Introduction
ECHASSOUX Jean-Philippe - 2012 5
Ensuite, nous justifions notre choix par le fait que le Brésil a mis en place la Fondation
Nationale de l’Indien (FUNAI), institution nationale de protection des communautés
indigènes. C’est un organe dépendant du ministère de la justice brésilien chargé de
« coordonner le processus de formulation et d’exécution de la politique indigéniste de l’Etat
brésilien »2 Ce n’est pas la fondation en tant que telle qui nous intéresse mais bien les
situations de rencontre indigènes/ non-indigènes dont elle conditionne les règles. Et ce,
en définissant un Statut de l’indigène, en démarquant les Terres Indigènes ou encore en
implémentant des fronts d’attraction. Par ailleurs, le travail des sertanistas, ces explorateurs-
salariés de la FUNAI qui aujourd’hui cherchent à délimiter le territoire des « tribus non
contactées » sans jamais les rencontrer directement, pose aussi la question de la non-
rencontre.
Nous n’étudierons pas la période de la colonisation portugaise. Il ne s’agit pas
d’un sujet d’Histoire. Nous souhaitons plutôt questionner la notion d’altérité à l’ « heure
actuelle ». Une telle expression est à manier avec précaution, d’autant plus que nous
effectuerons des retours en arrière tout au long de notre analyse. En effet, d’une part, les
processus de rencontre indigènes/non-indigènes actuels s’ancrent dans des dynamiques
plus anciennes, telles les rencontres entre garimpeiros du Roraima (les chercheurs d’or
brésiliens) et indigènes Yanomami qui résultent de l’occupation de terres des premiers
pour l’exploitation aurifère ; exploitation qui débuta en 1987. D’autre part, c’est à partir du
début des années 1970 que la question indigène se médiatise et se transnationalise. Ces
communautés et leurs combats deviennent alors plus visibles, notamment grâce à la fin de
la dictature militaire en 1985, ensuite avec l’assassinat de Chico Mendes, le plus célèbre des
seringueiros 3, en décembre 1988. Nous avons donc choisi de borner notre sujet des années
1970 jusqu’à nos jours du fait que l’organisation des communautés indigènes en réseaux
et en lien avec des acteurs non-indigènes marque un nouveau rapport socio-économico-
politique entre indigènes et acteurs non-gouvernementaux et scientifiques principalement.
Outre sa médiatisation accrue depuis le milieu des années 1980 à partir des deux
évènements majeurs que nous venons de citer, puis à partir de 1992 et l’organisation
de la deuxième Conférence des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement
(CNUED) ou Sommet de la Terre à Rio de Janeiro, l’Amazonie brésilienne génère, depuis,
un certain nombre d’ouvrages caractérisés par une approche pluridisciplinaire. En France,
l’essentiel de la littérature scientifique portant sur l’Amazonie brésilienne (au sens large)
provient du Centre de REcherche et de Documentation des Amériques (CREDA) qui
est une Unité Mixte de Recherche (UMR 7227) créée le 1er janvier 2010. Pour ce qui
nous intéresse4, le laboratoire finance le projet DURAMAZ qui, à travers une approche
pluridisciplinaire, cherche à analyser les expériences de développement durable menées en
Amazonie brésilienne. Il finance également le projet USART qui étudie plus spécifiquement
la transmission du « savoir territorial » (soit l’ensemble des usages et des représentations
que possèdent les communautés indigènes à l’égard de la terre) entre générations plus
anciennes et actuelles. En outre, le laboratoire possède un pôle Un Brésil, des Amazonies
entièrement dédié au Brésil et à l’étude de ses phénomènes sociaux. Nous ne nous
attarderons pas plus sur les thématiques de recherche et les problématiques de ces projets
2 Povos indígenas – Fundação Nacional do Indio [en ligne]. [page consultée le 19 août 2012] <http://www.funai.gov.br/>
3 Ouvrier collecteur du latex
4 Un coup d’œil sur l’organigramme du CREDA permet de replacer dans leur contexte les projets financés et le pôle de recherche
brièvement évoqué ci-contre : http://www.iheal.univ-paris3.fr/IMG/pdf/organigramme_credal_19juillet2011.pdf