En-tête. La morale.
Textes.
A. Les trois tendances de l’éthique.
« 1. Déontologie
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Pour la déontologie, la question morale principale est : «Que dois-je faire? ». En
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réponse, elle nous prescrit de
respecter
personnellement certaines règles d'action
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générales comme tenir ses promesses ou ne pas mentir, même lorsque c'est au
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détriment de nos désirs ou de nos intérêts matériels et quelles que soient les
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conséquences sur l'état du monde en général.
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2. Conséquentialisme
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Pour le conséquentialiste, la question morale principale est : « Quel est le meilleur état
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du monde ?». Il nous demande d'œuvrer à la
promotion
du plus grand bien possible. Si,
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en ne respectant pas personnellement les règles d'action que les déontologiques
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prescrivent, comme ne pas mentir ou tenir ses promesses, on aboutit à plus de bien ou à
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moins de mal dans le monde en général, alors il est juste de ne pas les respecter. Ce qui
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compte le plus pour lui, du point de vue moral, c'est que le monde s'améliore ou ne se
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détériore pas en général, et non la «pureté morale» de chacun en particulier.
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3. Éthique des vertus
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L'ami des vertus est moins engagé dans le monde, plus dirigé vers lui-même. Il ne se
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demande pas en priorité : « Que dois-je faire? » ou : « Quel est le meilleur état du
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monde? » mais : « Quel genre de personne dois-je être? » et plus techniquement :
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« Quel genre de caractère est-il bon de posséder ? » Pour apparaître comme une théorie
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morale
indépendante
du conséquentialisme et de la déontologie, ou non
subordonnée
à
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ces dernières, elle doit affirmer qu'être vertueux est le but ultime de la morale et non
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pas seulement un bon
moyen
d'agir justement ou de faire en sorte qu'il y ait le plus de
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bien possible dans l'univers »
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Ruwen OGIEN,
L’éthique aujourd’hui
, Paris, Gallimard, Essais, 2007, pages 62-63.
B. Morale et éthique
« Faut-il distinguer entre morale et éthique ? A vrai dire, rien dans l’étymologie ou
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dans l’histoire de l’emploi des mots ne l’impose : l’un vient du grec, l’autre du latin, et les
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deux renvoient à l’idée de mœurs (
ethos
,
mores
) ; on peut toutefois discerner une nuance,
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selon que l’on met l’accent sur ce qui est estimé bon ou sur ce qui s’impose comme
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obligatoire. C’est par convention que je réserverai le terme d’« éthique » pour la visée d’une
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vie accomplie sous le signe des actions estimées bonnes, et celui de « morale » pour le côté
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obligatoire, marqué par des normes, des obligations, des interdictions caractérisées à la fois
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par une exigence d’universalité et par un effet de contrainte. On reconnaîtra aisément dans
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la distinction entre visée de la vie bonne et obéissance aux normes l’opposition entre deux
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héritages : l’héritage aristotélicien, où l’éthique est caractérisée par sa perspective
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téléologique (de telos, signifiant « fin ») ; et un héritage kantien, où la morale est définie par
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le caractère d’obligation de la norme, donc par un point de vue déontologique
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(déontologique signifiant précisément « devoir ») »
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Paul RICOEUR (1913-2005), « Ethique et morale ». In
Lectures 1. Autour du politique
, Paris,
Seuil ; Points Essais, 1991, p. 258.
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