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Les Soirées-Débats du GREP Midi-Pyrénées
Chine d'hier, Chine d'aujourd'hui
Les grands traits de la
culture chinoise
Bernard BESRET
théologien et philosophe
cofondateur d'un Centre de culture traditionnelle chinoise Qiyunshan (Anhui)
conférence-débat tenue à Toulouse le 22 mars 2014
GREP Midi-Pyrénées
5 rue des Gestes, BP119, 31013 Toulouse cedex 6
Tél : 0561136061 Site : www.grep-mp.fr
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Chine d'hier, Chine d'aujourd'hui
Les grands traits de la
culture chinoise
Bernard BESRET
théologien et philosophe
cofondateur d'un centre de Culture traditionnelle chinoise sur Qiyunshan
(Anhui)
Je suis surpris que vous soyez si nombreux à sacrifier un samedi après-midi
pour entendre parler de la Chine. On ne peut plus ouvrir un journal, un magazine
ou allumer la télévision aujourd’hui, sans qu'on y parle de la Chine. C'est donc
un sujet quelque peu rebattu. Mais si j'ai cependant un titre à en parler, c'est
parce que j'ai eu le privilège d'avoir été adopté par une famille chinoise il y a
presque 17 ans et d'avoir vécu avec elle ses projets, ses déceptions, ses
engagements, d'avoir discuté avec elle culture, politique ou économie. Je n'ai
donc pas le même point de vue que la plupart des journalistes, qui essaient
d'approcher la réalité chinoise, mais vivent en général un peu à l'écart des gens.
C'est ce qui me donne l'audace de venir devant vous pour parler de la Chine
d'hier et d'aujourd'hui.
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La Chine d’aujourd’hui : la diversité chinoise
La première idée qu'il faut chasser de nos têtes, c'est que la Chine formerait un
bloc uniforme. On ne compte pas moins de 33 entités régionales distinctes :
provinces, régions autonomes ou municipalités érigées en entités politiques
autonomes (comme si, en France, Paris et l'Ile de France avaient un
gouvernement unique). Or il y a d'énormes différences entre les provinces.
Diversité géographique
J'ai vécu essentiellement dans deux d’entre elles : celle de Zhejiang, très riche,
au sud de Shanghai, (dont la capitale est Hangzhou). Son développement est si
galopant qu’il en donne le vertige. Puis, plus récemment, dans la province
voisine du Anhui (juste de l'autre coté d'une frontière intérieure) qui a été
longtemps considérée comme l’une des plus pauvres de la Chine. Elle
commence à se développer aujourd’hui grâce au développement du tourisme
chinois. Passer du Zhejiang au Anhui, en quelques kilomètres, vous fait changer
d’univers.
Le Zhejiang est si riche que mon marchand de journaux parisien (qui est
Chinois) accuse les gens de cette province d'être des « Messieurs Gros sous » et
d'accaparer 80 % des richesses du pays. Ce n'est certes pas exact mais on ne
prête qu'aux riches !
Le Anhui voisin est resté pendant des années à la traîne et n’était qu’une région
sous-développée. Cela se voit encore dans les rues : si, à Shanghai, les taxis sont
très modernes, dans le Anhui ce sont encore essentiellement des tricycles. Vous
passez la frontière, et vous changez aussi de culture. L'Anhui est une province
de grande culture : littéraire, calligraphique, architecturale. On passe la frontière,
et l’architecture change du tout au tout, comme en Europe, quand on passe d’un
état à l’autre. On change aussi de dialecte mais en Chine tout le monde
comprend le chinois officiel, du moins sous sa forme écrite. C’est pourquoi
presque toutes les émissions télévisées sont sous-titrées. L’illettrisme est tombé
très bas en Chine. A peu près tout le monde sait lire, même s’il est nécessaire, à
la différence des 25 lettres de notre alphabet, de connaître au moins 3000
caractères chinois pour simplement pouvoir lire le journal quotidien.
Une deuxième source d’unité de ce continent si divers est le partage d’une
même culture qui remonte au moins à cinq millénaires. Notre histoire est
beaucoup plus courte ! C'est comme si, en Europe, nous vivions encore avec la
culture druidique d'avant l'invasion romaine et le christianisme. Cette culture
ancienne opère comme un ciment entre tous les Chinois. Mais cela ne doit pas
cacher que la Chine est une véritable mosaïque de provinces. La Chine du Nord
est traditionnellement opposée à celle du Sud. Et la Chine de l'Est (la banane
côtière) est surdéveloppée, à l’opposé de l'intérieur et surtout du grand Ouest qui
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l'est beaucoup moins. Ensuite, on a une grande différence entre la Chine du Sud
et celle de l'extrême Sud, l'exploitation des ouvriers a été et reste beaucoup
plus accentuée que dans le Nord.
Diversité politique
De plus, le parti communiste chinois ne correspond pas du tout à ce qu'on peut
voir à la télévision lors des Assemblées du peuple les 5000 membres votent
en levant la main en même temps. Le vote des textes se fait bien à l'unanimité.
C’est ce qu’on peut voir sur nos écrans. Mais ce n'est pas la réalité politique de
la Chine. Le parti Communiste chinois compte aujourd'hui environ 80 millions
de membres (plus du double du corps électoral français !) et il est traversé de
courants et de mouvements aussi nombreux qu'il y a de partis dans notre pays.
Mais cela, à l’intérieur d’un seul parti.
Et il y a une quinzaine d'années, le Président de l'époque a introduit une
révolution majeure. Jusqu'alors, le parti était basé sur deux piliers : les ouvriers
et les paysans. Avec le temps, ce sont les apparatchiks de chacune de ces classes
qui se retrouvaient dans les grandes assemblées. Jiang Zemin a eu le courage de
déclarer que, désormais, le parti reposerait sur trois piliers : les ouvriers, les
paysans, et les entrepreneurs privés ! Aujourd'hui, la majorité des membres de
l'Assemblée sont des entrepreneurs privés. Cela change beaucoup de choses : je
ne suis pas sûr que nous en ayons pris conscience en Occident.
Par ailleurs, on dit que le parti communiste chinois est un parti unique, et c'est
vrai. Mais il y a quand même huit petits partis autorisés. Même si leur liberté de
mouvement est limitée du fait de cette « autorisation ». Je travaillais pour la Cité
des Sciences de Shanghai, (qui s'appelle maintenant Musée scientifique et
technique de Pudong) j'avais comme interlocuteur le directeur des relations
internationales. Un jour, il me dit : « Je quitte la Cité des Sciences, et je deviens
le Secrétaire général du Parti démocratique chinois pour Shanghai. » En bon
Occidental, je m'étonnai : « un parti mocratique chinois ? » Il m'expliqua qu'il
y avait huit partis, limités dans leur développement, parce qu'ils ne pouvaient
pas augmenter le nombre de leurs adhérents de plus de 5 % par an (mais sur un
nombre déjà augmenté d'autant l'année précédente, cela finit par faire du
monde… ) Et il ajouta que ces petits partis étaient très actifs dans les
commissions. Le travail de l'Assemblée chinoise se fait comme chez nous avant
tout dans les commissions les petits partis sont comme des aiguillons, plus
libres de penser. Son parti est plus spécialisé dans les problèmes sanitaires. Il me
raconta qu'au moment de l'apparition du sida en Chine, c'est eux qui avaient
aiguillonné sans cesse la commission compétente pour qu'elle prenne des
mesures, alors que la grosse structure du parti communiste aurait laissé courir
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