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Introduction à : Le sacrifice de Pâque des Samaritains
MACCHI, Jean-Daniel
Reference
MACCHI, Jean-Daniel. Introduction à : Le sacrifice de Pâque des Samaritains. Asdiwal, 2012,
vol. 7, p. 151-152
Available at:
http://archive-ouverte.unige.ch/unige:41822
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LE SACRIFICE DE PÂQ1JE DES SAMARJTAINS
DANIEL BARBU
Introduction de jean-Daniel Macchi
Sur le mont Garizim qui domine la ville palelil:inienne de Naplouse, les Samaritains pratiquent
chaque année la Pâque, entourés d'une foule de curieux venus assister à cette cérémonie très parti-
culière qui conlil:itue, en un sens, une survivance des cultes sacrificiels de l'Israël biblique.
Contrairement à ce que l'on dit souvent, l'origine des Samaritains ne s'explique ni par l'installation d'un groupe de populations non-israélites dans la région de Samarie ~u vme siècle avant
notre ère, ni par un schisme provoqué à l'époque helléniSl:ique par un groupe deJudéens qui aurait
quitté Jérusalem pour fonder, plus au nord, un sanél:uaire concurrent. En réalité, Juifs et Samaritains
descendent les uns et les autres de populations israélites qui se sont longtemps considérées comme
membres d'un seul et même peuple, adorant le même dieu. Établis dans des régions différentes, les
israélites vivant en Judée autour de Jérusalem se sont pourtant progressivement éloignés de ceux habitant plus au nord, en Samarie. De sorte qu'à l'époque romaine, Juifs et Samaritains finirent par se
considérer comme deux groupes totalement séparés, voire comme des peuples clairement diStinél:s.
Les rites et croyances des Samaritains sont néanmoins reStés proches de celles du judaïsme.
Comme les Juifs, les Samaritains fondent leur syStème religieux sur le texte sacré de la Loi de Moïse,
la Torah, dont ils ont d'ailleurs préservé une forme textuelle relativement similaire. Comme les Juifs,
les Samaritains vénèrent un dieu nommé YHWH, dont ils se gardent de prononcer le nom, pratiquent
le repos sabbatique hebdomadaire, se réunissent dans des synagogues, demeurent attentifs à certains
tabous alimentaires et pratiquent la circoncision. Une différence fondamentale sépare cependant
Samaritains et Juifs: la localisation du lieu oit, selon la terminologie biblique, «YHWH fait demeurer
son nom>> (Deutéronome r2,n, etc.). Comme la Torah de Moïse ne tranche pas explicitement cette
queSl:ion, les Juifs situent ce lieu à Jérusalem tandis que les Samaritains eSl:iment qu'il s'agit du mont
Garizim. Ils s'y rendent donc en pèlerinage chaque année, pour y pratiquer la Pâque selon le corn-
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mandement biblique: « C'~st seulement au lieu que YHWH. ton Dieu a choisi pour y faire résider son
nom que tu sacrifieras la Pâque, le soir lorsque le soleil s'en va, au moment où tu es sorti d'Égypte"
(Deutéronome 16,6).
La communauté samaritaine, aujourd'hui réduite à quelques centaines de personnes, célèbre la
Pâq~e confonnéme~t aux prescriptions. énoncée~ ~ans la .T~rah/notamment ~u chapitre 12 d~ li~re
de 1Exode. Ils gravissent le mont sacre du Ganz1m et s y m$Îallent temporairement, en memoue
du temps où les Hébreux sortis d'Égypte vécurent dans le désert.. Les préparatifs de la cérémonie
pascale proprement dite se font durant la journée du 14 Nisan. Au cours de cette journée, le lieu de
sacrifice, les bûchers, ainsi que les fosses circulaires qui serviront à cuire les agneaux sont préparés.
Deux heures avant le coucher du soleil, on allume les bûchers, puis le feu de l'autel alors que des
prières sont prononcées. Vêtus de tuniques de lin blanc et coiffés de tarbouches, les prêtres samaritains célèbrent la liturgie pascale qui comporte textes bibliques, prières, cantiques et hymnes.
Uimmolation des agneaux a lieu au crépuscule, entre le coucher du soleil (r" soir) et la.tombée de
la nuit (z'm' soir), un moment précis, en application de l'expression biblique «entre les deux soirs"
(Exode rz,6, etc.).
Au coucher du soleil, le premier agneau est égorgé d'un coup de couteau après que le grand-prêtre
ait récité le texte d'Exode rz,r-6. Les autres animaux sont sacrifiés ensuite. Le nombre d'agneaux
immolés dépend de la taille de la communauté rassemblée. En zon une vingtaine d'agneaux environ ont été sacrifiés. Les agneaux du sacrifice sont délainés à l'eau chaude, puis suspendus par les
pattes arrière à des crochets métalliques. Uanimal est éventré et ses viscères retirés, lavés et salés.
Une partie d'entre eux sont remis en place. Le reste, tout comme le sang et les graisses du ventre, est
brûlé sur l'autel en «odeur agréable à Dieu>>. Les pattes avant droites sont enlevées et cuites à part:
il s'agit de la part réservée aux prêtres. La mâchoire inférieure de chaque agneau revient également
à ceux-ci. Les animaux sont salés, embrochés et cuits dans les fosses prévues à cet effet; fosses qui,
comme on le voit sur les clichés, sont scellées pour la cuisson.
Peu avant minuit, la communauté samaritaine se rassemble autour des fours et chaque responsable de famille retire alors son agneau du feu et le place dans une corbeille. On l'accompagne
d'herbes amères et de pain azyme.
A minuit, les familles rentrent chez elles et consomment rapi-
dement le repas pascal. Les restes, ainsi que tous les accessoires ayant touché l'agneau sont ensuite
amenés à l'autel, où ils seront brûlés. Ils se consumeront jusqu'au lever du jour.
Les photographies publiées dans le présent volume ont été prises par Daniel Barbu en avrilzon.
Elles constituent un témoignage remarquable sur ce rituel millénaire dont nous avons ici évoqué les
grandes lignes'.
r
Cette brève introduction reprend des éléments développés plus longuement dans
JEAN-DANIEL MACCHI,
«Le sacrifice samaritain de la Pâque)>, Cahiers Évangile rn (2ooo), pp. 55-59. Cf. également JEAN-DANIEL MAcclu, Les
Samaritaim: histoire d'une légende. Israël et la province de Samarie, Genève, Labor ct Fides, 1994.
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