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Pour en revenir à Eva…
Alors qu’il nous offrait une virée dans sa Bentley, le summum de
l’élégance britannique, Clint m’avait confi é que cette môme Eva
l’avait chamboulé et qu’il souhaiterait se la trimbaler, elle, au lieu
d’un gus has been dans mon genre. Là il ne parlait plus du roman
de Machin Chase mais d’un fi lm qui en avait été tiré. L’actrice
qui interprétait Eva, a priori une French Lady, se payait un cul
d’enfer et une bouche « fallait voir ça ». Dixit Clint, parole !
Affi rmatif ! C’est en hommage à cette star décapsuleuse et aussi
en souvenir de mon poteau Clint, que j’ai surnommé Evelyne,
Eva.
J’ai eu des diffi cultés à lui imposer ma passion des bagnoles,
à ma femelle. Pourtant pas de la 2 CV Citroën même de 1951
5 x 156 ! Non, des sérieuses, des grosses, des puissantes, de la
Bugatti Royale Type 41 de 1929 4 x 240, chef-d’œuvre de design
et d’ingénierie avec son moteur de 300 ch, à la Chevrolet Camaro
Z/28 de 1969 4 x 240 avec sa grille à alvéoles, son spouiler
arrière, le V8 de 5l ! Bordel, son V8 de…
« Calmos Samo. »
Ouais, je m’appelle Samo.
Plus exactement ils me surnommaient Samo parce que j’avais
toujours la bougeotte à pied et la vitesse en voiture. Je traçais ! Et
on me balançait du « Samo, trace ! ». Les nuls, ceux de Brooklyn
qui me prenaient pour leur larbin en m’obligeant à fournir en
dope ceux du Queens. « Allez Samo, magne-toi, y a nos clients
qu’en manquent, tu sais pas c’que c’est qu’d’en manquer mec,
trace Samo ! », m’ordonnaient les nuls de Muray Hill lorsqu’ils
m’expédiaient livrer les accros de Greenwich Village ! Et j’en
oublie. Sûr. Y a tellement de nuls qu’on fi nit par en oublier, c’est
obligé, surtout pour un type comme moi qu’a des problèmes de
mémorisation, dixit Willys.
Lui le Wyllis, je l’avais à la bonne car lorsqu’il m’emmenait faire