CONDUITE A TENIR DIAGNOSTIQUE DEVANT UN NODULE DU SEIN EL MANSOURI A.* La mortalité par cancer du sein augmente régulièrement chez la femme, alors que la mortalité par cancer ainsi que la mortalité générale diminue. Le taux annuel de décès par cancer du sein est de l’ordre de 28 décès pour 100.000 femmes (statistique française). La précocité du diagnostic améliore le pronostic du cancer du sein. Un diagnostic au stade de début a pour corollaire un traitement simple non mutilant. Au plan diagnostique des examens complémentaires ont été proposés. La question est donc de connaître la valeur de chacun pour en utiliser les meilleurs. I - LA CLINIQUE Devant un nodule du sein, trois diagnostics sont à soulever : l’adénofibrome, le cancer (Kc), et la dystrophie kystique du sein. Les 3 affections ne se voient pas au même âge (Fig. 1). Fig. 1 : Distribution des adénofibromes, des dystrophies kystiques et des cancers en fonction de l’âge . re ch e rche des connections cutanées ou d’une adhérence au plan profond . recherche d’une adénopathie ou sus-claviculaire. Dans la pathologie maligne du sein, l’examen clinique bien fait reste un temps essentiel du diagnostic ; en effet le diagnostic se trouve exact dans 75 % des cas, il doutera dans 20 % des cas et il se trompera dans 5 % des cas ; l’examen clinique permet à tort de poser le diagnostic du cancer dans 3 % seulement et il rassure à tort dans 8 à 14 % des cas (1). C’est l’examen clinique qui permet la mesure de la taille de la tumeur et la classification internationale (T : Taille, N : Ganglions, M : Métastases (T.N.M.) et aussi d’apprécier l’évolutivité de la tumeur. II - QUELS EXAMENS COMPLÉMENTAIRES DEMANDER ? a) La thermographie : non C’est un mauvais examen diagnostique. La thermographie est douteuse dans 15-16 % des cas et elle se trompe dans 18 % des cas ; son taux de concordance est de 55-65 % (4). Dystrophie kystique Adénofibrome Cancer du sein - Chez la femme jeunes : il s’agit presque toujours d’un adénofibrome. - Après la ménopause l’ap p a rition d’une tumeur signe presque toujours un cancer. - Entre 35 ans et 55 ans le diagnostic est difficile entre kyste et cancer d’où l’intérêt de l’examen clinique : . mesure du diamètre du nodule . appréciation de sa consistance, ses limites * Maître Assistante à la Faculté de Médecine - Casablanca. Hôpital BAOUAFI - Casablanca Médecine du Maghreb 1992 n°33 * Le faux positif se voit en cas de : - lésions inflammatoires bénignes, les tumeurs bénignes à croissance rapide (adénofibrome proliférant, adénosclérose). - lésions bénignes en début de grossesse ou si l’examen se fait en période pré-menstruelle ou encore si la patiente prend des oestro-progestatifs. * Le faux négatif se voit en cas de : - gros seins graisseux, ptosés - cancer situé au niveau du sillon sous-mammaire, ou derrière le mamelon - cancers bilatéraux et symétriques - cancers éloignés de la peau - cancers à croissance lente 5 % des cas (1, 2). Une anomalie à la thermographie n’est donc qu’un élément de suspicion. Sa valeur est bien discutable dans les dépistages des cancers. La thermographie est plus intéressante dans l’étude de l’évolutivité de la tumeur. b) La mammographie : oui !! Faite dans de bonnes conditions elle confirme le diagnostic dans 72 % des cas, peut être à l’origine de résultats douteux dans 25 % des cas et d’erreur dans 3 % des cas (3, 5). La mammographie confirme la malignité dans 98,5 % des cas, quand elle affirme la bénignité il y a une marge de 6,5 % d’erreur car il peut s’agir de sein opaque, d’épithélioma colloïde ou de fibro-sarcome. La mammographie est l’examen qui donne le moins de faux négatifs. C’est le seul examen de confirmation des lésions suspectées cliniquement (intérêt dans le dépistage des cancers infracliniques). La mammographie précise la structure et l’extension des formations cliniquement décelables, elle localise la tumeur que l’on peut ponctionner. Elle peut déceler les signes de poussées évolutives (oedèmes, épaississement cutanée). Enfin elle vérifie l’intégrité du sein controlatéral, car 2 à 11 % des cancers sont bilatéraux (5). LA mammographie peut encore diagnostiquer les cancers occultes. Mais, la mammographie a ses limites ; ceci est le cas pour les seins très denses chez la jeune femme (moins de 30 ans), chez la femme enceinte ou allaitante ou encore les seins irradiés). Les tumeurs très postérieures situées contre le gril costal ou dans le prolongement axillaire, sont également mal explorées par la mammographie. 30 ans aux seins denses. Dans les cancers, la fiabilité du diagnostic est tributaire au diamètre de la tumeur. Si l’on fait le diagnostic exact dans 95 % des cas pour les tumeurs supérieures de diamètre à 2 cm, le taux de faux négatif est seulement de 40 % des cas pour les tumeurs moins de 3 cm ce qui limite actuellement ce type d’exploration aux tumeurs pleines, non malignes à l’évidence chez la femme jeune moins de 30 ans. e) La cyto-ponction !! En cas de kyste la ponction retire facilement du liquide dont on fera une étude cytologique. La cytologie permet de confirmer le diagnostic exact dans 88 % des cas (1, 5) ; il faut s’attendre à 3 % de résultat douteux et 3 % de faux négatif et 3 % de faux positif. La fréquence des frottis acellulaires peut aller jusqu’à 21 % des cas de tumeurs ponctionnées. Quant aux faux négatifs ils représentent 20 % des cas. Si l’on ponctionne des lésions à l’évidence de faible diamètre ou non malignes on peut donc dire que le faible pourcentage de faux positif c o n f è re au diagnostic de malignité, une valeur incontestable. Mais le taux élevé de prélèvement acellulaire ou de faux négatifs donne au diagnostic de bénignité une valeur de suggestion qui devra être confrontée aux autres données du bilan. III - LA SYNTHESE DU TRÉPIED DIAGNOSTIQUE : CLINIQUE, c) Les autres examens radiologiques . La kystographie consiste en une injection de l’air dans le kyste ponctionné, elle peut être utile pour montrer des végétations intrakystiques ou un aspect polypobé invitant à l’exérèse. . La xerographie permet d’explorer les seins denses et l’exploration de certaines localisations péri p h é ri ques, les microcalcifications sont plus contrastées. d) L’échographie Le diagnostic de kyste est échographiquement facile lorsque celui-ci fait plus de 5 mm de diamètre. Par contre le diagnostic échographique des fibro-adénomes est moins fiable, mais utilisable chez les femmes jeunes moins de Médecine du Maghreb 1992 n°33 EL MANSOURI A. 26 b) La tumeur n’est pas un cancer évident IV - L’EXAMEN HISTOLOGIQUE EXTEMPORANÉ Il faut faire la mammographie, la cytoponction et si la femme a un âge inférieur à 30 ans, l’échographie est une aide au diagnostic. Le diagnostic est assuré dans 99,5 %, si 2 éléments seulement affirment la malignité, le diagnostic de cancer est très probable. Il faut faire une biopsie extemporanée. Si un seul élément affirme la malignité, il faut faire une biopsie extemporanée. En cas d’incertitude des autres méthodes il affirme le diagnostic avec une fi abilité très élev é e. C’est le dern i e r examen préthérapeutique. Cet examen est très fiable en cas de nodule plein. Mais il atteint ses limites dans les lésions frontières, où il ne donne que 30 % des diagnostics exacts carcinomes in situ. Il faudra dans ce cas savoir attendre l’examen anatomopathologique. BIBLIOGRAPHIE 1 - BERMOUD A., RENAUD R., GAIRARD B., FORES A.M., BELOCQ J.P. Cancer du sein. Flammarion Médecine Sciences Paris, 1990. 2 - LANSAC J., LECOMTE P. Gynécologie pour le praticien. Edit. SIMP 2ème édition - Paris 1984. 3 - LEFRANC J.P., ROLET F., BLONDON J. Examens cliniques du sein. Méthodes et résultats. Encycl. Méd. Chir - Médecine du Maghreb 1992 n°33 Paris Gynéco. 810 F10 12, 1986, 610. 4 - LETREUT A., DILHUYDY M.H., PARSI B. Cancer gy n é c o l ogique et mammaire. Edition Flammarion Médecine Sciences Paris, 1986. 5 - PERRET F., TOURNANT B., GORINS A. Pathologie mammaire bénigne. Flammarion Médecine Sciences, Paris 1990.