AMBASSADE DE FRANCE EN RÉPUBLIQUE DOMINICAINE SERVICE ÉCONOMIQUE Le Chef de service économique Saint-Domingue, le 10 mai 2016 NOTE Objet : Le commerce extérieur d’Haïti en 2015. Sans réelle industrie locale, le commerce extérieur d’Haïti est caractérisé par un important déficit commercial structurel qui constitue un facteur de vulnérabilité récurrent pour son économie. Les exportations ont encore augmenté en 2015 (+8%) alors que les importations ont baissé (-1,6%). Haïti exporte principalement du textile et importe ses besoins en alimentation et pétrole. 1. Un déficit commercial imposant qui menace l'équilibre de la balance des paiements. Le commerce extérieur haïtien en 2015, caractérisé par une certaine morosité, a pâti de l’instabilité politique du pays et d’une importante sécheresse qui a affecté la production agricole. Les échanges ont augmenté de seulement 0,5%1 en 2015 contre 5% l’année précédente. Bien qu’ayant affiché une progression de 72% entre 2009 et 2015, leur évolution récente reste bien en dessous de leur potentiel. La balance commerciale a enregistré en 2015 un solde négatif de 2,4 Mds USD (le même qu’en 2014), soit 28% du PIB estimé par le FMI. Le taux de couverture des importations par les exportations a retrouvé son niveau antérieur au séisme de 2010, 30%. Il reste insuffisant, les exportations de biens représentant à peine 12% du PIB. L’équilibre de la balance des paiements est assuré grâce aux dons internationaux (488 MUSD en 2015, 5% du PIB) et aux transferts des haïtiens émigrés (2,2 Mds USD, 25% du PIB). Cette situation est néanmoins difficilement soutenable sur le long terme puisque le montant des dons officiels provenant de l’aide internationale diminue (-13% entre 2014 et 2015, soit -73% depuis 2010). Le gouvernement haïtien doit s’atteler à lancer une politique économique susceptible de stimuler la production et ainsi les exportations afin de réduire la brèche commerciale. 2. Les exportations sont largement dominées par les produits textiles à destination des Etats-Unis. Les exportations sont passées de 563,4 MUSD à 1 029 MUSD (+82%) depuis le séisme de 2010. L’année 2015 a été marquée par une stagnation de leur croissance (+8% contre +7% en 2014). Les produits du textile, principalement à destination des Etats-Unis, concentrent environ 90% des exportations haïtiennes. Leur quasi-totalité est confectionnée avec des matières premières importées, conséquence de la loi HOPE II de 2008 permettant à l'industrie haïtienne du textile de bénéficier d’un régime de franchise douanière avec les États-Unis. Cette loi favorise les exportations de vêtements d'Haïti vers le marché US, en les exonérant des droits de douane si au moins 50% de la valeur des intrants et/ou des coûts de transformation des vêtements sont originaires d’Haïti, des États-Unis ou d’un autre pays bénéficiant d’un accord de libre-échange avec les États-Unis. Ce pourcentage est passé à 60% en 2013. Enfin, juste après le tremblement de terre, le « Haiti Economic Lift Program » (loi HELP) prolonge l’accord commercial HOPE jusqu’en 2020, et augmente les quotas d’importation de matières premières pour la production de vêtements. En parallèle, le dynamisme des exportations devrait pouvoir se poursuivre grâce à l’activité des parcs industriels, CODEVI et Caracol. Inauguré en octobre 2012, ce dernier a été financé par les Etats-Unis et la BID. 1 L’année fiscale haïtienne s’étend du 1er octobre au 30 septembre. Données provisoires. Calle Las Damas 42, Zona Colonial Saint-Domingue - République dominicaine Tél. : (1) 809 695 43 70 – Site Internet : http://www.tresor.economie.gouv.fr/republiquedominicaine Selon la Banque de la République d’Haïti (BRH), les produits primaires, principalement les pites et ficelles (tirés des fibres de l’agave), le cacao, le café et la langouste, représentent 29,5 MUSD soit 3% du total des exportations. Les exportations haïtiennes sont absorbées à hauteur de 83% par les Etats-Unis, contre seulement 3% pour l’UE (la France, premier partenaire européen, représente 1,2% des exportations). Les douanes françaises ont enregistré 12,5 MEUR d’importations en provenance d’Haïti en 2015 (+44% par rapport à 2014), dont 84% (soit 10,5 MEUR) correspondent à des huiles essentielles (principalement du vétiver, ingrédient entrant dans la composition des parfums et de l’huile essentielle d’orange amère), et 6% à des préparations à base de fruits et légumes. 3. Les importations élevées sont la conséquence de la faible production agricole nationale et des besoins énergétiques. En 2015, les importations ont baissé de 1,6% pour s’établir à 3,4 Mds USD. Selon la BRH, elles sont principalement concentrées autour de cinq familles de produits : (i) les produits alimentaires, boissons et tabacs (1 Md USD soit 28%) principalement des céréales (riz et froment) et des condiments en provenance de République dominicaine (RD) ; (ii) les articles manufacturés représentent 27% des importations (975 Mds USD) du fait de la faiblesse traditionnelle de l’industrie manufacturière locale et des importations de produits transformés réexportés sur le marché US dans le cadre de la loi HOPE (l’aide humanitaire a également entrainé, d’un point de vue strictement macroéconomique, une augmentation des importations des biens de consommation) ; (iii) les combustibles (780 MUSD soit 22% des importations) ; (iv) les machines et matériel de transport (580 MUSD soit 16%) ; (v) les produits chimiques (275 MUSD soit 8%). Sur le dernier exercice, le premier fournisseur d’Haïti sont les Etats-Unis, avec 33% de part de marché, au détriment de la RD (29%) qui l’était l’année dernière. Les échanges commerciaux avec le pays voisin se sont accélérés depuis le séisme de 2010 mais le solde de la balance commerciale est largement déficitaire pour Haïti (-1,7 Mds USD en 2014). La Chine est le troisième partenaire avec 13% de part de marché, suivi de l’UE, avec 6%. La France est le premier fournisseur européen d’Haïti avec 1,5% de part de marché. Les importations d’origine françaises (44 MEUR, -8% en 2015) sont surtout composées d’équipements mécaniques, de matériel électrique, électronique et informatique (14 MEUR) et de produits agroalimentaires (11 MEUR). * * * L’ancien gouvernement comme le prochain semblent compter sur le développement des zones franches, notamment à la frontière dominicaine (à l’instar de la zone franche de CODEVI), pour assoir le développement de ses exportations. Dans la filière textile cependant, l’intégration verticale entre les zones franches dominicaines et haïtiennes joue en faveur de celles situées dans le pays voisin. Les patrons, fils et tissus sont en effet entreposés, découpés dans des parcs industriels dominicains avant d’être expédiées à CODEVI pour être cousus. Ils sont ensuite renvoyés en RD pour le lavage, la finition et l’expédition. Haïti reste ainsi spécialisé dans un segment de la chaîne de valeur à faible valeur ajoutée. La nature des importations (combustibles et produits alimentaires, 50% du total) et la faible production locale rendent le pays vulnérable à une hausse du prix des matières premières et à l’évolution du taux de change. Cette fragilité est exacerbée par les évènements climatiques auxquels le pays est exposé. La probabilité d’occurrence élevée de ces risques constitue une menace permanente pour la stabilité économique pays. Annexe Statistique Les échanges extérieurs entre 2010 et 2015 (MUSD) Le déficit commercial / PIB entre 2010 et 2015 Source : Banque de la République d'Haïti Principaux partenaires commerciaux d’Haïti en 2015 (MUSD) Fournisseurs 2015 Importations Part de marché (en %) 1 Etats-Unis 1 143 35% 2 République dominicaine 1 012 30% 3 Chine 436 13% 4 Union européenne 208 6% 5 Inde 75 2% Clients 2015 1 Etats-Unis 972 Part de marché (en %) 83% 2 République dominicaine 59 5% 3 Union européenne 39 3,3% 4 Canada 30 2,5% 5 Mexique 22 1,9% Exportations Source : International Trade Centre - UN