peut diviser les interactions en deux groupes. Les
interactions pharmacocinétiques sont associées à un
changement de la concentration sanguine de chaque
médicament ou de leur(s) métabolite(s) ou des
deux1,5,6. Les interactions pharmacodynamiques se
produisent au niveau du site d’action du médicament
et font varier l’efficacité ou la toxicité d’autres médica-
ments sans affecter leur concentration plasma-
tique1,3,6,7.
Interactions pharmacocinétiques
Les interactions pharmacocinétiques peuvent survenir
à n’importe quelle étape de la disposition du médica-
ment, c’est-à -dire durant l’absorption, la distribution,
le métabolisme ou l’excrétion. Elles sont associées Ã
des changements de la concentration sanguine du
médicament dans le compartiment périphérique et
central1,3,8,9. Les interactions pharmacocinétiques les
plus significatives médicalement sont les interactions
métaboliques. Les meilleurs exemples en sont l’inhibi-
tion et l’induction du système hépatique d’enzymes du
cytochrome P450. L’induction implique la synthèse de
nouvelles enzymes et exige la synthèse de protéines.
Avec ce type d’interaction, plusieurs jours peuvent
s’écouler avant que l’induction soit complète et que
l’on observe un métabolisme accru du médicament,
des concentrations plasmatiques réduites et un effet
pharmacologique atténué (si aucun métabolite actif
n’est présent). Le processus s’inverse au moment où
l’inducteur est retiré avec une augmentation des
concentrations plasmatiques du médicament et, par
conséquent, un potentiel accru d’effets indésirables et
même toxiques. L’inhibition, elle, résulte d’une com-
pétition des antiépileptiques pour les mêmes enzymes
métaboliques au niveau du foie. La concentration
plasmatique de l’antiépileptique affecté est augmentée
et une réduction de la dose peut être nécessaire afin
d’éviter des effets toxiques. Un nouvel état d’équilibre
est atteint entre quatre à six demi-vies après l’introduc-
tion de l’inhibiteur. La potentialisation pharma-
cologique apparaît rapidement si l’antiépileptique a
une demi-vie courte et lentement s’il a une demi-vie
longue. On observera une potentialisation minimale
après 4 jours pour la carbamazépine, 12 jours pour
l’éthosuximide, 14 jours pour la phénytoïne, 20 jours
pour le phénobarbital, 5 jours pour la lamotrigine et
3 jours pour l’acide valproïque10. Lorsque l’inhibiteur
est retiré, la concentration plasmatique de l’antiépilep-
tique affecté diminue et on peut augmenter la dose. La
comparaison des nouveaux antiépileptiques avec les
agents traditionnels montre un contraste évident : les
interactions pharmacocinétiques basées sur l’induc-
tion de la biotransformation hépatique sont com-
munes avec les anciens antiépileptiques (la carba-
mazépine, le phénobarbital, la phénytoïne), mais elles
ont été largement évitées par la mise au point des nou-
veaux antiépileptiques9. Il est important de compren-
dre ces processus afin d’utiliser les antiépileptiques de
manière optimale et d’évaluer les facteurs qui influen-
cent leurs concentrations plasmatiques11.
Absorption et disponibilité
Les interactions médicamenteuses avec les antiépilep-
tiques se produisent rarement pendant l’absorption,
toutefois on sait que les antiacides non systémiques
réduisent l’absorption de plusieurs d’entre eux (p. ex. :
la phénytoïne, le phénobarbital, la carbamazépine et la
gabapentine) en diminuant l’acidité de l’estomac et
aussi par la formation de complexes insolubles1,9. Le
sucralfate et les gavages administrés via le tube naso-
gastrique peuvent affecter l’absorption de la phény-
toïne, entraînant une diminution des concentrations
sériques. On propose aussi l’hypothèse de la liaison
aux parois du tube de gavage8,11,12. La dissolution et
l’absorption sont influencées par la formule médica-
menteuse utilisée, la grosseur du grain, la sorte
d’excipient, la voie d’administration, la nourriture, la
relation temporelle entre les repas et la prise de
l’antiépileptique ainsi que les troubles du tractus
digestif5. Il est préférable de surveiller les niveaux
sériques avant et après chaque changement de for-
mule5,13. La biodisponibilité biologique de la plupart
des antiépileptiques est linéaire. L’exception est la
gabapentine, pour laquelle l’absorption, chez beau-
coup de patients, diminue progressivement avec des
doses dépassant 600 mg trois fois par jour. C’est
probablement en raison d’une capacité saturable de
l’intestin (système de transport d’acides aminés)14.
Distribution
Ce que l’on doit considérer principalement dans la
distribution d’un médicament est le degré de liaison
aux protéines, qui affecte la pénétration au cerveau
aussi bien que les interactions avec d’autres médica-
ments8,14. En termes quantitatifs, ces interactions sont
peu significatives pour les médicaments liés à 70 % ou
moins aux protéines plasmatiques, mais elles peuvent
être importantes pour ceux qui sont liés à 90 % ou
plus. La phénytoïne, l’acide valproïque et la tiagabine
font partie de cette catégorie1,8,14. Une petite réduction
de la proportion liée produit une grande augmenta-
tion transitoire de la concentration libre9. Comme la
fraction libre du médicament augmente, la clairance
systémique totale augmente et il se produit une
diminution de la concentration totale du médica-
ment1. Les implications du déplacement au niveau des
protéines sont souvent mal comprises. En effet, c’est
uniquement la fraction libre du médicament qui est en
équilibre avec les sites du récepteur et qui croise la bar-
rière hématoméningée pour exercer l’action pharma-
cologique désirée8,14. En présence d’interactions reliées
aux liaisons protéiques, les effets thérapeutiques et
toxiques peuvent apparaître avec des concentrations
plasmatiques faibles du médicament. Il devient alors
242 Québec Pharmacie vol. 52, no4, avril 2005
les pages BLEUES
Les interactions
pharmacociné-
tiques les plus
significatives
médicalement
sont les
interactions
métaboliques.