FACULTÉ DE MÉDECINE HENRI WAREMBOURG Saisonnalité et

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UNIVERSITÉ DU DROIT ET DE LA SANTÉ - LILLE 2
FACULTÉ DE MÉDECINE HENRI WAREMBOURG
Année : 2014
THÈSE POUR LE DIPLÔME D’ÉTAT
DE DOCTEUR EN MÉDECINE
Saisonnalité et Trouble Bipolaire
Présentée et soutenue publiquement le 11 avril 2014 à 18 heures
au Pôle Recherche
Par Pierre Alexis GEOFFROY
_______________
JURY
Président :
Monsieur le Professeur Pierre THOMAS
Assesseurs :
Monsieur le Professeur Guillaume VAIVA
Monsieur le Professeur Olivier COTTENCIN
Monsieur le Professeur Frank BELLIVIER
Directeur de Thèse :
Monsieur le Docteur Renaud JARDRI
_______________
GEOFFROY Pierre Alexis
« Mon bon Henri, j’interromps un moment mon article sur Lecomte de Lisle, pour t’écrire
vingt lignes. (...) Emmanuel t’avait peut être parlé d’une stérilité curieuse que le printemps
avait installé en moi. Après trois mois d’impuissance, j’en suis enfin débarrassé, et mon
premier sonnet est consacré à la décrire, c’est-à-dire à la maudire. »
Correspondance de Stéphane Mallarmé
adressée à son ami Henri Cazalis
4 juin 1862
« C’est dans l’orbite de la biologie et de la médecine que la notion de maladie mentale doit
se mouvoir. »
Henri Ey
Défense et illustration de la psychiatrie,
Masson éditions, 1978, P.5.
10
GEOFFROY Pierre Alexis
TABLE DES MATIÈRES
I.
SAISONNALITÉ ET TROUBLE BIPOLAIRE : SYNTHESE DE LA
LITTÉRURE SCIENTIFIQUE INTERNATIONALE......................................................12
A.
Introduction....................................................................................................13
B.
Méthode de la revue systématique de la littérature....................................14
1. Définition du trouble bipolaire et de la saisonnalité...................................14
2. Stratégie de recherche bibliographique.......................................................25
3. Processus de sélection des études..................................................................25
C.
Résultats..........................................................................................................27
1. Recherche bibliographique...........................................................................27
2. Analyse de la saisonnalité par les études sur l’utilisation des services de
santé.....................................................................................................................27
3. Polarité des épisodes et corrélation avec les variables climatiques...........31
4. Analyse du caractère saisonnier selon les critères DSM............................35
5. Analyse dimensionnelle de la saisonnalité dans le TB................................37
D.
Discussion........................................................................................................41
E.
Conclusion.......................................................................................................49
II.
PREMIER TRAVAIL EXPÉRIMENTAL : CARACTÉRISTIQUES
CLINIQUES DU TROUBLE BIPOLAIRE ASSOCIÉES AU CARACTÈRE
SAISONNIER DU DSM-IV..................................................................................................50
A.
Introduction....................................................................................................51
B.
Méthode...........................................................................................................53
C.
Résultats..........................................................................................................56
D.
Discussion........................................................................................................62
E.
Conclusion.......................................................................................................67
III.
SECOND TRAVAIL EXPÉRIMENTAL : ÉVALUATION DIMENSIONNELLE
SAISONNIÈRE DES CARACTÉRISTIQUES CLINIQUES DU TROUBLE
BIPOLAIRE...........................................................................................................................68
A.
Introduction....................................................................................................69
B.
Méthode...........................................................................................................70
C.
Résultats..........................................................................................................73
D.
Discussion........................................................................................................80
E.
Conclusion.......................................................................................................82
IV.
CONCLUSION GÉNÉRALE...................................................................................83
V.
BIBLIOGRAPHIE.....................................................................................................85
VI.
ANNEXES...................................................................................................................93
11
GEOFFROY Pierre Alexis
I.
SAISONNALITÉ ET TROUBLE BIPOLAIRE :
SYNTHESE DE LA LITTÉRURE SCIENTIFIQUE INTERNATIONALE
12
GEOFFROY Pierre Alexis
A.
INTRODUCTION
Le trouble bipolaire (TB) est une maladie psychiatrique sévère et cyclique, faite de
récurrences d’épisodes de l’humeur dits « maniaques » ou « dépressifs ». Ces épisodes se
définissent par des changements à la fois de l’humeur et des changements de l’activité ou de
l’énergie qui sont augmentés dans la manie ou diminués dans la dépression (1). Le TB
regroupe un ensemble de maladies de l’humeur aux présentations cliniques hétérogènes. On
définit classiquement selon le Diagnostic and Statistical Manual for Mental Disorders 5
(DSM, 5e édition) produit par l’association psychiatrique américaine : le TB de type I (définit
par des épisodes maniaques et dépressifs, ce sous-type de TB peut être diagnostiqué sur la
base d’un seul épisode maniaque), le TB de type II (définit par la présence d’épisodes
dépressifs et d’épisodes hypomaniaques qui n’ont pas réunis les critères de l’épisode
maniaque), la cyclothymie (définit par des périodes associant des symptômes hypomaniaques
et dépressifs qui n’ont pas réunis les critères de l’épisode dépressif majeur), et le TB non
spécifié (définit par des symptômes hypomaniaques et dépressifs qui ne réunissent pas les
critères diagnostics des sous-types définis précédemment) (2).
Le TB est une maladie fréquente qui touche 1% de la population générale si l’on
considère le TB dit de type I et II, et dont la prévalence va jusqu’à 4,4% si l’on considère le
spectre plus élargi du TB (3). Ces estimations sont plutôt conservatrices puisqu’il existe un
taux important d’erreurs diagnostiques allant de 30% à 69% en Europe et aux États-Unis (4).
D’autre part il existe un retard diagnostic catastrophique d’en moyenne 10 ans chez les
patients atteints de TB (5).
13
GEOFFROY Pierre Alexis
La physiopathologie du TB est complexe et associe des facteurs de risque génétiques
et environnementaux (6). Il est également démontré que cette maladie est de nature
neurodéveloppementale et qu’elle s’associe à un début du trouble avant 21 ans pour la moitié
des sujets atteints (7). La sévérité du TB est telle que le TB est le 4e contributeur de la charge
mondiale de morbidité générale (tous âges confondus) parmi les maladies mentales,
neurologiques et d’usage de substances (8). La sévérité et le pronostic de cette maladie est en
partie liée à un taux élevé de récurrences des épisodes de l’humeur avec 70 à 80% de rechutes
en moyenne à 2 ans après un épisode majeur et ce malgré le traitement (9,10). Ces
récurrences peuvent suivre une cyclicité saisonnière, ce qui n’est pas rare puisque 25% des
sujets avec TB semblent présenter une saisonnalité de leurs épisodes dépressifs et 15%
d’entre eux présentent une cyclicité de leurs épisodes maniaques (11,12). La vulnérabilité
circadienne du TB est telle qu’en plus de cette cyclicité des épisodes, des anomalies des
rythmes chronobiologiques apparaissent chez les patients avec TB lors de toutes les phases de
la maladie (13). Ainsi, des perturbations du sommeil et des rythmes circadiens sont présentes
pendant les épisodes (insomnie, hypersomnie, réduction du besoin de sommeil), pendant les
phases de stabilité de l’humeur (anomalies veille/sommeil, hypersensibilité aux perturbateurs
des rythmes, chronotype davantage du soir, anomalies biochimiques de sécrétion telle que
pour la mélatonine et le cortisol, hypersensibilité mélatoninergique à la lumière) et précèdent
également les rechutes thymiques pouvant ainsi prédire celles-ci (13). Certaines de ces
anomalies du sommeil et des rythmes circadiens ont pu être associées à des vulnérabilités
génétiques circadiennes (13,14). Plusieurs études ont ainsi évoqués la présence d’anomalies
infradiennes (cycles > 24 heures) et notamment saisonnières de ces rythmes
comportementaux et physiologiques dans le TB (15).
14
GEOFFROY Pierre Alexis
L’étude de l’effet des saisons dans le TB est donc une question vaste dont il existe
une littérature complexe et hétérogène mêlant différents niveaux d’évaluation et différentes
méthodologies d’analyse. Nous avons pris ici le parti de s’intéresser à l’expression clinique
de la saisonnalité dans le TB et ouvrons ce travail de thèse sur une revue de la littérature afin
de dresser un état de l’art sur cette question. Une première revue rapide de la littérature
permet de dégager 3 approches ou perspectives qui ont été historiquement utilisées dans
l’analyse de la saisonnalité dans le TB. La première perspective est macroscopique et
implique l’analyse des registres de soins (hospitaliers, cliniques, externes) et les taux
saisonniers d’admission à l’hôpital pour un épisode de l’humeur. La seconde perspective est
la plus microscopique des trois et se définit par une analyse dimensionnelle à travers les
saisons des symptômes associés au TB. Enfin, la troisième approche est intermédiaire et
catégorielle en prenant pour outil la définition du caractère saisonnier du DSM.
Nous avons effectué une revue systématique de tous les articles issus la littérature
scientifique internationale de ces 40 dernières années et relatifs aux variations saisonnières
dans le TB. Afin de rendre cette littérature intelligible, nous avons choisi de la classer en trois
« niveaux » de perspective d’étude de la saisonnalité : macroscopique, intermédiaire et
microscopique.
15
GEOFFROY Pierre Alexis
B.
MÉTHODE DE LA REVUE SYSTÉMATIQUE DE LA LITTÉRATURE
1.
Définition du Trouble Bipolaire et de la saisonnalité
a)
Trouble Bipolaire
Dans ce travail, le TB a été défini selon les critères internationaux de l’ ICD (9 ou 10)
ou du DSM (III ou IV) (16,17). Ce diagnostic devaient être porté par des psychiatres ou des
psychologues entraînés et utilisant des critères DSM/ICD au cours de leur entretien
systématisé.
Tableau 1. Rappel des définitions du trouble bipolaire I et II selon le DSM-IV-TR
Sous-types de
Troubles
Bipolaires
Type I = survenue d'un ou plusieurs épisode(s) maniaque(s) ou mixte(s)
(Épisode mixte : critères d'un épisode maniaque et d'un épisode dépressif
majeur rencontrés simultanément).
Le diagnostic peut être posé même en l’absence de trouble dépressif.
Il peut y avoir des épisodes hypomaniaques.
Sans cause organique, iatrogénique ou toxique.
Type II = survenue d’un ou plusieurs épisode(s) hypomaniaque(s)
et un ou plusieurs épisodes dépressifs majeurs
Sans cause organique, iatrogénique ou toxique.
Épisode
Maniaque
A. Période nettement délimitée durant laquelle l’humeur est élevée de façon
anormale et persistante, pendant au moins une semaine (ou toute autre durée
si une hospitalisation est nécessaire).
B. Au cours de cette période de perturbation de l’humeur, au moins 3 des
symptômes suivants (4 si l’humeur est seulement irritable) ont persisté avec
une intensité suffisante :
1) Augmentation de l’estime de soi ou idées de grandeur
2) Réduction du besoin de sommeil (p. ex. le sujet se sent reposé après
seulement 3 heures de sommeil)
3) Plus grande communicabilité que d’habitude ou désir de parler
constamment
4) Fuite des idées ou sensations subjectives que les pensées défilent
5) Distractibilité (p. ex. l’attention est trop facilement attirée par des
16
GEOFFROY Pierre Alexis
stimuli extérieurs sans importance ou insignifiants)
6) Augmentation de l’activité orientée vers un but (social, professionnel,
scolaire ou sexuel) ou agitation psychomotrice
7) Engagement excessif dans des activités agréables mais à potentiel élevé
de conséquences dommageables (p. ex. la personne se lance sans retenue
dans des achats inconsidérés, des conduites sexuelles inconséquentes ou des
investissements commerciaux déraisonnables)
C. Cette perturbation ne répond pas aux critères d’un épisode mixte.
D. La perturbation de l’humeur est suffisamment sévère pour entraîner une
altération marquée du fonctionnement professionnel, des activités sociales
ou des relations interpersonnelles, ou pour nécessiter l’hospitalisation afin
de prévenir des conséquences dommageables pour le sujet ou pour autrui,
ou bien il existe des caractéristiques psychotiques.
E. Les symptômes ne sont pas dus aux effets physiologiques directs d’une
substance (p. ex. substance donnant lieu à abus, médicament ou autre
traitement) ou d’une affection médicale générale (p. ex. hyperthyroïdie).
Épisode
A. Période nettement délimitée durant laquelle l'humeur est élevée de façon
Hypomaniaque persistante, expansive ou irritable, clairement différente de l'humeur non
dépressive habituelle, et ce tous les jours pendant au moins 4 jours.
B. Au cours de cette période de perturbation de l'humeur, au moins 3 des
symptômes décrits (quatre si l'humeur est seulement irritable) ont persisté
avec une intensité significative :
1) augmentation de l'estime de soi ou idées de grandeur.
2) réduction du besoin de sommeil
3) plus grande communicabilité que d'habitude ou désir de parler
constamment.
4) fuite des idées ou sensations subjectives que les idées défilent.
5) distractibilité
6) engagement excessif dans des activités agréables mais à potentiel élevé de
conséquences dommageables
C. L'épisode s'accompagne de modifications indiscutables du
fonctionnement, qui diffère de celui du sujet hors période symptomatique.
D. La perturbation de l'humeur et la modification du fonctionnement sont
manifestes pour les autres.
E. La sévérité de l'épisode n'est pas suffisante pour entraîner une altération
marquée du fonctionnement professionnel ou social, ou pour nécessiter
l'hospitalisation, et il n'existe pas de caractéristiques psychotiques.
F. Les symptômes ne sont pas dus aux effets physiologiques directs d'une
substance ou d'une affection médicale générale.
17
GEOFFROY Pierre Alexis
Épisode
Dépressif
Majeur
A. Au moins 5 des symptômes suivants doivent être présents pendant une
même période d’une durée de deux semaines et avoir représenté un
changement par rapport au fonctionnement antérieur; au moins un des
symptômes est soit une humeur dépressive, soit une perte d’intérêt ou de
plaisir.
1) Humeur dépressive présente pratiquement toute la journée, presque tous
les jours signalée par le sujet (par exemple : se sent triste ou vide) ou
observée par les autres (par exemple : pleure).
NB : Éventuellement irritabilité chez l’enfant ou adolescent.
2) Diminution marquée de l’intérêt et du plaisir pour toutes ou presque toutes
les activités, pratiquement toute la journée, presque tous les jours (signalée
par le sujet ou observé par les autres)
3) Perte ou gain de poids significatif en absence de régime (par exemple :
modification du poids corporel en 1 mois excédant 5%) ou diminution ou
augmentation de l’appétit presque tous les jours.
NB : Chez l’enfant prendre en compte l’absence de l’augmentation de poids
attendue.
4) Insomnie ou hypersomnie presque tous les jours
5) Agitation ou ralentissement psychomoteur presque tous les jours (constaté
par les autre, non limités à un sentiment subjectif de fébrilité ou de
ralentissement intérieur).
6) Fatigue ou perte d’énergie presque tous les jours
7) Sentiment de dévalorisation ou de culpabilité excessive ou inappropriée
(qui peut être délirante) presque tous les jours (pas seulement se faire prier
ou se sentir coupable d’être malade).
8) Diminution de l’aptitude à penser ou à se concentrer ou indécision
presque tous les jours (signalée par le sujet ou observée par les autres)
9) Pensées de mort récurrentes (pas seulement une peur de mourir), idées
suicidaires récurrentes sans plan précis ou tentative de suicide ou plan précis
pour se suicider.
B. Les symptômes ne répondent pas aux critères d’épisode mixte.
C. Les symptômes traduisent une souffrance cliniquement significative ou
une altération du fonctionnement social, professionnel, ou dans d’autres
domaines importants.
D. Les symptômes ne sont pas imputables aux effets physiologiques directs
d’une substance (par exemple une substance donnant lieu à abus, un
médicament) ou une affection médicale générale (par exemple
hypothyroïdie).
E. Les symptômes ne sont pas mieux expliqués par un deuil, c’est-à-dire
après la mort d’un être cher, les symptômes persistent pendant plus de 2
mois ou s’accompagnent d’une altération marquée du fonctionnement, de
préoccupations morbides, de dévalorisation, d’idées suicidaires, de
symptômes psychotiques ou d’un ralentissement psychomoteur.
18
GEOFFROY Pierre Alexis
b)
Saisonnalité
Une définition large de la saisonnalité a été utilisée et est issue d’une publication de
Stone et al. parue dans le journal Nature : « a driving force that has a major effect on the
spatiotemporal dynamics of natural systems and their populations » (18). Ainsi, les
symptômes ou syndromes présentent un caractère saisonnier lorsqu’ils suivent des variations
cycliques prévisibles selon la période de l’année.
La saisonnalité dans le TB peut s’observer à différents niveaux de perspective. Nous
avons choisi de classer ces études selon leur perspective d’évaluation de la plus
macroscopique à la plus microscopique :
(1)
Les données issues des études sur l’utilisation des services de santé :
telles que les taux d’admission pour des épisodes de l’humeur et les
corrélations avec des variations climatiques locales.
(2)
Les données permises par un diagnostic basé sur une évaluation
catégorielle de la saisonnalité : la spécification « caractère saisonnier » du
DSM.
(3)
Les données issues d’évaluations dimensionnelles : la saisonnalité des
symptômes du TB.
Le premier niveau d’évaluation de la saisonnalité s’intéresse aux études sur l’utilisation
des services de santé qui permettent une évaluation des taux d’admissions pour un épisode de
l’humeur selon la période de l’année. Cette méthodologie implique donc l’utilisation de
grands registres de patients, souvent nationaux voire internationaux, et peut permettre
d’analyser la distribution d’un type spécifique d’épisode de l’humeur selon sa polarité :
maniaque, hypomaniaque, mixte ou dépressif. Ces données peuvent éventuellement permettre
19
GEOFFROY Pierre Alexis
d’être corrélées à des variables climatiques locales, telles que les heures de fort
ensoleillement, la durée des jours, la température extérieure, l’humidité, l’index de
pluviométrie et la pression de l’air.
Le second niveau d’évaluation est de nature rétrospective et analyse la présence du
caractère saisonnier au cours d’un épisode de l’humeur. Cette approche catégorielle
concernait dans le DSM-III à la fois les épisodes de natures dépressives et maniaques, mais a
été réduit aux épisodes dépressifs dans le DSM-IV. Le DSM-5 a repris une définition plus
large, plus proche de celle du DSM-III, et considère le caractère saisonnier des épisodes de
manière indépendante de leur polarité (2,16,17). L’ICD ne propose pas de définition de ce
caractère saisonnier et intègre cette notion seulement dans le cadre des troubles dépressifs
récurrents (F33), qui inclue les dépressions saisonnières. Le tableau 1 résume les critères
DSM-5
et
DSM-IV
TR
du
caractère
saisonnier
dans
le
TB
(2,16).
20
GEOFFROY Pierre Alexis
Tableau 2. Critères de la caractéristique saisonnière dans le DSM-5* et DSM-IVTR
DSM-5
Le caractère essentiel est un caractère saisonnier régulier d’au moins
un type d’épisode (i.e., maniaque, hypomaniaque ou dépressif) :
dépressifs :
A) une relation temporelle régulière entre la survenue des épisodes
maniaques, hypomaniaques ou dépressifs et une période particulière de
l’année (e.g., en automne ou en hiver), dans un Trouble Bipolaire de
type I ou II (non lié à des facteurs de stress environnementaux
évidemment en lien avec la période)
B) des rémissions complètes (ou un virement de la dépression vers la
manie ou l’hypomanie ou inversement) surviennent aussi au cours d’une
période particulière de l’année
C) au moins 2 épisodes maniaques, hypomaniaques ou dépressifs aux
cours des 2 dernières années remplissant les critères A et B et en
l’absence d’épisodes non-saisonniers au cours de la même période
D) une vie entière du sujet marquée par nettement plus d’épisodes
maniaques, hypomaniaques ou dépressifs saisonniers que non
saisonniers.
DSM-IV TR
Le caractère essentiel est un caractère saisonnier régulier des épisodes
dépressifs :
A) une relation temporelle régulière entre la survenue des épisodes
dépressifs et une période particulière de l’année
(non lié à des facteurs de stress environnementaux évidemment
en lien avec la période)
B) des rémissions complètes (ou un virement de la dépression vers la
manie ou l’hypomanie) surviennent aussi au cours d’une période
particulière de l’année
C) au moins 2 épisodes dépressifs aux cours des 2 dernières années
remplissant les critères A et B et en l’absence d’épisodes
non-saisonniers au cours de la même période
D) une vie entière du sujet marquée par nettement plus d’épisodes
dépressifs saisonniers que non saisonniers.
* Traduction de l’auteur, la traduction française du DSM-5 est non disponible à ce jour.
21
GEOFFROY Pierre Alexis
Enfin, le dernier niveau de perspective est le plus microscopique et examine de manière
dimensionnelle les effets des saisons sur la symptomatologie du TB. Ainsi cette évaluation
saisonnière peut être permise à l’aide de questionnaires explorant des dimensions cliniques du
TB telle l’humeur, le sommeil et l’anxiété par exemple. Une évaluation plus spécifique de
l’effet saisonnier sur le TB peut également être réalisé à l’aide d’un questionnaire spécifique
appelé le SPAQ (Seasonal Pattern Assessment Questionnaire) qui a été conçu par Rosenthal
et collaborateurs comme un outil de dépistage de la dépression saisonnière (19). Ce
questionnaire SPAQ peut aussi bien être utilisé en population générale que dans la population
de patients avec trouble de l’humeur, de part son absence d’assomption concernant la
direction du changement saisonnier et sa capacité à relever des variations saisonnières en
absence de maladie particulière. Le SPAQ a une bonne spécificité (94%) mais une mauvaise
sensibilité (44%) pour l’identification d’une dépression saisonnière (20). C’est donc un bon
outil de dépistage mais un outil diagnostic peu utile. Ce questionnaire est divisé en 7
sections de recueil de données et n’a à ce jour pas encore été validé en français (19)
(questionnaire en version originale disponible en Annexe 1):
(1)
Données démographiques
(2)
Une échelle de 5 points évaluant différents changements
saisonniers de : a) la durée du sommeil, b) l’activité sociale, c)
l’humeur, d) le poids, e) l’appétit et f) le niveau d’énergie.
(3)
Un calendrier sur lequel le sujet indique le mois de
l’année où il : a) se sent le mieux, b) se sent le moins bien, c)
perd le plus de poids, d) gagne le plus de poids, e) dort le plus,
f) dort le moins, g) mange le plus, h) mange le moins, i) se
socialise le plus, et j) se socialise moins.
(4)
Des questions sur leur préférence climatique concernant
22
GEOFFROY Pierre Alexis
les différents types de journées suivantes : froide, chaude,
humide, ensoleillée, sèche, grise et nuageuse, longue, élevée en
pollen, brumeuse, et courte.
(5)
La fluctuation de poids et les préférences alimentaires au
cours de l’année
(6)
Le nombre d’heures de sommeil par période de 24
heures au cours de l’hiver, du printemps, de l’été et de
l’automne.
(7)
Une note générale, où le sujet évalue son propre
sentiment de l’importance des répercussions entraînées par les
changements de saisons chez lui ou elle.
En conclusion, ces différents niveaux d’évaluation de la saisonnalité peuvent être
résumés et classés selon deux perspectives extrêmes allant d’une évaluation macroscopique à
une évaluation microscopique.
La figure 1 se propose de résumer ces différents niveaux d’évaluation de la saisonnalité
dans le trouble bipolaire.
23
GEOFFROY Pierre Alexis
MACROSCOPIQUE
UTILISATION DES
SERVICES DE SANTÉ
Taux d’admissions
selon la période de l’année
(Corrélation avec variables
climatiques)
CATEGORIEL
Caractère saisonnier
des épisodes de l’humeur
(Critères DSM)
DIMENSIONNEL
Échelles de symptômes ou
Questionnaire saisonnalité
(SPAQ)
MICROSCOPIQUE
Figure 1. Différents niveaux d’étude de la saisonnalité dans le trouble bipolaire allant d’une
perspective macroscopique à microscopique.
24
GEOFFROY Pierre Alexis
2.
Stratégie de recherche bibliographique
Une recherche systématique de la littérature internationale a été faite en utilisant les
moteurs de recherche bibliographiques PubMed et Embase. La recherche s’est portée sur les
papiers publiés entre 1974 (date de la publication du DSM-III, l’ICD-9 étant publié en 1975)
jusqu’au 31 mai 2013.
Les termes MESH suivants ont été utilisés : bipolar disorder AND (season* OR
seasonality OR seasonal OR seasonal pattern). Nous avons aussi utilisé la fonction « related
articles » de PubMed, la liste bibliographique des papiers relevés, les résumés de conférence,
et la base Google Scholar afin d’identifier de possibles papiers additionnels. Les papiers
publiés uniquement en anglais ont été retenus.
3.
Processus de sélection des études
Deux auteurs (Pierre Alexis Geoffroy & Bruno Etain) ont procédés à une sélection des
titres des publications identifiées dans les bases de données grâce à la stratégie de recherche
définie plus haut afin d’identifier les études possiblement éligibles. Ces deux auteurs ont,
d’abord de manière indépendante puis conjointe, sélectionné les études sur la base des
résumés de celles-ci. Tous les résumés en ligne ont été relus et des papiers en texte complet
ont été récupérés lorsque cela était pertinent. Cette procédure de recherche a suivi les critères
PRISMA (Preferred Reporting Items for Systematic Reviews and Meta-Analyses) (21).
La Figure 2 résume l’organigramme de la stratégie de recherche de la littérature et du
processus utilisé de sélection des études. Les études finalement retenues pour l’analyse
qualitative ont été classé en 3 catégories définies plus haut : 1) les études sur l’utilisation des
services de santé, 2) les études catégorielles, et 3) les études dimensionnelles (voir la figure 2
pour les détails).
25
GEOFFROY Pierre Alexis
Figure 2. Organigramme du processus utilisé de recherche et de sélection des études a
Articles identifiés grâce à la
recherche dans les bases de
données (n = 370)
Articles additionnels
identifiés (n = 16)
Articles identifiés
(n = 386)
Articles exclus après une
sélection initiale sur les
titres/résumés (n = 271)
Articles évalués pour
éligibilité
(n = 115)
Articles exclus car n’étudiant
pas la saisonnalité dans le TB
(n = 64)
Articles inclus dans l’analyse
qualitative
(n = 51)
Études d’utilisation des
services de soins
(n = 34)
Études catégorielles
(n = 5)
Études dimensionnelles
(n = 12)
a
La recherché bibliographique a été faite sur PubMed en utilisant les termes MeSh : bipolar
disorder AND (season* OR seasonality OR seasonal OR seasonal pattern).
26
GEOFFROY Pierre Alexis
C.
RÉSULTATS
1.
Recherche bibliographique
La recherche bibliographique a identifié 51 études qui ont été incluses dans l’analyse
qualitative et classées en 3 sous-groupes selon leur perspective macroscopique, intermédiaire
ou microscopique. Il a pu être analysé 34 études sur l’utilisation des services de santé (dont
14 études qui ont examiné les corrélations avec les variations climatiques saisonnières), 5
études catégorielles utilisant les critères DSM du caractère saisonnier, et 12 études
dimensionnelles qui ont examiné la saisonnalité des symptômes.
2.
Analyse de la saisonnalité par les études sur l’utilisation des
services de santé
a)
Saisonnalité et pics d’admissions
La très grande majorité des publications sur la saisonnalité dans le TB porte sur les taux
d’admission par saison et comporte une exploration de la polarité de l’épisode avec de
possibles analyses de corrélation avec des variables climatiques locales. En tout 34 études ont
été analysées, correspondant à 30 sets de données originales provenant de tous les continents
à travers le monde : 27 ont examinés les épisodes maniaques, 16 les épisodes dépressifs et 4
les épisodes mixtes. Parmi celles-ci, 12 de ces études ont examiné des corrélations entre les
variables climatiques et les épisodes maniaques, et 5 ont analysés les corrélations entre les
variables climatiques et la polarité dépressive.
27
GEOFFROY Pierre Alexis
Les premières preuves d’un tel caractère saisonnier sont venues des données issues des
fluctuations mensuelles des taux d’admissions pour épisodes maniaques, qui ont démontrées
un pic récurrent au printemps/été des épisodes maniaques. Symonds et Williams (1976) ont
ainsi rapporté un pic d’épisodes maniaques en août-septembre (22). Ces observations ont été
répliquées par Rihmer et collaborateurs (1980), qui ont également rapporté un pic d’épisodes
dépressifs davantage en été et en hiver (23). Cette occurrence de pics saisonniers d’épisodes
de l’humeur a par la suite été largement répliquée, avec un pic en printemps/été et un second
pic plus petit en automne (22–44). Très répliqué aussi, le pic d’épisodes dépressifs apparaît
davantage
au
début
de
l’hiver
avec
un
pic
plus
petit
au
cours
de
l’été
(23,26,27,34,37,39,42,44–49). En revanche peu d’études ont examiné l’existence d’une
variation saisonnière du pic d’épisodes mixtes. Ainsi, 4 études ont pu être identifiées
présentant des données non consensuelles et suggérant un pic en été (44,50), un pic en fin
d’été avec un nadir en novembre (38), ou un pic en début de printemps (42). Sur les 34 études
relevées dans la littérature, seulement 4 n’observaient pas de caractère saisonnier des
épisodes de l’humeur (50–53). Il est à souligner cependant que ces résultats négatifs peuvent
être le reflet d’un manque de puissance de ces études lié à des populations de petite taille :
l’échantillon le plus grand de ces études négatives est celui de Bauer et collaborateurs (2009)
qui a pu inclure 360 sujets contre par exemple 9619 sujets avec TB inclus dans l’étude de
Yang et collaborateurs (2013). La figure 3 suivante illustre les pics d’admissions observés
pour les épisodes thymiques selon leur polarité.
28
GEOFFROY Pierre Alexis
Figure 3. Représentation par polarité des épisodes de l’humeur d’un trouble bipolaire
des pics d’admissions par saison.
L’analyse des études sur l’utilisation des services de santé relève des pics d’admissions pour
la manie au cours du printemps/été et de l’automne (23 études significatives et 4 non
significatives, représentées en rouge), pour la dépression au cours du début de l’hiver et de
l’été (14 études significatives et 3 non significatives, représentées en bleu), et pour les
épisodes mixtes au cours du début du printemps ou en milieu/fin de l’été (4 études
significatives et 0 non significative, représentées en vert).
29
GEOFFROY Pierre Alexis
b)
Caractéristiques de ces pics d’admissions
De manière intéressante, ce caractère saisonnier des épisodes de l’humeur est présent à
la fois au début et au cours des récurrences du TB (36). De plus ces observations de pics
saisonniers ont été faites et répliquées partout dans le monde comme en Europe (22–
26,28,29,32,34,36,39,46,47), en Amérique du nord (38,49), en Amérique du sud (35), en Asie
(37,40,42,44,45,48,51), en Océanie (27,30,31,33,41,43,46) et en Afrique du sud (54).
L’association entre latitude et caractère saisonnier du TB est discutée, mais il y a des
éléments en faveur d’effets saisonniers variant avec la latitude : ces effets seraient plus forts
dans les zones climatiques de l’hémisphère nord que de l’hémisphère sud (49,53,55). De plus,
l’analyse des données issues de l’étude STEP-BD présente une prévalence augmentée des
dépressions dans les centres recruteurs plus au nord, avec des effets saisonniers différents
selon les régions et le sous-type de TB (49). Cependant, il est important de souligner que ces
variations saisonnières existent même dans les zones climatiques présentant peu de variations
saisonnières. Ainsi, Volpe et collaborateurs ont confirmé qu’il existait même dans les régions
tropicales un pic d’épisodes maniaques au printemps (41,43) et ceci va dans le sens d’autres
études menées dans l’hémisphère sud dans des régions tempérées (27,30,31,33).
Il existe également de possibles différences d’effets saisonniers selon le sexe des
individus. Ainsi, Symonds et Williams ont dans leur première étude relevé un pic saisonnier
de manie uniquement chez les femmes de leur population d’étude (22). Cette observation a
été par la suite ré-analysée par Walter et collaborateurs qui ont utilisé alors une méthode
d’analyse différente à l’aide de courbes harmoniques et ont ainsi pu mettre en évidence que
l’amplitude des variations et leur maximum étaient alors similaires dans la population des
deux sexes (24). Ils ont ainsi confirmé la présence d’un pic saisonnier mais infirmé une
différence liée au sexe. La question semblait donc réglée et davantage liée à un biais
d’analyse. Mais par la suite de telles différences liées au sexe ont pu être rapportées même en
30
GEOFFROY Pierre Alexis
utilisant la méthode d’analyse par courbes harmoniques et suggèrent que les femmes sont
plus susceptibles d’exprimer un caractère saisonnier (34,35) et cela pourrait être
particulièrement présent chez les femmes jeunes (39).
3.
Polarité des épisodes et corrélation avec les variables climatiques
Comme nous l’avons vu dans la partie méthode de cette revue, les études utilisant les
données issues des systèmes de soins peuvent corréler les taux d’admissions aux variables
climatiques locales à la recherche d’effet causal ou participatif de ces derniers.
Dès les premières études, les chercheurs ont observé que ces pics d’admissions pour
des épisodes de l’humeur n’étaient pas constants d’une année sur l’autre, suggérant ainsi une
association possible avec les variables climatiques locales (30). Myers et Davies ont les
premiers examiné les corrélats climatiques avec l’incidence des épisodes maniaques (25).
Ainsi, en plus de l’observation classique d’un pic d’hospitalisations pour épisode maniaque
en été et d’une décroissance de ces épisodes en hiver, ils ont relevés que ces admissions
étaient corrélées à la température journalière moyenne, à la moyenne de la durée des jours et
à la moyenne des heures d’ensoleillement (25). Cette étude a été suivie par d’autres études
tentant
de
confirmer
ces
résultats
dans
le
cadre
des
épisodes
maniaques
(25,28,29,31,34,38,40–43,51,53,56) ou bien dans le cadre des épisodes dépressifs
(42,45,48,53,56) qui sont résumées respectivement dans le tableau 3 et 4.
31
GEOFFROY Pierre Alexis
Ces études rétrospectives sont inconstamment répliquées et demandent d’être précisées
dans études futures prospectives qui pourront mettre en évidence un lien de causalité
éventuel. Cependant, il faut souligner qu’il a été démontré que les variables climatiques
étaient aussi associées avec les récurrences du TB même dans des régions avec des conditions
climatiques plutôt stables comme dans les régions tropicales (31,41–43). Les études futures
devront également rechercher la présence d’effets possiblement différents de ces conditions
climatiques selon le type de polarité de l’épisode thymique.
32
GEOFFROY Pierre Alexis
Tableau 3. Résumé des études de corrélation entre l’incidence des épisodes
maniaques et des variables climatiques locales.
VARIABLES CLIMATIQUES
Ensoleillement
Durée du jour
+
+
Études
Myers &
Davies 1978
Mawson &
Smith 1981
+
+
Sayer et al.
1991
+
+
Jain et al.
1992
0
Suhail & Cochrane 1998
+
+
Lee et al.
2002
+
0
Cassidy &
Carroll 2002
Lee et al.
2007
Bauer et al.
2009
Température
Pression
Barométrique
+
-
Carney et al.
1988
Volpe et al.
2006
Humidité/
Précipitations
0
0
0
+
0
0
0
0
0
0
+
+
-
-
0
-
0
-
0
0
0
0
Volpe et al.
2010
0
0
-
0
TOTAL
6 (+)
1 (-)
2 (0)
5 (+)
1 (-)
4 (0)
0 (+)
4 (-)
4 (0)
2 (+)
0 (-)
8 (0)
0
0 (+)
0 (-)
3 (0)
(+) corrélation positive; (-) corrélation négative; (0) corrélation non significative
(case noire) donnée non disponible
33
GEOFFROY Pierre Alexis
Tableau 4. Résumé des études de corrélation entre l’incidence des épisodes
dépressifs et des variables climatiques locales.
VARIABLES CLIMATIQUES
Ensoleillement
Durée du jour
Humidité/
Précipitations
Température
Pression
Barométrique
Études
Mawson &
Smith 1981
Modai et al.
1994
0
-
0
Shapira et al.
2004
Lee et al.
2007
0
0
+
+
Bauer et al.
2009
TOTAL
0
1 (+)
1 (-)
0 (0)
0
0
+
0
0
0
0 (+)
0 (-)
2 (0)
0 (+)
0 (-)
4 (0)
2 (+)
0 (-)
2 (0)
0
0 (+)
0 (-)
3 (0)
(+) corrélation positive; (-) corrélation négative; (0) corrélation non significative
(case noire) donnée non disponible
34
GEOFFROY Pierre Alexis
4.
Analyse du caractère saisonnier selon les critères DSM
Il existe peu d’études ayant examiné la saisonnalité par le biais de cette approche
catégorielle. En utilisant les critères DSM-III de la saisonnalité, Hunt et collaborateurs ont
observé que 15% des patients avec TB présentaient un caractère saisonnier de leurs épisodes
maniaques (57). De plus, Faedda et collaborateurs rapportaient que 10% de leurs patients
(issus d’une clinique spécialisée pour troubles de l’humeur) présentaient un caractère
saisonnier de leurs récurrences thymiques, étaient majoritairement des femmes, et que 68%
d’entre eux avaient des antécédents familiaux de trouble de l’humeur (58). La moitié de ces
patients avec un caractère saisonnier souffraient de trouble unipolaire dépressif et l’autre
moitié souffrait de TB dont 30% avaient présenté des manies et 19% des hypomanies (58).
Faedda et collaborateurs ont pu décrire 2 types de caractère saisonnier avec une période
précise et répétée du début et des récurrences : A) une dépression en automne-hiver avec ou
sans manie/hypomanie en printemps-été, et b) une dépression en printemps-été avec ou sans
manie/hypomanie en automne-hiver (58).
En même temps que le DSM-IV, de nouvelles études de ce caractère saisonnier sont
apparues. Au total, 3 études (dont celle présentée plus en détails dans la section II de cette
thèse) ont pu examiner le caractère saisonnier dépressif selon la définition du DSM-IV
(11,59,60). La première a été produite par Schaffer et collaborateurs qui ont observé grâce à
des enquêtes téléphoniques que 23% des patients avec TB présentent un caractère dépressif
saisonnier. De plus, les auteurs n’ont pas retrouvé une influence de la latitude sur le
pourcentage de patients avec caractère saisonnier et TB (59). Cette prévalence élevée a été
répliquée par les deux études menée par Goikolea et collaborateurs (26%) et par notre étude
(23%) confirmant que un quart des patients avec TB souffrent d’un caractère saisonnier de
leurs épisodes dépressifs. L’étude espagnole de Goikolea et collaborateurs consistait en un
35
GEOFFROY Pierre Alexis
suivi prospectif de 10 ans de patients avec TB de type I et II. Les auteurs ont démontré que le
caractère dépressif saisonnier était associé au TB de type II, au début à polarité dépressive et
à la polarité dépressive prédominante (60). J’ai pu par la suite confirmer et préciser ces
associations cliniques dans une population plus grande et qui a permit également la recherche
d’une influence du sexe sur ce caractère saisonnier (11). Ces résultats seront présentés en
détails dans la section II de cette thèse.
Il n’existe pas encore à ce jour d’études utilisant les critères du DSM-5. Celles-ci sont
attendues car la considération de tous les types de polarité dans le caractère saisonnier pourra
permettre une exploration plus complète de la saisonnalité des récurrences thymiques dans le
TB. Elles pourront également permettre de confirmer les caractéristiques cliniques associées
à ce caractère saisonnier et ainsi d’améliorer l’identification des patients avec TB et à risque
de saisonnalité.
36
GEOFFROY Pierre Alexis
5.
Analyse dimensionnelle de la saisonnalité dans le TB
L’analyse dimensionnelle de la saisonnalité dans le TB permet une analyse la plus fine
possible de la saisonnalité des symptômes du TB. Soulignons que les patients avec TB
présentent des changements saisonniers de leur humeur et des fonctions neuro-végétatives
semblables à celles rencontrées dans la dépression saisonnière mais aussi chez des sujets
exempts de maladie mentale (61). Une étude intéressante utilisant le SPAQ a choisi de
comparer les variations saisonnières de l’humeur et des comportements entre différents
groupes de patients : des patients avec dépression saisonnière hivernale, dépression
saisonnière d’été, trouble des conduites alimentaires, TB, trouble dépressif unipolaire et
dépression hivernale sub-syndromique (62). Cette étude observa qu’en hiver tous les groupes
de patients quelque soit leur pathologie : mangeaient plus, dormaient plus et gagnaient du
poids (62). Mais la prévalence des variations saisonnières pathologiques est bien plus
importante chez les patients avec TB. En effet, Shand et collaborateurs ont démontré, à l’aide
du questionnaire SPAQ, que 27% des patients avec TB présentaient les critères diagnostics de
la dépression saisonnière. Comparés à une population de patients sans pathologie mentale, les
patients avec TB présentaient un odds ratio ajusté de 3,73 (IC95% 2,64-5,27) (63). De plus,
Hakkarainen et collaborateurs en étudiant des jumeaux discordants sur la présence d’une
maladie TB ont observé que le jumeau avec le TB, comparé à son jumeau sans TB, présente
davantage de variations saisonnières au niveau de son sommeil et de son humeur (64). Les
rythmes saisonniers infradiens des patients avec TB diffèrent des sujets sans trouble
psychiatrique en démontrant des périodes marquées d’une augmentation de l’amplitude des
mesures journalières de l’humeur et des fonctions végétatives (65). Dans ce sens, Simonsen
et collaborateurs ont comparé les symptômes évalués à l’aide du SPAQ de 183 patients avec
37
GEOFFROY Pierre Alexis
TB comparés à 468 sujets sans TB consultant leur médecin généraliste. Les auteurs
démontrent que les patients avec TB présentent de plus grandes fluctuations saisonnières de
leur humeur, de leur activité sociale, de leur poids, de leurs habitudes de sommeil, et de leur
durée totale de sommeil (particulièrement marquée par une hypersomnie hivernale) (66).
Récemment, Shin et collaborateurs à l’aide du SPAQ ont démontré que les patients avec TB
et caractère saisonnier présentaient davantage de fluctuations de l’humeur et des
comportements que des patients avec trouble dépressif unipolaire avec ou sans caractère
saisonnier, et que des témoins sains (67). De manière remarquable, ces auteurs ont même
démontré que les patient avec TB sans caractère saisonnier présentaient des fluctuations
saisonnières comparables à celles rencontrées chez les patients avec dépression saisonnière
(67). Ces études soulignent ainsi l’effet majeur des saisons sur les symptômes thymiques et
végétatifs dans le TB avec ou sans caractère saisonnier. Les patients avec TB semblent
particulièrement susceptibles aux perturbations des rythmes infradiens même comparés aux
patients avec dépressions récurrentes saisonnières.
Cependant, trois études négatives sont à relever (53,68,69). La première étude de
Christensen et collaborateurs est prospective sur 3 ans et examine les effets des paramètres
météorologiques sur l’apparition des épisodes thymiques de patients souffrant de TB (68).
Les auteurs ont tout de même observé une influence légère des facteurs météorologiques sur
les symptômes de l’humeur mais n’ont pas réussi à mettre en évidence une corrélation
significative avec le début des épisodes de l’humeur et les scores aux échelles
dimensionnelles thymiques (68). Par ailleurs, Bauer et collaborateurs ont produit une étude
intéressante sur le plan méthodologique qui analysait les auto-évaluations journalières de
scores de l’humeur de 360 patients avec TB provenant de zones climatiques différentes (53).
Ces auteurs n’ont pas retrouvé d’effets saisonniers ou même d’effets liés au climat ou à la
38
GEOFFROY Pierre Alexis
latitude (53). Enfin, Murray et collaborateurs ont mené une étude prospective multicentrique
chez 429 patients avec un TB de type I et II, dans laquelle les auteurs testèrent l’hypothèse
que les symptômes dépressifs sont majorés en automne/hiver et que les symptômes
maniaques/hypomaniaques sont majorés en printemps/été (69). Pour cela, ils ont utilisé trois
échelles différentes de l’humeur et trois définitions distinctes du temps : le mois civil, la
saison nominale et une analyse harmonique. A travers ces analyses, les auteurs n’ont pas
retrouvé de variation saisonnière systématique des symptômes. Cependant l’analyse
harmonique (qui est probablement l’évaluation la plus fine) a permis de relever un pic de
manie en décembre et en juin, ainsi qu’une augmentation des symptômes dépressifs en
novembre/décembre chez les femmes (69).
Au total l’ensemble de ces résultats indique que les sujets avec TB subissent
d’importantes variations saisonnières de leurs symptômes, et la seule présence des quelques
rares études partiellement non concluantes en témoigne. Les fluctuations saisonnières sont
présentes chez tous les individus malades ou non malades, mais apparaissent d’une
particulière importance chez les patients avec TB même comparés aux individus avec
dépression unipolaire saisonnière. L’étude prospective la plus récente a été produite par
Akhter et collaborateurs qui valident clairement cette hypothèse par l’utilisation d’analyses
de séries temporelles et par des modèles d’auto-régression (autoregressive integrated moving
average (ARIMA)) chez 314 patients avec TB de type I et II, suivis pendant 10 ans et évalués
sur la saisonnalité de leurs symptômes (hypo)maniaques ou dépressifs (70). Les auteurs
confirmèrent ainsi que pour tous les patients, les symptômes dépressifs étaient moins
fréquents l’été et plus fréquents vers le solstice d’hiver, alors que les symptômes
(hypo)maniaques étaient davantage présents autour de l’équinoxe d’automne. Le TB de type
II, comparé au type I, semblait là encore plus vulnérable aux variations saisonnières des
39
GEOFFROY Pierre Alexis
symptômes bipolaires (70).
Des dimensions plus spécifiques du TB ont pu également être examinées à la recherche
d’une rythmicité saisonnière. Ainsi, Volpe et collaborateurs ont analysé les variations
saisonnières de 3 dimensions cliniques de la manie : le caractère psychotique, l’agressivité et
la suicidalité. Les auteurs ont examiné ces dimensions chez des patients hospitalisés en
psychiatrie et ont pu mener des analyses de corrélation avec les variables climatiques locales
(71). Ils ont observé qu’au cours des manies le taux d’agressions était plus élevé en JanvierMars et que celui de suicidalité était plus élevé en Décembre et en Janvier. Le caractère
psychotique des manies corrélait positivement avec les heures d’ensoleillement du mois en
cours et avec l’augmentation des heures d’ensoleillement, alors qu’il corrélait négativement
avec l’humidité relative du mois en cours et d’un changement entre le mois précédent et celui
en cours. De plus, la suicidalité au cours des manies était corrélée à une augmentation rapide
de la température extérieure (71).
En lien avec une expression clinique du TB plus sévère lorsqu’un caractère saisonnier
est présent, Rajajärvi et collaborateurs ont observé que les patients avec TB qui rapportaient à
l’aide du SPAQ que les variations saisonnières étaient un problème, comparés à ceux pour
qui cela n’était pas un problème, présentaient alors des scores moins élevés à certains tests
neuropsychologiques : au niveau des fonctions visuo-constructives, du raisonnement visuospatial, de l’attention auditive, de la mémoire de travail, de la mémoire verbale (72). Là
encore et en concordance avec les études précédentes, il faut souligner que tous les sujets de
l’étude atteignaient des scores moins élevés que le reste de l’année en hiver (72).
Des études supplémentaires analysant les dimensions cliniques du TB sont nécessaires
car le TB associe un nombre important de facteurs qui peuvent probablement suivre une
rythmicité saisonnière distincte, tels que : l’impulsivité, la réactivité émotionnelle, le
40
GEOFFROY Pierre Alexis
caractère psychotique, l’agressivité, la suicidalité, les comportements d’abus et/ou
d’addiction, les fonctions cognitives, ou le sommeil, en plus des symptômes thymiques.
La section III de cette thèse suit cet objectif et propose une analyse de certaines
dimensions cliniques du TB afin de contribuer à cette littérature.
D.
DISCUSSION
Principaux résultats
Cette première partie de ma thèse avait pour objectif de dresser de manière
systématique un état des lieux de la littérature examinant la saisonnalité dans le TB. À travers
l’utilisation de méthodologies différentes allant d’études sur l’utilisation des services de santé
analysant le taux d’admissions pour épisodes de l’humeur jusqu’à des études examinant les
variations intrinsèques des symptômes du TB, et en passant par des études catégorielles du
caractère saisonnier du DSM, il a été observé que les saisons influencent le niveau de
symptomatologie du TB et s’associent à une très grande proportion de patients avec TB
présentant une vulnérabilité aux variations saisonnières. Cette vulnérabilité saisonnière toute
particulière du TB, et qui semble même plus importante que dans la dépression saisonnière
pourtant mieux identifiée, souligne la grande vulnérabilité chronobiologique de cette maladie.
En effet, dans ce contexte d’intérêt grandissant pour les déterminants physiologiques
chronobiologiques du TB (13), les variations saisonnières et les stimuli environnementaux
identifiés dans ce travail ouvrent la voie vers de nouvelles études intégrant et analysant
l’influence du climat sur la psychopathologie du TB.
Il faut néanmoins garder à l’esprit qu’un petit sous-groupe de patients avec TB présente
probablement un caractère saisonnier des récurrences dépressives précipitées par des facteurs
41
GEOFFROY Pierre Alexis
psychologiques (plutôt que par les changements climatiques ou par des anomalies des
rythmes circadiens), tels que des réactions en lien avec la date anniversaire d’expériences
traumatiques dans l’enfance, l’adolescence ou l’âge adulte (73). De tels facteurs sont à
rechercher et à identifier afin d’adapter la thérapeutique envisagée.
Ce travail identifie un profil clinique saisonnier plus sévère associé au TB avec une
prévalence élevée et des implications cliniques et pronostics. Au total, la description de la
saisonnalité dans le TB, et donc d’anomalies infradiennes, est plutôt bien identifiée et
documentée à travers différents niveaux de perspective. Néanmoins les mécanismes sousjacents liants le TB et les facteurs climatiques à la source de variations saisonnières restent
peu compris. Un autre point de discussion important concerne une possible différence selon
le sexe de l’individu des présentations cliniques associées à cette caractéristique saisonnière.
Nous verrons dans la section II de ce manuscrit que notre étude a permis d’apporter des
éléments supplémentaires en faveur d’une expression distincte de cette saisonnalité au sein du
TB en fonction du sexe (11). Mais déjà des éléments en faveur de cette hypothèse sont
apparus à la lecture de cette littérature. En effet, les femmes présenteraient une plus grande
vulnérabilité aux variations saisonnières (34,35,39). Murray et collaborateurs dans leur suivi
prospectif ont également démontré que les femmes subissaient davantage de variations
saisonnières de leurs symptômes bipolaires (69). Plusieurs hypothèses ont été proposées pour
rendre compte de cette différence observée chez les femmes : un taux plus élevé
d’hypothyroïdies, une utilisation plus facile des traitements antidépresseurs, et des effets des
hormones gonadiques (74). De plus, plusieurs arguments et analogies cliniques laissent
penser que le TB, la dépression saisonnière et les symptômes prémenstruels pourraient faire
partie d’un seul et même spectre de maladies (75). Choi et collaborateurs ont récemment
observé que les femmes avec TB présentaient des altérations saisonnières et prémenstruelles
42
GEOFFROY Pierre Alexis
de leur humeur et de leurs comportements, et ceci de manière indépendante de leurs épisodes
thymiques (76). Ils ont aussi démontré une association significative entre le caractère
saisonnier et le syndrome prémenstruel, suggérant que ces deux troubles cycliques puissent
présenter des mécanismes biologiques communs contribuant à la nature cyclique de ces
symptômes du TB (76). Une meilleure compréhension de ces mécanismes biologiques sousjacents apparait essentiel afin que les cliniciens puissent être en mesure de développer des
stratégies thérapeutiques et préventives plus personnalisées et ciblées.
Implications cliniques et thérapeutiques
Le caractère saisonnier des épisodes de l’humeur a été associé chez ces patients à une
plus grande utilisation des services médicaux de premier recours dont les services
psychiatriques comparativement à des patients sans caractéristique saisonnière (77,78). La
caractéristique saisonnière apparaît donc être une spécification importante du TB, reflet d’un
tableau clinique plus sévère, qui a déjà été intégré utilement à certaines classification
nosographiques dont le DSM-5 fait partie. Néanmoins, des études supplémentaires semblent
nécessaires afin d’intégrer également la présence du caractère saisonnier dans les algorithmes
de décision thérapeutique, afin d’aider au mieux le clinicien dans son choix de thérapeutiques
chronobiologiques ciblées. En effet, de telles thérapies chronobiologiques existent dont leur
pertinence devra être étudiée dans cette population particulière à caractéristique saisonnière.
Murray et Harvey ont suggéré que les variations saisonnières apportaient des éléments en
faveur d’un rôle de la luminosité et des rythmes biologiques dans l’étiologie du TB (79). Une
étude récente chez des patients euthymiques souligne que le sommeil, la luminosité et la
saisonnalité sont trois conditions interconnectées se rejoignant sur une base commune
chronobiologique qui, lorsqu’elle est altérée, a un effet important à la fois sur la
psychopathologie et la thérapeutique des troubles de l’humeur (80).
43
GEOFFROY Pierre Alexis
En théorie, les épisodes saisonniers de l’humeur dans le TB pourraient être traités en
manipulant le système circadien avec des drogues chronobiotiques (comme l’agomélatine ou
la mélatonine) (81,82) et les chronothérapeutiques (comme la luminothérapie ou la privation
de sommeil) (83,84). De telles approches peuvent être utiles pour traiter la dépression du TB
mais pas dans le cadre de la manie. Il est aussi important d’être attentif (et que les patients
soient attentifs) aux possibles récurrences saisonnières de certains symptômes isolés ou
prodromiques d’une récurrence thymique, et donc ainsi de proposer un suivi avec une
surveillance toute particulière lors des périodes de l’année à risque. De plus, les symptômes
du TB tels que la suicidalité ou l’impulsivité, devront être également recherchés et surveillés
au cours des variations saisonnières afin de prévenir un possible passage à l’acte suicidaire
(85). Enfin, les cliniciens devraient utilement intégrer le rôle des saisons dans les stratégies
développées de détection précoce des symptômes et des autres stratégies de prévention telle
que la psychoéducation (11).
Forces et limites de cette littérature
Ce travail donne aussi l’occasion de discuter des limites et problèmes méthodologiques
rencontrés par les études issues des trois niveaux de perspective et examinant la saisonnalité
dans le TB.
Le niveau d’évaluation macroscopique présente plusieurs limites telles que les erreurs
de classification diagnostique et la surreprésentation des cas sévères liés à l’utilisation des
registres de réseaux de soins (hospitalier, clinique ou consultation). Cette méthodologie a
également possiblement sous-évalué certains sous-types de TB, probablement les moins
sévères ou ceux ayant moins accès aux réseaux de santé. Par exemple, le TB de type II peut
possiblement être associé à moins d’hospitalisations que le TB de type I. Malgré un design
44
GEOFFROY Pierre Alexis
d’étude relativement écologique, de telles études ne permettent pas l’interprétation de
données de la saisonnalité à l’échelle individuelle. En effet, elles ne rendent pas compte des
variations saisonnières intrinsèques à chaque individu, et en l’absence de niveaux d’analyse
plus fins sur le plan individuel, il serait donc impossible de conclure sur l’existence ou non
d’une variation saisonnière du TB même si à l’échelle macroscopique de telles variations
existent. Cette perspective rend compte davantage d’une tendance saisonnière générale des
visites aux urgences ou d’admissions hospitalières pour épisode de l’humeur, qui sont le
reflet des symptômes aigus et sévères. Néanmoins, en dehors de ces limitations, cette
méthode a l’avantage d’être adaptée pour l’analyse de larges cohortes de patients dont les
résultats peuvent être facilement répliqués nationalement ou internationalement.
L’approche catégorielle a pour avantage d’être une évaluation rétrospective ce qui
autorise son utilisation de manière facile et rapide en pratique clinique courante. De plus une
telle évaluation a démontrée son utilité clinique dans le cadre des soins, du pronostic et du
choix thérapeutique (11). De plus, cette facilité d’utilisation permet également de mener de
larges études sur des cohortes de patients existantes ou naissantes. Enfin, l’utilisation de la
caractéristique saisonnière rend possible l’identification d’un sous groupe de patients avec
TB, ce qui facilite l’identification de caractéristiques cliniques et de biomarqueurs associés à
la maladie. Une telle stratégie aide ainsi à une meilleure compréhension de la
pathophysiologie du TB (86). Cependant, même si cette évaluation catégorielle permet une
analyse à un certain niveau individuel, elle ne permet pas (comme les études sur l’utilisation
des réseaux de santé) l’analyse fine et intrinsèque des variations saisonnières symptomatiques
propres à un individu donné. Mais cette évaluation présente l’avantage de pouvoir s’appliquer
à tous les patients et ce de manière indépendante de leur degré de sévérité du TB et peut
inclure les patients non-hospitalisés, permettant ainsi de dépasser les biais possibles existants
dans les études sur l’utilisation des réseaux de santé. Ainsi, l’approche catégorielle pourrait
45
GEOFFROY Pierre Alexis
théoriquement être appliquée à tous les patients et serait indépendante du système de soins.
Ce dernier pouvant être différent entre les pays (par exemple, le taux d’admissions
hospitalières peut être biaisé par les conditions d’accès aux soins, au recours à
l’hospitalisation, etc.).
Le niveau le plus fin d’évaluation est donc la perspective microscopique permise par les
outils dimensionnels. Cette évaluation dimensionnelle se caractérise par une mesure sensible
et individuelle des variations saisonnières intrinsèques. Elle seule permet l’évaluation
saisonnière intrinsèque d’une cohorte de patients, et donc quantifie l’effet direct des
variations saisonnières sur la symptomatologie bipolaire. Néanmoins, cette stratégie est plus
lourde que les précédentes en terme notamment de temps d’évaluation. Cette méthodologie
dimensionnelle apporte un niveau de lecture des effets saisonniers dans le TB très précis mais
se limite souvent à l’étude de petites populations et à un nombre limité de dimensions
cliniques qu’il faudra sélectionner a priori.
Perspectives
Les patients avec TB de caractéristique saisonnière constituent un sous-groupe de
patients dont l’adaptation aux changements climatiques a échoué. À ce jour, les déterminants
de cette vulnérabilité infradienne/saisonnière sont peu clairs. Cependant, de nombreux
polymorphismes génétiques circadiens des gènes CLOCK (horloge biologique interne) et de
gènes impliqués dans la voie de la synthèse de la mélatonine (neuro-hormone du sommeil)
ont été associés au TB (13). De plus, la dépression saisonnière a démontré une vulnérabilité
génétique forte qui recouvre plusieurs de ces anomalies génétiques préalablement identifiées
dans le TB. En effet, plusieurs études de jumeaux ont suggéré qu’il existait une composante
génétique forte associée à cette susceptibilité saisonnière. Madden et collaborateurs ont ainsi
étudié plusieurs milliers de jumeaux australiens et observèrent que plus de 30% de la variance
46
GEOFFROY Pierre Alexis
saisonnière des hommes et femmes étaient expliqué par une vulnérabilité génétique (87). Ces
auteurs ont aussi observé que ces effets génétiques de changements saisonniers avaient un
effet plus générale sur tous les changements comportementaux : humeur, énergie, activité
sociale, sommeil, appétit, et poids (87). Dans une autre étude de jumeaux, Jang et
collaborateurs ont utilisé le SPAQ et observèrent alors les modifications du sommeil, des
activités sociales, de l’humeur, de l’appétit et de l’énergie étaient en premier lieu liées à des
effets génétiques additifs (88). Ces effets génétiques rendaient compte chez les hommes de
46% de la variance saisonnière et de 31% chez les femmes (88). De manière intéressante,
cette analyse par sexe de ces auteurs permet également de renforcer l’hypothèse qu’il
existerait une possible vulnérabilité génétique différente selon le sexe. Enfin, Brambilla et
collaborateurs ont trouvé que les patients avec TB et avec des antécédents familiaux de
troubles de l’humeur présentaient des effets saisonniers plus sévères que les patients sans
antécédent familial (80). Ainsi, au cours des variations saisonnières, des composantes
génétiques pourraient venir renforcer certains symptômes du TB dont l’humeur, l’énergie,
l’appétit et le sommeil. De futures études génétiques sont attendues afin de mieux
comprendre le TB avec caractéristique saisonnière et plus généralement de mieux identifier
les mécanismes neurobiologiques des troubles de l’humeur face aux saisons.
Différents aspects tels que la nature et l’intensité des facteurs environnementaux ou
encore la relation temporelle entre les symptômes et ces facteurs environnementaux, devront
être examinés plus en détails. Par exemple, la dépression et les allergies sont une association
bien connue, et Postolache et collègues ont ainsi pu observer de manière répétée dans deux
études chez des patients avec récurrences thymiques, que les pics saisonniers en allergènes
corrélaient positivement avec les symptômes dépressifs et anxieux (89,90). Une étude récente
examina le lien entre la présence d’immunoglobulines E (IgE) spécifiques d’allergènes et sa
47
GEOFFROY Pierre Alexis
répercussion sur les symptômes allergiques et sur l’humeur (91). Les auteurs ont trouvé que
ces IgE étaient en lien avec une exacerbation de la dépression chez des patients avec TB de
type I (91). Ces résultats indiquent qu’une relation existe entre les symptômes allergiques et
ceux de l’humeur. Ces liens devront être précisés afin de pouvoir développer des
interventions préventives dans le TB. Les effets d’autres facteurs environnementaux, comme
les infections, devront aussi être étudiés dans le cadre des variations saisonnières associées au
TB.
48
GEOFFROY Pierre Alexis
E.
CONCLUSION
La saisonnalité du TB est bien documentée et validée dans la littérature internationale.
Les effets des saisons sur l’humeur et les comportements semblent plus importants chez les
sujets avec TB comparés à des sujets sains et à des sujets avec dépression unipolaire, même
de caractéristique saisonnière. Les individus avec TB de caractéristique saisonnière
présentent une symptomatologie plus sévère et marquée par un TB de type II, des troubles
des conduites alimentaires, des cycles rapides et davantage de récurrences thymiques. Les
conditions climatiques peuvent influencer et/ou déclencher les symptômes du TB, et des
études futures devront clarifier les liens entre conditions climatiques et variations
saisonnières du TB. Néanmoins, il est clair et bien démontré internationalement que des pics
d’épisodes maniaques apparaissent au cours du printemps/été et dans une moindre mesure en
en automne, alors que des pics d’épisodes dépressifs apparaissent majoritairement en hiver et
dans une moindre mesure en été. L’étude de dimensions cliniques du TB a montré des
premiers résultats intéressants qui devront être consolidés. En effet, les caractéristiques
psychotiques, suicidaires et l’agressivité semblent suivre des variations saisonnières,
probablement influencées par des facteurs climatiques possiblement différents. Il apparaît
nécessaire de préciser ces observations cliniques dans des études futures qui devront
examiner les mécanismes physiologiques sous-tendant les effets saisonniers dans le TB. Ces
études permettront d’améliorer la compréhension du TB et in fine d’améliorer le dépistage, le
suivi et les thérapeutiques de ces patients.
49
GEOFFROY Pierre Alexis
II.
PREMIER TRAVAIL EXPÉRIMENTAL :
CARACTÉRISTIQUES CLINIQUES DU TROUBLE BIPOLAIRE
ASSOCIÉES AU CARACTÈRE SAISONNIER DU DSM-IV
50
GEOFFROY Pierre Alexis
A.
INTRODUCTION
Cette section a pour objectif de renforcer, par le biais d’un travail expérimental, les
connaissances des caractéristiques cliniques du TB associées au caractère saisonnier selon la
définition du DSM-IV-TR précédemment définie. Ce travail a été publié en 2013 dans le
journal Chronobiology International (11). En effet, nous avons pu observer qu’il existait
seulement deux études de cette nature qui indiquaient une prévalence élevée d’un sujet sur
quatre atteints de TB présentant cette caractéristique saisonnière des épisodes dépressifs
(59,60). La première étude de Schaffer et collaborateurs retrouvait une association du
caractère saisonnier au sous-type II de TB (59). Ce résultat a été confirmé et précisé par
l’étude espagnole de Goikolea et collaborateurs observant une association avec le sous-type II
et davantage d’épisodes thymiques, en particulier dépressifs (60). Ces résultats préliminaires
sont intéressants et demandent confirmation dans des populations plus larges (l’étude
Goikolea et collaborateurs comportait 302 sujets recrutés sur un seul centre spécialisé)
accompagnés d’analyses plus fines des caractéristiques cliniques associées (cyclicité,
caractéristique psychotique, tentative de suicide, comorbidités addictives, etc). De plus, il
existe une totale méconnaissance de l’expression clinique selon le sexe du TB avec cette
caractéristique saisonnière DSM (92). Jusqu’à ce jour de telles analyses par sous-groupe
selon le sexe étaient rendues impossibles par manque de puissance liée à la petite taille des
populations étudiées. Or nous avons vu, dans la première partie de cette thèse consacrée à la
revue de la littérature, qu’il existe des données en faveur d’une sensibilité d’expression
saisonnière du TB selon le sexe.
51
GEOFFROY Pierre Alexis
La caractéristique saisonnière étant intégrée au DSM-5, il apparaît indispensable pour
démontrer sa pertinence en tant que spécification du TB de confirmer que cette
caractéristique est fréquente, qu’elle est associée à des caractéristiques cliniques particulières
du TB, et d’en clarifier sa sensibilité d’expression selon le sexe. À l’aide d’une population
bien caractérisée de patients avec TB recrutés sur plusieurs centres universitaires
psychiatriques français, les objectifs de ce travail seront de 1) préciser la fréquence de la
caractéristique saisonnière des épisodes dépressifs selon les critères DSM, 2) comparer les
caractéristiques cliniques et sociodémographiques de patients bipolaires avec et sans
caractéristique saisonnière, et 3) d’explorer si le sexe influence la présentation clinique du TB
avec caractéristique saisonnière.
52
GEOFFROY Pierre Alexis
B.
MÉTHODE
Population d’étude
Des sujets caucasiens remplissant les critères DSM-IV (93) pour le TB de type I ou II
ont été recrutés dans trois centres psychiatriques universitaires français (Paris 12, Bordeaux et
Nancy). Le protocole expérimental est conforme aux standards éthiques internationaux et a
obtenu l’accord des comités régionaux d’éthique et de protection des personnes. Les sujets
inclus dans cette étude ont été informés sur le protocole expérimental et ses objectifs, puis ont
accepté et signé un consentement écrit. Ces sujets ont par a suite été évalués par des
psychiatres ou psychologues expérimentés et formés à l’utilisation de la French version of the
Diagnostic Interview for Genetic Studies (DIGS). Cette DIGS propose un entretien structuré
permettant le recueil rétrospectif du diagnostic vie entière de TB, des traitements et des autres
pathologies de l’axe I du DSM-IV-TR (94). Les patients avec TB devaient présenter une
rémission symptomatique depuis au moins 3 mois pour pouvoir être inclus dans cette étude.
La rémission symptomatique était vérifiée si des scores inférieurs à 5 aux deux échelles de
l’humeur MADRS et YMRS étaient relevés à l’inclusion.
Méthodes d’évaluation
La caractéristique saisonnière était définit selon les critères du DSM-IV-TR par un
caractère saisonnier régulier des épisodes dépressifs, et : A) une relation temporelle régulière
entre la survenue des épisodes dépressifs et une période particulière de l’année (non liés à des
facteurs de stress environnementaux évidemment en lien avec la période), B) des rémissions
complètes (ou un virement de la dépression vers la manie ou l’hypomanie) surviennent aussi
au cours d’une période particulière de l’année, C) au moins 2 épisodes dépressifs aux cours
des 2 dernières années remplissant les critères A et B et en l’absence d’épisodes non-
53
GEOFFROY Pierre Alexis
saisonniers au cours de la même période, et D) une vie entière du sujet marquée par
nettement plus d’épisodes dépressifs saisonniers que non saisonniers.
Les caractéristiques cliniques et démographiques suivantes, pouvant possiblement être
liées à la caractéristique saisonnière, ont été évaluées : données sociodémographiques,
traitements psychotropes (vie entière), caractéristiques du début du TB (âge et polarité du
premier épisode thymique), indicateurs d’évolution de la maladie (nombre d’épisodes de
l’humeur, polarité prédominante, cycles rapides), tentatives de suicide, comorbidités
anxieuses et comorbidités addictives. La polarité prédominante était définit par un ratio du
nombre d’épisodes maniaques divisé par le nombre d’épisodes dépressifs, dont un ratio >2/3
indiquait une polarité prédominante maniaque et un ratio <1/3 une polarité prédominante
dépressive (95).
Analyses statistiques
Pour comparer les sujets avec et sans caractéristique saisonnière, des tests statistiques
descriptifs standards ont été utilisés : Chi2 X2, Wilcoxon. Les distributions gaussiennes des
variables quantitatives ont été testées par la méthode de Shapiro-Wilk et la lecture graphique
des QQ plots. Lorsque les variables ne suivaient pas une distribution normale, des tests nonparamétriques ont été utilisés.
Dans un premier temps des analyses univariées ont été réalisées sur la population totale
de 452 sujets. Dans un second temps, une méthode de régression logistique par étapes
retrogrades (backward stepwise logistic regression) a été faite avec les variables présentant
des associations statistiquement significatives lors de l’analyse univariée et différenciant les
groupes avec ou sans caractéristique saisonnière. Les odds ratio (OR) et les intervalles de
confiance à 95% (IC) ont été rapportés pour les variables significatives identifiées par la
méthode de régression logistique.
54
GEOFFROY Pierre Alexis
Toutes les analyses statistiques ont été réalisées avec le logiciel statistique « R » libre
de droit (R software package, version 2.14.0) distribué par la R Foundation for Statistical
Computing.
Le niveau de significativité a été fixé à 5%. Une méthode de correction de Bonferroni
(= 5% / n tests statistiques) a été appliquée afin de prendre en compte les tests multiples et a
fixé un niveau de significativité à p≤0.003.
55
GEOFFROY Pierre Alexis
C.
RÉSULTATS
Traitements et caractéristiques sociodémographiques
Quatre cent cinquante deux patients avec TB ont pu être inclus dans cette étude dont
102 (22.6%) présentaient un caractère saisonnier (CS+) et 350 (77.4%) n’en présentait pas
(CS-) selon les critères DSM-IV-TR.
Les groupes étaient comparables sur les variables sociodémographiques (voir Tableau
1). En particulier, il n’existait pas de différence de distribution de la caractéristique
saisonnière entre les femmes et les hommes (23% contre 22% respectivement).
Sur le plan des traitements psychotropes, il n’existait pas de différence entre les patients
avec TB et CS+ comparés aux patients avec TB et CS- sur les prises vie entière des différents
types de traitements psychotropes : antidépresseurs (p=0.52), lithium (p=0.26), valproate
(p=0.11), carbamazepine (p=0.47), antipsychotiques atypiques (p=0.49), antipsychotiques
typiques (p=0.09) et benzodiazépines (p=0.41).
Les résultats des analyses de comparaison entre les groupes des traitements et des
caractéristiques sociodémographiques sont résumés dans le Tableau 1 qui suit.
56
GEOFFROY Pierre Alexis
Tableau 1. Traitements et caractéristiques sociodémographiques des patients avec trouble
bipolaire (TB) et caractéristique saisonnière (CS+) ou sans caractéristique saisonnière (CS-)
Variables
N
(452)
CS+
CS(n=102, 22.6%)
(n=350, 77.4%)
moyenne (DS) ou n (%)a
W/Chi2
P
Caractéristiques sociodémographiques
Genre
Femme b
Homme c
Age
Antécédent familial de trouble de
l’humeur
Non
Oui
452
65 (63.7)
37 (36.3)
216 (61.7)
134 (38.3)
0.13
0.71
452
44.70 (13.28)
44.50 (13.19)
18132.5
0.81
422
22 (23.2)
73 (76.8)
92 (28.1)
235 (71.9)
0.92
444
39 (38.6)
62 (61.4)
161 (46.9)
182 (53.1)
421
28 (29.8)
66 (70.2)
428
2.18
0.14
70 (21.4)
257 (78.6)
2.87
0.09
74 (75.5)
24 (24.5)
260 (78.8)
70 (21.2)
0.47
0.49
440
2 (2.0)
98 (98.0)
11 (3.2)
329 (96.8)
0.41
0.52
418
5 (5.4)
87 (94.6)
26 (8.0)
300 (92.0)
0.68
0.41
444
3 (3.0)
98 (97.0)
23 (6.6)
325 (93.4)
1.90
0.17
444
31 (31.0)
69 (69.0)
87 (25.3)
257 (74.7)
1.29
0.26
437
59 (60.2)
39 (39.8)
233 (68.7)
106 (31.3)
2.49
0.11
441
62 (63.3)
36 (36.7)
203 (59.2)
140 (40.8)
0.53
0.47
Niveau d’études
Élevé
Moins élevé
0.34
Traitements psychotropes (vie entière)
Antipsychotique de première génération
Non
Oui
Antipsychotique de seconde génération
Non
Oui
Antidépresseur
Non
Oui
Benzodiazépine
Non
Oui
Stabilisateurs de l’humeur
Non
Oui
Lithium
Non
Oui
Valproate
Non
Oui
Tégrétol
Non
Oui
a
DS (=déviation standard) et % des colonnes
Femmes : 22% avec CS (65/216)
c
Hommes : 23% avec CS (37/134)
b
57
GEOFFROY Pierre Alexis
Caractéristiques cliniques des patients avec caractéristique saisonnière
Ainsi présenté dans le Tableau 2, le caractère saisonnier était davantage associé au
sous-type II de TB (42/137; 31%) en comparaison au sous-type I de TB (60/315; 19%). Les
patients avec CS+ avaient également plus de cycles rapides (p<0.0001), plus d’antécédents de
troubles des conduites alimentaires (p=0.0039), et rapportaient significativement plus
d’épisodes de l’humeur (p=0.00047) (dont maniaques hypomaniaques, mixtes et dépressifs)
et tout particulièrement plus d’épisodes dépressifs (p<0.0001). Les patients avec TB et CS+,
comparés aux patients avec TB et CS-, présentaient également un âge de début du TB plus
jeune (p=0.028).
La correction de Bonferroni pour tests multiples (p≤0.003) gardait significatif à cette
étape les associations du caractère saisonnier avec davantage de cycles rapides, plus
d’épisodes de l’humeur toutes polarités confondues, et plus d’épisodes dépressifs.
Les résultats des analyses de comparaison des caractéristiques cliniques des patients
avec TB et CS+ ou CS- sont résumés dans le Tableau 2 qui suit.
58
GEOFFROY Pierre Alexis
Tableau 2. Caractéristiques cliniques des patients avec trouble bipolaire (TB) et
caractéristique saisonnière (CS+) ou sans caractéristique saisonnière (CS-)
Variables
N
(452)
Variables catégorielles
Sous-type TB
I
452
II
Polarité de début
Manie
447
Dépression
Polarité prédominante
Manie
212
Dépression
Cycles rapides*
Non
445
Oui
Symptômes psychotiques*
Non
451
Oui
Tentative de suicide*
Non
447
Oui
Troubles anxieux*
Non
352
Oui
Trouble des conduites alimentaires*
Non
439
Oui
Mésusage d’alcool *
Non
442
Oui
Mésusage de cannabis*
Non
448
Oui
Variables continues
Age de début
450
Age de la 1ere hospitalisation
436
Durée d’évolution (années)
448
Nombre total d’épisodes
415
Nombre d’épisodes dépressifs
426
Nombre d’épisodes maniaques(BD1)
315
Nombre d’épisodes hypomaniaques
137
*vie entière
a
DS (=déviation standard) et % des colonnes
CS(n=350,
77.4%)
moyenne (DS) ou n (%)a
CS+
(n=102, 22.6%)
W/Chi2
P
60 (58.8)
42 (41.2)
255 (72.9)
95 (27.1)
7.36
0.0067
23 (23.5)
75 (76.5)
97 (27.8)
252 (72.2)
0.73
0.39
16 (30.8)
36 (69.2)
45 (28.1)
115 (71.9)
0.14
0.71
59 (61.5)
37 (38.5)
286 (81.9)
63 (18.1)
18.14
<0.0001
56 (54.9)
46 (45.1)
170 (48.7)
179 (51.3)
1.21
0.27
58 (57.4)
43 (42.6)
177 (51.2)
169 (48.8)
1.23
0.27
43 (48.3)
46 (51.7)
126 (47.9)
137 (52.1)
0.004
0.95
80 (80.8)
19 (19.2)
310 (91.2)
30 (8.8)
8.31
75 (75.8)
24 (24.2)
281 (81.9)
62 (18.1)
1.86
0.17
26 (26.3)
73 (73.7)
114 (32.7)
235 (67.3)
1.47
0.23
23.13 (8.52)
29.47 (14.11)
21.60 (12.84)
8.40 (4.95)
6.08 (3.75)
3.53 (3.65)
6.5 (5.08)
26.39 (11.58)
32.96 (14.50)
18.55 (11.06)
6.64 (3.99)
4.52 (2.86)
2.58 (2.20)
4.5 (4.47)
20147.5
17757.5
15358.5
10696.5
10316.5
5795.5
439
0.028
0.05
0.06
0.00047
<0.0001
0.08
0.10
0.0039
59
GEOFFROY Pierre Alexis
Analyse par régression logistique
Une analyse de régression logistique par étapes (backward stepwise logistic regression)
a été réalisée sur 407 sujets (90% de la population totale) qui présentaient des données
disponibles pour l’ensemble des variables identifiées lors de la première étape d’analyses
univariées et ainsi introduites dans le modèle de régression. Les variables inclues dans le
modèle étaient la présence ou l’absence du sous-type II de TB, de cycles rapides, de troubles
des conduites alimentaires, le nombre d’épisodes dépressifs ; et en considérant les covariables
suivantes : sexe, durée et âge de début du TB.
L’analyse de régression montre des ORs statistiquement significatifs pour CS+ et : le
sous-type II de TB (OR=1.99; IC95% 1.15-3.42; p=0.014), la présence de cycles rapides
(OR=2.05; IC95% 1.14-3.69; p=0.017), l’antécédent de troubles des conduites alimentaires
(OR=2.94 ; IC95% 1.43-6.02 ; p=0.0032) et le nombre total d’épisodes dépressifs (OR=1.13;
IC95% 1.05-1.21; p=0.0015). Au totale 71% des sujets ont été correctement classés par cette
analyse de régression (voir partie A du Tableau 3).
Cette analyse a été répétée avec une stratification par sexe qui incluait d’une part 157
hommes et d’autre part 250 femmes. Chez les hommes, l’analyse a observé des associations
significatives du caractère saisonnier avec le sous-type II de TB (OR=2.89; IC95% 1.21-6.68;
p=0.017) et le nombre total d’épisodes dépressifs (OR=1.21; IC95% 1.07-1.36; p=0.0018).
69% des hommes ont été correctement classés par ces deux variables identifiées par l’analyse
de régression (voir partie B du Tableau 3). Chez les femmes, l’analyse a observé des
associations significatives du caractère saisonnier avec la présence de cycles rapides
(OR=3.02; IC95% 1.47-6.2; p=0.0027) et les antécédents de troubles des conduites
alimentaires (OR=2.60 ; IC95% 1.19-5.64 ; p=0.016). Au total, 51 % des femmes ont
correctement été classées par ces deux variables identifiées par l’analyse de régression (voir
partie B du Tableau 3).
60
GEOFFROY Pierre Alexis
Tableau 3. Régression logistique présentant les différences significatives des caractéristiques
cliniques classant le mieux les individus avec ou sans caractéristique saisonnièrea
A) Analyse en population générale
Odds Ratio
[95% IC]
Variables
Β(DS)
p
POPULATION TOTALE (n=407)
Trouble Bipolaire II
1.99
[1.15 - 3.42]
0.69 (0.28)
0.014
Cycles rapides*
2.05
[1.14 - 3.69]
0.72 (0.30)
0.017
Trouble des conduites
alimentaires*
2.94
[1.43 - 6.02]
1.08 (0.37)
0.0032
Nombre d’épisodes dépressifs
1.13
[1.05 - 1.21]
0.12 (0.037)
0.0015
*vie entière
a
en utilisant les covariables suivantes: âge de début, sexe et durée d’évolution de la maladie
DS : déviation standard
IC : intervalle de confiance
NS : non significatif
B) Analyse par sous-groupe selon le sexe
Odds Ratio
[95% IC]
Variables
Trouble Bipolaire II
Β(DS)
p
HOMMES (n=157)
2.84
[1.21 - 6.68]
0.69 (0.28)
Odds Ratio
[95% CI]
Β(DS)
p
FEMMES (n=250)
0.017
NS
Cycles rapides*
NS
3.02
[1.47 - 6.2]
1.10 (0.37)
0.0027
Trouble des conduites
alimentaires*
NS
2.60
[1.19 - 5.64]
0.95 (0.40)
0.016
Nombre d’épisodes
dépressifs
1.21
[1.07 - 1.36]
0.19 (0.06)
0.0018
NS
*vie entière
a
en utilisant les covariables suivantes: âge de début, sexe et durée d’évolution de la maladie
DS : déviation standard
IC : intervalle de confiance
NS : non significatif
61
GEOFFROY Pierre Alexis
D.
DISCUSSION
Résultats généraux
Un premier résultat important de cette étude est la confirmation de la prévalence
importante (23%) de cette caractéristique saisonnière des épisodes dépressifs chez les sujets
avec TB. Les deux études précédentes de Goikolea et collaborateurs et de Schaffer et
collaborateurs avaient retrouvé des taux similaires (23% et 26% respectivement), et notre
étude vient ainsi confirmer la présence moyenne de un sujet avec TB sur quatre exprimant
une saisonnalité d’expression des récurrences dépressives (60;59).
Cette prévalence est
particulièrement importante puisqu’elle dépasse la prévalence reconnue de la dépression
saisonnière chez les patients déprimés unipolaires qui est autour de 10-20% (96). Cette forte
prévalence vient renforcer également les observations faites par une étude communautaire qui
suggère que les patients avec TB présentent davantage de fluctuations saisonnières de
l’humeur et des comportements comparés aux sujets sans pathologie mentale et même aux
sujets souffrant de dépression unipolaire (67). Ces résultats soulignent que le TB est
probablement le trouble de l’humeur le plus sujet aux effets saisonniers.
D’autre part, nous confirmons les résultats obtenus en analyse multivariée par l’équipe
espagnole de Goikolea et collaborateurs qui retrouvaient une association entre la présence de
cette caractéristique saisonnière et le sous-type II du TB ainsi qu’une récurrence élevée des
épisodes dépressifs (60). La première étude américaine de Schaffer et collaborateurs qui
n’avait pas pu faire de telles analyses fines des caractéristiques cliniques par manque de
puissance, avait néanmoins retrouvé cette association avec le TB de type II (59). Ces résultats
et les nôtres semblent confirmer cette association forte entre le sous-type II du TB et
62
GEOFFROY Pierre Alexis
l’expression saisonnière du TB.
En revanche, nous n’avons pas retrouvé d’association avec la polarité de début du TB,
la polarité prédominante ou la présence de symptômes psychotiques qui avaient été retrouvé
dans l’étude espagnole. Cependant, la taille plus importante de notre population d’étude
permettant une meilleure puissance d’analyse, a permis de démontrer d’autres associations
importantes telles qu’une augmentation par deux du taux de cycles rapides et de celui des
troubles des conduites alimentaires. Enfin, notre observation la plus intéressante est
probablement celle d’une différence selon le sexe d’expression du TB avec caractéristique
saisonnière.
Expression clinique différente selon le sexe
À notre connaissance, il s’agit de la première étude qui démontre que l’homme et la
femme ont une expression clinique différente du TB sous l’influence des saisons. Cette
observation présente des implications cliniques directes en permettant de mieux caractériser
et identifier les patients avec caractéristique saisonnière, et permet également de souligner le
fait que des facteurs cliniques différents peuvent exister en fonction du sexe du sujet. Ainsi
nous avons pu observer que environ 70% des hommes avec TB de caractéristique saisonnière
ont un TB de type II et une récurrence d’épisodes dépressifs plus importante. Chez les
femmes, plus de la moitié avec TB de caractéristique saisonnière présentaient des cycles
rapides et des antécédents de troubles des conduites alimentaires. L’expression différente
selon le sexe du TB avec caractéristique saisonnière pourrait expliquer en partie les
différences observées entre les sexes au niveau des taux d’admissions hospitalières pour
épisode dépressif (39).
Les cycles rapides ont déjà été rapportés dans la littérature scientifique comme étant
63
GEOFFROY Pierre Alexis
préférentiellement associés au patients de sexe féminin (97,98). Plusieurs hypothèses ont pu
être suggérées afin d’expliquer ces observations dont celles d’un taux plus élevé
d’hypothyroïdies, une plus grande utilisation des antidépresseurs et les effets des hormones
gonadiques stéroïdiennes (74). De plus, les troubles des conduites alimentaires dans le TB ont
une prévalence élevée de 5 à 14% et sont essentiellement associés au sexe féminin (99;100).
Dans notre étude la fréquence des troubles des conduites alimentaires était deux fois plus
fréquente chez les patients avec caractéristique saisonnière contre ceux sans cette
caractéristique (19% contre 9% respectivement). Ainsi, nos observations indiquent que les
troubles des conduites alimentaires sont étroitement associés aux femmes avec TB et tout
particulièrement s’il existe un caractère saisonnier des épisodes dépressifs. Des études
précédentes avaient suggéré un lien entre boulimie et TB de type II, mais n’avaient pas étudié
le lien avec un troisième facteur tel que le caractère saisonnier des épisodes (101). Ainsi,
nous proposons ici de nouveaux éléments indiquant une co-ségrégation de plusieurs facteurs
cliniques chez les femmes avec TB : le caractère saisonnier des épisodes dépressifs, les
cycles rapides et les troubles des conduites alimentaires. Ces observations ouvrent de
nouvelles pistes de recherche des possibles mécanismes sous-jacents à l’origine de ces
associations cliniques.
Limites de l’étude
Bien qu’étant à ce jour l’étude du caractère saisonnier proposant la plus grande cohorte
de patients avec TB, cette étude présente plusieurs limites importantes à être soulignées.
La méthode rétrospective du recueil des données, ne permet pas d’exclure le risque
d’un biais de re-mémorisation ou de possibles facteurs de confusion liés aux prises de
traitements psychotropes. Il est difficile d’exclure le fait que certains traitements
psychotropes aient altéré le cours évolutif de la maladie (102). En effet, on peut par exemple
64
GEOFFROY Pierre Alexis
émettre l’hypothèse que l’association observée entre saisonnalité et cycles rapides soit liée
aux prises de traitements antidépresseurs mis en cause dans la précipitation des cycles du TB.
Cependant, cette hypothèse semble peu probable puisqu’il n’a pas été observé de différence
de prise de traitements, en particulier antidépresseurs, entre les deux groupes.
L’approche catégorielle pour définir la caractéristique saisonnière du TB est liée à la
définition du DSM-IV et se limite aux épisodes dépressifs. Le DSM-5 a élargi cette définition
et une étude plus large des effets saisonniers, sans restriction de polarité, sera possible dans
les études futures. De plus, comme nous l’avons vu dans la première partie de cette thèse,
cette approche catégorielle ne permet pas l’analyse des corrélations entre des phases
spécifiques de la maladie et une période précise de l’année. En d’autre terme, elle ne permet
pas l’étude des variations intrinsèques des symptômes liées aux variations saisonnières.
Aussi, ces études d’approche catégorielle, bénéficieraient d’une double approche complétée
d’outils dimensionnels comme le SPAQ (60).
Implications cliniques
Il est démontré que l’étiologie du TB et ses variations symptomatiques saisonnières
sont étroitement liées à la luminosité et aux rythmes biologiques (79). Le sommeil, la
luminosité et la saisonnalité semblent trois conditions interconnectées et à la base de la
chronobiologie. Lorsque ces conditions sont altérées, elles peuvent avoir un impact important
à la fois sur la psychopathologie du TB mais aussi sur son traitement (80). La dépression
saisonnière peut être traitée de manière relativement spécifique en manipulant le système
circadien par le biais de molécules chronobiotiques (agomélatine ou mélatonine) (81;82) et
des chronothérapies (luminothérapie ou déprivation de sommeil) (84;83). De plus, la
dépression saisonnière touchant un sujet sur quatre atteint de TB, les cliniciens sont
encouragés à surveiller étroitement ces populations pendant l’hiver. Enfin, il conviendra sur
65
GEOFFROY Pierre Alexis
le plan individuel de considérer le rôle des saisons dans l’expression du TB et d’organiser au
mieux les stratégies de suivi et de prévention du patient.
66
GEOFFROY Pierre Alexis
E.
CONCLUSION
La prévalence élevée de la caractéristique saisonnière dans le TB, ses caractéristiques
cliniques associées et l’expression différente selon le sexe, suggèrent que la caractéristique
saisonnière est une spécification importante et pertinente du TB. Néanmoins des études
futures apparaissent nécessaires afin de préciser les caractéristiques cliniques associées aux
épisodes maniaques de caractéristique saisonnière. Des études avec de larges populations sont
aussi nécessaires pour préciser l’influence des sexes sur l’expression des caractéristiques
cliniques associées à la caractéristique saisonnière. De manière plus générale, nos résultats
indiquent que la caractéristique saisonnière est un indicateur d’une forme de TB plus sévère
et complexe. Cette caractéristique saisonnière pourrait être utilement intégrée dans les
algorithmes de traitements, proposant l’utilisation de chronobiotiques ou de chronothérapies.
67
GEOFFROY Pierre Alexis
III.
SECOND TRAVAIL EXPÉRIMENTAL :
ÉVALUATION DIMENSIONNELLE SAISONNIÈRE
DES CARACTÉRISTIQUES CLINIQUES DU TROUBLE BIPOLAIRE
68
GEOFFROY Pierre Alexis
A.
INTRODUCTION
Cette dernière section est exploratoire et propose une analyse plus fine de la
saisonnalité des symptômes du TB.
Brièvement, nous avons vu dans la section première de cette thèse, que les individus
souffrant de TB subissent d’importantes variations saisonnières de leurs symptômes,
notamment maniaques, dépressifs et suicidaires. Ce sont ces trois dimensions du TB que nous
avons choisi d’analyser dans ce travail. En effet, Akhter et collaborateurs, qui ont suivi
pendant 10 ans des sujets atteints de TB de type I et II, ont observé une saisonnalité de leurs
symptômes (hypo)maniaques ou dépressifs (70). De plus, Volpe et collaborateurs ont observé
qu’au cours des manies le taux de suicidalité était plus élevé en Décembre et en Janvier et
qu’il était corrélé à une augmentation rapide de la température extérieure (71).
Il existe peu d’études évaluant ces dimensions dans la littérature internationale et ceci
est étroitement lié aux difficultés d’accès à des bases de données suffisamment grandes pour
pouvoir atteindre un niveau de puissance statistique satisfaisant. Aussi, notre étude a
bénéficié des larges données issues de l'enquête « Santé mentale en population générale :
images et réalités » (SMPG), qui est une recherche-action internationale multicentrique
menée par l'Association septentrionale d’épidémiologie psychiatrique (ASEP) et le Centre
collaborateur de l’OMS pour la recherche et la formation en santé mentale (CCOMS, Lille,
France), en collaboration avec la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des
statistiques (Drees) du Ministère de la santé français. Cette enquête, qui a été réalisée auprès
de 40 000 personnes de 18 ans issus de la population générale, semblait ainsi a priori
correspondre largement aux objectifs de puissance attendus.
69
GEOFFROY Pierre Alexis
Nous proposons ici des résultats préliminaires de l’étude des effets des saisons sur 3
dimensions symptomatiques du TB (symptômes maniaques, dépressifs et suicidaires) chez
des sujets atteints de TB et identifiés par l’enquête SMPG.
B.
MÉTHODE
Population d’étude
Cette enquête SMPG a été réalisée auprès de 37 063 sujets adultes (>18 ans) en France
métropolitaine (cinquantaine de sites), dans les Départements d’outre mer (DOM), en Algérie
(Alger), en Belgique (Bruxelles), aux Comores, en Grèce (Halakida), à Madagascar
(Antananarivo et Mahajanga), à l’Ile Maurice et en Mauritanie (Nouakchott). Les enquêtes
ont été menées entre 1999 et 2003. Les données ont été redressées pour être représentatives
de la population française âgée de 18 ans ou plus sur les variables d’âge, de sexe, de niveau
d’études, de catégorie socioprofessionnelle et de situation vis-à-vis de l’emploi, et ce à partir
des résultats du recensement de la population réalisé par l’Insee en 1999. La méthode de cette
enquête a été détaillée dans des études précédentes (103).
Pour notre étude, seules les données issues des sites français métropolitains ont été
utilisées afin que les comparaisons saisonnières mensuelles soient comparables (c’est à dire
correspondent aux mêmes saisons et donc à des variations climatiques comparables).
Variables mesurées
Le questionnaire de l’enquête SMPG dure en moyenne 40 minutes et est administré au
cours d'entretiens en face à face par des intervenants formés et entraînés à la passation du
questionnaire. L’enquête utilise 4 sous-questionnaires :
1)
un
questionnaire
sur
les
70
GEOFFROY Pierre Alexis
représentations de la « folie », la « maladie mentale », la « dépression » et les modes d’aides
et de soins ; 2) un questionnaire diagnostic structuré utilisant l’International Neuropsychiatric
Interview (MINI) reprenant les critères de la classification internationale CIM10 (104); 3)
une fiche complémentaire de recours aux soins et de retentissement en cas de trouble repéré;
et 4) un questionnaire sociodémographique.
Pour cette étude, les variables d’intérêt étaient le mois de passation du questionnaire, le
diagnostic de type I de TB, la présence d’un épisode actuel de dépression, de manie, d’idées
suicidaires et de tentatives de suicides. Les variables sociodémographiques retenues comme
covariables dans les modèles statistiques utilisés étaient : âge, sexe, situation matrimoniale,
niveau de formation et statut professionnel.
Analyses statistiques
L’analyse de l’effet saisonnier, des mois de l’année sur l’expression des dimensions de
manie, de dépression, d’idées suicidaires ou de tentatives de suicide, a été faite à l’aide d’un
modèle Cosinor décrit dans des études précédentes (53). C’est un modèle mathématique,
historiquement le plus utilisé en chronobiologie, qui est basé sur la fonction sinus et dont les
principales caractéristiques sont l’acrophase (pouvant être appelée simplement « phase » et
définit par le moment où survient la valeur la plus élevée), la bathyphase (définit par le
moment où survient la valeur la plus élevée), l’amplitude (définit par la moitié de la variation
globale prédictible par un modèle mathématique), et la moyenne (définit comme la moyenne
arithmétique des valeurs). Elle permet d’obtenir les différents paramètres d’une aire avec les
intervalles de confiance. Elle utilise la méthode des moindres carrés et permet de définir la
fonction sinusoïde qui se rapproche le plus de la série temporelle observée.
71
GEOFFROY Pierre Alexis
La formule mathématique utilisée du modèle Cosinor est la suivante :
Pour chaque dimension, le degré de significativité de la régression est calculé et un
intervalle de confiance à 95% de probabilité est donné. Les analyses statistiques ont toutes été
réalisées à l’aide du package Season (Barnett et al, 2012) du logiciel statistique R, version
2.14.0 (31 Octobre 2011) proposé par the R Foundation for Statistical Computing.
72
GEOFFROY Pierre Alexis
C.
RÉSULTATS
De cette population, 3455 sujets avec TB de type I ont pu être identifiés et
suffisamment renseignés pour les variables d’intérêt.
La distribution annuelle par mois des dimensions du TB était la suivante :
Figure 4. Distribution mensuelle des dimensions cliniques d’intérêt associées au trouble
bipolaire.
Mois Dépressions Manies 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 90 116 50 101 50 4 8 9 10 44 0 22 27 30 46 19 34 0 11 4 6 35 0 15 Total 504 227 Idées suicidaires 26 48 12 42 25 0 5 3 0 18 0 8 187 Tentatives de suicide 6 13 6 8 10 0 4 1 0 4 0 1 53 Nombre d’évaluations 4249 5449 6841 2521 5053 884 860 904 1660 6014 0 2628 37063 73
GEOFFROY Pierre Alexis
Figure 5. Fréquence mensuelle des dimensions cliniques d’intérêt associées au trouble
bipolaire.
a)
Dépressions
b)
Manies
74
GEOFFROY Pierre Alexis
c)
Idées suicidaires
d)
Tentatives de suicide
75
GEOFFROY Pierre Alexis
Le modèle Cosinor pour la dépression a pu être appliqué sur 3455 observations. Une
évolution annuelle sinusoïdale significative montrait un effet de la saisonnalité (AIC=2648).
Le pic de dépressions était estimé en mi-juillet (phase = 7.5) et le point le plus bas en mijanvier (low point = 1.5).
Figure 6. Évolution annuelle sinusoïdale (COSINOR) des dépressions associées au
trouble bipolaire.
76
GEOFFROY Pierre Alexis
Le modèle Cosinor pour la manie a pu être appliqué sur 3455 observations. Une
évolution annuelle sinusoïdale significative montrait un effet de la saisonnalité (AIC=1549).
Le pic de manies était estimé en fin juillet (phase = 7.8) et le point le plus bas en fin janvier
(low point = 1.8).
Figure 7. Évolution annuelle sinusoïdale (COSINOR) des manies associées au trouble
bipolaire.
77
GEOFFROY Pierre Alexis
Le modèle Cosinor pour les idées suicidaires a pu être appliqué sur 3270 observations.
Une évolution annuelle sinusoïdale significative montrait un effet de la saisonnalité
(AIC=1311). Le pic d’idées suicidaires était estimé en mi-juillet (phase = 7.5) et le point le
plus bas en mi-janvier (low point = 1.5).
Figure 8. Évolution annuelle sinusoïdale (COSINOR) des idées suicidaires associées au
trouble bipolaire.
78
GEOFFROY Pierre Alexis
Le modèle Cosinor pour les tentatives de suicides a pu être appliqué sur 3269
observations. Une évolution annuelle sinusoïdale significative montrait un effet de la
saisonnalité (AIC=487.8). Le pic des tentatives de suicide était estimé en fin juin (phase =
6.9) et le point le plus bas en fin décembre (low point = 12.9).
Figure 9. Évolution annuelle sinusoïdale (COSINOR) des tentatives de suicide
associées au trouble bipolaire.
79
GEOFFROY Pierre Alexis
D.
DISCUSSION
Les évolutions annuelles sinusoïdales (Cosinor) des 4 dimensions cliniques du TB
semblent ici toutes présenter un pic d’occurrences en milieu d’été, soit mi/fin juillet. Sur le
plan des symptômes thymiques, nous répliquons sans surprise le pic de manie bien démontré
et répliqué de manière internationale en été (voir première section de cette thèse). Concernant
le pic de dépressions, le modèle Cosinor ne pouvant présenter qu’un seul pic et surtout en
l’absence d’observations en novembre, il est possible que notre modèle aie seulement retenu
le second pic de dépressions observé en milieu d’été (voir première section de cette thèse) et
non celui classiquement observé en hiver par défaut d’observations. Cependant, il faut
souligner que ce pic survient davantage après le pic de manies et plutôt en fin d’été. Or ici
nous observons un pic de dépressions qui semble survenir avant le pic de manies.
Les idées suicidaires et les tentatives de suicide apportent des éléments d’observation
intéressants. En effet, le pic de tentatives de suicide et d’idées suicidaires semblent se
présenter tout deux en début d’été avec un pic de tentatives de suicide précédant légèrement
celui des idées suicidaires. Il est possible d’émettre l’hypothèse que le sous-groupe de
patients avec tentative de suicide est plus sévère ou plus sensible aux variations saisonnières
que le sous-groupe avec idées suicidaires et présentent donc des symptômes plus tôt après les
modifications climatiques. Soulignons que ces résultats répliquent les observations
antérieures démontrant un pic de suicides plutôt en avril-mai (105). De plus Volpe et
collaborateurs avaient précédemment observés qu’une augmentation rapide de la température
extérieure était corrélée à la suicidalité (71). Enfin, la superposition partielles des courbes de
manies et de dépressions avec celles des tentatives de suicide et des idées suicidaires vient
confirmer des résultats antérieurs de Morken et collaborateurs qui avaient observé que le taux
80
GEOFFROY Pierre Alexis
de suicides chez les hommes avec TB corrélait avec les taux d’admissions pour dépression et
pour manie (39). Il était bien démontré que les patients avec TB présentaient un pic de
suicides plus important que des sujets sans pathologie psychiatrique ou avec une autre
pathologie psychiatrique, mais que ce pic apparaissait à la même période de l’année (105). La
co-vulnérabilité trouble de l’humeur et suicide était bien connue, mais ici la corrélation
annuelle entre symptômes thymiques et symptômes suicidaires semblent indiquer la présence
de facteurs environnementaux précipitants communs.
Plusieurs limites de ce travail exploratoire sont à souligner. La plus importante
concerne l’absence d’observation en novembre qui a pu déstabiliser le modèle Cosinor.
L’étude SMPG a pu bénéficier de nouvelles inclusions de sujets, et nous espérons pouvoir
récupérer à terme des données sur des sujets évalués en novembre. Les analyses seront alors à
nouveau réalisées afin de vérifier la persistance de ces résultats. Une seconde limite concerne
la difficulté d’exclure un effet centre de ces données. En effet, malgré les efforts de
standardisation de l’enquête, il est impossible d’exclure l’existence de différences entre les
centres concernant la passation du MINI et donc des fluctuations de la propension à identifier
des sujets avec TB et/ou des symptômes de la maladie. Il conviendrait donc dans les analyses
futures d’intégrer le facteur « centre » dans les modèles Cosinor. Des limites habituelles liées
au caractère rétrospectif de l’étude sont à souligner. Un biais de re-mémorisation peut ainsi
exister, avec possiblement une sous déclaration des épisodes les plus anciens et donc une
sous-estimation de la fréquence des variables étudiées.
81
GEOFFROY Pierre Alexis
E.
CONCLUSION
Cette dernière section propose une travail exploratoire de quatre dimensions du TB : la
dépression, la manie, les idées suicidaires et les tentatives de suicide. Des premiers résultats
intéressants de ces analyses viennent confirmer l’existence d’une fluctuation saisonnière
importante de ces quatre dimensions cliniques du TB. L’été, et surtout les mois de juin et
juillet, apparaît être une période particulière de vulnérabilité et de décompensation du cours
évolutif de la maladie bipolaire. La co-vulnérabilité entre le TB et le suicide est bien
démontrée. Par la co-occurrence annuelle en début d’été des symptômes thymiques et des
symptômes
suicidaires,
ce
travail
vient
souligner
qu’il
existerait
des
facteurs
environnementaux précipitants communs. Il serait donc intéressant dans des études futures
d’analyser ces données avec les variables climatiques locales dont la température extérieure,
l’ensoleillement, la pluviométrie et la pression atmosphérique. Enfin ces résultats devront être
répliqués dans des études indépendantes où il serait intéressant d’analyser les fluctuations
saisonnières d’autres dimensions (ou comorbidités) du TB comme les addictions, les troubles
anxieux, les caractéristiques psychotiques, les rythmes circadiens et le sommeil.
82
GEOFFROY Pierre Alexis
IV.
CONCLUSION GÉNÉRALE
Cette revue systématique de littérature et les deux travaux expérimentaux proposés dans
cette thèse permettent de conclure qu’il existe une saisonnalité du TB. Les différents niveaux
d’évaluation de cette saisonnalité, allant de l’analyse des taux d’admissions hospitalières aux
évaluations dimensionnelles individuelles, indiquent qu’à la fois les épisodes de la maladie
mais aussi ses symptômes subissent ces effets saisonniers. Une donnée importante et
émergeante est que ces effets des saisons semblent plus importants chez les sujets avec TB
comparés à des sujets sains et à des sujets avec dépression unipolaire, même de
caractéristique saisonnière. L’existence de pics d’épisodes de manies ou de dépressions du
TB sont des observations réalisées de manière internationale et très répliquées, permettant
ainsi un excellent niveau de confiance dans ces observations. Les pics d’épisodes maniaques
apparaissent au cours du printemps/été et dans une moindre mesure en automne, alors que les
pics d’épisodes dépressifs apparaissent majoritairement en hiver et dans une moindre mesure
en été. Il apparaît que les conditions climatiques peuvent influencer et/ou déclencher les
symptômes du TB, mais les études de corrélation avec les variables climatiques locales sont à
ce jour insuffisantes pour être en mesure d’identifier clairement les facteurs climatiques
précipitants. Néanmoins, il semblerait que les changements brutaux de luminosité, de
température ou d’humidité ont une influence très probable sur le TB, mais dont la taille des
effets et la nature exacte seront à préciser. Une évaluation plus catégorielle des individus avec
TB de caractéristique saisonnière indique que la symptomatologie du TB est en elle-même
plus sévère. En effet, les patients avec TB et caractéristique saisonnière selon la définition du
DSM présentent davantage un TB de type II, plus de troubles des conduites alimentaires, de
cycles rapides et davantage de récurrences thymiques. L’étude de dimensions cliniques du
TB a montré des premiers résultats très intéressants qui devront être consolidés et étendus à
83
GEOFFROY Pierre Alexis
l’ensemble des dimensions cliniques du TB. En effet, les caractéristiques thymiques,
suicidaires, psychotiques et l’agressivité apparaissent subirent des fluctuations saisonnières,
probablement influencées par des facteurs climatiques possiblement communs (notamment
pour les symptômes thymiques et les symptômes suicidaires).
Il apparaît nécessaire de préciser ces observations cliniques dans des études futures qui
devront examiner les mécanismes physiologiques sous-tendant les effets saisonniers dans le
TB. Des études supplémentaires semblent également nécessaires afin d’intégrer utilement la
présence d’une composante saisonnière du TB dans les algorithmes de décision
thérapeutique, afin d’aider au mieux le clinicien dans son choix éventuel de thérapeutiques
chronobiologiques ciblées. Enfin plus généralement, ces travaux permettront d’améliorer le
dépistage, le suivi et les thérapeutiques des patients avec TB, dans l’idée du développement
d’une médecine plus personnalisée dans le champ de la psychiatrie.
84
GEOFFROY Pierre Alexis
V.
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92
GEOFFROY Pierre Alexis
VI.
ANNEXES
93
GEOFFROY Pierre Alexis
ANNEXE 1 : Questionnaire d’évaluation de la caractéristique saisonnière (SPAQ) non
validé en français (Rosenthal et al. 1987)
SEASONAL PATTERN ASSESSMENT QUESTIONNAIRE
1. Name _____________________________________
2. Age ___________
3. Place of birth - City / Province (State) / Country _________________________________________________
________
4. Today's date
Month
________
Day
________
Year
5. Current weight (in lbs.)
____________
6. Years of education
Less than four years of high school
1
High school only
2
1-3 years post high school
3
4 or more years post high school
4
7. Sex -
Male
1
Female
8. Marital Status -
Single
1
Married
2
INSTRUCTIONS
* Please circle the number
beside your choice.
Example:
Sex Male 1
2
Female 2
Sep./Divorced 3
Widowed
4
9. Occupation ______________________________________
10. How many years have you lived in this climatic area?
________________
The purpose of this form is to find out how your mood and behaviour change over time.
Please fill in all the relevant circles. Note: We are interested in your experience; not others
you may have observed.
11. To what degree do the following change with the seasons?
No
Change
Slight
Change
Moderate Marked
Change Change
Extremely
Marked
Change
A. Sleep length
0
1
2
3
4
B. Social activity
0
1
2
3
4
C. Mood (overall feeling of well being)
0
1
2
3
4
D. Weight
0
1
2
3
4
E. Appetite
0
1
2
3
4
F. Energy level
0
1
2
3
4
94
GEOFFROY Pierre Alexis
ANNEXE 1 (SUITE)
SEASONAL PATTERN ASSESSMENT QUESTIONNAIRE
1. Name _____________________________________
2. Age ___________
3. Place of birth - City / Province (State) / Country _________________________________________________
________
4. Today's date
Month
________
Day
________
Year
5. Current weight (in lbs.)
____________
6. Years of education
Less than four years of high school
1
High school only
2
1-3 years post high school
3
4 or more years post high school
4
7. Sex -
Male
1
Female
8. Marital Status -
Single
1
Married
2
INSTRUCTIONS
* Please circle the number
beside your choice.
Example:
Sex Male 1
2
Female 2
Sep./Divorced 3
Widowed
4
9. Occupation ______________________________________
10. How many years have you lived in this climatic area?
________________
The purpose of this form is to find out how your mood and behaviour change over time.
Please fill in all the relevant circles. Note: We are interested in your experience; not others
you may have observed.
11. To what degree do the following change with the seasons?
No
Change
Slight
Change
Moderate Marked
Change Change
Extremely
Marked
Change
A. Sleep length
0
1
2
3
4
B. Social activity
0
1
2
3
4
C. Mood (overall feeling of well being)
0
1
2
3
4
D. Weight
0
1
2
3
4
E. Appetite
0
1
2
3
4
F. Energy level
0
1
2
3
4
95
AUTEUR : Nom : GEOFFROY
Prénom : Pierre Alexis
Date de Soutenance : 11 avril 2014
Titre de la Thèse : Saisonnalité et Trouble Bipolaire
Thèse - Médecine - Lille 2014
Cadre de classement : Psychiatrie Adulte
DES + spécialité : DES Psychiatrie
Mots-clés : Troubles bipolaires ; saisons ; chronobiologie ; rythmes
caractéristique saisonnière ; troubles de l’humeur ; dépression ; manie.
circadiens ;
Résumé : Saisonnalité et Trouble Bipolaire
Contexte : Le trouble bipolaire (TB) est une maladie psychiatrique neurodéveloppementale
sévère et fréquente (1 à 4% de la population générale). La sévérité et le pronostic de cette
maladie est en partie liée à un taux élevé de récurrences des épisodes de l’humeur avec 70 à
80% de rechutes en moyenne à 2 ans après un épisode majeur (dépressif ou maniaque) et ce
malgré le traitement. Ces récurrences peuvent suivre une cyclicité saisonnière pour un
nombre important de patients. Or, l’étude de l’effet des saisons dans le TB présente une
littérature complexe et hétérogène, qui ne bénéficie pas à ce jour de synthèse exhaustive.
Méthode : Ce travail de thèse propose : I) une revue systématique de la littérature scientifique
internationale, II) un travail expérimental d’étude des caractéristiques cliniques du TB
associées au caractère saisonnier du DSM-IV, et III) un second travail expérimental proposant
une évaluation dimensionnelle saisonnière des caractéristiques cliniques du TB.
Résultats : Les différents niveaux d’évaluation de cette saisonnalité, allant de l’analyse des
taux d’admissions hospitalières aux évaluations dimensionnelles individuelles, indiquent qu’à
la fois les épisodes du TB mais aussi ses symptômes subissent ces effets saisonniers.
L’existence de pics d’épisodes de manies ou de dépressions du TB sont des observations
internationales et très répliquées. Les pics d’épisodes maniaques apparaissent au cours du
printemps/été et dans une moindre mesure en automne, alors que les pics d’épisodes
dépressifs apparaissent en hiver et dans une moindre mesure en été. Il apparaît que les
conditions climatiques peuvent influencer et/ou déclencher les symptômes.
Une évaluation plus catégorielle de la caractéristique saisonnière dans le TB indique qu’elle
s’associe à une maladie de forme plus sévère. Il est démontré que 25% des sujets avec TB
présentent une saisonnalité des épisodes dépressifs et que 15% présentent une cyclicité des
épisodes maniaques.
L’étude des dimensions cliniques montre que les caractéristiques thymiques, suicidaires,
psychotiques et l’agressivité apparaissent subirent des fluctuations saisonnières,
probablement influencées par des facteurs climatiques possiblement communs (notamment
pour les symptômes thymiques et les symptômes suicidaires).
Conclusion : Il existe une saisonnalité du TB, dont la spécification serait utilement intégrée
dans les algorithmes de décision thérapeutique, de prévention et de dépistage.
Composition du Jury :
Président : Monsieur le Professeur Pierre THOMAS
Assesseurs : Messieurs le Professeur Guillaume VAIVA, le Professeur Olivier COTTENCIN,
le Professeur Frank BELLIVIER, le Docteur Renaud JARDRI.
96
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