vous avez une moyenne d’âge ici 85, on évalue un niveau de dépendance, c’est à dire que
l’on fait la grille GIR et en fonction de ce niveau de dépendance on va avoir des aides de l’état du
conseil, etc. sauf que dans le cas de personnes jeunes, on n’a pas d’aide. Moi actuellement, j’ai un
résident Alzheimer jeune en gir 1 qui n’est pas codifié dans mon listing, du coup sur le papier ça
n’alourdit pas le GIR de l’ensemble de la maison de retraite. Donc financièrement je n’aurai peut -être
pas les moyens en personnel que j’aurai pu l’avoir si il avait été pris en compte.
Donc je pense que ça doit peser dans la balance d’accueillir des résidents jeunes ou pas, parce que à
présent on avance dans des problèmes économiques et financiers de plus en plus importants. Donc il
y a des établissements comme le nôtre qui doit réfléchir à deux fois avant d’accueillir des personnes
Alzheimer jeunes. On va être reconnu par certaines instances mais concrètement on ne reçoit rien en
retour. »
Pouvez- vous m’expliquer les grandes lignes de la prise en charge qui a été mise en place pour
ces personnes?
Mme C : « Ici on a une unité Alzheimer de 11 lits qui a été créée en interne, nous ne sommes pas
reconnus par les instances, par l’ARS. On a voulu amener une prestation supplémentaire à
l’ensemble de la population. Les soignants ont été formés en interne et après par la participation à des
congrès, etc. Mais ici on n’a pas de moyens supplémentaires donc si en plus de cela il faut accueillir
des personnes jeunes ça va compliquer encore la chose.
On n’est pas le bon exemple car pour cette dame même si des choses on été mises en place
au début, le terrain psychiatrique a rendu l’accompagnement compliqué. C’est une dame qui est
arrivée dans notre établissement à 52 ans, aujourd’hui elle en a 57 ans et est devenue complètement
dépendante. Ça a été catastrophique pour sa famille et pour nous aussi parce que les équipes
n’étaient pas formées. Je ne suis pas sûre qu’on ait été à la hauteur avec cette dame.
Ce qu’on a pu mettre en place, au niveau de la communication mais elle ne répondait pas,
des techniques de toucher-confort qui permettaient de calme son stress et son anxiété. »
Dans quel contexte cet accompagnement s’est-il déroulé ?
Mme C : « Quand la personne est arrivée la pathologie était déjà bien avancée et elle a évolué très
rapidement. A l’inverse de chez la personne âgée, chez les jeunes je trouve qu’il y a une progression
impressionnante. Donc, chez nous
il n’y avait rien au niveau accompagnement, la personne ne
voulait rien, les équipes étaient devant un mur, aucune activité n’était possible. Cette dame a fait des
courts séjours en psychiatrie parce que l’équipe ne savait plus comment faire. Les traitements mis en
place ont par la suite permis de l’apaiser. Et on a pu commencer à mettre des choses en place.
Aujourd’hui la personne est en GIR 1 à tous les niveaux, elle est mise en fauteuil coquille, mais elle
est accompagnée pour tout on est rendu à l’état végétatif !
L’accompagnement n’a pas été significatif avec cette dame parce qu’elle était déjà dans un stade de
la pathologie bien avancé quand elle arrivée chez nous. »
Avez-vous eu besoin d’effectuer des aménagements nécessaires pour l’accueil ce public ?
(locaux, équipes, …)
Mme C : « Les locaux étaient déjà existants. L’unité d’Alzheimer se situait au rez-de-chaussée et les
résidents peuvent quand même déambuler, c’est une unité ouverte. Avec celle là, on n’était pas dans
cette problématique, elle était en pleine rébellion. Elle a du être contentionner au lit au fauteuil, avec
l’intervention du médecin coordinateur et de la cadre sup allait avec l’aide soignante pour mettre en
place un accompagnement pour pouvoir faire la toilette. On a dû mettre en place des techniques
différentes pour calmer son stress, son anxiété (toucher/confort/thérapie du bisou). Les équipes n’ont
pas été formées spécialement. A part la formation Alzheimer, ils n’y ont pas eu plus de soins,
d’informations apportées. »
Au sein de vos équipes, il y a t-il eu des réticences à l’accompagnement de ces personnes ?
Mme C : « Oui ! A l’époque, et avec ce qu’on a pu me raconter, la souffrance et les inquiétudes des
équipes n’avaient pas été prises en compte.
Si aujourd’hui on me proposait de nouveau dans mes admissions une personne jeune je ferai tout un
travail en amont avec les équipes. Je ferai souvent avant plusieurs séjours temporaires afin que la
personne déjà elle-même s’habitue, les autres résidents et les professionnelles. La suite logique ça
serait l’accueil de jour, des séjours temporaires puis définitifs afin qu’il y ait une suite logique pour la
personne et l’équipe. »
Avez-vous rencontré des difficultés dans l’accompagnement de ces personnes ?
Mme C : « Dans le cas de cette dame qu’on a pris moi je ne l’ai pas connue à son entrée. Mais ça a
causé énormément de difficultés parce qu’il y avait un versant psychiatrique important. Ça a été très
difficile pour l’équipe qui m’en parle encore aujourd’hui bien que moi je n’ai pas connu cette situation.
A un moment ils ne savaient plus comment faire.
Ici on a une moyenne d’âge de 85ans, quand on accepte quelqu’un d’Alzheimer jeune ça leur renvoie
une image qui n’est pas positive.
Pour la personne elle-même, sa famille et pour les autres résidents, le placement dans un EHPAD
n’est pas adapté. Est-ce que le fait d’être avec des personnes âgées ne va pas favoriser l’éloignement
familial… c’est une chose que nous avons pu remarquer dans le cas de cette personne. »
Selon vous, peut-on dire qu’il y a une prise en charge spécifique, différente de chez la
personne âgée pour ce public de 55-65ans, atteint de la maladie d’Alzheimer ?
Mme C : « Les personnes jeunes devraient être suivies dans des unités spécifiques où il y a les
moyens. Oui c’est une prise en charge complètement différente, ce n’est pas parce que les équipes
ont une formation Alzheimer que l’on sait comment prendre les gens jeunes en charge, parce que je
pense que nous ne sommes pas du tout sur les même problématiques. Les personnes Alzheimer
vieillissantes ont souvent des pathologies associées. Sur le plan général ce sont des personnes qui
sont plus facilement maniables entre guillemets car plus dépendantes physiquement. Alors que chez
cette dame il y avait une révolte physique et des capacités motrices bien présentes qui ont rendu
l’accompagnement difficile. Je ne suis pas certaine que les ehpad soient des structures adaptées, on
ne se rend pas mutuellement service à accueillir ces personnes dans nos structures. Je sais bien qu’il
faut les accepter quelques part mais les EHPAD ne sont pas faites pour cela. Je ne suis pas sûre
qu’on ait été à la hauteur pour cette dame.
Ah oui et il faut qu’il y en ait une !! Il faut prendre en compte le regard des autres : des
résidents ; de l’équipe. Soigner quelqu’un qui est d’un âge proche, sur ce type de maladie ça peut
renvoyer quelque chose : ah oui ça arrive à cet âge, comment moi je vais pouvoir gérer cela, etc.
l’EHAPD c’est quand même la gériatrie, donc c’est un milieu de personnes âgées. Donc pour les
soignants c’est plus « entendable » lorsque la pathologie est là parce que la personne vieillit, l’aide
apportée est justifiable parce que la personne ne peut plus physiquement nonplus. Mais qu’enc’est
une personne du même âge que soit, comment le professionnel va pouvoir répondre à toutes ses
attentes nouvelles, le professionnel va devoir gérer le stress de la personne associée au sien, à ses
inquiétudes. Parce que les équipes sont stressées, cela leur renvoie une image négative de la
pathologie, de la fin de vie également.
Et puis, avec les jeunes on va être plus dans la stimulation que chez la personne âgée je
pense, plus pointilleux sur les détails. Je pense que l’accompagnement est complètement différent ça
c’est évident. L’accompagnement sera peut être plus axé sur des problématiques de mon âge… la
question de la famille, par rapport aux enfants qu’est ce qu’on peut mettre en place pour
l’accompagnement de la famille et de la personne dans l’acceptation de la maladie. Par exemple avec
la psychologue, il y aura un travail nouveau à mettre en place. Il faudrait par exemple des temps de
sorties adaptées pour que les résidents puissent retourner de temps à autre au sein de leur famille,
organiser des temps de vacances où autres. Je pense qu’il y a des choses à adapter mais il faut les
moyens et je ne pense pas que les EHPAD soient des lieux adaptés pour les personnes Alzheimer
jeunes. D’autant plus que la moyenne d’âge dans nos établissements va augmenter de plus en plus.
J’ai du mal à imaginer quelqu’un de 48 ans ici avec des personnes de 85 ans et voir même plus parce
qu’on a des centenaires ici. Je sais bien qu’il n’y a pas assez de cas en France pour créer de
nouvelles structures spécifiques mais il existe peut être déjà des structures plus adaptées que
l’EHPAD. »
Selon vous,
quel type d’accompagnement/ de structure pourrait être au plus proche des
besoins des personnes Alzheimer jeunes ?
Mme C : « Des maisons familiales où on regroupe 4-5 personnes et ce sont les soignants qui
s’adaptent à eux. Il doit exister 2 ou 3 maisons en France mais ça serait un accompagnement qui me
paraît plus adapté.
Il y a aussi des systèmes d’équipe à domicile qui se déplacent ou qui organisent des activités dans
différents endroits et qui permettentde faciliter le maintien à domicile.
L’accompagnement idéale ça serait pour moi un maintien à domicile au maximum, et après placer ces
personnes dans des structures plus petites avec des soignants présents mais pas dans des structures
comme les EHPAD. »
L’organisation actuelle du système de santé permet-elle de répondre de manière efficace à
l’accompagnement de ces personnes ?
Mme C : « Non, parce que je trouve qu’on n’entend pas parler beaucoup de ces personnes. Ce qui
s’expriment sont encore chez eux, mais après qu’est ce qu’il existe ? Rien. On est pour moi dans la
même problématique que les gens reconnus handicapés mentaux, qui sont dans des CAT jusqu'à 60
ans et après ils sont dirigés vers les EHPAD. Il n’existe rien après. Donc ces personnes se retrouvent
mélangées à des personnes qui n’ont pas les mêmes troubles. Donc non il y a du travail encore. »
ENTRETIEN N°3 : Mme N
Pouvez vous vous présentez brièvement ?
Mme N : « Je suis diplômée d’état en ergothérapie depuis juin 1998. J’ai travaillé dans un premier
temps en centre de rééducation pendant 2 mois. Et en janvier 1999 j’ai fait un diplôme universitaire de
neuropsychologie et j’ai intégré le chu en mai 1999 sur un mi- temps en rééducation neurologique puis
ensuite un second mi- temps en en gérontologie dans un des services du CHU. Donc jusqu’en 2006
j’ai quitté la gérontologie pour être en mi- temps sur le centre mémoire. Ce centre est construit sur une
mutualisation de moyens entre la gérontologie et la neurologie. Ensuite il y a eu la validation d’un
centre de compétence pour des démences rares, avec des plus en plus de demandes de neurologue
de ville ou de gériatre qui avaient de plus en plus des cas jeunes de démence.
Je travaille depuis le départ auprès des personnes Alzheimer, le médecin étant spécialisé en
neuropsychologie on avait des le départ des cas de démences Alzheimer ou apparentées. Pour les
personnes Alzheimer jeunes, j’ai commencé à en rencontrer quand le centre mémoire a ouvert car à
ce moment là on a commencé à se dire que les besoin des sujets jeunes étaient différents de ceux
proposés en gérontologie. Et de ma pratique personnelle, pour avoir travaillé dans les deux secteurs
en même temps, je voyais bien que la pratique, l’annonce du diagnostic n’étaient pas les mêmes. »
Avez-vous de plus en plus ce type de public en prise en charge ?
Mme N : « Oui parce que dans les directives des Centre Mémoire de Ressource et de Recherche, il y
a l’obligation depuis un ou deux ans, d’adresser ou de faire connaître les sujets jeunes au centre de
référence. Déjà on voyait de plus en plus des personnes jeunes pour des diagnostics, mais là depuis
un an il y en a d’autant plus notamment par la mise en place de cette obligation.
Après aujourd’hui c’est la question du suivi de ces personnes qui se pose, afin de bien répartir
en fonction de chaque professionnel qui fait quoi, car nous on ne peut pas faire le suivi de toutes ces
personnes là. Donc on a proposé de faire une réunion avec tous les centres de proximité une
présentation de tous les sujets jeunes, afin que nous en tant que CMRR on puisse les intégrer dans
des protocoles de recherche, s’assurer du suivi et s’intéresser à la question de la génétique, qui se
pose d’autant plus chez les formes jeunes. »
Pouvez- vous m’expliquer les grandes lignes de la prise en charge qui a été mise en place pour
ces personnes?
Mme N : « Je peux donner l’exemple d’une patiente qui va être assez représentative. C’est une dame
qui nous a été adressée par son médecin traitant pour pouvoir établir un diagnostic. Elle a été reçue
pour une consultation mémoire, elle a été vue par la neurologue et le neuropsychologue qui
déterminent un complément de bilan en hospitalisation.
Sur le temps de l’hospitalisation, elle a revu le neuropsychologue pour terminer les bilans, elle a eu
des examens notamment un scanner, une scintigraphie, une irm, ce sont les trois examens que l’on
demande. Et puis elle a peut être vu le psychiatre si il y avait des troubles de l’humeur repérés mais
également au regard du risque de dépression qui est plus élevé car il y a des répercussions dans le
quotidien qui sont importantes car il y a souvent un problème familial, professionnel, etc. Au départ,
par exemple les personnes ont des difficultés à continuer de travailler, sont en arrêt de travail mais ils
ne savent pas dire pourquoi, d’où viennent leur difficultés.
Donc pour ces gens là on va faire le complément de bilan, on va rencontrer les familles. La personne
aura vu l’ergothérapeute, l’assistante sociale, si besoin la kinésithérapeute ou la diététicienne mais
ceci est plus rare dans le cas de maladie d’Alzheimer chez l’adulte jeune. Une fois tous ces entretiens
passés, ce sera le temps de l’annonce du diagnostic avec la famille et la personne, et des
propositions de thérapeutiques médicamenteuses, de prise en charge en orthophonie pour prévenir
l’apparition de certains troubles (langage, gnosique, praxique, syndrome dyséxécutifs) en fonction de
l’atteinte. On peut également proposer une intervention du SAMSAH lorsque les personnes sont plus
isolées. Ce dernier prend en charge l’organisation, la mise en place des aides humaines, ou bien
parfois diriger les personnes vers des équipes spécialisées Alzheimer pour une intervention plus
courte. On accompagne les personnes dans les démarches administratives type dossier MDPH (volet
PCH aide humain ou une orientation vers le SAMSAH), la demande de l’ALD. Notre action se situe
donc essentiellement sur l’évaluation, l’annonce du diagnostic et sur la mise en place de relais.
Et dans le service, le suivi est poursuivi par le neurologue de ville si c’est lui qui avait commencé et
nous on les revoit une fois par an pour une hospitalisation de trois à cinq jours pour un suivi. Ils sont
revus par le neuropsychologue, l’ergothérapeute, une nouvelle imagerie est faite, l’assistante sociale
peut être rencontrée si besoin. Et s’ils sont seulement suivis par nous, le CMRR, ils sont revus une
fois par an pour le même bilan et tous les 6 mois ils ont une consultation avec le neurologue. Après on
peut réintervenir à la demande s’il y a des besoins particuliers. »
Dans quel contexte cet accompagnement s’est-il déroulé ?
Mme N : « Dans notre cas on peut avoir tout type de contexte. Parfois les personnes commencent
juste à avoir certains troubles qui affectent leur quotidien que ce soit à leur domicile, sur le lieu de
travail, etc. le critère d’urgence pour nous se situe au niveau de l’accompagnement médico-social qui
va être mis en place, il concerne les personnes qui sont isolées, qui ont des enfants à charge, ou s’il y
a des problématiques professionnelles et pour qui l’accompagnement est urgent à mettre en place. »
Avez-vous eu besoin d’effectuer des aménagements nécessaires pour l’accueil ce public ?
(locaux, équipes, …)
Mme N : « Il y a un peu de formation en interne sur le service de neurologie. Mais c’est beaucoup de
la formation informelle, les anciens transmettent aux plus jeunes. Nous, nos équipes sont quand
même sensibilisées à l’accompagnement des personnes jeunes atteintes de démence… c’est un peu
notre spécificité.
Et pour les locaux, pas réellement puisque l’unité pour les démences rares a été construite il y a peu
de temps. »
Au sein de vos équipes, il y a t-il eu des réticences à l’accompagnement de ces personnes ?
Mme N : « Non, parce que comme on a une culture neurologique, on est habitué à travailler auprès
de personnes jeunes. Et ce sont les mêmes équipes que sur le service de neurologie, donc on fait
déjà de la rééducation neuropsychologique auprès de personnes beaucoup plus jeunes. »
Avez-vous rencontré des difficultés dans l’accompagnement de ces personnes ?
Mme N : « Oui. Moins maintenant avec la création des SAMSAH et des Equipes spécialisées
Alzheimer, mais avant il n’y avait pas de prise en charge pour elles. Et aujourd’hui on ne mesure
encore pas tout notamment dans l’accompagnement des familles et notamment dans la prise en
charge des enfants jeunes. Je pense à une dame qui a des enfants jeunes, et moi je ne les jamais vus
et cette dame et son mari sont assez opposés à l’intervention de personne chez eux donc on ne s’est
pas trop comment ils s’en sortent.
C’est difficile de trouver des structures adaptées. Par exemple, des structures telles que les
accueils de jour ne sont pas du tout adaptés pour les sujets jeunes. On arrive à force de négociation à
les faire rentrer, mais les personnes le disent très bien elles se retrouvent avec des « vieux » et ne
savent pas quoi leur dire. Certains y trouvent une place parce qu’ils ont l’impression d’aider les autres
donc quand il y a cette fibre là ça passe, mais pour les autres c’est très difficile de les faire rentrer à
55 ans en maison de retraite.
La difficulté est plus dans l’accompagnement des familles et dans l’acceptation de la perte
d’autonomie des personnes et donc de l’intervention d’une aide extérieure. Car souvent les conjoints
sont encore en activité professionnelle, la personne porteuse de la maladie est donc seule au domicile
et qui peut partir, se perdre, ne plus gérer… et les gens aidants ont justement du mal à intégrer cela,
qu’il faille plus faire confiance à la personne en quelque sorte, ne plus la laisser faire les courses
seule, conduire. Le conjoint est obligé de prendre des décisions sans spécialement concerter l’autre et
c’est ce qui est compliqué chez les jeunes, ça se fait plus naturellement chez les personnes âgées. »
Selon vous, peut-on dire qu’il y a une prise en charge spécifique, différente de chez la
personne âgée pour ce public de 55-65ans, atteint de la maladie d’Alzheimer ?
Mme N : « Oui. Je pense qu’il ne faut pas du tout penser comme chez la personne âgée, parce que
les problématiques et les ressources ne sont pas les mêmes. Par exemple on peut s’appuyer sur le
conjoint d’une certaine manière parce qu’il est plus jeune mais par contre il travaille donc est moins
disponible mais il est beaucoup plus partie prenante dans le projet d’accompagnement. Après il y a
toute la question du travail et des activités sociales qui ne sont pas les mêmes. En vieillissant on a
moins besoin d’activités à l’extérieur de la maison. Alors qu’à 55 ans on va encore au cinéma, on fait
encore beaucoup d’activités sociales, on participe à des associations, etc. il y a vraiment des
problématiques sociales, familiales et professionnelles qui ne sont pas les mêmes.
Et puis il y a des compétences physiques qui sont bien plus préservées et mobilisables que chez la
personne âgée. L’accompagnement va être complètement différent, il faut beaucoup plus créatifs
avec les personnes jeunes. »
Selon vous,
quel type d’accompagnement/ de structure pourrait être au plus proche des
besoins des personnes Alzheimer jeunes ?
Mme N : « Aujourd’hui il n’en existe pas. Pour moi il y a encore des choses à créer parce que
chacune des structures existantes actuellement possèdent ces limites.
Le SAMSAH, sa limite est dans le temps et cette structure est plutôt dans le gain, le maintien à
domicile alors que dans le cas de la maladie d’Alzheimer on est dans la dégénérescence et donc plus
dans l’accompagnement vers une structure malheureusement. On sait très bien que ce qui est fait
aujourd’hui avec une personne jeune atteinte de la maladie d’Alzheimer ne sera plus d’actualité dans
deux ans. Il y a une réactualisation nécessaire tous les ans et qui va vers le moins bon. Donc valoriser
le travail du SAMSAH la dessus c’est à l’inverse des textes officiels des missions du SAMSAH, donc
ça les met en porte-à-faux. Parce que cet accompagnement qui ne devait pas être sur du long terme,
devient sur du long terme.
Pour les Equipes Spécialisées Alzheimer, je pense qu’en 15 séances c’est illusoire qu’on puisse
mettre tout en place chez des sujets jeunes puisqu’il y a tellement de choses à traiter chez eux que si
on s’attaque aux soins d’hygiène, cuisine ; courses ; aux taches ménagères et j’en passe et bien 15
séances ce n’est pas suffisant. Et puis il y a une limite aussi de trois mois, il y a des textes aussi qui
viennent limiter et qui les rendent inadaptés dans le cas de personnes jeunes. Il faudrait que les
équipes soit la en permanence et que chaque mission soit reprise mais ça ne me paraît pas non plus
adapté au sujet jeune.
De même pour les accueils de jour…Je pense que ça mériterait un accompagnement très spécifique
du sujet jeune.
Et puis en fonction des capacités, des envies, de la personnalité de la personne et de son
environnement, le maintien à domicile peut vite devenir compliqué. Par exemple si c’est quelqu’un qui
a des gros troubles de mémoire, qui est anosognosique, très dynamique et qui prend beaucoup
d’initiatives ça va vite devenir ingérable au quotidien. De même s’il y a des troubles dans le cycle du
sommeil. Le conjoint qui travaille ne pourra pas gérer et les déambulations nocturnes et se lever le
matin pour se rendre au travail.
De même pour les institutions, on en a pas encore des adaptées. Pour renter en maison de retraite, il
faut une dérogation, dérogation qui n’est pas forcément acceptée partout. Nous on a eu ce problème
dans le département à un moment donné. Il y avait des refus de dérogations en disant que des gens
de 55 ans ne relèvent pas d’une maison de retraite, sauf qu’il n’y a pas vraiment d’autres
établissements. Ou alors il faut une orientation en Maison d’Accueil Spécialisée mais 55 ans en MAS,
on se retrouve avec des MAS pour traumatisé crânien et il n’y en a pas vraiment qui se
rapprocheraient et dans le cas de personnes Alzheimer on est dans du dégénératif. Il y a des MAS qui
se créent autour de personnes ayant des maladies dégénératives, mais ils vont se retrouver avec des
pathologies complètement différentes. Après on dit que mettre des gens avec la même pathologie ce
n’est pas vraiement mieux, mais je ne sais pas trop. Et c’est l’environnement qui pousse vers ces
solutions extrêmes. »
L’organisation actuelle du système de santé permet-elle de répondre de manière efficace à
l’accompagnement de ces personnes ?
Mme N : « Pas pleinement. Dans l’organisation actuelle on peut quand même s’appuyer sur les
SAMSAH, les ESA, les MAIA même si je suis un peu plus réservée sur leur action auprès des
personnes jeunes. Les MAIA sont plus dans un accompagnement au long court, parce que le maintien
à domicile s’il y a un isolement j’ai du mal à voir comment ils peuvent trouver des solutions mais je me
trompe peut être.
Il faudrait créer des structures inspirées de tout cela, des ESA, du SAMASH mais qui soit plutôt dans
l’idée d’un accompagnement vers une structure de vie. Puisque le maintien à domicile va être
compromis à un moment donné. Et donc il faut trouver ces structures de vie. »
ENTRETIEN N°4 : Mme E
Pouvez vous vous présentez brièvement ?
Mme E : « Moi je suis ergothérapeute sur une équipe spécialisée Alzheimer depuis septembre 2009.
J’ai une antériorité de travail dans les services hospitaliers depuis une vingtaine d’années. Je travaille
depuis plus de 20 ans auprès de personnes porteuses Alzheimer, y compris dans le secteur
hospitalier car il y a de plus en plus fréquemment ce type de pathologie associée.
J’ai eu rarement à faire à des personnes jeunes en service hospitalier mais depuis que je suis en ESA
j’en rencontre plus fréquemment. »
Avez-vous de plus en plus ce type de public en prise en charge ?
Mme E : « Alors de plus en plus je ne sais pas, mais depuis trois que je travaille en équipe spécialisée
il y a ponctuellement des demandes pour des personnes précocement atteintes. Après je n’ai pas eu
de recrudescence en trois ans mais ponctuellement il y a des demandes. »
Pourquoi ?
Mme E : « Parce qu’elles rencontrent les mêmes problématiques que les personnes de 80 ans en
terme de perte d’autonomie, de troubles du comportement, voila,
elles sont devant une
problématiques et elles font appel plus facilement maintenant à des services qui peuvent leur apporter
de l’aide. Qu’on soit jeunes ou moins jeunes la difficulté par rapport à la déficience, à la perte
d’autonomie, aux changements de comportement elles restent les mêmes selon moi. Après c’est
l’environnement qui n’est pas forcement le même, l’aidant n’est pas non plus dans la même situation
que dans le cas d’un couple âgé et ceci peut amener une problématique supplémentaire. »
Pouvez- vous m’expliquer les grandes lignes de la prise en charge qui a été mise en place pour
ces personnes?
Mme E : « Les grandes lignes c’est : l’accompagnement auprès de personnes malades. Soit pour
essayer de maintenir sa participation dans les activités routinières. Ceci en associant plusieurs
techniques, et en intervenant dans plusieurs domaines. Soit en intervenant sur l’environnement
matériel afin de mettre en place du matériel pour entretenir l’autonomie ou pour sécuriser
l’environnement et limiter les troubles du comportement. Soit en intervenant auprès des aidants pour
apporter des conseils ou pour orienter vers une aide humaine. Soit en essayant de renforcer les
compensations sensorimotrices, cognitives et dans certains cas ou les gens ne sont pas dans des
stades trop avancés on peut essayer d’améliorer le rendement mnésique, donc la il existe des
techniques. Et puis il y a aussi tout le travail qui fait auprès de l’aidant pour améliorer son savoir-faire,
son savoir-être, pour essayer del’accompagner et de trouver des solutions de répit lorsqu’il est épuisé.
Enfin il y a tout le travail de partenariat que l’on fait avec la mise en place de relais. En effet, quand on
arrête notre intervention on passe le relais au service existant. Soit dans le cadre de maintien de
stimulation donc on serait sur les accueils de jours, soit parce qu’il faut mettre en place des temps de
répit donc on serait toujours sur des accueils de jours ou des hébergements temporaires. Soit sur de
services intervenant au domicile, parce que là il y a besoin de mettre en place des compensations
humaines et bien entendu tout le relais qui se fait avec le corps médical car comme on intervient sur
prescription médicale il y a un retour à faire. »
Dans quel contexte cet accompagnement s’est-il déroulé ?
Mme E : « On a du mal à intervenir en amont, comme quand par exemple le diagnostic vient juste
d’être posé. Là où on a du mal à intervenir c’est chez les personnes chez le diagnostic vient tout juste
d’être posé, chez qui les troubles débutent et qui n’intègrent pas vraiment cette notion de prévention.
Notre intervention suppose que les gens aient déjà accepté le diagnostic et certaines personnes ne
sont pas prêtes à cela. Donc dans ces conditions ç’est délicat d’intervenir. Après tout dépend de
l’optique dans lequel sont les personnes. Si elles ont une conscience de la maladie, du trouble, de ce
que cela va engendrer dans le temps, il y a des personnes qui sont dans des stratégies d’ajustement
positives et qui vont vouloir entraîner la mémoire, suivre les traitements médicamenteux au pied de la
lettre…Là oui ils feront appel à nous. Mais personnellement j’ai rarement rencontré des personnes
comme cela. Et puis il faut avoir conscience que c’est une pathologie très déniante, donc nous
sommes souvent confrontés à ce déni de la maladie, de la conscience objective du trouble. Du coup
quand on arrive pour parler de maladie de la mémoire, des incapacités, etc. ce n‘est pas forcement
entendable. Donc à nous d’intervenir de manière à positiver ce qui fonctionne bien et que notre
intervention va essentiellement s’appuyer sur ce qui fonctionne. »
Avez-vous eu besoin d’effectuer des aménagements nécessaires pour l’accueil ce public ?
(locaux, équipes, …)
Mme E : « Alors au niveau des équipes non. On ne change pas radicalement notre manière
d’appréhender la personne, si ce n’est qu’on a des données autres. Par exemple si on est chez
l’accompagnement de l’aidant qui là se retrouve en activité professionnelle, si on repère qu’il y a un
problème insécuritaire, un problème de dépendance, il y aura une problématique supplémentaire. On
n’a pas une approche différente si ce n’est que le problème est peut être plus complexe à aborder.
Mais à nous avec nos outils ergo, avec ce que l’on connaît déjà de la pathologie et de
l’accompagnement de l’aidant, à nous de l’adapter à cette situation. Aprèsc’est peut être plus par
rapport aux ressources, aux services partenaires qui existent que ça peut être différent. Quelqu’un de
moins de 60 ne peut pas prétendre à l’APA. Régulièrement on a des temps de coordination mensuel
qui sont centrés sur les plans APA. Alors comment moi j’introduis le dossier d’une patiente de moins
de 60 ans sur ces temps de coordination. Donc ça veut dire qu’il faut que je me réfère à d’autres
professionnels et ça c’est plus chronophage pour moi, les démarches sont différentes. »
Au sein de vos équipes, il y a t-il eu des réticences à l’accompagnement de ces personnes ?
Mme E : « Non parce que par exemple les assistants en soin de gérontologie qui interviennent au
domicile sont également des aides soignantes au sein du SSIAD. Or au sein d’un SSIAD on accueille
des personnes âgées mais aussi des personnes jeunes handicapées. Donc ce n’était pas du tout un
frein pour mes collègues.
Certains accompagnements plus complexes parce qu’il y a une entrée dans la pathologie plus
atypique type syndrome de Benson qui demande des actes et des connaissances plus pointues.
Pour les personnes qu’on a eu c’était une entrée atypique dans la maladie certains ont développé un
syndrome de Benson, ce n’était pas les troubles mnésiques qui prédominaient. Les troubles étaient
surtout de l’ordre du visuospatial. Donc pour le coup c’était une approche un peu plus technique plus
de l’ordre de l’ergothérapie, avec des actes un peu difficiles à confier à des assistants en soin.
Ou bien la maladie évoluait très rapidement et on arrivait à des stades très avancés de la pathologie.
Il ne restait que la déambulation qui était maitrisée, on était sur une autre approche mais que l’on
rencontre plus chez la personne âgée. Là on est plus dans des notions de réadaptation, mais plus sur
de la stimulation sensorielle, l’accompagnement d’activité motrice.
Et troisième tableau on intervenait au moment ou la pathologie est déjà bien avancée. »
Avez-vous rencontré des difficultés dans l’accompagnement de ces personnes ?
Mme E : « La difficulté par exemple par rapport aux structures relais qui sont parfois difficiles à mettre
en place au vue de l’âge des personnes. Notamment sur les accueils de jours spécifiques c’est
compliqué, à Rennes il y en a un qui est adapté et il est complet. Et on voit bien que d’intégrer ces
personnes là sur des accueils de jour traditionnels par rapport à la tranche d’âge c’est beaucoup
moins facile, les activités ne sont pas les mêmes, le relationnel est compliqué, le but c’est qu’il y ait
des échanges et là il y a de la réticence sur le fait que « je vais être avec des vieux ». Il y a quand
même cette barrière de l’âge, les groupes sont plus hétérogènes.
Et pour l’accompagnement en lui-même je ne trouve pas qu’il y a des difficultés nouvelles propres au
mode d’accompagnement. Parce que finalement nos objectifs et la demande restent les mêmes. On
retrouve la perte d’autonomie, l’isolement social ; la difficulté de l’aidant. Mais c’est plus dans le relais
qu’on va rencontrer des difficultés parce que en tête au domicile on peut pallier à ces difficultés, on
s’adapte, on fait du sur-mesure et ceci de part noter profession et nos compétences. »
Selon vous, peut-on dire qu’il y a une prise en charge spécifique, différente de chez la
personne âgée pour ce public de 55-65ans, atteint de la maladie d’Alzheimer ?
Mme E : « Elle est différente dans le sens où on n’axera pas spécialement les objectifs sur les mêmes
types d’activités. On axera sur l’activité qui nous semble signifiante pour la personne et qui va être
intéressante à développer. Mais on fait du sur-mesure comme tout le temps. Dans le cas de la
pratique en équipe spécialisée, la prise en charge de la personne n’est pas si différente que chez la
personne âgée. Par contre où cela change c’est dans l’accompagnement de l’aidant, parce qu’il
n’aura pas les même problématiques qu’un conjoint âgé retraité, les même ressources. Cela va être
plus compliqué quand l’aidant n’a pas de disponibilité en temps, parce qu’il travaille, qu’il doit
s’absenter en journée, etc. et elle sera différente dans la mise en place des relais parce que cela est
plus compliqué pour nous comme nous l’avons dit tout à l’heure. »
Selon vous,
quel type d’accompagnement/ de structure pourrait être au plus proche des
besoins des personnes Alzheimer jeunes ?
Mme E : « Déjà pour les structures de répits il faudrait créer quelque chose de plus spécifique, il faut
multiplier les structures qui crééent des accueils de jours pour les personnes jeunes ou au moins des
temps spécifiques. Il faut dédier plus de temps à l’aidant jeune par le biais de groupe de parole, tel
que les bistrots mémoire mais adaptés pour les personnes jeunes. Il faut penser à des
accompagnements spécifiques pour les populations jeunes.
Dans l’encadrement médical, c’est vrai que le terme gériatrie peut choquer pour ces personnes. Mais
le gériatre est pour moi pleinement compétent à accompagner des personnes jeunes atteintes de
maladie d’Alzheimer. La clinique ne change pas tellement, le gériatre est accompagné d’une équipe
de neuropsychologues, de kinésithérapeutes, d’ergothérapeutes, d’assistantes sociales qui ont
compétences à intervenir chez les personnes jeunes. Une consultation mémoire type peut convenir à
une personne jeune.
Après pour l’accompagnement par les neurologues, le problème c’est que pour les neurologues de
ville, il y a juste le diagnostic et les traitements mais après il n’y a pas de suivi. Après pour les
neurologues en service hospitalier les neurologues ont plus tendance à passer le relais, à orienter
vers les autres services. Après psychiatrie oui ça peut être le cas si ce sont les troubles du
comportement qui prédominent, mais comme pour une personne âgée. Après il n’y a pas plus de
raison que les personnes soient suivies en psychiatrie.
Je pense que l’accompagnement plus psychologique est plus à développer chez les patients
jeunes.tel que le café des aidants, mais c’est aussi à nous en tant que professionnel de faire ce relais
et de prendre conscience de tout ce qui existe et se crée.
Je pense qu’il faut que l’on intègre à notre niveau qu’il y a peut être des besoins plus spécifiques chez
les patients jeunes, mais on sait bien qu’aujourd’hui les ressources sont encore insuffisantes pour ses
personnes. »
L’organisation actuelle du système de santé permet-elle de répondre de manière efficace à
l’accompagnement de ces personnes ?
Mme E : « Ce qui existe est utile, les accueils de personnes jeunes, les prises en charge psycho sur
les consultations mémoire. Mais ce n’est pas suffisamment développé. »
ENTRETIEN N°5 : Mme P et Mme O
Pouvez vous vous présentez brièvement ?
Mme O : « Moi je suis orthophoniste, je travaille depuis 2005 avec des personnes âgées et j’ai
entendu parler également depuis 2005 des personnes Alzheimer jeunes et c’est depuis cette date que
j’en ai rencontrées.»
Mme P : « Moi je suis psychiatre, je travaille auprès de personnes âgées en hospitalisation puis en
ambulatoire depuis 20 ans. Donc j’ai appris pendant mes études de psychiatrie les différentes
pathologies neuropsychiatriques et donc l’existence des démences jeunes. »
Avez-vous de plus en plus ce type de public en prise en charge ?
Pourquoi ?
Pouvez- vous m’expliquer les grandes lignes de la prise en charge qui a été mise en place pour
ces personnes?
Mme P : « C’est une prise en charge globale, multidisciplinaire avec un panel de soins dont les gens
s’emparent en fonction de leur besoin. Les personnes peuvent venir une fois par an ou toutes les
deux semaines, etc. c’est vraiment en fonction de leur besoin. Il y a des consultations, de la
rééducation, des visites au domicile, chaque professionnel a sa fonction bien déterminée et apporte
son savoir en fonction du besoin des gens.
En ambulatoire on a un avantage par rapport au milieu hospitalier c’est que les gens qui viennent ici
sont motivés à suivre les soins, parce que rien ne les y oblige et c’est important pour nous.»
Mme O : « Sur le plan cognitif on leur propose des prise en charge individuelles de rééducation
cognitive, par exemple sur la mémoire, le langage, avec la neuropsychologue et moi-même en temps
qu’orthophoniste. Et aussi des prises en charge de groupes avec la psychomotricienne, des infirmiers.
On favorise au mieux les prise en charge de groupe pour favoriser le lien, mais en fonction de chacun,
des objectifs personnels, on propose des choses différentes.»
Mme P : « Alors quand les gens arrivent il y a une consultation-évaluation obligatoire avec les trois
médecins de l’unité d’une heure. Et on fait ces consultations en binôme avec un infirmier, parce
qu’après ils vont faire une évaluation à domicile écologique. Après soit le diagnostic est fait et on voit
pour un suivi éventuel, soit on demande un bilan plus approfondi et après on voit s’ils veulent une
prise en charge ou pas. A chaque fois c’est un arbre décisionnel et les gens font leur choix. On voit
bien nous que des gens qui sont évalués et pris en charge régulièrement on voit la différence avec
ceux qui ne le sont pas. On voit une très nette amélioration des patients suivis régulièrement sur le
plan psychiatrique et cognitif. On le remarque par le biais de bilans standardisés réguliers, les gens
peuvent stabiliser leurs troubles. Après parfois ils perdent un peu plus sur le plan cognitif mais les
troubles l’humeur sont améliorés. Et on voit bien qu’avec une maladie donnée telle que la démence
précoce par exemple, les gens peuvent stabiliser leurs symptômes ! »
Dans quel contexte cet accompagnement s’est-il déroulé ?
Mme P : « En général les gens ici ne viennent pas ici en début de maladie. Les gens attendent
toujours que ce soit un petit peu grave pour venir consulter. Et parce que les familles en général ont
beaucoup fait avant, et c’est quand ces familles sont un peu fatiguées d’apporter de l’aide, bien que
parfois elles n’en sont pas spécialement conscientes. Elles passent par le médecin traitant, par une
association.
Ou alors quand ils viennent en début c’est plus parce qu’ils ont entendu parler de la pathologie et
qu’ils ont peur. Mais bien souvent ces gens là ne sont pas malades. Tout cela c’est surtout pour des
personnes qui ont des troubles neurologiques. Après pour ce qui est des personnes ayant des
troubles psychiatriques, des troubles dépressifs mais qui ont déjà un trouble de la mémoire sousjacent…et c’est la que notre rôle est important, on est vraiment dans quelque chose de psychiatrique
qui peut basculer vers la démence. On ne s’en rend pas vraiment compte mais ces personnes ont
déjà des troubles psychiatriques avec un trouble cognitif seul sans une atteinte démentielle
authentifiée, et ce sont ces profils qui peuvent basculer vers la démence constituée. Parce que nous
plus de la moitié de nos patients viennent pour des troubles psychiatriques de type dépression, ce
n’est pas forcément la démence la cause première. »
Avez-vous eu besoin d’effectuer des aménagements nécessaires pour l’accueil ce public ?
(locaux, équipes, …)
Mme P : « C’est vrai que ça nous met un peu plus en difficultés. Par exemple en salle d’attente les
gens qui ont 60 ans et qui se retrouvent avec des gens de 85 ans en salle d’attente, ils voient la
différence et ils ne veulent pas qu’on les mette dans la même case que les personnes âgées. Après il
y a eu aussi la gestion des groupes qui peut être un peu plus difficile. Mais cela dépend aussi de ce
que nous en tant que soignant on renvoie. Dans les cas que j’ai rencontrés cette crainte est souvent
tombée assez vite, certains s’intègrent même bien, ils rentrent dans un rôle un peu d’aidant, il y a de
l’entraide qui se met en place dans les deux sens. Ca peut être intéressant. Par contre c’est dans les
établissements d’hébergement que cela pose problème à mon avis, ça ils nous le rapportent et ça les
insupportent de rentrer dans un lieu de vie avec des personnes plus âgées. »
Au sein de vos équipes, il y a t-il eu des réticences à l’accompagnement de ces personnes ?
Mme P : « Ici, non. C’est plus un problème de personnalité que l’on peut rentrer ici. Par exemple des
soignants qui ont plus de mal à s’affirmer par rapport à des demandes de patients. D’où l’avantage de
travailler en équipe car on essaye que chacun se sente à l’aise. Et puis on peut parler facilement des
patients qui nous posent problème dans la prise en charge pour pouvoir continuer à travailler. »
Avez-vous rencontré des difficultés dans l’accompagnement de ces personnes ?
Mme P : « Pour moi en tant que psychiatre, les consultations avec des gens jeunes sont plus
compliquées. Je suis obligée de les voir plus fréquemment, parfois dans l’urgence parce qu’il y a plus
de relations difficiles avec leur famille. Mais également par ce que ces gens sont comme je vous le
disais plus souvent anosognosiques. Cela est difficile, il faut faire prendre conscience aussi aux
enfants de ces troubles. Et c’est une évolution plus rapide. Ces personnes nous demandent plus de
soins. Pour les professionnels qui interviennent au domicile chez nous, les infirmiers qui sont dans la
réalité des choses, et là on voit que ce sont des gens plus difficiles à prendre en charge car ils
demandent beaucoup plus de temps et l’évolution de la pathologie rend l’adaptation difficile. Après
pour moi en tant qu’orthophoniste je suis dans le travail de rééducation, c’est l’évolution rapide qui est
problématique. Dans les séances ils savent pourquoi ils viennent donc ce n’est pas problématique. »
Selon vous, peut-on dire qu’il y a une prise en charge spécifique, différente de chez la
personne âgée pour ce public de 55-65ans, atteint de la maladie d’Alzheimer ?
Mme P : « Non je ne crois pas. Sur le plan pharmacologique on tente les mêmes molécules, on
essaie d’améliorer les gens au mieux sur le plan thymique, sur l’anxiété et sur le plan cognitif. En
théorie il n’y a pas de différences. Mais avec du recul on voit que la prise en charge est accélérée. On
arrive moins à maintenir quelqu’un au domicile, donc nos objectifs on les maintient moins longtemps
chez eux. Avec les gens plus âgés on n’y arrive plus. Mais les modalités de prise en charge chez les
personnes jeunes ne sont pas différentes. Mais on constate et ceci pas que pour des cas de démence
mais que chez les gens plus jeunes les processus pathologiques sont accélérés et que dans un
objectif de maintien au domicile c’est plus compliqué. Ces personnes perdent plus vite sur le plan
cognitif, sur le plan de l’autonomie. Ce sont des gens qui quand ils arrivent en consultation ils
conduisent encore, ils ont vie sociale adaptée, ils vont chez leur enfants, etc. et après tout ces pans là
tombent rapidement donc ça a forcement plus d’incidence. Ce qui changent aussi c’est qu’à cet âge
ils ont encore une vie sociale dynamique, plus que chez la personne âgée. »
Selon vous,
quel type d’accompagnement/ de structure pourrait être au plus proche des
besoins des personnes Alzheimer jeunes ?
Mme P : « Bah je pense que déjà qu’il faut faire une différence entre ceux qui sont seuls et ceux qui
sont accompagnés par la famille, le conjoint. Car lorsqu’il y a un accompagnement que ce soit par la
famille, le conjoint, ces personnes permettent de préserver un peu une continuité de vie un peu
comme avant. Parce que parfois les personnes n’ont as vraiment conscience de leur difficulté, et
parfois même le conjoint peut rester un peu dans une désillusion des troubles. Le conjoint peut pallier
et pallie souvent pendant un temps. Mais pour les gens jeunes seules, c’est l’hébergement qui va
arriver très rapidement. Ou bien les structures type ssiad ou structure d’équipe à domicile serait une
solution.
Parce que souvent, à domicile il y a beaucoup de choses qui se maintiennent bien que les troubles
soient présents. Il y a comme un décalage, c’est la notion de réhabilitation. Et quand ce n’est plus
possible parfois c’est le foyer logement, nous on a eu ce cas très récemment. Cela lui permet de
garder un peu d’autonomie et d’éviter la maison de retraite. Ce sont des hommes et des femmes, ils
n’ont pas envie de se faire voir comme des personnes malades graves ou des personnes âgées. Mais
bon tout cela a un coup ! »
L’organisation actuelle du système de santé permet-elle de répondre de manière efficace à
l’accompagnement de ces personnes ?
Mme P : « Personnellement en tant que psychiatre, je trouve que ce qu’on a mis en place dans notre,
cette équipe de psychogériatrie est très bien, par ce qu’il n’y avait rien avant 2005 dans notre région. Il
y a aussi de plus en plus des accueils de jour qui se mettent en place, et je trouve cela très bien. Par
contre, je trouve particulier que d’autres spécialités médicales ne fassent pas ce travail de suivi. Il y a
beaucoup de lieu d’évaluation que se soit en gériatrie ou en neurologie, mais il n’y a pas de suivi
régulier de ces patients ensuite. Sur le diagnostic il y a ce qu’il faut mais après il faut se coltiner ce
suivi régulier de gens qui ont des maladies graves et qui s’aggravent progressivement. Ce que nous
faisons mais je n’en connais pas d’autres personnellement. Le problème c’est qu’en libéral il y aurait
des professionnels, mais tous les actes ne sont pas remboursés, tel que les neuropsychologues, les
psychomotriciens, les ergothérapeutes, etc. donc forcement ça limite le suivi. Il ya un souci dans la
prise en charge financières des actes médicaux envers ces personnes et il manque des structures
d’accompagnement et d’hébergement pour le long terme. »
GLOSSAIRE

Acalculie : incapacité de reconnaître ou de former des chiffres et des symboles arithmétiques et
d’effectuer des calculs mathématiques élémentaires (addition, soustraction, multiplication, etc.)

Agnosie associative : incapacité ou difficultés à classer un objet en function d’un lien sémantique

Agraphie : incapacité d’écrire, indépendante de tout trouble moteur

Alexie : incapacité de comprendre les signes écrits ou imprimés

Anomie des doigts : alteration ou impossibilité de nommer les doigts de la main ou de reconnaître
ceux qui sont nommés (par l’examinateur)

Apraxie réflexive : incapacité à imiter des gestes réalisés par un tiers.

Apraxie visuoconstructive : difficulté de la personne à reproduire la perspective et/ou une incapacité
à dessiner sur un ordre ou sur copie

Apraxie idéomotrice : impossibilité ou difficulté d’éxécuter volontairement les mouvements
nécessaires pour la réalisation d’un geste simple finalisé (sans objet) dans l’espace et le temps

Apraxie idéatoire : difficulté à concevoir et effectuer des actes gestuels finalisés avec des objets,
dans le temps et dans l’espace

Apraxie de l’habillage : difficulté ou incapacité pour s’habiller, avec les actes sous-jacents au
résultat : prendre les habits, les organiser, les disperser, enfiler les manches, nouer une cravette, …

Autonomie : capacité de quelqu’un à être autonome, à ne pas être dépendant d’autrui ; caractère de
quelque chose qui fonctionne ou évolue indépendamment d’autre chose

CMRR : Centre Mémoire de Ressources et de Recherche

Consolidation : troisième processus de mémorisation. Il fait appel à la mémoire à court terme. Il
s’apparente à un système de conservation en mémoire des informationsen attente du traitement actif
des informations

EHPAD : Etablissement d’Hébergement pour Personne Âgée Dépendante

Encodage : premier processus de mémorisation, il fait appel à la mémoire immédiate. Cet étape
permet de conserver les informations percutes pendant un temps limité

ESA : Equipe Spécialisé Alzheimer

Indépendance : état de quelqu’un qui n’est tributaire de personne sur le plan materiel, moral,
intellectuel

Mémoire : aptitude à conserver et à restituer des choses passées. Représentation du passé sous une
forme mentale. Dispositif permettant de stocker des informations

Mémoire autobiographie: mémoire qui concerne les souvenirs de la vie de la personne

Mémoire procedurale : concerne les procedures automatiques

Mémoire sémantique : concerne les informations générales

Rétropulsion à la marche (trouble neurologique)

Système limbique : ensemble de structures cérébrales situées dans la région médiane et profonde
du cerveau, jouant un rôle majeur dans la mémoire et les émotions, de même que dans l'élaboration
des comportements

Stockage : fait appel à la mémoire à long terme. Cette étape permet la mémorisation d’un nombre
importants d’informations sur une longue durée. Elle permetaussi de donner du sens à l’information
Résumé
La maladie d’Alzheimer est l’un des enjeux du XXIème siècle en matière de santé
publique.
Pathologie connue de tous, ce terme s’associe souvent, en termes de représentations
sociales, à la personne âgée, au vieillissement et à l’oubli. Longtemps laissés pour compte,
les adultes de moins de 65 ans porteurs de la maladie d’Alzheimer font de plus en plus parler
d’eux. Comment ces personnes sont-elles accompagnées dans un milieu de soin qui a pour
habitude de prendre en charge des personnes plus âgées ?
Aujourd’hui, cette population peut être suivie en psychiatrie, en neurologie ou en
gériatrie, par une équipe pluridisciplinaire au sein de laquelle l’ergothérapeute a une place
importante. Cependant, l’ergothérapeute doit prendre en compte un environnement
spécifique, qui se traduit par des problématiques professionnelles, familiales et sociales
complexes. La réalisation d’entretiens et de questionnaires, a permis d’établir l’état des lieux,
des objectifs, des moyens et des contraintes de l’accompagnement de ses personnes,
notamment en ergothérapie.
La mise en place d’une prise en charge spécifique ne fait pas l’unanimité auprès des
ergothérapeutes, cependant tous s’accordent à dire que leur suivi est complexe.
Mots clés : Maladie d’Alzheimer à forme focale ; représentation sociale; prise en charge
ergothérapique ; complexité.
Abstract
Alzheimer’s disease is one of the public health issues of the 21 century. This pathology
known by all of ushas a negative likeness because of the social view associated to the
elderly, the ageing, and the lapse of memory. For a few years, the society has been focusing
on the adults aged less than 65 years old who suffered from Alzheimer’sdisease. In fact, how
the medical community takes care of young Alzheimer’s patients?
Currently, this kind of patients could be cured in psychiatric; neurology or geriatric
departments, by a multidisciplinary team in which the occupational therapist has an important
role.However, the occupational therapist has to take account of a specific environment based
on professional, family and social problems. The conduct of semi-structured interviews and
questionnaire allowed making the current state of the targets, the means and the caring
young Alzheimer’s patients constraints, particularly in occupational therapy.
A part of the occupational therapists don’t agree with the introduction of a specific care,
but all of them agree about monitoring difficulties.
Keywords: Focal cortical presentations of Alzheimer’s disease ; social representation ;
occupational therapy care ; complexity.
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