
Liberté syndicale et développement économique
syndicale, où les conventions existantes ont été le plus ratifiées et les procédures
de contrôle le plus développées, que l'application de la norme a rencontré les
obstacles les plus sérieux. Mais cela ne doit étonner qu'à première vue. Les
droits syndicaux sont si étroitement liés à l'organisation de la société, aux
libertés publiques et, plus généralement, à la vie de la nation qu'il est inévitable
qu'ils soient affectés par les conceptions et les structures nationales, souvent
même par les vicissitudes de la politique intérieure.
Les problèmes qui ont ainsi entravé, dans de nombreux pays, la mise en
œuvre de la liberté syndicale ont été d'ordre et d'importance très différents.
Il en est un que l'on voit souvent invoqué — et pas seulement à propos de la
liberté syndicale — et qui tantôt est plus ou moins clairement formulé et tantôt
transparaît en filigrane au cours de discussions sur l'application des conventions
de l'OIT. Il
s'agit
des relations qui peuvent exister entre la liberté syndicale
et le développement économique. La liberté syndicale serait-elle une entrave
au développement économique? Devrait-on alors accepter qu'elle soit restreinte,
voire supprimée, pour faire face aux nécessités du développement? Ou, inver-
sement, le ralentissement du développement devrait-il être le prix du respect
de la liberté syndicale?
Pour sa part, l'OIT a estimé qu'on ne devrait pas s'enfermer dans un tel
dilemme. Et qu'il
s'agit
même, dans une large mesure, d'un faux problème.
A ses yeux, il ne saurait être question de sacrifier ni le développement écono-
mique ni la liberté syndicale. Un développement économique soutenu a tou-
jours été considéré comme un important facteur du progrès social, mais le
développement économique n'est pas une fin en soi: il constitue un moyen
dont il ne faut pas perdre de vue les finalités sociales et humaines. Cette thèse,
que l'OIT a longtemps soutenue, a été appuyée, en 1970, par l'Assemblée
générale des Nations Unies lorsque, en adoptant la Stratégie internationale pour
la deuxième Décennie des Nations Unies pour le développement, elle y a insisté
sur les objectifs sociaux du développement et a même rapporté l'économique
au social. Il devrait donc être possible, et des voix autorisées l'ont souvent
souligné, de concilier les besoins du développement avec le droit des individus
de vivre et de se développer dans la liberté et la dignité.
Mais cela, pourra-t-on dire, ne constitue que de belles généralités et une
vue trop idéaliste des choses. Qu'en est-il réellement des rapports entre la
liberté syndicale et le développement économique? Qu'y
a-t-il
de vrai dans ce
qu'on entend dire de leur incompatibilité?
Une étude scientifique et objective de la question nous a donc paru s'impo-
ser. L'objet de cette étude est d'apprécier la réalité et éventuellement les dimen-
sions d'une objection qu'on oppose parfois aux principes de la liberté syndi-
cale et de pouvoir ainsi, soit démythifier l'objection, soit envisager les moyens
propres à la surmonter. Il est, en définitive, de contribuer, par une meilleure
VI