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persister alors que l’excès de fer a été retiré. Cette
énigme pousse les chercheurs à enquêter sur les méca-
nismes qui induisent les lésions articulaires.
D’autre part, il apparaît que pour un même défaut
génétique, certains patients sont très affectés par la
maladie et d’autres beaucoup moins. « Ces inégalités
laissent suspecter l’existence de facteurs, internes et
externes, susceptibles de moduler la maladie. » Des
recherches sur l’influence de facteurs externes, comme
la consommation d’alcool, sont également conduites.
Enfin, l’existence d’anomalies des métabolismes gluci-
diques et lipidiques, qui moduleraient le métabolisme
du fer et aggraveraient les lésions (notamment au
niveau hépatique), est une autre piste étudiée.
Dans l'hémochromatose, il n'y a pas d'autre option
thérapeutique, aucun régime alimentaire ne permet, à
lui seul, d'éviter ou de limiter le nombre de saignées.
Il est cependant recommandé d'éviter l'excès de boissons
alcoolisées, ainsi que la vitamine C en complément
alimentaire. D'autre part, la consommation de fruits
de mer crus, en particulier les huîtres qui peuvent
contenir une bactérie appelée « Vibrio vulnificus » qui
peut être mortelle pour les personnes ayant une hémo-
chromatose, est à éviter ! Faites bien cuire tous vos
fruits de mer. A contrario, il est recommandé de boire
du thé au moment des repas.
n
POURQUOI NE PAS FAIRE
UN DÉPISTAGE SYSTÉMATIQUE ?
L'hémochromatose répond aux critères d'un dépistage
systématique de grande envergure : maladie fréquente
dans la population, qui peut être dépistée par un test
fiable et sûr permettant une prise en charge qui évite
des complications graves, de lourdes dépenses médi-
cales, et améliore la survie.
La Haute Autorité de Santé a étudié, en 1999 et en
2004, la faisabilité et le bénéfice en termes de santé
publique d'un dépistage génétique à la naissance. Cette
piste n'a pas été retenue du fait de son coût, et comme
la maladie ne se manifeste qu'à l'âge adulte, le délai
entre le diagnostic et la prise en charge risque d'entraî-
ner une perte d'efficacité.
Seul le dépistage familial est accepté par la Sécurité
sociale. S’il est plus pertinent, puisque partant d'un
sujet atteint, il est plus compliqué à mettre en œuvre
car il repose sur le volontariat. Seul le patient peut
prévenir sa famille, son médecin ne le peut pas. Le
malade peut hésiter à « avouer » sa maladie génétique,
même si un décret de juin 2013 lui en fait obligation,
et les autres membres de la famille peuvent hésiter ou
tarder à faire les examens.
Il faut œuvrer pour que soit mis en place le dépistage
systématique chez l'adulte. La meilleure attitude semble
être d'introduire le bilan martial, le dosage du coefficient
de saturation dans les bilans de santé, et de proposer
le test génétique en cas d'augmentation confirmée.
N'en doutons pas, le seul progrès dans l'avenir ne peut
venir que d'un dépistage précoce.
n
VERS DES « DONS SAIGNÉES » ?
La saignée thérapeutique étant le traitement de base
de l'hémochromatose, le potentiel que représente l'uti-
lisation du sang des malades à des fins transfusionnelles
est une question d'intérêt majeur pour pallier le manque
de sang. Durant des années, il y a eu débat sur les
conditions d'éligibilité au don du sang des malades
hémochromatosiques et sur l'aspect éthique du don
saignée. Deux questions se posaient : le sang des
malades est-il sans danger pour les receveurs ? Le don
de sang peut-il être considéré comme volontaire chez
ces patients ?
Une réponse a été apportée en France, avec l'arrêté du
12 janvier 2009 fixant les critères de sélection des
donneurs de sang : les patients porteurs d'une hémo-
chromatose génétique ne sont plus contre-indiqués au
don du sang. Le Canada avait pris cette décision il y a
plus de 10 ans…
Les saignées peuvent alors être transformées en « don
saignée », le patient étant alors orienté vers un site de
l'Etablissement Français du Sang (EFS) comprenant un
centre de santé et un site de collecte. L'ouverture des
centres de santé de l'EFS aux patients devait se faire
au fur et à mesure d'affranchissement des contraintes
réglementaires liées à la mise en place de cette nouvelle
organisation (qualification du personnel, agrément des
locaux…). Quel dommage que cela n'aille pas plus vite
- le « don saignée » n'est pas encore possible dans les
Alpes-Maritimes, par exemple - car, chaque année, ce
sont au minimum 4 dons du sang par malade qui sont
perdus. Si on multiplie par le nombre de malades et
que l'on rapproche cela des appels aux dons fait durant
toute l'année, ne serait-ce qu’en PACA, on peut se poser
bien des questions sur le fonctionnement de notre
système de santé !
En attendant que l’institution rationalise ses actions,
chacun d’entre nous peut sauver des vies en parlant de
cette maladie autour de soi.
Et que tous ceux qui ont des contacts politiques n'hé-
sitent pas à plaider en faveur du dépistage et de l'accrois-
sement des possibilités des « dons saignée ».
CONTACTS :
Association Hémochromatose France
BP 7777,
30 912 Nîmes cedex
Tél. : 04 66 64 52 22 ou 09 75 49 14 52
Site internet : http://hemochromatose.fr
Etienne Arets
Tél. : 04 93 18 41 32
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Dans ses formes avancées, l'hémochromatose fait partie
des 30 affections longue durée (ALD 30) qui donnent
lieu à une prise en charge à 100 % par la Sécurité sociale.
Dans les formes graves, les malades ont la possibilité
d'obtenir une allocation d'adulte handicapé en déposant
un dossier auprès de la Maison Départementale du
Handicap. Dans les formes plus modérées, on a juste
droit à la RQTH (Reconnaissance de la Qualité de Tra-
vailleur Handicapé) ce qui aide l'employeur à atteindre
ses quotas, et permet au malade d'obtenir les aménage-
ments de poste nécessaires à sa pathologie.
UnE AffEction longUE dUréE
Depuis la
découverte de
la maladie
au début du
XXème siècle,
et malgré
la découverte
de l'origine
génétique
en 1976 ou
du gène
responsable en
1996, le remède
reste la
suppression
de cet excès
de fer par des
« saignées »
régulières...
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