Préface de Matthieu Ricard
Au cours des trente dernières années, Jon Kabat-Zinn a apporté une contribution
unique au monde de la santé, principalement en Amérique du Nord et, plus récemment,
sur les autres continents. Il a conçu et mis en place dans plusieurs centaines d'hôpitaux
une méthode pour réduire le stress dû à la maladie, aux douleurs chroniques, au choc
postopératoire et à nombre de traitements pénibles. Cette approche, qu’il a affinée à
mesure que ses applications prenaient de l'ampleur, est connue sous les initiales MBSR,
abréviation de "Mindfulness Based Stress Reduction", ou "réduction du stress basée sur le
pleine conscience". Cette méthode, qui est maintenant tout à fait intégrée au service
hospitalier, a véritablement révolutionné la manière dont de nombreux patients traversent
l'expérience de la maladie et de la douleur physique.
Conçu initialement pour des patients qui n'étaient pas suffisamment soulagés par les
traitements à leur portée - ce qui s'est avéré représenter beaucoup de monde -, ce
programme attira rapidement un éventail de plus en plus large de patients, puis de
soignants, au sein de l'hôpital. Aujourd'hui, la MBSR a trouvé une place légitime dans les
centre médicaux universitaires comme les hôpitaux, et les pratiques ne sont plus
considérées comme relavant de médecines alternatives, mais tout simplement comme de
la bonne médecine.
Aux États-Unis, plus de deux cents hôpitaux proposent à leurs patients, ainsi qu'au
personnel soignant, des programmes de MBSR. D'autres programmes ont vu le jour en
Amérique du Sud, à Hong-Kong, en Afrique du Sud, en Australie et en Nouvelle-Zélande
dans des établissements renommés. Un nombre sans cesse croissant de scientifiques
mènent des recherches cliniques sur l'application de la pleine conscience en médecine et
en psychologie. L'exercice de la pleine conscience a aussi été associée aux techniques de
thérapie cognitive. La thérapie cognitive basée sur la pleine conscience, la MBCT, s'est
révélée très concluante lors de plusieurs essais clinique et éveille beaucoup d'intérêt dans
les cercles de psychologie clinique. Elle diminue notamment de 50% le risque de rechute
chez les patients ayant déjà subi au moins deux épisodes de dépression grave.
Comme l'explique Jon Kabat-Zinn, "compte tenu de toute la souffrance que les
hôpitaux attirent, on pourrait se demander : "Quel meilleur endroit pour proposer un
programme d'entraînement en pleine conscience, décrite par le Bouddha en personne
comme la voie directe pour surmonter peines et chagrins, et dissiper souffrances et
insatisfactions, en un mot pour soulager la souffrance ? La pleine conscience, si elle est
aussi puissante, fondamentale et universelle que le soutenait le Bouddha, ferait-elle
sensiblement du bien à la majorité des gens qui franchissent ces portes debout ou
allongés ?" Bien entendu, il ne s'agit pas d'un substitut à des soins médicaux bons et
compatissants, mais d'un complément potentiellement vital aux traitements qu'ils
pourraient recevoir. Et quel meilleur endroit pour proposer un tel programme
d'entraînement aux patients, mais également au personnel qui, dans bien des cas, n'est
pas moins stressé que les patients ?" et encore : "Et par-dessus tout, peut-être qu'il
venaient, et restaient, parce que nous parvenions quelque part à créer une atmosphère
qui incitait à une écoute profonde et chaleureuse, une atmosphère que les participants
pouvaient identifier immédiatement comme bienveillante, empathique, respectueuse et
acceptante. Comme tonalité affective, malheureusement, est souvent bien trop rare dans
les centre médicaux très fréquentés."
La méditation en pleine conscience est maintenant enseignée dans les cabinets
juridiques et proposée aux étudiants en droit des Universités de Yale, de Columbia, de
Harvard, du Missouri et d'ailleurs. Des prisons proposent également des programmes de
méditation à leur détenus comme à leurs employés, aux États-Unis, mais également dans