Les conséquences économiques et sociales de la Première Guerre

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Les conséquences économiques et sociales de la Première Guerre mondiale
Etudier la façon dont la Première Guerre mondiale a bouleversé les économies et sociétés européennes
de 1914 à la signature des traités de paix, mais également l'échec des Européens après 1919 à proposer
un système économique ou des mesures sociales adaptés à un monde très différent de celui d'avant
1914, et les conséquences de cet échec tout au long des années 1920 et 1930, jusqu'au déclenchement
de la Guerre suivante.
Principale difficulté : étudier de front économie et société en citant des exemples pris dans toute
l'Europe. .
Autre difficulté : éviter le hors-sujet en faisant une histoire générale de l'Europe entre 1918 et 1939
Bornes chronologiques : compliqué de bien traiter le sujet sans aller au moins jusqu'au début des
années 1930, qui voient le système mis en place en 1919 complètement bouleversé, de l'abandon de
l'étalon-or par les Britanniques en 1931 à la fin de la démocratie et l'avènement d'une société totalitaire
dans le plus peuplé des États d'Europe en 1933. Aller jusqu'à la fin des années 1930 (dernière souspartie sur la montée à la guerre)
Première Guerre mondiale (1914-1918) conflit entre les empires allemand, austro-hongrois et ottoman
et la majorité des autres États européens, qualifié de mondial car des combats eurent lieu dans les
empires coloniaux et que la majorité des États alors indépendants se sont engagés d'un côté ou de
l'autre, mais qui a surtout concerné l'Europe, où eurent lieu la majorité des combats. Guerre totale=
mobilisation totale des économies et des sociétés en vue de l'effort de guerre.
Conséquences économiques et sociales Impact qu'eut la guerre durant celle-ci et ensuite sur la
production/consommation de biens, la répartition des richesses, les rapports entre les classes sociales
et les rapports entre les Européens (hiérarchies économiques). Sujet qui conduit à ne pas insister sur
les conséquences politiques ou diplomatiques, bien que celles-ci doivent être connues et devront être
évoquées incidemment.
Montrer en quoi l'incapacité des décideurs européens à apporter des solutions économiques et sociales
nouvelles à une crise inédite a empêché l'Europe de faire disparaître après 1918 les fragilités qui
avaient conduit à la Première Guerre mondiale.
I.
II.
III.
Conséquences immédiates de la Première Guerre mondiale sur l'Europe, tant qu'elle a lieu et
dans les mois suivant l'armistice de novembre 1918.
Solutions marquées par la nostalgie de l'avant 1914 appliquées par les dirigeants européens
pour résoudre les problèmes créés par la Guerre.
Décisions, pas toujours adaptées aux défis apparus après 1918, ont pu conduire à aggraver les
problèmes de l'Europe à partir de la fin des années 1920.
I. L’Europe déstructurée par la Guerre (1914-1920)
1) Une guerre totale au bilan humain et économique catastrophique [sous-partie « tableau »]
a) Des conséquences humaines importantes
Mobilisation massive + combats intenses, longs et armement plus destructeur que jamais : bilan
humain très lourd (10 millions de soldats et 9 millions de civils tués, 21 millions de blessés dont de
nombreux invalides) qui détruit des familles entières et touche principalement des hommes jeunes
(« générations sacrifiées »).
→ Handicap à moyen terme pour les États les plus touchés : vieillissement de la population,
déséquilibre entre les sexes, baisse de la natalité, etc.
Ex : inégalité du bilan matériel et humain cf tableau brochure p. 14 : (1) URSS 2) All 3) France
b) Des combats dévastateurs et coûteux
Localement, des régions entières dévastées le long des lignes de front sur plusieurs kilomètres (Est de
la France, Grève) voire plus largement lorsque les fronts sont moins statiques (Roumanie). Cela limite
la production durant la guerre et conduit à des coûts importants de reconstructions.
De même la production d'armes et soldes des combattants, puis les paiement des pensions après 1918
→ accumulation de dépenses pour tous les États.
Ex : texte d'Albert Demangeon différence entre les zones de combats (à illustrer) / celles qui ont été
épargnées + tableau p.13
2) L'économie de guerre : entre solutions éprouvées et innovations
a) Des difficultés d’approvisionnement en marchandise et de financement
Avant 1914, malgré protectionnisme, échanges importants entre les États qui sont limités par la guerre
(blocus des ports russes, développement des sous-marins).
→ Déficit croissant des balances commerciales pour les États qui parviennent à importer (tableau
p.15).
Coût de la guerre financé par l'impôt (surtout au RU), l'emprunt interne (bons du trésor) et externe
(surtout aux ÉU et RU, la vente d'avoirs étrangers (France et RU premiers investisseurs mondiaux
avant 1914)
→ accroissement très important des dettes des belligérants ; déstabilisation de la monnaie et fin du
système d'étalon-or à cause du recours croissant à l'inflation, dès 1916 et jusqu'en 1920-21(texte de
Keynes, p.19) ; États appauvris et épargnants/rentiers touchés dans tout l'Europe.
Ex : dettes de guerre tableau de la brochure p.13 et texte et tableaux d'A.Demangeon
b) Transformations des appareils productifs et mutations de la main d'œuvre
Industrie lourde avantagées par rapport aux biens de consommation.
→ pénuries et rationnements dans plusieurs pays.
Diminution de la main d'œuvre disponible (mobilisation et mortalité)
→ importance croissante du travail des femmes dans des secteurs auparavant considérés comme
masculins (automobile, armement) même si à la campagne le changement apparaît moins grand (si
elles ne dirigeaient pas les exploitations, elles y travaillaient déjà avant 1914)
3) De l'union sacrée aux troubles sociaux
a) Des sociétés d'abord unies...
Européens imaginent d'abord une guerre courte, d'où un relatif soutien à celle-ci à une époque de
nationalismes exacerbés.
Gouvernements d'union nationale qui censurent la presse, le courrier et développent tout un arsenal
propagandiste.
b) ...avant une multiplication des tensions
Acceptation initiale laisse progressivement place à un rejet croissant lié à l'aggravation du bilan malgré
la stagnation des fronts (mutineries de 1917), aux pénuries, à l'accroissement du coût de la vie, au
contrôle social parfois étouffant, etc.
→ grèves, influence dans l'immédiat après-guerre de l'URSS dans des soulèvement insurrectionnels
qui échouent mais montrent l'importance de la recherche de modèles alternatifs (spartakisme, Bela
Kun) et la création de partis communistes qui ne parviennent pas à prendre le pouvoir mais
commencent localement à s'implanter.
La Première Guerre mondiale a déstructuré les économies et sociétés européennes d'une manière
inédite. Après la Première Guerre mondiale, les pays européens se mettent à considérer la période
précédant 1914 comme un âge d'or, appelé « Belle Époque » par les francophones d'Europe. Les
décideurs, avec le soutien tacite de leurs populations, cherchent donc à revenir à la situation d'avantguerre : stabilité monétaire, libéralisme économique peu régulé, progrès sociaux mesurés, etc.
II. La reconstruction de l'Europe : les limites de la nostalgie de la « Belle Époque » (années 1920)
1) Une relance de l'économie marquée
Les États vainqueurs cherchent à la fois à reconstituer l'appareil productif endommagé (France,
Belgique, Pologne), à rembourser leurs dettes et à faire revenir les niveaux de productions industrielles
et d'échange à ceux d'avant 1914.
a) La volonté de faire payer la reconstruction à l'Allemagne
Cela les conduit à vouloir faire payer à l'Allemagne le coût de cette reconstruction (art. 231 traité de
Versailles, occupation de la Ruhr) → conséquences désastreuse pour la propre reconstruction
économique de ce pays et pour ses habitants (crise inflationniste de 1923, tensions politiques).
Malgré le rééchelonnement de la dette allemande (plans Dawes et Young), l'idée que « l'Allemagne
paiera » reste constante tout au long des années 1920, d'autant que les États-Unis n'acceptent pas
l'annulation de leur dette, même s'ils consentent à des renégociations (accords Mellon-Béranger).
Autre constante de la politique européenne : obsession du retour à la stabilité monétaire et à l'étalon-or
(conférence de Gênes, 1922), concrétisé de manière partielle (système d'étalon de change-or plus que
d'étalon-or) autour de quelques monnaies principales qui dominent des zones économiques (livre
sterling convertible en 1925, franc français en 1928 après forte dépréciation, reichsmark qui influence
plusieurs monnaies d'Europe de l'Est).
Globalement, l'inflation se stabilise dans les années 1920, les dettes diminuent, les balances
commerciales deviennent moins déséquilibrées.
b) La reprise économique des années 1920
Adoption de nouvelles méthodes de production, rationalisation, diffusion du modèle américain,
nouveaux secteurs d'activité.
Ex : Citroën, un fordisme à la française
2) Des aspirations au changement social partiellement prises en compte
a) Une volonté changement dans les sociétés européennes
Importance des mouvements d'anciens combattants qui selon les États défendent des idées différentes :
pacifisme et idées conservatrices dans les pays vainqueurs (qui conduit à refuser la guerre à tout prix) ;
idées de revanches en Allemagne ou en Italie où de nombreux anciens combattants s'estiment frustrés
par les traités de Paix et réclament une transformation radicale de la société pour restaurer la grandeur
du pays. Groupes d'intérêts puissants qui influent sur les politiques nationales autant que d'autres
comme les syndicats.
Au sein des États tensions entre les groupes sociaux qui s'estiment les plus touchés (paysans, ouvriers
non qualifiés) et les autres d'où contestation sociale toujours importante (grève générale de 1926 au
RU).
Ex des diverses mesures prises pour satisfaire leurs revendications : loi des huit heures adoptée dans
plusieurs pays dans l'immédiat après-guerre [brochure p.16-18] ; assurance-chômage (partielle au RU
en 1920 ; Allemagne 1927) ; réformes foncières en Europe de l'Est aux conséquences mitigées
(conflits d'intérêts et traille maximale des exploitations trop haute en Pologne ; parcellisation extrême
pour les petits paysans mais maintien de grandes propriétés et réforme plus sévère pour les
propriétaires hongrois ethniques en Pologne, etc.).
b) Des sociétés qui restent proches de l'avant-guerre
Les bouleversements culturels liée à la volonté de surmonter le traumatisme de la guerre par une joie
de vivre exacerbée (« années folles ») concernent surtout une élite urbaine éduquée et/ou riche : pour
la majorité des Européens, pas d'éducation supérieure, et loisirs de masse similaires à avant 1914
(apogée de la presse, poursuite de la diffusion du cinéma, etc.).
Les tendances de fonds (urbanisation ; diminution de la population active agricole ; taylorisation du
travail industriel) se poursuivent mais la situation reste toujours très contrastée entre États urbanisés
(Bénélux, RU) États intermédiaires (France, Hongrie) et États ruraux (Portugal, Bulgarie).
La féminisation de la main d'œuvre initiée par la guerre n'empêche pas un retour rapide à la situation
d'avant-guerre dans les industries considérées comme masculines ; l'imagerie d'après-guerre (visible
notamment sur les monuments aux morts) reste très traditionnelle (infirmière, mère aimante, veuve
éplorée, etc.) ; cependant, dans plusieurs États, et alors que ça n'était le cas qu'en Scandinavie, droit de
vote accordé (1918 Hongrie, RU, Autriche, Allemagne ; 1919 Bénélux ; 1922 Irlande) mais parfois de
manière partielle (RU statut aligné sur celui des hommes après 10 ans), et peu d'évolutions après 1922.
3) Un système fragile et critiqué
a) Un redémarrage économique qui masque des vulnérabilités
La volonté de faire financer la reconstruction par l'Allemagne comme les politiques déflationnistes
sont critiquées par des penseurs même libéraux comme Keynes qui met en avant les risques de
déstabilisation du continent (malgré la création d'organisations et conférences internationales, et une
atmosphère parfois extrêmement optimisme : pacte Briand-Kellogg), les dangers de la stagnation des
revenus sur la consommation et la production, les risques liés au chômage (10 % au RU, faible en
France mais stats peu fiables).
La grande dépendance au crédit américain, notamment pour les banques d'Europe de l'Est, entraîne
une autre vulnérabilité en cas de crise américaine.
b) Des conséquences variées sur l'Europe
À l'Ouest et au Nord, régimes démocratiques qui ont des difficultés à revenir à la situation d'avant
guerre et sont contestés ; dans plusieurs pays de l'Est (Hongrie, Pologne, Yougoslavie) et en Espagne,
des régimes autoritaires s'appuyant sur l'armée exaltant des valeurs traditionnelles et conservatrices ;
en Italie fascisme qui prône la régénération d'une société mobilisée par une idéologie de grandeur
nationale associant valeurs martiales, modernisme et nostalgie de l'empire romain.
« Années folles » vues des quartiers animés de Paris ou de Londres, les années 1920 apparaissent
comme les années d'un chômage localement important, d'une stagnation des droits sociaux, et d'un
système monétaire où les principales devises européennes apparaissent de moins en moins puissants
face aux dollars. Les mesures prises pour redresser l'Europe semblent donc la laisser fortement
vulnérable.
III. Une Europe qui reste instable faute d'une résolution satisfaisante des problèmes de l'aprèsguerre (années 1930)
1) Un système économique qui ne survit par à la crise de 1929
a) L'effondrement du système financier et économique
Importance des banques américaines en Allemagne et Europe de l'Est précipite la débâcle des banques
de ces pays ; raréfaction de l'accès au crédit, contraction mondiale de la demande et baisse des prix
touchent l'ensemble des États européens : fermetures d'usines, baisse des salaires, diffusion du
chômage. Or poursuite dans un premier temps des politiques déflationnistes dans la lignée de la doxa
économique d'après 1918 qui conduit à aggraver la crise.
b) L'abandon progressif du modèle de Gênes
Adaptation assez rapide des britanniques et de la zone sterling avec suspension de la convertibilité en
or et dévaluation dès 1931. Permet un avantage comparatif pour le Royaume-Uni durant quelques
mois mais efficacité diminue à mesure que les autres monnaies sont dévaluées. Désavantage le franc,
qui fait l'objet de spéculation et n'est dévalué qu'en 1936. Dans tous les cas ces mesures sont
présentées comme provisoires et liées à l'intensité exceptionnelle de la crise ; le retour à l'étalon de
change-or une fois celle-ci achevée reste présent dans les discours.
Ex : l'interventionnisme, nouvel état d'esprit britannique (TD)
c) Des politiques de relance encore limitées
Politiques de soutien à la consommation mises en place progressivement et avec parcimonie,
protection des chômeurs reste faible même si des États comme la Suède y accordent une grande
importance. Absence de réponses aux revendications sociales conduisent en France à la première
victoire d'une coalition menée par le parti socialiste
2) Un consensus démocratique de plus en plus contesté
a) Un rejet croissant du modèle démocratique
Dans plusieurs États, stagnation économique des années 1920 puis crise sont mis au discrédit de
gouvernements perçus comme faibles : de nouveaux États autoritaires dirigés par un homme fort,
qu'ils soient conservateurs (Bulgarie, Albanie, Grèce) ou mettent en avant une volonté de transformer
la société dans une optique conservatrice et nationaliste (Portugal, Autriche). Consensus social autour
de valeurs perçues comme garantes de stabilité, au détriment de libertés individuelles qui ne sont pas
forcément au cœur des préoccupations populaires. Mouvements similaires dans certains États
démocratiques (manifestations du 6 février 1934 en France).
b) Des tentatives de rénovation plus profondes de la société
Italie fasciste ou Allemagne nazie : régime nés notamment de la frustration populaire face à la
résolution de la guerre et marqués par la volonté de mettre en place un monde nouveau sans pour
autant rejeter la guerre, particulièrement exaltée en Italie, et dont la préparation est au cœur du
développement économique allemand à partir de 1934. Dans les deux cas, organisation sociale qui
prétend éviter la lutte des classes et les tensions agitant les démocraties, avancées comme une des
causes du déclin du pays, par la mobilisation derrière une idéologie nationaliste incarnée par un
homme fort. Mobilisation complète de la société à l'opposé des idéaux libéraux.
3. La marche à la guerre
Plans de relance tournés vers la guerre (All) / politique
Montée des tensions à l'échelle européenne, formation des alliances.
coupable
d'appeasement.
Ex : All, la reprise par la militarisation (dossier TD)
Conclusion
La volonté manifestée en 1918 par les États vainqueurs de reconstruire l'Europe sur les bases du
système d'avant-guerre et en faisant payer l'Allemagne a conduit à un développement de plus en plus
différencié de l'Europe aussi bien en termes économiques que sociaux : dans les années 1930, les
modèles politique qui ont découlé de ces mesures s'opposent de plus en plus frontalement, jusqu'à
conduire en 1939 l'Europe à un nouveau conflit de grande ampleur.
Dès les premières années de cette guerre, une réflexion est entamée dans les pays anglo-saxons pour
réfléchir à une résolution de celle-ci qui ne puisse conduire à un nouveau conflit dans les décennies
suivantes. Les mesures appliquées après 1945 (ne pas entraver la reconstruction allemande ;
intégration croissante de l'Europe ; diffusion d'un État-Providence plus ambitieux) sont directement
issues des conséquences perçues comme négatives de la Première Guerre mondiale.
Si les particularités de la situation géopolitique de la fin des années 1940, avec une Europe de l'Est
passée sous influence soviétique, rendent difficile la comparaison des conséquences des deux guerres,
l'Europe d'après 1945 après plus unanimement pacifiste, plus soucieuse d'un développement
économique et politique commun au sein de chaque bloc, et plus ambitieuse en termes de
transformation des sociétés, ce qui apparaît comme l'une des dernières conséquences importantes de la
Première Guerre mondiale.
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