UNIVERSITÉ DU DROIT ET DE LA SANTÉ - LILLE 2 FACULTÉ DE MÉDECINE HENRI WAREMBOURG Année : 2014 THÈSE POUR LE DIPLÔME D’ÉTAT DE DOCTEUR EN MÉDECINE Saisonnalité et Trouble Bipolaire Présentée et soutenue publiquement le 11 avril 2014 à 18 heures au Pôle Recherche Par Pierre Alexis GEOFFROY _______________ JURY Président : Monsieur le Professeur Pierre THOMAS Assesseurs : Monsieur le Professeur Guillaume VAIVA Monsieur le Professeur Olivier COTTENCIN Monsieur le Professeur Frank BELLIVIER Directeur de Thèse : Monsieur le Docteur Renaud JARDRI _______________ GEOFFROY Pierre Alexis « Mon bon Henri, j’interromps un moment mon article sur Lecomte de Lisle, pour t’écrire vingt lignes. (...) Emmanuel t’avait peut être parlé d’une stérilité curieuse que le printemps avait installé en moi. Après trois mois d’impuissance, j’en suis enfin débarrassé, et mon premier sonnet est consacré à la décrire, c’est-à-dire à la maudire. » Correspondance de Stéphane Mallarmé adressée à son ami Henri Cazalis 4 juin 1862 « C’est dans l’orbite de la biologie et de la médecine que la notion de maladie mentale doit se mouvoir. » Henri Ey Défense et illustration de la psychiatrie, Masson éditions, 1978, P.5. 10 GEOFFROY Pierre Alexis TABLE DES MATIÈRES I. SAISONNALITÉ ET TROUBLE BIPOLAIRE : SYNTHESE DE LA LITTÉRURE SCIENTIFIQUE INTERNATIONALE......................................................12 A. Introduction....................................................................................................13 B. Méthode de la revue systématique de la littérature....................................14 1. Définition du trouble bipolaire et de la saisonnalité...................................14 2. Stratégie de recherche bibliographique.......................................................25 3. Processus de sélection des études..................................................................25 C. Résultats..........................................................................................................27 1. Recherche bibliographique...........................................................................27 2. Analyse de la saisonnalité par les études sur l’utilisation des services de santé.....................................................................................................................27 3. Polarité des épisodes et corrélation avec les variables climatiques...........31 4. Analyse du caractère saisonnier selon les critères DSM............................35 5. Analyse dimensionnelle de la saisonnalité dans le TB................................37 D. Discussion........................................................................................................41 E. Conclusion.......................................................................................................49 II. PREMIER TRAVAIL EXPÉRIMENTAL : CARACTÉRISTIQUES CLINIQUES DU TROUBLE BIPOLAIRE ASSOCIÉES AU CARACTÈRE SAISONNIER DU DSM-IV..................................................................................................50 A. Introduction....................................................................................................51 B. Méthode...........................................................................................................53 C. Résultats..........................................................................................................56 D. Discussion........................................................................................................62 E. Conclusion.......................................................................................................67 III. SECOND TRAVAIL EXPÉRIMENTAL : ÉVALUATION DIMENSIONNELLE SAISONNIÈRE DES CARACTÉRISTIQUES CLINIQUES DU TROUBLE BIPOLAIRE...........................................................................................................................68 A. Introduction....................................................................................................69 B. Méthode...........................................................................................................70 C. Résultats..........................................................................................................73 D. Discussion........................................................................................................80 E. Conclusion.......................................................................................................82 IV. CONCLUSION GÉNÉRALE...................................................................................83 V. BIBLIOGRAPHIE.....................................................................................................85 VI. ANNEXES...................................................................................................................93 11 GEOFFROY Pierre Alexis I. SAISONNALITÉ ET TROUBLE BIPOLAIRE : SYNTHESE DE LA LITTÉRURE SCIENTIFIQUE INTERNATIONALE 12 GEOFFROY Pierre Alexis A. INTRODUCTION Le trouble bipolaire (TB) est une maladie psychiatrique sévère et cyclique, faite de récurrences d’épisodes de l’humeur dits « maniaques » ou « dépressifs ». Ces épisodes se définissent par des changements à la fois de l’humeur et des changements de l’activité ou de l’énergie qui sont augmentés dans la manie ou diminués dans la dépression (1). Le TB regroupe un ensemble de maladies de l’humeur aux présentations cliniques hétérogènes. On définit classiquement selon le Diagnostic and Statistical Manual for Mental Disorders 5 (DSM, 5e édition) produit par l’association psychiatrique américaine : le TB de type I (définit par des épisodes maniaques et dépressifs, ce sous-type de TB peut être diagnostiqué sur la base d’un seul épisode maniaque), le TB de type II (définit par la présence d’épisodes dépressifs et d’épisodes hypomaniaques qui n’ont pas réunis les critères de l’épisode maniaque), la cyclothymie (définit par des périodes associant des symptômes hypomaniaques et dépressifs qui n’ont pas réunis les critères de l’épisode dépressif majeur), et le TB non spécifié (définit par des symptômes hypomaniaques et dépressifs qui ne réunissent pas les critères diagnostics des sous-types définis précédemment) (2). Le TB est une maladie fréquente qui touche 1% de la population générale si l’on considère le TB dit de type I et II, et dont la prévalence va jusqu’à 4,4% si l’on considère le spectre plus élargi du TB (3). Ces estimations sont plutôt conservatrices puisqu’il existe un taux important d’erreurs diagnostiques allant de 30% à 69% en Europe et aux États-Unis (4). D’autre part il existe un retard diagnostic catastrophique d’en moyenne 10 ans chez les patients atteints de TB (5). 13 GEOFFROY Pierre Alexis La physiopathologie du TB est complexe et associe des facteurs de risque génétiques et environnementaux (6). Il est également démontré que cette maladie est de nature neurodéveloppementale et qu’elle s’associe à un début du trouble avant 21 ans pour la moitié des sujets atteints (7). La sévérité du TB est telle que le TB est le 4e contributeur de la charge mondiale de morbidité générale (tous âges confondus) parmi les maladies mentales, neurologiques et d’usage de substances (8). La sévérité et le pronostic de cette maladie est en partie liée à un taux élevé de récurrences des épisodes de l’humeur avec 70 à 80% de rechutes en moyenne à 2 ans après un épisode majeur et ce malgré le traitement (9,10). Ces récurrences peuvent suivre une cyclicité saisonnière, ce qui n’est pas rare puisque 25% des sujets avec TB semblent présenter une saisonnalité de leurs épisodes dépressifs et 15% d’entre eux présentent une cyclicité de leurs épisodes maniaques (11,12). La vulnérabilité circadienne du TB est telle qu’en plus de cette cyclicité des épisodes, des anomalies des rythmes chronobiologiques apparaissent chez les patients avec TB lors de toutes les phases de la maladie (13). Ainsi, des perturbations du sommeil et des rythmes circadiens sont présentes pendant les épisodes (insomnie, hypersomnie, réduction du besoin de sommeil), pendant les phases de stabilité de l’humeur (anomalies veille/sommeil, hypersensibilité aux perturbateurs des rythmes, chronotype davantage du soir, anomalies biochimiques de sécrétion telle que pour la mélatonine et le cortisol, hypersensibilité mélatoninergique à la lumière) et précèdent également les rechutes thymiques pouvant ainsi prédire celles-ci (13). Certaines de ces anomalies du sommeil et des rythmes circadiens ont pu être associées à des vulnérabilités génétiques circadiennes (13,14). Plusieurs études ont ainsi évoqués la présence d’anomalies infradiennes (cycles > 24 heures) et notamment saisonnières de ces rythmes comportementaux et physiologiques dans le TB (15). 14 GEOFFROY Pierre Alexis L’étude de l’effet des saisons dans le TB est donc une question vaste dont il existe une littérature complexe et hétérogène mêlant différents niveaux d’évaluation et différentes méthodologies d’analyse. Nous avons pris ici le parti de s’intéresser à l’expression clinique de la saisonnalité dans le TB et ouvrons ce travail de thèse sur une revue de la littérature afin de dresser un état de l’art sur cette question. Une première revue rapide de la littérature permet de dégager 3 approches ou perspectives qui ont été historiquement utilisées dans l’analyse de la saisonnalité dans le TB. La première perspective est macroscopique et implique l’analyse des registres de soins (hospitaliers, cliniques, externes) et les taux saisonniers d’admission à l’hôpital pour un épisode de l’humeur. La seconde perspective est la plus microscopique des trois et se définit par une analyse dimensionnelle à travers les saisons des symptômes associés au TB. Enfin, la troisième approche est intermédiaire et catégorielle en prenant pour outil la définition du caractère saisonnier du DSM. Nous avons effectué une revue systématique de tous les articles issus la littérature scientifique internationale de ces 40 dernières années et relatifs aux variations saisonnières dans le TB. Afin de rendre cette littérature intelligible, nous avons choisi de la classer en trois « niveaux » de perspective d’étude de la saisonnalité : macroscopique, intermédiaire et microscopique. 15 GEOFFROY Pierre Alexis B. MÉTHODE DE LA REVUE SYSTÉMATIQUE DE LA LITTÉRATURE 1. Définition du Trouble Bipolaire et de la saisonnalité a) Trouble Bipolaire Dans ce travail, le TB a été défini selon les critères internationaux de l’ ICD (9 ou 10) ou du DSM (III ou IV) (16,17). Ce diagnostic devaient être porté par des psychiatres ou des psychologues entraînés et utilisant des critères DSM/ICD au cours de leur entretien systématisé. Tableau 1. Rappel des définitions du trouble bipolaire I et II selon le DSM-IV-TR Sous-types de Troubles Bipolaires Type I = survenue d'un ou plusieurs épisode(s) maniaque(s) ou mixte(s) (Épisode mixte : critères d'un épisode maniaque et d'un épisode dépressif majeur rencontrés simultanément). Le diagnostic peut être posé même en l’absence de trouble dépressif. Il peut y avoir des épisodes hypomaniaques. Sans cause organique, iatrogénique ou toxique. Type II = survenue d’un ou plusieurs épisode(s) hypomaniaque(s) et un ou plusieurs épisodes dépressifs majeurs Sans cause organique, iatrogénique ou toxique. Épisode Maniaque A. Période nettement délimitée durant laquelle l’humeur est élevée de façon anormale et persistante, pendant au moins une semaine (ou toute autre durée si une hospitalisation est nécessaire). B. Au cours de cette période de perturbation de l’humeur, au moins 3 des symptômes suivants (4 si l’humeur est seulement irritable) ont persisté avec une intensité suffisante : 1) Augmentation de l’estime de soi ou idées de grandeur 2) Réduction du besoin de sommeil (p. ex. le sujet se sent reposé après seulement 3 heures de sommeil) 3) Plus grande communicabilité que d’habitude ou désir de parler constamment 4) Fuite des idées ou sensations subjectives que les pensées défilent 5) Distractibilité (p. ex. l’attention est trop facilement attirée par des 16 GEOFFROY Pierre Alexis stimuli extérieurs sans importance ou insignifiants) 6) Augmentation de l’activité orientée vers un but (social, professionnel, scolaire ou sexuel) ou agitation psychomotrice 7) Engagement excessif dans des activités agréables mais à potentiel élevé de conséquences dommageables (p. ex. la personne se lance sans retenue dans des achats inconsidérés, des conduites sexuelles inconséquentes ou des investissements commerciaux déraisonnables) C. Cette perturbation ne répond pas aux critères d’un épisode mixte. D. La perturbation de l’humeur est suffisamment sévère pour entraîner une altération marquée du fonctionnement professionnel, des activités sociales ou des relations interpersonnelles, ou pour nécessiter l’hospitalisation afin de prévenir des conséquences dommageables pour le sujet ou pour autrui, ou bien il existe des caractéristiques psychotiques. E. Les symptômes ne sont pas dus aux effets physiologiques directs d’une substance (p. ex. substance donnant lieu à abus, médicament ou autre traitement) ou d’une affection médicale générale (p. ex. hyperthyroïdie). Épisode A. Période nettement délimitée durant laquelle l'humeur est élevée de façon Hypomaniaque persistante, expansive ou irritable, clairement différente de l'humeur non dépressive habituelle, et ce tous les jours pendant au moins 4 jours. B. Au cours de cette période de perturbation de l'humeur, au moins 3 des symptômes décrits (quatre si l'humeur est seulement irritable) ont persisté avec une intensité significative : 1) augmentation de l'estime de soi ou idées de grandeur. 2) réduction du besoin de sommeil 3) plus grande communicabilité que d'habitude ou désir de parler constamment. 4) fuite des idées ou sensations subjectives que les idées défilent. 5) distractibilité 6) engagement excessif dans des activités agréables mais à potentiel élevé de conséquences dommageables C. L'épisode s'accompagne de modifications indiscutables du fonctionnement, qui diffère de celui du sujet hors période symptomatique. D. La perturbation de l'humeur et la modification du fonctionnement sont manifestes pour les autres. E. La sévérité de l'épisode n'est pas suffisante pour entraîner une altération marquée du fonctionnement professionnel ou social, ou pour nécessiter l'hospitalisation, et il n'existe pas de caractéristiques psychotiques. F. Les symptômes ne sont pas dus aux effets physiologiques directs d'une substance ou d'une affection médicale générale. 17 GEOFFROY Pierre Alexis Épisode Dépressif Majeur A. Au moins 5 des symptômes suivants doivent être présents pendant une même période d’une durée de deux semaines et avoir représenté un changement par rapport au fonctionnement antérieur; au moins un des symptômes est soit une humeur dépressive, soit une perte d’intérêt ou de plaisir. 1) Humeur dépressive présente pratiquement toute la journée, presque tous les jours signalée par le sujet (par exemple : se sent triste ou vide) ou observée par les autres (par exemple : pleure). NB : Éventuellement irritabilité chez l’enfant ou adolescent. 2) Diminution marquée de l’intérêt et du plaisir pour toutes ou presque toutes les activités, pratiquement toute la journée, presque tous les jours (signalée par le sujet ou observé par les autres) 3) Perte ou gain de poids significatif en absence de régime (par exemple : modification du poids corporel en 1 mois excédant 5%) ou diminution ou augmentation de l’appétit presque tous les jours. NB : Chez l’enfant prendre en compte l’absence de l’augmentation de poids attendue. 4) Insomnie ou hypersomnie presque tous les jours 5) Agitation ou ralentissement psychomoteur presque tous les jours (constaté par les autre, non limités à un sentiment subjectif de fébrilité ou de ralentissement intérieur). 6) Fatigue ou perte d’énergie presque tous les jours 7) Sentiment de dévalorisation ou de culpabilité excessive ou inappropriée (qui peut être délirante) presque tous les jours (pas seulement se faire prier ou se sentir coupable d’être malade). 8) Diminution de l’aptitude à penser ou à se concentrer ou indécision presque tous les jours (signalée par le sujet ou observée par les autres) 9) Pensées de mort récurrentes (pas seulement une peur de mourir), idées suicidaires récurrentes sans plan précis ou tentative de suicide ou plan précis pour se suicider. B. Les symptômes ne répondent pas aux critères d’épisode mixte. C. Les symptômes traduisent une souffrance cliniquement significative ou une altération du fonctionnement social, professionnel, ou dans d’autres domaines importants. D. Les symptômes ne sont pas imputables aux effets physiologiques directs d’une substance (par exemple une substance donnant lieu à abus, un médicament) ou une affection médicale générale (par exemple hypothyroïdie). E. Les symptômes ne sont pas mieux expliqués par un deuil, c’est-à-dire après la mort d’un être cher, les symptômes persistent pendant plus de 2 mois ou s’accompagnent d’une altération marquée du fonctionnement, de préoccupations morbides, de dévalorisation, d’idées suicidaires, de symptômes psychotiques ou d’un ralentissement psychomoteur. 18 GEOFFROY Pierre Alexis b) Saisonnalité Une définition large de la saisonnalité a été utilisée et est issue d’une publication de Stone et al. parue dans le journal Nature : « a driving force that has a major effect on the spatiotemporal dynamics of natural systems and their populations » (18). Ainsi, les symptômes ou syndromes présentent un caractère saisonnier lorsqu’ils suivent des variations cycliques prévisibles selon la période de l’année. La saisonnalité dans le TB peut s’observer à différents niveaux de perspective. Nous avons choisi de classer ces études selon leur perspective d’évaluation de la plus macroscopique à la plus microscopique : (1) Les données issues des études sur l’utilisation des services de santé : telles que les taux d’admission pour des épisodes de l’humeur et les corrélations avec des variations climatiques locales. (2) Les données permises par un diagnostic basé sur une évaluation catégorielle de la saisonnalité : la spécification « caractère saisonnier » du DSM. (3) Les données issues d’évaluations dimensionnelles : la saisonnalité des symptômes du TB. Le premier niveau d’évaluation de la saisonnalité s’intéresse aux études sur l’utilisation des services de santé qui permettent une évaluation des taux d’admissions pour un épisode de l’humeur selon la période de l’année. Cette méthodologie implique donc l’utilisation de grands registres de patients, souvent nationaux voire internationaux, et peut permettre d’analyser la distribution d’un type spécifique d’épisode de l’humeur selon sa polarité : maniaque, hypomaniaque, mixte ou dépressif. Ces données peuvent éventuellement permettre 19 GEOFFROY Pierre Alexis d’être corrélées à des variables climatiques locales, telles que les heures de fort ensoleillement, la durée des jours, la température extérieure, l’humidité, l’index de pluviométrie et la pression de l’air. Le second niveau d’évaluation est de nature rétrospective et analyse la présence du caractère saisonnier au cours d’un épisode de l’humeur. Cette approche catégorielle concernait dans le DSM-III à la fois les épisodes de natures dépressives et maniaques, mais a été réduit aux épisodes dépressifs dans le DSM-IV. Le DSM-5 a repris une définition plus large, plus proche de celle du DSM-III, et considère le caractère saisonnier des épisodes de manière indépendante de leur polarité (2,16,17). L’ICD ne propose pas de définition de ce caractère saisonnier et intègre cette notion seulement dans le cadre des troubles dépressifs récurrents (F33), qui inclue les dépressions saisonnières. Le tableau 1 résume les critères DSM-5 et DSM-IV TR du caractère saisonnier dans le TB (2,16). 20 GEOFFROY Pierre Alexis Tableau 2. Critères de la caractéristique saisonnière dans le DSM-5* et DSM-IVTR DSM-5 Le caractère essentiel est un caractère saisonnier régulier d’au moins un type d’épisode (i.e., maniaque, hypomaniaque ou dépressif) : dépressifs : A) une relation temporelle régulière entre la survenue des épisodes maniaques, hypomaniaques ou dépressifs et une période particulière de l’année (e.g., en automne ou en hiver), dans un Trouble Bipolaire de type I ou II (non lié à des facteurs de stress environnementaux évidemment en lien avec la période) B) des rémissions complètes (ou un virement de la dépression vers la manie ou l’hypomanie ou inversement) surviennent aussi au cours d’une période particulière de l’année C) au moins 2 épisodes maniaques, hypomaniaques ou dépressifs aux cours des 2 dernières années remplissant les critères A et B et en l’absence d’épisodes non-saisonniers au cours de la même période D) une vie entière du sujet marquée par nettement plus d’épisodes maniaques, hypomaniaques ou dépressifs saisonniers que non saisonniers. DSM-IV TR Le caractère essentiel est un caractère saisonnier régulier des épisodes dépressifs : A) une relation temporelle régulière entre la survenue des épisodes dépressifs et une période particulière de l’année (non lié à des facteurs de stress environnementaux évidemment en lien avec la période) B) des rémissions complètes (ou un virement de la dépression vers la manie ou l’hypomanie) surviennent aussi au cours d’une période particulière de l’année C) au moins 2 épisodes dépressifs aux cours des 2 dernières années remplissant les critères A et B et en l’absence d’épisodes non-saisonniers au cours de la même période D) une vie entière du sujet marquée par nettement plus d’épisodes dépressifs saisonniers que non saisonniers. * Traduction de l’auteur, la traduction française du DSM-5 est non disponible à ce jour. 21 GEOFFROY Pierre Alexis Enfin, le dernier niveau de perspective est le plus microscopique et examine de manière dimensionnelle les effets des saisons sur la symptomatologie du TB. Ainsi cette évaluation saisonnière peut être permise à l’aide de questionnaires explorant des dimensions cliniques du TB telle l’humeur, le sommeil et l’anxiété par exemple. Une évaluation plus spécifique de l’effet saisonnier sur le TB peut également être réalisé à l’aide d’un questionnaire spécifique appelé le SPAQ (Seasonal Pattern Assessment Questionnaire) qui a été conçu par Rosenthal et collaborateurs comme un outil de dépistage de la dépression saisonnière (19). Ce questionnaire SPAQ peut aussi bien être utilisé en population générale que dans la population de patients avec trouble de l’humeur, de part son absence d’assomption concernant la direction du changement saisonnier et sa capacité à relever des variations saisonnières en absence de maladie particulière. Le SPAQ a une bonne spécificité (94%) mais une mauvaise sensibilité (44%) pour l’identification d’une dépression saisonnière (20). C’est donc un bon outil de dépistage mais un outil diagnostic peu utile. Ce questionnaire est divisé en 7 sections de recueil de données et n’a à ce jour pas encore été validé en français (19) (questionnaire en version originale disponible en Annexe 1): (1) Données démographiques (2) Une échelle de 5 points évaluant différents changements saisonniers de : a) la durée du sommeil, b) l’activité sociale, c) l’humeur, d) le poids, e) l’appétit et f) le niveau d’énergie. (3) Un calendrier sur lequel le sujet indique le mois de l’année où il : a) se sent le mieux, b) se sent le moins bien, c) perd le plus de poids, d) gagne le plus de poids, e) dort le plus, f) dort le moins, g) mange le plus, h) mange le moins, i) se socialise le plus, et j) se socialise moins. (4) Des questions sur leur préférence climatique concernant 22 GEOFFROY Pierre Alexis les différents types de journées suivantes : froide, chaude, humide, ensoleillée, sèche, grise et nuageuse, longue, élevée en pollen, brumeuse, et courte. (5) La fluctuation de poids et les préférences alimentaires au cours de l’année (6) Le nombre d’heures de sommeil par période de 24 heures au cours de l’hiver, du printemps, de l’été et de l’automne. (7) Une note générale, où le sujet évalue son propre sentiment de l’importance des répercussions entraînées par les changements de saisons chez lui ou elle. En conclusion, ces différents niveaux d’évaluation de la saisonnalité peuvent être résumés et classés selon deux perspectives extrêmes allant d’une évaluation macroscopique à une évaluation microscopique. La figure 1 se propose de résumer ces différents niveaux d’évaluation de la saisonnalité dans le trouble bipolaire. 23 GEOFFROY Pierre Alexis MACROSCOPIQUE UTILISATION DES SERVICES DE SANTÉ Taux d’admissions selon la période de l’année (Corrélation avec variables climatiques) CATEGORIEL Caractère saisonnier des épisodes de l’humeur (Critères DSM) DIMENSIONNEL Échelles de symptômes ou Questionnaire saisonnalité (SPAQ) MICROSCOPIQUE Figure 1. Différents niveaux d’étude de la saisonnalité dans le trouble bipolaire allant d’une perspective macroscopique à microscopique. 24 GEOFFROY Pierre Alexis 2. Stratégie de recherche bibliographique Une recherche systématique de la littérature internationale a été faite en utilisant les moteurs de recherche bibliographiques PubMed et Embase. La recherche s’est portée sur les papiers publiés entre 1974 (date de la publication du DSM-III, l’ICD-9 étant publié en 1975) jusqu’au 31 mai 2013. Les termes MESH suivants ont été utilisés : bipolar disorder AND (season* OR seasonality OR seasonal OR seasonal pattern). Nous avons aussi utilisé la fonction « related articles » de PubMed, la liste bibliographique des papiers relevés, les résumés de conférence, et la base Google Scholar afin d’identifier de possibles papiers additionnels. Les papiers publiés uniquement en anglais ont été retenus. 3. Processus de sélection des études Deux auteurs (Pierre Alexis Geoffroy & Bruno Etain) ont procédés à une sélection des titres des publications identifiées dans les bases de données grâce à la stratégie de recherche définie plus haut afin d’identifier les études possiblement éligibles. Ces deux auteurs ont, d’abord de manière indépendante puis conjointe, sélectionné les études sur la base des résumés de celles-ci. Tous les résumés en ligne ont été relus et des papiers en texte complet ont été récupérés lorsque cela était pertinent. Cette procédure de recherche a suivi les critères PRISMA (Preferred Reporting Items for Systematic Reviews and Meta-Analyses) (21). La Figure 2 résume l’organigramme de la stratégie de recherche de la littérature et du processus utilisé de sélection des études. Les études finalement retenues pour l’analyse qualitative ont été classé en 3 catégories définies plus haut : 1) les études sur l’utilisation des services de santé, 2) les études catégorielles, et 3) les études dimensionnelles (voir la figure 2 pour les détails). 25 GEOFFROY Pierre Alexis Figure 2. Organigramme du processus utilisé de recherche et de sélection des études a Articles identifiés grâce à la recherche dans les bases de données (n = 370) Articles additionnels identifiés (n = 16) Articles identifiés (n = 386) Articles exclus après une sélection initiale sur les titres/résumés (n = 271) Articles évalués pour éligibilité (n = 115) Articles exclus car n’étudiant pas la saisonnalité dans le TB (n = 64) Articles inclus dans l’analyse qualitative (n = 51) Études d’utilisation des services de soins (n = 34) Études catégorielles (n = 5) Études dimensionnelles (n = 12) a La recherché bibliographique a été faite sur PubMed en utilisant les termes MeSh : bipolar disorder AND (season* OR seasonality OR seasonal OR seasonal pattern). 26 GEOFFROY Pierre Alexis C. RÉSULTATS 1. Recherche bibliographique La recherche bibliographique a identifié 51 études qui ont été incluses dans l’analyse qualitative et classées en 3 sous-groupes selon leur perspective macroscopique, intermédiaire ou microscopique. Il a pu être analysé 34 études sur l’utilisation des services de santé (dont 14 études qui ont examiné les corrélations avec les variations climatiques saisonnières), 5 études catégorielles utilisant les critères DSM du caractère saisonnier, et 12 études dimensionnelles qui ont examiné la saisonnalité des symptômes. 2. Analyse de la saisonnalité par les études sur l’utilisation des services de santé a) Saisonnalité et pics d’admissions La très grande majorité des publications sur la saisonnalité dans le TB porte sur les taux d’admission par saison et comporte une exploration de la polarité de l’épisode avec de possibles analyses de corrélation avec des variables climatiques locales. En tout 34 études ont été analysées, correspondant à 30 sets de données originales provenant de tous les continents à travers le monde : 27 ont examinés les épisodes maniaques, 16 les épisodes dépressifs et 4 les épisodes mixtes. Parmi celles-ci, 12 de ces études ont examiné des corrélations entre les variables climatiques et les épisodes maniaques, et 5 ont analysés les corrélations entre les variables climatiques et la polarité dépressive. 27 GEOFFROY Pierre Alexis Les premières preuves d’un tel caractère saisonnier sont venues des données issues des fluctuations mensuelles des taux d’admissions pour épisodes maniaques, qui ont démontrées un pic récurrent au printemps/été des épisodes maniaques. Symonds et Williams (1976) ont ainsi rapporté un pic d’épisodes maniaques en août-septembre (22). Ces observations ont été répliquées par Rihmer et collaborateurs (1980), qui ont également rapporté un pic d’épisodes dépressifs davantage en été et en hiver (23). Cette occurrence de pics saisonniers d’épisodes de l’humeur a par la suite été largement répliquée, avec un pic en printemps/été et un second pic plus petit en automne (22–44). Très répliqué aussi, le pic d’épisodes dépressifs apparaît davantage au début de l’hiver avec un pic plus petit au cours de l’été (23,26,27,34,37,39,42,44–49). En revanche peu d’études ont examiné l’existence d’une variation saisonnière du pic d’épisodes mixtes. Ainsi, 4 études ont pu être identifiées présentant des données non consensuelles et suggérant un pic en été (44,50), un pic en fin d’été avec un nadir en novembre (38), ou un pic en début de printemps (42). Sur les 34 études relevées dans la littérature, seulement 4 n’observaient pas de caractère saisonnier des épisodes de l’humeur (50–53). Il est à souligner cependant que ces résultats négatifs peuvent être le reflet d’un manque de puissance de ces études lié à des populations de petite taille : l’échantillon le plus grand de ces études négatives est celui de Bauer et collaborateurs (2009) qui a pu inclure 360 sujets contre par exemple 9619 sujets avec TB inclus dans l’étude de Yang et collaborateurs (2013). La figure 3 suivante illustre les pics d’admissions observés pour les épisodes thymiques selon leur polarité. 28 GEOFFROY Pierre Alexis Figure 3. Représentation par polarité des épisodes de l’humeur d’un trouble bipolaire des pics d’admissions par saison. L’analyse des études sur l’utilisation des services de santé relève des pics d’admissions pour la manie au cours du printemps/été et de l’automne (23 études significatives et 4 non significatives, représentées en rouge), pour la dépression au cours du début de l’hiver et de l’été (14 études significatives et 3 non significatives, représentées en bleu), et pour les épisodes mixtes au cours du début du printemps ou en milieu/fin de l’été (4 études significatives et 0 non significative, représentées en vert). 29 GEOFFROY Pierre Alexis b) Caractéristiques de ces pics d’admissions De manière intéressante, ce caractère saisonnier des épisodes de l’humeur est présent à la fois au début et au cours des récurrences du TB (36). De plus ces observations de pics saisonniers ont été faites et répliquées partout dans le monde comme en Europe (22– 26,28,29,32,34,36,39,46,47), en Amérique du nord (38,49), en Amérique du sud (35), en Asie (37,40,42,44,45,48,51), en Océanie (27,30,31,33,41,43,46) et en Afrique du sud (54). L’association entre latitude et caractère saisonnier du TB est discutée, mais il y a des éléments en faveur d’effets saisonniers variant avec la latitude : ces effets seraient plus forts dans les zones climatiques de l’hémisphère nord que de l’hémisphère sud (49,53,55). De plus, l’analyse des données issues de l’étude STEP-BD présente une prévalence augmentée des dépressions dans les centres recruteurs plus au nord, avec des effets saisonniers différents selon les régions et le sous-type de TB (49). Cependant, il est important de souligner que ces variations saisonnières existent même dans les zones climatiques présentant peu de variations saisonnières. Ainsi, Volpe et collaborateurs ont confirmé qu’il existait même dans les régions tropicales un pic d’épisodes maniaques au printemps (41,43) et ceci va dans le sens d’autres études menées dans l’hémisphère sud dans des régions tempérées (27,30,31,33). Il existe également de possibles différences d’effets saisonniers selon le sexe des individus. Ainsi, Symonds et Williams ont dans leur première étude relevé un pic saisonnier de manie uniquement chez les femmes de leur population d’étude (22). Cette observation a été par la suite ré-analysée par Walter et collaborateurs qui ont utilisé alors une méthode d’analyse différente à l’aide de courbes harmoniques et ont ainsi pu mettre en évidence que l’amplitude des variations et leur maximum étaient alors similaires dans la population des deux sexes (24). Ils ont ainsi confirmé la présence d’un pic saisonnier mais infirmé une différence liée au sexe. La question semblait donc réglée et davantage liée à un biais d’analyse. Mais par la suite de telles différences liées au sexe ont pu être rapportées même en 30 GEOFFROY Pierre Alexis utilisant la méthode d’analyse par courbes harmoniques et suggèrent que les femmes sont plus susceptibles d’exprimer un caractère saisonnier (34,35) et cela pourrait être particulièrement présent chez les femmes jeunes (39). 3. Polarité des épisodes et corrélation avec les variables climatiques Comme nous l’avons vu dans la partie méthode de cette revue, les études utilisant les données issues des systèmes de soins peuvent corréler les taux d’admissions aux variables climatiques locales à la recherche d’effet causal ou participatif de ces derniers. Dès les premières études, les chercheurs ont observé que ces pics d’admissions pour des épisodes de l’humeur n’étaient pas constants d’une année sur l’autre, suggérant ainsi une association possible avec les variables climatiques locales (30). Myers et Davies ont les premiers examiné les corrélats climatiques avec l’incidence des épisodes maniaques (25). Ainsi, en plus de l’observation classique d’un pic d’hospitalisations pour épisode maniaque en été et d’une décroissance de ces épisodes en hiver, ils ont relevés que ces admissions étaient corrélées à la température journalière moyenne, à la moyenne de la durée des jours et à la moyenne des heures d’ensoleillement (25). Cette étude a été suivie par d’autres études tentant de confirmer ces résultats dans le cadre des épisodes maniaques (25,28,29,31,34,38,40–43,51,53,56) ou bien dans le cadre des épisodes dépressifs (42,45,48,53,56) qui sont résumées respectivement dans le tableau 3 et 4. 31 GEOFFROY Pierre Alexis Ces études rétrospectives sont inconstamment répliquées et demandent d’être précisées dans études futures prospectives qui pourront mettre en évidence un lien de causalité éventuel. Cependant, il faut souligner qu’il a été démontré que les variables climatiques étaient aussi associées avec les récurrences du TB même dans des régions avec des conditions climatiques plutôt stables comme dans les régions tropicales (31,41–43). Les études futures devront également rechercher la présence d’effets possiblement différents de ces conditions climatiques selon le type de polarité de l’épisode thymique. 32 GEOFFROY Pierre Alexis Tableau 3. Résumé des études de corrélation entre l’incidence des épisodes maniaques et des variables climatiques locales. VARIABLES CLIMATIQUES Ensoleillement Durée du jour + + Études Myers & Davies 1978 Mawson & Smith 1981 + + Sayer et al. 1991 + + Jain et al. 1992 0 Suhail & Cochrane 1998 + + Lee et al. 2002 + 0 Cassidy & Carroll 2002 Lee et al. 2007 Bauer et al. 2009 Température Pression Barométrique + - Carney et al. 1988 Volpe et al. 2006 Humidité/ Précipitations 0 0 0 + 0 0 0 0 0 0 + + - - 0 - 0 - 0 0 0 0 Volpe et al. 2010 0 0 - 0 TOTAL 6 (+) 1 (-) 2 (0) 5 (+) 1 (-) 4 (0) 0 (+) 4 (-) 4 (0) 2 (+) 0 (-) 8 (0) 0 0 (+) 0 (-) 3 (0) (+) corrélation positive; (-) corrélation négative; (0) corrélation non significative (case noire) donnée non disponible 33 GEOFFROY Pierre Alexis Tableau 4. Résumé des études de corrélation entre l’incidence des épisodes dépressifs et des variables climatiques locales. VARIABLES CLIMATIQUES Ensoleillement Durée du jour Humidité/ Précipitations Température Pression Barométrique Études Mawson & Smith 1981 Modai et al. 1994 0 - 0 Shapira et al. 2004 Lee et al. 2007 0 0 + + Bauer et al. 2009 TOTAL 0 1 (+) 1 (-) 0 (0) 0 0 + 0 0 0 0 (+) 0 (-) 2 (0) 0 (+) 0 (-) 4 (0) 2 (+) 0 (-) 2 (0) 0 0 (+) 0 (-) 3 (0) (+) corrélation positive; (-) corrélation négative; (0) corrélation non significative (case noire) donnée non disponible 34 GEOFFROY Pierre Alexis 4. Analyse du caractère saisonnier selon les critères DSM Il existe peu d’études ayant examiné la saisonnalité par le biais de cette approche catégorielle. En utilisant les critères DSM-III de la saisonnalité, Hunt et collaborateurs ont observé que 15% des patients avec TB présentaient un caractère saisonnier de leurs épisodes maniaques (57). De plus, Faedda et collaborateurs rapportaient que 10% de leurs patients (issus d’une clinique spécialisée pour troubles de l’humeur) présentaient un caractère saisonnier de leurs récurrences thymiques, étaient majoritairement des femmes, et que 68% d’entre eux avaient des antécédents familiaux de trouble de l’humeur (58). La moitié de ces patients avec un caractère saisonnier souffraient de trouble unipolaire dépressif et l’autre moitié souffrait de TB dont 30% avaient présenté des manies et 19% des hypomanies (58). Faedda et collaborateurs ont pu décrire 2 types de caractère saisonnier avec une période précise et répétée du début et des récurrences : A) une dépression en automne-hiver avec ou sans manie/hypomanie en printemps-été, et b) une dépression en printemps-été avec ou sans manie/hypomanie en automne-hiver (58). En même temps que le DSM-IV, de nouvelles études de ce caractère saisonnier sont apparues. Au total, 3 études (dont celle présentée plus en détails dans la section II de cette thèse) ont pu examiner le caractère saisonnier dépressif selon la définition du DSM-IV (11,59,60). La première a été produite par Schaffer et collaborateurs qui ont observé grâce à des enquêtes téléphoniques que 23% des patients avec TB présentent un caractère dépressif saisonnier. De plus, les auteurs n’ont pas retrouvé une influence de la latitude sur le pourcentage de patients avec caractère saisonnier et TB (59). Cette prévalence élevée a été répliquée par les deux études menée par Goikolea et collaborateurs (26%) et par notre étude (23%) confirmant que un quart des patients avec TB souffrent d’un caractère saisonnier de leurs épisodes dépressifs. L’étude espagnole de Goikolea et collaborateurs consistait en un 35 GEOFFROY Pierre Alexis suivi prospectif de 10 ans de patients avec TB de type I et II. Les auteurs ont démontré que le caractère dépressif saisonnier était associé au TB de type II, au début à polarité dépressive et à la polarité dépressive prédominante (60). J’ai pu par la suite confirmer et préciser ces associations cliniques dans une population plus grande et qui a permit également la recherche d’une influence du sexe sur ce caractère saisonnier (11). Ces résultats seront présentés en détails dans la section II de cette thèse. Il n’existe pas encore à ce jour d’études utilisant les critères du DSM-5. Celles-ci sont attendues car la considération de tous les types de polarité dans le caractère saisonnier pourra permettre une exploration plus complète de la saisonnalité des récurrences thymiques dans le TB. Elles pourront également permettre de confirmer les caractéristiques cliniques associées à ce caractère saisonnier et ainsi d’améliorer l’identification des patients avec TB et à risque de saisonnalité. 36 GEOFFROY Pierre Alexis 5. Analyse dimensionnelle de la saisonnalité dans le TB L’analyse dimensionnelle de la saisonnalité dans le TB permet une analyse la plus fine possible de la saisonnalité des symptômes du TB. Soulignons que les patients avec TB présentent des changements saisonniers de leur humeur et des fonctions neuro-végétatives semblables à celles rencontrées dans la dépression saisonnière mais aussi chez des sujets exempts de maladie mentale (61). Une étude intéressante utilisant le SPAQ a choisi de comparer les variations saisonnières de l’humeur et des comportements entre différents groupes de patients : des patients avec dépression saisonnière hivernale, dépression saisonnière d’été, trouble des conduites alimentaires, TB, trouble dépressif unipolaire et dépression hivernale sub-syndromique (62). Cette étude observa qu’en hiver tous les groupes de patients quelque soit leur pathologie : mangeaient plus, dormaient plus et gagnaient du poids (62). Mais la prévalence des variations saisonnières pathologiques est bien plus importante chez les patients avec TB. En effet, Shand et collaborateurs ont démontré, à l’aide du questionnaire SPAQ, que 27% des patients avec TB présentaient les critères diagnostics de la dépression saisonnière. Comparés à une population de patients sans pathologie mentale, les patients avec TB présentaient un odds ratio ajusté de 3,73 (IC95% 2,64-5,27) (63). De plus, Hakkarainen et collaborateurs en étudiant des jumeaux discordants sur la présence d’une maladie TB ont observé que le jumeau avec le TB, comparé à son jumeau sans TB, présente davantage de variations saisonnières au niveau de son sommeil et de son humeur (64). Les rythmes saisonniers infradiens des patients avec TB diffèrent des sujets sans trouble psychiatrique en démontrant des périodes marquées d’une augmentation de l’amplitude des mesures journalières de l’humeur et des fonctions végétatives (65). Dans ce sens, Simonsen et collaborateurs ont comparé les symptômes évalués à l’aide du SPAQ de 183 patients avec 37 GEOFFROY Pierre Alexis TB comparés à 468 sujets sans TB consultant leur médecin généraliste. Les auteurs démontrent que les patients avec TB présentent de plus grandes fluctuations saisonnières de leur humeur, de leur activité sociale, de leur poids, de leurs habitudes de sommeil, et de leur durée totale de sommeil (particulièrement marquée par une hypersomnie hivernale) (66). Récemment, Shin et collaborateurs à l’aide du SPAQ ont démontré que les patients avec TB et caractère saisonnier présentaient davantage de fluctuations de l’humeur et des comportements que des patients avec trouble dépressif unipolaire avec ou sans caractère saisonnier, et que des témoins sains (67). De manière remarquable, ces auteurs ont même démontré que les patient avec TB sans caractère saisonnier présentaient des fluctuations saisonnières comparables à celles rencontrées chez les patients avec dépression saisonnière (67). Ces études soulignent ainsi l’effet majeur des saisons sur les symptômes thymiques et végétatifs dans le TB avec ou sans caractère saisonnier. Les patients avec TB semblent particulièrement susceptibles aux perturbations des rythmes infradiens même comparés aux patients avec dépressions récurrentes saisonnières. Cependant, trois études négatives sont à relever (53,68,69). La première étude de Christensen et collaborateurs est prospective sur 3 ans et examine les effets des paramètres météorologiques sur l’apparition des épisodes thymiques de patients souffrant de TB (68). Les auteurs ont tout de même observé une influence légère des facteurs météorologiques sur les symptômes de l’humeur mais n’ont pas réussi à mettre en évidence une corrélation significative avec le début des épisodes de l’humeur et les scores aux échelles dimensionnelles thymiques (68). Par ailleurs, Bauer et collaborateurs ont produit une étude intéressante sur le plan méthodologique qui analysait les auto-évaluations journalières de scores de l’humeur de 360 patients avec TB provenant de zones climatiques différentes (53). Ces auteurs n’ont pas retrouvé d’effets saisonniers ou même d’effets liés au climat ou à la 38 GEOFFROY Pierre Alexis latitude (53). Enfin, Murray et collaborateurs ont mené une étude prospective multicentrique chez 429 patients avec un TB de type I et II, dans laquelle les auteurs testèrent l’hypothèse que les symptômes dépressifs sont majorés en automne/hiver et que les symptômes maniaques/hypomaniaques sont majorés en printemps/été (69). Pour cela, ils ont utilisé trois échelles différentes de l’humeur et trois définitions distinctes du temps : le mois civil, la saison nominale et une analyse harmonique. A travers ces analyses, les auteurs n’ont pas retrouvé de variation saisonnière systématique des symptômes. Cependant l’analyse harmonique (qui est probablement l’évaluation la plus fine) a permis de relever un pic de manie en décembre et en juin, ainsi qu’une augmentation des symptômes dépressifs en novembre/décembre chez les femmes (69). Au total l’ensemble de ces résultats indique que les sujets avec TB subissent d’importantes variations saisonnières de leurs symptômes, et la seule présence des quelques rares études partiellement non concluantes en témoigne. Les fluctuations saisonnières sont présentes chez tous les individus malades ou non malades, mais apparaissent d’une particulière importance chez les patients avec TB même comparés aux individus avec dépression unipolaire saisonnière. L’étude prospective la plus récente a été produite par Akhter et collaborateurs qui valident clairement cette hypothèse par l’utilisation d’analyses de séries temporelles et par des modèles d’auto-régression (autoregressive integrated moving average (ARIMA)) chez 314 patients avec TB de type I et II, suivis pendant 10 ans et évalués sur la saisonnalité de leurs symptômes (hypo)maniaques ou dépressifs (70). Les auteurs confirmèrent ainsi que pour tous les patients, les symptômes dépressifs étaient moins fréquents l’été et plus fréquents vers le solstice d’hiver, alors que les symptômes (hypo)maniaques étaient davantage présents autour de l’équinoxe d’automne. Le TB de type II, comparé au type I, semblait là encore plus vulnérable aux variations saisonnières des 39 GEOFFROY Pierre Alexis symptômes bipolaires (70). Des dimensions plus spécifiques du TB ont pu également être examinées à la recherche d’une rythmicité saisonnière. Ainsi, Volpe et collaborateurs ont analysé les variations saisonnières de 3 dimensions cliniques de la manie : le caractère psychotique, l’agressivité et la suicidalité. Les auteurs ont examiné ces dimensions chez des patients hospitalisés en psychiatrie et ont pu mener des analyses de corrélation avec les variables climatiques locales (71). Ils ont observé qu’au cours des manies le taux d’agressions était plus élevé en JanvierMars et que celui de suicidalité était plus élevé en Décembre et en Janvier. Le caractère psychotique des manies corrélait positivement avec les heures d’ensoleillement du mois en cours et avec l’augmentation des heures d’ensoleillement, alors qu’il corrélait négativement avec l’humidité relative du mois en cours et d’un changement entre le mois précédent et celui en cours. De plus, la suicidalité au cours des manies était corrélée à une augmentation rapide de la température extérieure (71). En lien avec une expression clinique du TB plus sévère lorsqu’un caractère saisonnier est présent, Rajajärvi et collaborateurs ont observé que les patients avec TB qui rapportaient à l’aide du SPAQ que les variations saisonnières étaient un problème, comparés à ceux pour qui cela n’était pas un problème, présentaient alors des scores moins élevés à certains tests neuropsychologiques : au niveau des fonctions visuo-constructives, du raisonnement visuospatial, de l’attention auditive, de la mémoire de travail, de la mémoire verbale (72). Là encore et en concordance avec les études précédentes, il faut souligner que tous les sujets de l’étude atteignaient des scores moins élevés que le reste de l’année en hiver (72). Des études supplémentaires analysant les dimensions cliniques du TB sont nécessaires car le TB associe un nombre important de facteurs qui peuvent probablement suivre une rythmicité saisonnière distincte, tels que : l’impulsivité, la réactivité émotionnelle, le 40 GEOFFROY Pierre Alexis caractère psychotique, l’agressivité, la suicidalité, les comportements d’abus et/ou d’addiction, les fonctions cognitives, ou le sommeil, en plus des symptômes thymiques. La section III de cette thèse suit cet objectif et propose une analyse de certaines dimensions cliniques du TB afin de contribuer à cette littérature. D. DISCUSSION Principaux résultats Cette première partie de ma thèse avait pour objectif de dresser de manière systématique un état des lieux de la littérature examinant la saisonnalité dans le TB. À travers l’utilisation de méthodologies différentes allant d’études sur l’utilisation des services de santé analysant le taux d’admissions pour épisodes de l’humeur jusqu’à des études examinant les variations intrinsèques des symptômes du TB, et en passant par des études catégorielles du caractère saisonnier du DSM, il a été observé que les saisons influencent le niveau de symptomatologie du TB et s’associent à une très grande proportion de patients avec TB présentant une vulnérabilité aux variations saisonnières. Cette vulnérabilité saisonnière toute particulière du TB, et qui semble même plus importante que dans la dépression saisonnière pourtant mieux identifiée, souligne la grande vulnérabilité chronobiologique de cette maladie. En effet, dans ce contexte d’intérêt grandissant pour les déterminants physiologiques chronobiologiques du TB (13), les variations saisonnières et les stimuli environnementaux identifiés dans ce travail ouvrent la voie vers de nouvelles études intégrant et analysant l’influence du climat sur la psychopathologie du TB. Il faut néanmoins garder à l’esprit qu’un petit sous-groupe de patients avec TB présente probablement un caractère saisonnier des récurrences dépressives précipitées par des facteurs 41 GEOFFROY Pierre Alexis psychologiques (plutôt que par les changements climatiques ou par des anomalies des rythmes circadiens), tels que des réactions en lien avec la date anniversaire d’expériences traumatiques dans l’enfance, l’adolescence ou l’âge adulte (73). De tels facteurs sont à rechercher et à identifier afin d’adapter la thérapeutique envisagée. Ce travail identifie un profil clinique saisonnier plus sévère associé au TB avec une prévalence élevée et des implications cliniques et pronostics. Au total, la description de la saisonnalité dans le TB, et donc d’anomalies infradiennes, est plutôt bien identifiée et documentée à travers différents niveaux de perspective. Néanmoins les mécanismes sousjacents liants le TB et les facteurs climatiques à la source de variations saisonnières restent peu compris. Un autre point de discussion important concerne une possible différence selon le sexe de l’individu des présentations cliniques associées à cette caractéristique saisonnière. Nous verrons dans la section II de ce manuscrit que notre étude a permis d’apporter des éléments supplémentaires en faveur d’une expression distincte de cette saisonnalité au sein du TB en fonction du sexe (11). Mais déjà des éléments en faveur de cette hypothèse sont apparus à la lecture de cette littérature. En effet, les femmes présenteraient une plus grande vulnérabilité aux variations saisonnières (34,35,39). Murray et collaborateurs dans leur suivi prospectif ont également démontré que les femmes subissaient davantage de variations saisonnières de leurs symptômes bipolaires (69). Plusieurs hypothèses ont été proposées pour rendre compte de cette différence observée chez les femmes : un taux plus élevé d’hypothyroïdies, une utilisation plus facile des traitements antidépresseurs, et des effets des hormones gonadiques (74). De plus, plusieurs arguments et analogies cliniques laissent penser que le TB, la dépression saisonnière et les symptômes prémenstruels pourraient faire partie d’un seul et même spectre de maladies (75). Choi et collaborateurs ont récemment observé que les femmes avec TB présentaient des altérations saisonnières et prémenstruelles 42 GEOFFROY Pierre Alexis de leur humeur et de leurs comportements, et ceci de manière indépendante de leurs épisodes thymiques (76). Ils ont aussi démontré une association significative entre le caractère saisonnier et le syndrome prémenstruel, suggérant que ces deux troubles cycliques puissent présenter des mécanismes biologiques communs contribuant à la nature cyclique de ces symptômes du TB (76). Une meilleure compréhension de ces mécanismes biologiques sousjacents apparait essentiel afin que les cliniciens puissent être en mesure de développer des stratégies thérapeutiques et préventives plus personnalisées et ciblées. Implications cliniques et thérapeutiques Le caractère saisonnier des épisodes de l’humeur a été associé chez ces patients à une plus grande utilisation des services médicaux de premier recours dont les services psychiatriques comparativement à des patients sans caractéristique saisonnière (77,78). La caractéristique saisonnière apparaît donc être une spécification importante du TB, reflet d’un tableau clinique plus sévère, qui a déjà été intégré utilement à certaines classification nosographiques dont le DSM-5 fait partie. Néanmoins, des études supplémentaires semblent nécessaires afin d’intégrer également la présence du caractère saisonnier dans les algorithmes de décision thérapeutique, afin d’aider au mieux le clinicien dans son choix de thérapeutiques chronobiologiques ciblées. En effet, de telles thérapies chronobiologiques existent dont leur pertinence devra être étudiée dans cette population particulière à caractéristique saisonnière. Murray et Harvey ont suggéré que les variations saisonnières apportaient des éléments en faveur d’un rôle de la luminosité et des rythmes biologiques dans l’étiologie du TB (79). Une étude récente chez des patients euthymiques souligne que le sommeil, la luminosité et la saisonnalité sont trois conditions interconnectées se rejoignant sur une base commune chronobiologique qui, lorsqu’elle est altérée, a un effet important à la fois sur la psychopathologie et la thérapeutique des troubles de l’humeur (80). 43 GEOFFROY Pierre Alexis En théorie, les épisodes saisonniers de l’humeur dans le TB pourraient être traités en manipulant le système circadien avec des drogues chronobiotiques (comme l’agomélatine ou la mélatonine) (81,82) et les chronothérapeutiques (comme la luminothérapie ou la privation de sommeil) (83,84). De telles approches peuvent être utiles pour traiter la dépression du TB mais pas dans le cadre de la manie. Il est aussi important d’être attentif (et que les patients soient attentifs) aux possibles récurrences saisonnières de certains symptômes isolés ou prodromiques d’une récurrence thymique, et donc ainsi de proposer un suivi avec une surveillance toute particulière lors des périodes de l’année à risque. De plus, les symptômes du TB tels que la suicidalité ou l’impulsivité, devront être également recherchés et surveillés au cours des variations saisonnières afin de prévenir un possible passage à l’acte suicidaire (85). Enfin, les cliniciens devraient utilement intégrer le rôle des saisons dans les stratégies développées de détection précoce des symptômes et des autres stratégies de prévention telle que la psychoéducation (11). Forces et limites de cette littérature Ce travail donne aussi l’occasion de discuter des limites et problèmes méthodologiques rencontrés par les études issues des trois niveaux de perspective et examinant la saisonnalité dans le TB. Le niveau d’évaluation macroscopique présente plusieurs limites telles que les erreurs de classification diagnostique et la surreprésentation des cas sévères liés à l’utilisation des registres de réseaux de soins (hospitalier, clinique ou consultation). Cette méthodologie a également possiblement sous-évalué certains sous-types de TB, probablement les moins sévères ou ceux ayant moins accès aux réseaux de santé. Par exemple, le TB de type II peut possiblement être associé à moins d’hospitalisations que le TB de type I. Malgré un design 44 GEOFFROY Pierre Alexis d’étude relativement écologique, de telles études ne permettent pas l’interprétation de données de la saisonnalité à l’échelle individuelle. En effet, elles ne rendent pas compte des variations saisonnières intrinsèques à chaque individu, et en l’absence de niveaux d’analyse plus fins sur le plan individuel, il serait donc impossible de conclure sur l’existence ou non d’une variation saisonnière du TB même si à l’échelle macroscopique de telles variations existent. Cette perspective rend compte davantage d’une tendance saisonnière générale des visites aux urgences ou d’admissions hospitalières pour épisode de l’humeur, qui sont le reflet des symptômes aigus et sévères. Néanmoins, en dehors de ces limitations, cette méthode a l’avantage d’être adaptée pour l’analyse de larges cohortes de patients dont les résultats peuvent être facilement répliqués nationalement ou internationalement. L’approche catégorielle a pour avantage d’être une évaluation rétrospective ce qui autorise son utilisation de manière facile et rapide en pratique clinique courante. De plus une telle évaluation a démontrée son utilité clinique dans le cadre des soins, du pronostic et du choix thérapeutique (11). De plus, cette facilité d’utilisation permet également de mener de larges études sur des cohortes de patients existantes ou naissantes. Enfin, l’utilisation de la caractéristique saisonnière rend possible l’identification d’un sous groupe de patients avec TB, ce qui facilite l’identification de caractéristiques cliniques et de biomarqueurs associés à la maladie. Une telle stratégie aide ainsi à une meilleure compréhension de la pathophysiologie du TB (86). Cependant, même si cette évaluation catégorielle permet une analyse à un certain niveau individuel, elle ne permet pas (comme les études sur l’utilisation des réseaux de santé) l’analyse fine et intrinsèque des variations saisonnières symptomatiques propres à un individu donné. Mais cette évaluation présente l’avantage de pouvoir s’appliquer à tous les patients et ce de manière indépendante de leur degré de sévérité du TB et peut inclure les patients non-hospitalisés, permettant ainsi de dépasser les biais possibles existants dans les études sur l’utilisation des réseaux de santé. Ainsi, l’approche catégorielle pourrait 45 GEOFFROY Pierre Alexis théoriquement être appliquée à tous les patients et serait indépendante du système de soins. Ce dernier pouvant être différent entre les pays (par exemple, le taux d’admissions hospitalières peut être biaisé par les conditions d’accès aux soins, au recours à l’hospitalisation, etc.). Le niveau le plus fin d’évaluation est donc la perspective microscopique permise par les outils dimensionnels. Cette évaluation dimensionnelle se caractérise par une mesure sensible et individuelle des variations saisonnières intrinsèques. Elle seule permet l’évaluation saisonnière intrinsèque d’une cohorte de patients, et donc quantifie l’effet direct des variations saisonnières sur la symptomatologie bipolaire. Néanmoins, cette stratégie est plus lourde que les précédentes en terme notamment de temps d’évaluation. Cette méthodologie dimensionnelle apporte un niveau de lecture des effets saisonniers dans le TB très précis mais se limite souvent à l’étude de petites populations et à un nombre limité de dimensions cliniques qu’il faudra sélectionner a priori. Perspectives Les patients avec TB de caractéristique saisonnière constituent un sous-groupe de patients dont l’adaptation aux changements climatiques a échoué. À ce jour, les déterminants de cette vulnérabilité infradienne/saisonnière sont peu clairs. Cependant, de nombreux polymorphismes génétiques circadiens des gènes CLOCK (horloge biologique interne) et de gènes impliqués dans la voie de la synthèse de la mélatonine (neuro-hormone du sommeil) ont été associés au TB (13). De plus, la dépression saisonnière a démontré une vulnérabilité génétique forte qui recouvre plusieurs de ces anomalies génétiques préalablement identifiées dans le TB. En effet, plusieurs études de jumeaux ont suggéré qu’il existait une composante génétique forte associée à cette susceptibilité saisonnière. Madden et collaborateurs ont ainsi étudié plusieurs milliers de jumeaux australiens et observèrent que plus de 30% de la variance 46 GEOFFROY Pierre Alexis saisonnière des hommes et femmes étaient expliqué par une vulnérabilité génétique (87). Ces auteurs ont aussi observé que ces effets génétiques de changements saisonniers avaient un effet plus générale sur tous les changements comportementaux : humeur, énergie, activité sociale, sommeil, appétit, et poids (87). Dans une autre étude de jumeaux, Jang et collaborateurs ont utilisé le SPAQ et observèrent alors les modifications du sommeil, des activités sociales, de l’humeur, de l’appétit et de l’énergie étaient en premier lieu liées à des effets génétiques additifs (88). Ces effets génétiques rendaient compte chez les hommes de 46% de la variance saisonnière et de 31% chez les femmes (88). De manière intéressante, cette analyse par sexe de ces auteurs permet également de renforcer l’hypothèse qu’il existerait une possible vulnérabilité génétique différente selon le sexe. Enfin, Brambilla et collaborateurs ont trouvé que les patients avec TB et avec des antécédents familiaux de troubles de l’humeur présentaient des effets saisonniers plus sévères que les patients sans antécédent familial (80). Ainsi, au cours des variations saisonnières, des composantes génétiques pourraient venir renforcer certains symptômes du TB dont l’humeur, l’énergie, l’appétit et le sommeil. De futures études génétiques sont attendues afin de mieux comprendre le TB avec caractéristique saisonnière et plus généralement de mieux identifier les mécanismes neurobiologiques des troubles de l’humeur face aux saisons. Différents aspects tels que la nature et l’intensité des facteurs environnementaux ou encore la relation temporelle entre les symptômes et ces facteurs environnementaux, devront être examinés plus en détails. Par exemple, la dépression et les allergies sont une association bien connue, et Postolache et collègues ont ainsi pu observer de manière répétée dans deux études chez des patients avec récurrences thymiques, que les pics saisonniers en allergènes corrélaient positivement avec les symptômes dépressifs et anxieux (89,90). Une étude récente examina le lien entre la présence d’immunoglobulines E (IgE) spécifiques d’allergènes et sa 47 GEOFFROY Pierre Alexis répercussion sur les symptômes allergiques et sur l’humeur (91). Les auteurs ont trouvé que ces IgE étaient en lien avec une exacerbation de la dépression chez des patients avec TB de type I (91). Ces résultats indiquent qu’une relation existe entre les symptômes allergiques et ceux de l’humeur. Ces liens devront être précisés afin de pouvoir développer des interventions préventives dans le TB. Les effets d’autres facteurs environnementaux, comme les infections, devront aussi être étudiés dans le cadre des variations saisonnières associées au TB. 48 GEOFFROY Pierre Alexis E. CONCLUSION La saisonnalité du TB est bien documentée et validée dans la littérature internationale. Les effets des saisons sur l’humeur et les comportements semblent plus importants chez les sujets avec TB comparés à des sujets sains et à des sujets avec dépression unipolaire, même de caractéristique saisonnière. Les individus avec TB de caractéristique saisonnière présentent une symptomatologie plus sévère et marquée par un TB de type II, des troubles des conduites alimentaires, des cycles rapides et davantage de récurrences thymiques. Les conditions climatiques peuvent influencer et/ou déclencher les symptômes du TB, et des études futures devront clarifier les liens entre conditions climatiques et variations saisonnières du TB. Néanmoins, il est clair et bien démontré internationalement que des pics d’épisodes maniaques apparaissent au cours du printemps/été et dans une moindre mesure en en automne, alors que des pics d’épisodes dépressifs apparaissent majoritairement en hiver et dans une moindre mesure en été. L’étude de dimensions cliniques du TB a montré des premiers résultats intéressants qui devront être consolidés. En effet, les caractéristiques psychotiques, suicidaires et l’agressivité semblent suivre des variations saisonnières, probablement influencées par des facteurs climatiques possiblement différents. Il apparaît nécessaire de préciser ces observations cliniques dans des études futures qui devront examiner les mécanismes physiologiques sous-tendant les effets saisonniers dans le TB. Ces études permettront d’améliorer la compréhension du TB et in fine d’améliorer le dépistage, le suivi et les thérapeutiques de ces patients. 49 GEOFFROY Pierre Alexis II. PREMIER TRAVAIL EXPÉRIMENTAL : CARACTÉRISTIQUES CLINIQUES DU TROUBLE BIPOLAIRE ASSOCIÉES AU CARACTÈRE SAISONNIER DU DSM-IV 50 GEOFFROY Pierre Alexis A. INTRODUCTION Cette section a pour objectif de renforcer, par le biais d’un travail expérimental, les connaissances des caractéristiques cliniques du TB associées au caractère saisonnier selon la définition du DSM-IV-TR précédemment définie. Ce travail a été publié en 2013 dans le journal Chronobiology International (11). En effet, nous avons pu observer qu’il existait seulement deux études de cette nature qui indiquaient une prévalence élevée d’un sujet sur quatre atteints de TB présentant cette caractéristique saisonnière des épisodes dépressifs (59,60). La première étude de Schaffer et collaborateurs retrouvait une association du caractère saisonnier au sous-type II de TB (59). Ce résultat a été confirmé et précisé par l’étude espagnole de Goikolea et collaborateurs observant une association avec le sous-type II et davantage d’épisodes thymiques, en particulier dépressifs (60). Ces résultats préliminaires sont intéressants et demandent confirmation dans des populations plus larges (l’étude Goikolea et collaborateurs comportait 302 sujets recrutés sur un seul centre spécialisé) accompagnés d’analyses plus fines des caractéristiques cliniques associées (cyclicité, caractéristique psychotique, tentative de suicide, comorbidités addictives, etc). De plus, il existe une totale méconnaissance de l’expression clinique selon le sexe du TB avec cette caractéristique saisonnière DSM (92). Jusqu’à ce jour de telles analyses par sous-groupe selon le sexe étaient rendues impossibles par manque de puissance liée à la petite taille des populations étudiées. Or nous avons vu, dans la première partie de cette thèse consacrée à la revue de la littérature, qu’il existe des données en faveur d’une sensibilité d’expression saisonnière du TB selon le sexe. 51 GEOFFROY Pierre Alexis La caractéristique saisonnière étant intégrée au DSM-5, il apparaît indispensable pour démontrer sa pertinence en tant que spécification du TB de confirmer que cette caractéristique est fréquente, qu’elle est associée à des caractéristiques cliniques particulières du TB, et d’en clarifier sa sensibilité d’expression selon le sexe. À l’aide d’une population bien caractérisée de patients avec TB recrutés sur plusieurs centres universitaires psychiatriques français, les objectifs de ce travail seront de 1) préciser la fréquence de la caractéristique saisonnière des épisodes dépressifs selon les critères DSM, 2) comparer les caractéristiques cliniques et sociodémographiques de patients bipolaires avec et sans caractéristique saisonnière, et 3) d’explorer si le sexe influence la présentation clinique du TB avec caractéristique saisonnière. 52 GEOFFROY Pierre Alexis B. MÉTHODE Population d’étude Des sujets caucasiens remplissant les critères DSM-IV (93) pour le TB de type I ou II ont été recrutés dans trois centres psychiatriques universitaires français (Paris 12, Bordeaux et Nancy). Le protocole expérimental est conforme aux standards éthiques internationaux et a obtenu l’accord des comités régionaux d’éthique et de protection des personnes. Les sujets inclus dans cette étude ont été informés sur le protocole expérimental et ses objectifs, puis ont accepté et signé un consentement écrit. Ces sujets ont par a suite été évalués par des psychiatres ou psychologues expérimentés et formés à l’utilisation de la French version of the Diagnostic Interview for Genetic Studies (DIGS). Cette DIGS propose un entretien structuré permettant le recueil rétrospectif du diagnostic vie entière de TB, des traitements et des autres pathologies de l’axe I du DSM-IV-TR (94). Les patients avec TB devaient présenter une rémission symptomatique depuis au moins 3 mois pour pouvoir être inclus dans cette étude. La rémission symptomatique était vérifiée si des scores inférieurs à 5 aux deux échelles de l’humeur MADRS et YMRS étaient relevés à l’inclusion. Méthodes d’évaluation La caractéristique saisonnière était définit selon les critères du DSM-IV-TR par un caractère saisonnier régulier des épisodes dépressifs, et : A) une relation temporelle régulière entre la survenue des épisodes dépressifs et une période particulière de l’année (non liés à des facteurs de stress environnementaux évidemment en lien avec la période), B) des rémissions complètes (ou un virement de la dépression vers la manie ou l’hypomanie) surviennent aussi au cours d’une période particulière de l’année, C) au moins 2 épisodes dépressifs aux cours des 2 dernières années remplissant les critères A et B et en l’absence d’épisodes non- 53 GEOFFROY Pierre Alexis saisonniers au cours de la même période, et D) une vie entière du sujet marquée par nettement plus d’épisodes dépressifs saisonniers que non saisonniers. Les caractéristiques cliniques et démographiques suivantes, pouvant possiblement être liées à la caractéristique saisonnière, ont été évaluées : données sociodémographiques, traitements psychotropes (vie entière), caractéristiques du début du TB (âge et polarité du premier épisode thymique), indicateurs d’évolution de la maladie (nombre d’épisodes de l’humeur, polarité prédominante, cycles rapides), tentatives de suicide, comorbidités anxieuses et comorbidités addictives. La polarité prédominante était définit par un ratio du nombre d’épisodes maniaques divisé par le nombre d’épisodes dépressifs, dont un ratio >2/3 indiquait une polarité prédominante maniaque et un ratio <1/3 une polarité prédominante dépressive (95). Analyses statistiques Pour comparer les sujets avec et sans caractéristique saisonnière, des tests statistiques descriptifs standards ont été utilisés : Chi2 X2, Wilcoxon. Les distributions gaussiennes des variables quantitatives ont été testées par la méthode de Shapiro-Wilk et la lecture graphique des QQ plots. Lorsque les variables ne suivaient pas une distribution normale, des tests nonparamétriques ont été utilisés. Dans un premier temps des analyses univariées ont été réalisées sur la population totale de 452 sujets. Dans un second temps, une méthode de régression logistique par étapes retrogrades (backward stepwise logistic regression) a été faite avec les variables présentant des associations statistiquement significatives lors de l’analyse univariée et différenciant les groupes avec ou sans caractéristique saisonnière. Les odds ratio (OR) et les intervalles de confiance à 95% (IC) ont été rapportés pour les variables significatives identifiées par la méthode de régression logistique. 54 GEOFFROY Pierre Alexis Toutes les analyses statistiques ont été réalisées avec le logiciel statistique « R » libre de droit (R software package, version 2.14.0) distribué par la R Foundation for Statistical Computing. Le niveau de significativité a été fixé à 5%. Une méthode de correction de Bonferroni (= 5% / n tests statistiques) a été appliquée afin de prendre en compte les tests multiples et a fixé un niveau de significativité à p≤0.003. 55 GEOFFROY Pierre Alexis C. RÉSULTATS Traitements et caractéristiques sociodémographiques Quatre cent cinquante deux patients avec TB ont pu être inclus dans cette étude dont 102 (22.6%) présentaient un caractère saisonnier (CS+) et 350 (77.4%) n’en présentait pas (CS-) selon les critères DSM-IV-TR. Les groupes étaient comparables sur les variables sociodémographiques (voir Tableau 1). En particulier, il n’existait pas de différence de distribution de la caractéristique saisonnière entre les femmes et les hommes (23% contre 22% respectivement). Sur le plan des traitements psychotropes, il n’existait pas de différence entre les patients avec TB et CS+ comparés aux patients avec TB et CS- sur les prises vie entière des différents types de traitements psychotropes : antidépresseurs (p=0.52), lithium (p=0.26), valproate (p=0.11), carbamazepine (p=0.47), antipsychotiques atypiques (p=0.49), antipsychotiques typiques (p=0.09) et benzodiazépines (p=0.41). Les résultats des analyses de comparaison entre les groupes des traitements et des caractéristiques sociodémographiques sont résumés dans le Tableau 1 qui suit. 56 GEOFFROY Pierre Alexis Tableau 1. Traitements et caractéristiques sociodémographiques des patients avec trouble bipolaire (TB) et caractéristique saisonnière (CS+) ou sans caractéristique saisonnière (CS-) Variables N (452) CS+ CS(n=102, 22.6%) (n=350, 77.4%) moyenne (DS) ou n (%)a W/Chi2 P Caractéristiques sociodémographiques Genre Femme b Homme c Age Antécédent familial de trouble de l’humeur Non Oui 452 65 (63.7) 37 (36.3) 216 (61.7) 134 (38.3) 0.13 0.71 452 44.70 (13.28) 44.50 (13.19) 18132.5 0.81 422 22 (23.2) 73 (76.8) 92 (28.1) 235 (71.9) 0.92 444 39 (38.6) 62 (61.4) 161 (46.9) 182 (53.1) 421 28 (29.8) 66 (70.2) 428 2.18 0.14 70 (21.4) 257 (78.6) 2.87 0.09 74 (75.5) 24 (24.5) 260 (78.8) 70 (21.2) 0.47 0.49 440 2 (2.0) 98 (98.0) 11 (3.2) 329 (96.8) 0.41 0.52 418 5 (5.4) 87 (94.6) 26 (8.0) 300 (92.0) 0.68 0.41 444 3 (3.0) 98 (97.0) 23 (6.6) 325 (93.4) 1.90 0.17 444 31 (31.0) 69 (69.0) 87 (25.3) 257 (74.7) 1.29 0.26 437 59 (60.2) 39 (39.8) 233 (68.7) 106 (31.3) 2.49 0.11 441 62 (63.3) 36 (36.7) 203 (59.2) 140 (40.8) 0.53 0.47 Niveau d’études Élevé Moins élevé 0.34 Traitements psychotropes (vie entière) Antipsychotique de première génération Non Oui Antipsychotique de seconde génération Non Oui Antidépresseur Non Oui Benzodiazépine Non Oui Stabilisateurs de l’humeur Non Oui Lithium Non Oui Valproate Non Oui Tégrétol Non Oui a DS (=déviation standard) et % des colonnes Femmes : 22% avec CS (65/216) c Hommes : 23% avec CS (37/134) b 57 GEOFFROY Pierre Alexis Caractéristiques cliniques des patients avec caractéristique saisonnière Ainsi présenté dans le Tableau 2, le caractère saisonnier était davantage associé au sous-type II de TB (42/137; 31%) en comparaison au sous-type I de TB (60/315; 19%). Les patients avec CS+ avaient également plus de cycles rapides (p<0.0001), plus d’antécédents de troubles des conduites alimentaires (p=0.0039), et rapportaient significativement plus d’épisodes de l’humeur (p=0.00047) (dont maniaques hypomaniaques, mixtes et dépressifs) et tout particulièrement plus d’épisodes dépressifs (p<0.0001). Les patients avec TB et CS+, comparés aux patients avec TB et CS-, présentaient également un âge de début du TB plus jeune (p=0.028). La correction de Bonferroni pour tests multiples (p≤0.003) gardait significatif à cette étape les associations du caractère saisonnier avec davantage de cycles rapides, plus d’épisodes de l’humeur toutes polarités confondues, et plus d’épisodes dépressifs. Les résultats des analyses de comparaison des caractéristiques cliniques des patients avec TB et CS+ ou CS- sont résumés dans le Tableau 2 qui suit. 58 GEOFFROY Pierre Alexis Tableau 2. Caractéristiques cliniques des patients avec trouble bipolaire (TB) et caractéristique saisonnière (CS+) ou sans caractéristique saisonnière (CS-) Variables N (452) Variables catégorielles Sous-type TB I 452 II Polarité de début Manie 447 Dépression Polarité prédominante Manie 212 Dépression Cycles rapides* Non 445 Oui Symptômes psychotiques* Non 451 Oui Tentative de suicide* Non 447 Oui Troubles anxieux* Non 352 Oui Trouble des conduites alimentaires* Non 439 Oui Mésusage d’alcool * Non 442 Oui Mésusage de cannabis* Non 448 Oui Variables continues Age de début 450 Age de la 1ere hospitalisation 436 Durée d’évolution (années) 448 Nombre total d’épisodes 415 Nombre d’épisodes dépressifs 426 Nombre d’épisodes maniaques(BD1) 315 Nombre d’épisodes hypomaniaques 137 *vie entière a DS (=déviation standard) et % des colonnes CS(n=350, 77.4%) moyenne (DS) ou n (%)a CS+ (n=102, 22.6%) W/Chi2 P 60 (58.8) 42 (41.2) 255 (72.9) 95 (27.1) 7.36 0.0067 23 (23.5) 75 (76.5) 97 (27.8) 252 (72.2) 0.73 0.39 16 (30.8) 36 (69.2) 45 (28.1) 115 (71.9) 0.14 0.71 59 (61.5) 37 (38.5) 286 (81.9) 63 (18.1) 18.14 <0.0001 56 (54.9) 46 (45.1) 170 (48.7) 179 (51.3) 1.21 0.27 58 (57.4) 43 (42.6) 177 (51.2) 169 (48.8) 1.23 0.27 43 (48.3) 46 (51.7) 126 (47.9) 137 (52.1) 0.004 0.95 80 (80.8) 19 (19.2) 310 (91.2) 30 (8.8) 8.31 75 (75.8) 24 (24.2) 281 (81.9) 62 (18.1) 1.86 0.17 26 (26.3) 73 (73.7) 114 (32.7) 235 (67.3) 1.47 0.23 23.13 (8.52) 29.47 (14.11) 21.60 (12.84) 8.40 (4.95) 6.08 (3.75) 3.53 (3.65) 6.5 (5.08) 26.39 (11.58) 32.96 (14.50) 18.55 (11.06) 6.64 (3.99) 4.52 (2.86) 2.58 (2.20) 4.5 (4.47) 20147.5 17757.5 15358.5 10696.5 10316.5 5795.5 439 0.028 0.05 0.06 0.00047 <0.0001 0.08 0.10 0.0039 59 GEOFFROY Pierre Alexis Analyse par régression logistique Une analyse de régression logistique par étapes (backward stepwise logistic regression) a été réalisée sur 407 sujets (90% de la population totale) qui présentaient des données disponibles pour l’ensemble des variables identifiées lors de la première étape d’analyses univariées et ainsi introduites dans le modèle de régression. Les variables inclues dans le modèle étaient la présence ou l’absence du sous-type II de TB, de cycles rapides, de troubles des conduites alimentaires, le nombre d’épisodes dépressifs ; et en considérant les covariables suivantes : sexe, durée et âge de début du TB. L’analyse de régression montre des ORs statistiquement significatifs pour CS+ et : le sous-type II de TB (OR=1.99; IC95% 1.15-3.42; p=0.014), la présence de cycles rapides (OR=2.05; IC95% 1.14-3.69; p=0.017), l’antécédent de troubles des conduites alimentaires (OR=2.94 ; IC95% 1.43-6.02 ; p=0.0032) et le nombre total d’épisodes dépressifs (OR=1.13; IC95% 1.05-1.21; p=0.0015). Au totale 71% des sujets ont été correctement classés par cette analyse de régression (voir partie A du Tableau 3). Cette analyse a été répétée avec une stratification par sexe qui incluait d’une part 157 hommes et d’autre part 250 femmes. Chez les hommes, l’analyse a observé des associations significatives du caractère saisonnier avec le sous-type II de TB (OR=2.89; IC95% 1.21-6.68; p=0.017) et le nombre total d’épisodes dépressifs (OR=1.21; IC95% 1.07-1.36; p=0.0018). 69% des hommes ont été correctement classés par ces deux variables identifiées par l’analyse de régression (voir partie B du Tableau 3). Chez les femmes, l’analyse a observé des associations significatives du caractère saisonnier avec la présence de cycles rapides (OR=3.02; IC95% 1.47-6.2; p=0.0027) et les antécédents de troubles des conduites alimentaires (OR=2.60 ; IC95% 1.19-5.64 ; p=0.016). Au total, 51 % des femmes ont correctement été classées par ces deux variables identifiées par l’analyse de régression (voir partie B du Tableau 3). 60 GEOFFROY Pierre Alexis Tableau 3. Régression logistique présentant les différences significatives des caractéristiques cliniques classant le mieux les individus avec ou sans caractéristique saisonnièrea A) Analyse en population générale Odds Ratio [95% IC] Variables Β(DS) p POPULATION TOTALE (n=407) Trouble Bipolaire II 1.99 [1.15 - 3.42] 0.69 (0.28) 0.014 Cycles rapides* 2.05 [1.14 - 3.69] 0.72 (0.30) 0.017 Trouble des conduites alimentaires* 2.94 [1.43 - 6.02] 1.08 (0.37) 0.0032 Nombre d’épisodes dépressifs 1.13 [1.05 - 1.21] 0.12 (0.037) 0.0015 *vie entière a en utilisant les covariables suivantes: âge de début, sexe et durée d’évolution de la maladie DS : déviation standard IC : intervalle de confiance NS : non significatif B) Analyse par sous-groupe selon le sexe Odds Ratio [95% IC] Variables Trouble Bipolaire II Β(DS) p HOMMES (n=157) 2.84 [1.21 - 6.68] 0.69 (0.28) Odds Ratio [95% CI] Β(DS) p FEMMES (n=250) 0.017 NS Cycles rapides* NS 3.02 [1.47 - 6.2] 1.10 (0.37) 0.0027 Trouble des conduites alimentaires* NS 2.60 [1.19 - 5.64] 0.95 (0.40) 0.016 Nombre d’épisodes dépressifs 1.21 [1.07 - 1.36] 0.19 (0.06) 0.0018 NS *vie entière a en utilisant les covariables suivantes: âge de début, sexe et durée d’évolution de la maladie DS : déviation standard IC : intervalle de confiance NS : non significatif 61 GEOFFROY Pierre Alexis D. DISCUSSION Résultats généraux Un premier résultat important de cette étude est la confirmation de la prévalence importante (23%) de cette caractéristique saisonnière des épisodes dépressifs chez les sujets avec TB. Les deux études précédentes de Goikolea et collaborateurs et de Schaffer et collaborateurs avaient retrouvé des taux similaires (23% et 26% respectivement), et notre étude vient ainsi confirmer la présence moyenne de un sujet avec TB sur quatre exprimant une saisonnalité d’expression des récurrences dépressives (60;59). Cette prévalence est particulièrement importante puisqu’elle dépasse la prévalence reconnue de la dépression saisonnière chez les patients déprimés unipolaires qui est autour de 10-20% (96). Cette forte prévalence vient renforcer également les observations faites par une étude communautaire qui suggère que les patients avec TB présentent davantage de fluctuations saisonnières de l’humeur et des comportements comparés aux sujets sans pathologie mentale et même aux sujets souffrant de dépression unipolaire (67). Ces résultats soulignent que le TB est probablement le trouble de l’humeur le plus sujet aux effets saisonniers. D’autre part, nous confirmons les résultats obtenus en analyse multivariée par l’équipe espagnole de Goikolea et collaborateurs qui retrouvaient une association entre la présence de cette caractéristique saisonnière et le sous-type II du TB ainsi qu’une récurrence élevée des épisodes dépressifs (60). La première étude américaine de Schaffer et collaborateurs qui n’avait pas pu faire de telles analyses fines des caractéristiques cliniques par manque de puissance, avait néanmoins retrouvé cette association avec le TB de type II (59). Ces résultats et les nôtres semblent confirmer cette association forte entre le sous-type II du TB et 62 GEOFFROY Pierre Alexis l’expression saisonnière du TB. En revanche, nous n’avons pas retrouvé d’association avec la polarité de début du TB, la polarité prédominante ou la présence de symptômes psychotiques qui avaient été retrouvé dans l’étude espagnole. Cependant, la taille plus importante de notre population d’étude permettant une meilleure puissance d’analyse, a permis de démontrer d’autres associations importantes telles qu’une augmentation par deux du taux de cycles rapides et de celui des troubles des conduites alimentaires. Enfin, notre observation la plus intéressante est probablement celle d’une différence selon le sexe d’expression du TB avec caractéristique saisonnière. Expression clinique différente selon le sexe À notre connaissance, il s’agit de la première étude qui démontre que l’homme et la femme ont une expression clinique différente du TB sous l’influence des saisons. Cette observation présente des implications cliniques directes en permettant de mieux caractériser et identifier les patients avec caractéristique saisonnière, et permet également de souligner le fait que des facteurs cliniques différents peuvent exister en fonction du sexe du sujet. Ainsi nous avons pu observer que environ 70% des hommes avec TB de caractéristique saisonnière ont un TB de type II et une récurrence d’épisodes dépressifs plus importante. Chez les femmes, plus de la moitié avec TB de caractéristique saisonnière présentaient des cycles rapides et des antécédents de troubles des conduites alimentaires. L’expression différente selon le sexe du TB avec caractéristique saisonnière pourrait expliquer en partie les différences observées entre les sexes au niveau des taux d’admissions hospitalières pour épisode dépressif (39). Les cycles rapides ont déjà été rapportés dans la littérature scientifique comme étant 63 GEOFFROY Pierre Alexis préférentiellement associés au patients de sexe féminin (97,98). Plusieurs hypothèses ont pu être suggérées afin d’expliquer ces observations dont celles d’un taux plus élevé d’hypothyroïdies, une plus grande utilisation des antidépresseurs et les effets des hormones gonadiques stéroïdiennes (74). De plus, les troubles des conduites alimentaires dans le TB ont une prévalence élevée de 5 à 14% et sont essentiellement associés au sexe féminin (99;100). Dans notre étude la fréquence des troubles des conduites alimentaires était deux fois plus fréquente chez les patients avec caractéristique saisonnière contre ceux sans cette caractéristique (19% contre 9% respectivement). Ainsi, nos observations indiquent que les troubles des conduites alimentaires sont étroitement associés aux femmes avec TB et tout particulièrement s’il existe un caractère saisonnier des épisodes dépressifs. Des études précédentes avaient suggéré un lien entre boulimie et TB de type II, mais n’avaient pas étudié le lien avec un troisième facteur tel que le caractère saisonnier des épisodes (101). Ainsi, nous proposons ici de nouveaux éléments indiquant une co-ségrégation de plusieurs facteurs cliniques chez les femmes avec TB : le caractère saisonnier des épisodes dépressifs, les cycles rapides et les troubles des conduites alimentaires. Ces observations ouvrent de nouvelles pistes de recherche des possibles mécanismes sous-jacents à l’origine de ces associations cliniques. Limites de l’étude Bien qu’étant à ce jour l’étude du caractère saisonnier proposant la plus grande cohorte de patients avec TB, cette étude présente plusieurs limites importantes à être soulignées. La méthode rétrospective du recueil des données, ne permet pas d’exclure le risque d’un biais de re-mémorisation ou de possibles facteurs de confusion liés aux prises de traitements psychotropes. Il est difficile d’exclure le fait que certains traitements psychotropes aient altéré le cours évolutif de la maladie (102). En effet, on peut par exemple 64 GEOFFROY Pierre Alexis émettre l’hypothèse que l’association observée entre saisonnalité et cycles rapides soit liée aux prises de traitements antidépresseurs mis en cause dans la précipitation des cycles du TB. Cependant, cette hypothèse semble peu probable puisqu’il n’a pas été observé de différence de prise de traitements, en particulier antidépresseurs, entre les deux groupes. L’approche catégorielle pour définir la caractéristique saisonnière du TB est liée à la définition du DSM-IV et se limite aux épisodes dépressifs. Le DSM-5 a élargi cette définition et une étude plus large des effets saisonniers, sans restriction de polarité, sera possible dans les études futures. De plus, comme nous l’avons vu dans la première partie de cette thèse, cette approche catégorielle ne permet pas l’analyse des corrélations entre des phases spécifiques de la maladie et une période précise de l’année. En d’autre terme, elle ne permet pas l’étude des variations intrinsèques des symptômes liées aux variations saisonnières. Aussi, ces études d’approche catégorielle, bénéficieraient d’une double approche complétée d’outils dimensionnels comme le SPAQ (60). Implications cliniques Il est démontré que l’étiologie du TB et ses variations symptomatiques saisonnières sont étroitement liées à la luminosité et aux rythmes biologiques (79). Le sommeil, la luminosité et la saisonnalité semblent trois conditions interconnectées et à la base de la chronobiologie. Lorsque ces conditions sont altérées, elles peuvent avoir un impact important à la fois sur la psychopathologie du TB mais aussi sur son traitement (80). La dépression saisonnière peut être traitée de manière relativement spécifique en manipulant le système circadien par le biais de molécules chronobiotiques (agomélatine ou mélatonine) (81;82) et des chronothérapies (luminothérapie ou déprivation de sommeil) (84;83). De plus, la dépression saisonnière touchant un sujet sur quatre atteint de TB, les cliniciens sont encouragés à surveiller étroitement ces populations pendant l’hiver. Enfin, il conviendra sur 65 GEOFFROY Pierre Alexis le plan individuel de considérer le rôle des saisons dans l’expression du TB et d’organiser au mieux les stratégies de suivi et de prévention du patient. 66 GEOFFROY Pierre Alexis E. CONCLUSION La prévalence élevée de la caractéristique saisonnière dans le TB, ses caractéristiques cliniques associées et l’expression différente selon le sexe, suggèrent que la caractéristique saisonnière est une spécification importante et pertinente du TB. Néanmoins des études futures apparaissent nécessaires afin de préciser les caractéristiques cliniques associées aux épisodes maniaques de caractéristique saisonnière. Des études avec de larges populations sont aussi nécessaires pour préciser l’influence des sexes sur l’expression des caractéristiques cliniques associées à la caractéristique saisonnière. De manière plus générale, nos résultats indiquent que la caractéristique saisonnière est un indicateur d’une forme de TB plus sévère et complexe. Cette caractéristique saisonnière pourrait être utilement intégrée dans les algorithmes de traitements, proposant l’utilisation de chronobiotiques ou de chronothérapies. 67 GEOFFROY Pierre Alexis III. SECOND TRAVAIL EXPÉRIMENTAL : ÉVALUATION DIMENSIONNELLE SAISONNIÈRE DES CARACTÉRISTIQUES CLINIQUES DU TROUBLE BIPOLAIRE 68 GEOFFROY Pierre Alexis A. INTRODUCTION Cette dernière section est exploratoire et propose une analyse plus fine de la saisonnalité des symptômes du TB. Brièvement, nous avons vu dans la section première de cette thèse, que les individus souffrant de TB subissent d’importantes variations saisonnières de leurs symptômes, notamment maniaques, dépressifs et suicidaires. Ce sont ces trois dimensions du TB que nous avons choisi d’analyser dans ce travail. En effet, Akhter et collaborateurs, qui ont suivi pendant 10 ans des sujets atteints de TB de type I et II, ont observé une saisonnalité de leurs symptômes (hypo)maniaques ou dépressifs (70). De plus, Volpe et collaborateurs ont observé qu’au cours des manies le taux de suicidalité était plus élevé en Décembre et en Janvier et qu’il était corrélé à une augmentation rapide de la température extérieure (71). Il existe peu d’études évaluant ces dimensions dans la littérature internationale et ceci est étroitement lié aux difficultés d’accès à des bases de données suffisamment grandes pour pouvoir atteindre un niveau de puissance statistique satisfaisant. Aussi, notre étude a bénéficié des larges données issues de l'enquête « Santé mentale en population générale : images et réalités » (SMPG), qui est une recherche-action internationale multicentrique menée par l'Association septentrionale d’épidémiologie psychiatrique (ASEP) et le Centre collaborateur de l’OMS pour la recherche et la formation en santé mentale (CCOMS, Lille, France), en collaboration avec la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) du Ministère de la santé français. Cette enquête, qui a été réalisée auprès de 40 000 personnes de 18 ans issus de la population générale, semblait ainsi a priori correspondre largement aux objectifs de puissance attendus. 69 GEOFFROY Pierre Alexis Nous proposons ici des résultats préliminaires de l’étude des effets des saisons sur 3 dimensions symptomatiques du TB (symptômes maniaques, dépressifs et suicidaires) chez des sujets atteints de TB et identifiés par l’enquête SMPG. B. MÉTHODE Population d’étude Cette enquête SMPG a été réalisée auprès de 37 063 sujets adultes (>18 ans) en France métropolitaine (cinquantaine de sites), dans les Départements d’outre mer (DOM), en Algérie (Alger), en Belgique (Bruxelles), aux Comores, en Grèce (Halakida), à Madagascar (Antananarivo et Mahajanga), à l’Ile Maurice et en Mauritanie (Nouakchott). Les enquêtes ont été menées entre 1999 et 2003. Les données ont été redressées pour être représentatives de la population française âgée de 18 ans ou plus sur les variables d’âge, de sexe, de niveau d’études, de catégorie socioprofessionnelle et de situation vis-à-vis de l’emploi, et ce à partir des résultats du recensement de la population réalisé par l’Insee en 1999. La méthode de cette enquête a été détaillée dans des études précédentes (103). Pour notre étude, seules les données issues des sites français métropolitains ont été utilisées afin que les comparaisons saisonnières mensuelles soient comparables (c’est à dire correspondent aux mêmes saisons et donc à des variations climatiques comparables). Variables mesurées Le questionnaire de l’enquête SMPG dure en moyenne 40 minutes et est administré au cours d'entretiens en face à face par des intervenants formés et entraînés à la passation du questionnaire. L’enquête utilise 4 sous-questionnaires : 1) un questionnaire sur les 70 GEOFFROY Pierre Alexis représentations de la « folie », la « maladie mentale », la « dépression » et les modes d’aides et de soins ; 2) un questionnaire diagnostic structuré utilisant l’International Neuropsychiatric Interview (MINI) reprenant les critères de la classification internationale CIM10 (104); 3) une fiche complémentaire de recours aux soins et de retentissement en cas de trouble repéré; et 4) un questionnaire sociodémographique. Pour cette étude, les variables d’intérêt étaient le mois de passation du questionnaire, le diagnostic de type I de TB, la présence d’un épisode actuel de dépression, de manie, d’idées suicidaires et de tentatives de suicides. Les variables sociodémographiques retenues comme covariables dans les modèles statistiques utilisés étaient : âge, sexe, situation matrimoniale, niveau de formation et statut professionnel. Analyses statistiques L’analyse de l’effet saisonnier, des mois de l’année sur l’expression des dimensions de manie, de dépression, d’idées suicidaires ou de tentatives de suicide, a été faite à l’aide d’un modèle Cosinor décrit dans des études précédentes (53). C’est un modèle mathématique, historiquement le plus utilisé en chronobiologie, qui est basé sur la fonction sinus et dont les principales caractéristiques sont l’acrophase (pouvant être appelée simplement « phase » et définit par le moment où survient la valeur la plus élevée), la bathyphase (définit par le moment où survient la valeur la plus élevée), l’amplitude (définit par la moitié de la variation globale prédictible par un modèle mathématique), et la moyenne (définit comme la moyenne arithmétique des valeurs). Elle permet d’obtenir les différents paramètres d’une aire avec les intervalles de confiance. Elle utilise la méthode des moindres carrés et permet de définir la fonction sinusoïde qui se rapproche le plus de la série temporelle observée. 71 GEOFFROY Pierre Alexis La formule mathématique utilisée du modèle Cosinor est la suivante : Pour chaque dimension, le degré de significativité de la régression est calculé et un intervalle de confiance à 95% de probabilité est donné. Les analyses statistiques ont toutes été réalisées à l’aide du package Season (Barnett et al, 2012) du logiciel statistique R, version 2.14.0 (31 Octobre 2011) proposé par the R Foundation for Statistical Computing. 72 GEOFFROY Pierre Alexis C. RÉSULTATS De cette population, 3455 sujets avec TB de type I ont pu être identifiés et suffisamment renseignés pour les variables d’intérêt. La distribution annuelle par mois des dimensions du TB était la suivante : Figure 4. Distribution mensuelle des dimensions cliniques d’intérêt associées au trouble bipolaire. Mois Dépressions Manies 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 90 116 50 101 50 4 8 9 10 44 0 22 27 30 46 19 34 0 11 4 6 35 0 15 Total 504 227 Idées suicidaires 26 48 12 42 25 0 5 3 0 18 0 8 187 Tentatives de suicide 6 13 6 8 10 0 4 1 0 4 0 1 53 Nombre d’évaluations 4249 5449 6841 2521 5053 884 860 904 1660 6014 0 2628 37063 73 GEOFFROY Pierre Alexis Figure 5. Fréquence mensuelle des dimensions cliniques d’intérêt associées au trouble bipolaire. a) Dépressions b) Manies 74 GEOFFROY Pierre Alexis c) Idées suicidaires d) Tentatives de suicide 75 GEOFFROY Pierre Alexis Le modèle Cosinor pour la dépression a pu être appliqué sur 3455 observations. Une évolution annuelle sinusoïdale significative montrait un effet de la saisonnalité (AIC=2648). Le pic de dépressions était estimé en mi-juillet (phase = 7.5) et le point le plus bas en mijanvier (low point = 1.5). Figure 6. Évolution annuelle sinusoïdale (COSINOR) des dépressions associées au trouble bipolaire. 76 GEOFFROY Pierre Alexis Le modèle Cosinor pour la manie a pu être appliqué sur 3455 observations. Une évolution annuelle sinusoïdale significative montrait un effet de la saisonnalité (AIC=1549). Le pic de manies était estimé en fin juillet (phase = 7.8) et le point le plus bas en fin janvier (low point = 1.8). Figure 7. Évolution annuelle sinusoïdale (COSINOR) des manies associées au trouble bipolaire. 77 GEOFFROY Pierre Alexis Le modèle Cosinor pour les idées suicidaires a pu être appliqué sur 3270 observations. Une évolution annuelle sinusoïdale significative montrait un effet de la saisonnalité (AIC=1311). Le pic d’idées suicidaires était estimé en mi-juillet (phase = 7.5) et le point le plus bas en mi-janvier (low point = 1.5). Figure 8. Évolution annuelle sinusoïdale (COSINOR) des idées suicidaires associées au trouble bipolaire. 78 GEOFFROY Pierre Alexis Le modèle Cosinor pour les tentatives de suicides a pu être appliqué sur 3269 observations. Une évolution annuelle sinusoïdale significative montrait un effet de la saisonnalité (AIC=487.8). Le pic des tentatives de suicide était estimé en fin juin (phase = 6.9) et le point le plus bas en fin décembre (low point = 12.9). Figure 9. Évolution annuelle sinusoïdale (COSINOR) des tentatives de suicide associées au trouble bipolaire. 79 GEOFFROY Pierre Alexis D. DISCUSSION Les évolutions annuelles sinusoïdales (Cosinor) des 4 dimensions cliniques du TB semblent ici toutes présenter un pic d’occurrences en milieu d’été, soit mi/fin juillet. Sur le plan des symptômes thymiques, nous répliquons sans surprise le pic de manie bien démontré et répliqué de manière internationale en été (voir première section de cette thèse). Concernant le pic de dépressions, le modèle Cosinor ne pouvant présenter qu’un seul pic et surtout en l’absence d’observations en novembre, il est possible que notre modèle aie seulement retenu le second pic de dépressions observé en milieu d’été (voir première section de cette thèse) et non celui classiquement observé en hiver par défaut d’observations. Cependant, il faut souligner que ce pic survient davantage après le pic de manies et plutôt en fin d’été. Or ici nous observons un pic de dépressions qui semble survenir avant le pic de manies. Les idées suicidaires et les tentatives de suicide apportent des éléments d’observation intéressants. En effet, le pic de tentatives de suicide et d’idées suicidaires semblent se présenter tout deux en début d’été avec un pic de tentatives de suicide précédant légèrement celui des idées suicidaires. Il est possible d’émettre l’hypothèse que le sous-groupe de patients avec tentative de suicide est plus sévère ou plus sensible aux variations saisonnières que le sous-groupe avec idées suicidaires et présentent donc des symptômes plus tôt après les modifications climatiques. Soulignons que ces résultats répliquent les observations antérieures démontrant un pic de suicides plutôt en avril-mai (105). De plus Volpe et collaborateurs avaient précédemment observés qu’une augmentation rapide de la température extérieure était corrélée à la suicidalité (71). Enfin, la superposition partielles des courbes de manies et de dépressions avec celles des tentatives de suicide et des idées suicidaires vient confirmer des résultats antérieurs de Morken et collaborateurs qui avaient observé que le taux 80 GEOFFROY Pierre Alexis de suicides chez les hommes avec TB corrélait avec les taux d’admissions pour dépression et pour manie (39). Il était bien démontré que les patients avec TB présentaient un pic de suicides plus important que des sujets sans pathologie psychiatrique ou avec une autre pathologie psychiatrique, mais que ce pic apparaissait à la même période de l’année (105). La co-vulnérabilité trouble de l’humeur et suicide était bien connue, mais ici la corrélation annuelle entre symptômes thymiques et symptômes suicidaires semblent indiquer la présence de facteurs environnementaux précipitants communs. Plusieurs limites de ce travail exploratoire sont à souligner. La plus importante concerne l’absence d’observation en novembre qui a pu déstabiliser le modèle Cosinor. L’étude SMPG a pu bénéficier de nouvelles inclusions de sujets, et nous espérons pouvoir récupérer à terme des données sur des sujets évalués en novembre. Les analyses seront alors à nouveau réalisées afin de vérifier la persistance de ces résultats. Une seconde limite concerne la difficulté d’exclure un effet centre de ces données. En effet, malgré les efforts de standardisation de l’enquête, il est impossible d’exclure l’existence de différences entre les centres concernant la passation du MINI et donc des fluctuations de la propension à identifier des sujets avec TB et/ou des symptômes de la maladie. Il conviendrait donc dans les analyses futures d’intégrer le facteur « centre » dans les modèles Cosinor. Des limites habituelles liées au caractère rétrospectif de l’étude sont à souligner. Un biais de re-mémorisation peut ainsi exister, avec possiblement une sous déclaration des épisodes les plus anciens et donc une sous-estimation de la fréquence des variables étudiées. 81 GEOFFROY Pierre Alexis E. CONCLUSION Cette dernière section propose une travail exploratoire de quatre dimensions du TB : la dépression, la manie, les idées suicidaires et les tentatives de suicide. Des premiers résultats intéressants de ces analyses viennent confirmer l’existence d’une fluctuation saisonnière importante de ces quatre dimensions cliniques du TB. L’été, et surtout les mois de juin et juillet, apparaît être une période particulière de vulnérabilité et de décompensation du cours évolutif de la maladie bipolaire. La co-vulnérabilité entre le TB et le suicide est bien démontrée. Par la co-occurrence annuelle en début d’été des symptômes thymiques et des symptômes suicidaires, ce travail vient souligner qu’il existerait des facteurs environnementaux précipitants communs. Il serait donc intéressant dans des études futures d’analyser ces données avec les variables climatiques locales dont la température extérieure, l’ensoleillement, la pluviométrie et la pression atmosphérique. Enfin ces résultats devront être répliqués dans des études indépendantes où il serait intéressant d’analyser les fluctuations saisonnières d’autres dimensions (ou comorbidités) du TB comme les addictions, les troubles anxieux, les caractéristiques psychotiques, les rythmes circadiens et le sommeil. 82 GEOFFROY Pierre Alexis IV. CONCLUSION GÉNÉRALE Cette revue systématique de littérature et les deux travaux expérimentaux proposés dans cette thèse permettent de conclure qu’il existe une saisonnalité du TB. Les différents niveaux d’évaluation de cette saisonnalité, allant de l’analyse des taux d’admissions hospitalières aux évaluations dimensionnelles individuelles, indiquent qu’à la fois les épisodes de la maladie mais aussi ses symptômes subissent ces effets saisonniers. Une donnée importante et émergeante est que ces effets des saisons semblent plus importants chez les sujets avec TB comparés à des sujets sains et à des sujets avec dépression unipolaire, même de caractéristique saisonnière. L’existence de pics d’épisodes de manies ou de dépressions du TB sont des observations réalisées de manière internationale et très répliquées, permettant ainsi un excellent niveau de confiance dans ces observations. Les pics d’épisodes maniaques apparaissent au cours du printemps/été et dans une moindre mesure en automne, alors que les pics d’épisodes dépressifs apparaissent majoritairement en hiver et dans une moindre mesure en été. Il apparaît que les conditions climatiques peuvent influencer et/ou déclencher les symptômes du TB, mais les études de corrélation avec les variables climatiques locales sont à ce jour insuffisantes pour être en mesure d’identifier clairement les facteurs climatiques précipitants. Néanmoins, il semblerait que les changements brutaux de luminosité, de température ou d’humidité ont une influence très probable sur le TB, mais dont la taille des effets et la nature exacte seront à préciser. Une évaluation plus catégorielle des individus avec TB de caractéristique saisonnière indique que la symptomatologie du TB est en elle-même plus sévère. En effet, les patients avec TB et caractéristique saisonnière selon la définition du DSM présentent davantage un TB de type II, plus de troubles des conduites alimentaires, de cycles rapides et davantage de récurrences thymiques. L’étude de dimensions cliniques du TB a montré des premiers résultats très intéressants qui devront être consolidés et étendus à 83 GEOFFROY Pierre Alexis l’ensemble des dimensions cliniques du TB. En effet, les caractéristiques thymiques, suicidaires, psychotiques et l’agressivité apparaissent subirent des fluctuations saisonnières, probablement influencées par des facteurs climatiques possiblement communs (notamment pour les symptômes thymiques et les symptômes suicidaires). Il apparaît nécessaire de préciser ces observations cliniques dans des études futures qui devront examiner les mécanismes physiologiques sous-tendant les effets saisonniers dans le TB. Des études supplémentaires semblent également nécessaires afin d’intégrer utilement la présence d’une composante saisonnière du TB dans les algorithmes de décision thérapeutique, afin d’aider au mieux le clinicien dans son choix éventuel de thérapeutiques chronobiologiques ciblées. Enfin plus généralement, ces travaux permettront d’améliorer le dépistage, le suivi et les thérapeutiques des patients avec TB, dans l’idée du développement d’une médecine plus personnalisée dans le champ de la psychiatrie. 84 GEOFFROY Pierre Alexis V. BIBLIOGRAPHIE 1. Phillips ML, Kupfer DJ. Bipolar disorder diagnosis: challenges and future directions. Lancet. 11 mai 2013;381(9878):1663‑1671. 2. Association AP. Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders: Dsm-5. Amer Psychiatric Pub Incorporated; 2013. 947 p. 3. Merikangas KR, Akiskal HS, Angst J, Greenberg PE, Hirschfeld RMA, Petukhova M, et al. Lifetime and 12-month prevalence of bipolar spectrum disorder in the National Comorbidity Survey replication. Arch Gen Psychiatry. mai 2007;64(5):543‑552. 4. Leboyer M, Kupfer DJ. Bipolar disorder: new perspectives in health care and prevention. J Clin Psychiatry. déc 2010;71(12):1689‑1695. 5. Drancourt N, Etain B, Lajnef M, Henry C, Raust A, Cochet B, et al. 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Place of birth - City / Province (State) / Country _________________________________________________ ________ 4. Today's date Month ________ Day ________ Year 5. Current weight (in lbs.) ____________ 6. Years of education Less than four years of high school 1 High school only 2 1-3 years post high school 3 4 or more years post high school 4 7. Sex - Male 1 Female 8. Marital Status - Single 1 Married 2 INSTRUCTIONS * Please circle the number beside your choice. Example: Sex Male 1 2 Female 2 Sep./Divorced 3 Widowed 4 9. Occupation ______________________________________ 10. How many years have you lived in this climatic area? ________________ The purpose of this form is to find out how your mood and behaviour change over time. Please fill in all the relevant circles. Note: We are interested in your experience; not others you may have observed. 11. To what degree do the following change with the seasons? No Change Slight Change Moderate Marked Change Change Extremely Marked Change A. Sleep length 0 1 2 3 4 B. Social activity 0 1 2 3 4 C. Mood (overall feeling of well being) 0 1 2 3 4 D. Weight 0 1 2 3 4 E. Appetite 0 1 2 3 4 F. Energy level 0 1 2 3 4 94 GEOFFROY Pierre Alexis ANNEXE 1 (SUITE) SEASONAL PATTERN ASSESSMENT QUESTIONNAIRE 1. Name _____________________________________ 2. Age ___________ 3. Place of birth - City / Province (State) / Country _________________________________________________ ________ 4. Today's date Month ________ Day ________ Year 5. Current weight (in lbs.) ____________ 6. Years of education Less than four years of high school 1 High school only 2 1-3 years post high school 3 4 or more years post high school 4 7. Sex - Male 1 Female 8. Marital Status - Single 1 Married 2 INSTRUCTIONS * Please circle the number beside your choice. Example: Sex Male 1 2 Female 2 Sep./Divorced 3 Widowed 4 9. Occupation ______________________________________ 10. How many years have you lived in this climatic area? ________________ The purpose of this form is to find out how your mood and behaviour change over time. Please fill in all the relevant circles. Note: We are interested in your experience; not others you may have observed. 11. To what degree do the following change with the seasons? No Change Slight Change Moderate Marked Change Change Extremely Marked Change A. Sleep length 0 1 2 3 4 B. Social activity 0 1 2 3 4 C. Mood (overall feeling of well being) 0 1 2 3 4 D. Weight 0 1 2 3 4 E. Appetite 0 1 2 3 4 F. Energy level 0 1 2 3 4 95 AUTEUR : Nom : GEOFFROY Prénom : Pierre Alexis Date de Soutenance : 11 avril 2014 Titre de la Thèse : Saisonnalité et Trouble Bipolaire Thèse - Médecine - Lille 2014 Cadre de classement : Psychiatrie Adulte DES + spécialité : DES Psychiatrie Mots-clés : Troubles bipolaires ; saisons ; chronobiologie ; rythmes caractéristique saisonnière ; troubles de l’humeur ; dépression ; manie. circadiens ; Résumé : Saisonnalité et Trouble Bipolaire Contexte : Le trouble bipolaire (TB) est une maladie psychiatrique neurodéveloppementale sévère et fréquente (1 à 4% de la population générale). La sévérité et le pronostic de cette maladie est en partie liée à un taux élevé de récurrences des épisodes de l’humeur avec 70 à 80% de rechutes en moyenne à 2 ans après un épisode majeur (dépressif ou maniaque) et ce malgré le traitement. Ces récurrences peuvent suivre une cyclicité saisonnière pour un nombre important de patients. Or, l’étude de l’effet des saisons dans le TB présente une littérature complexe et hétérogène, qui ne bénéficie pas à ce jour de synthèse exhaustive. Méthode : Ce travail de thèse propose : I) une revue systématique de la littérature scientifique internationale, II) un travail expérimental d’étude des caractéristiques cliniques du TB associées au caractère saisonnier du DSM-IV, et III) un second travail expérimental proposant une évaluation dimensionnelle saisonnière des caractéristiques cliniques du TB. Résultats : Les différents niveaux d’évaluation de cette saisonnalité, allant de l’analyse des taux d’admissions hospitalières aux évaluations dimensionnelles individuelles, indiquent qu’à la fois les épisodes du TB mais aussi ses symptômes subissent ces effets saisonniers. L’existence de pics d’épisodes de manies ou de dépressions du TB sont des observations internationales et très répliquées. Les pics d’épisodes maniaques apparaissent au cours du printemps/été et dans une moindre mesure en automne, alors que les pics d’épisodes dépressifs apparaissent en hiver et dans une moindre mesure en été. Il apparaît que les conditions climatiques peuvent influencer et/ou déclencher les symptômes. Une évaluation plus catégorielle de la caractéristique saisonnière dans le TB indique qu’elle s’associe à une maladie de forme plus sévère. Il est démontré que 25% des sujets avec TB présentent une saisonnalité des épisodes dépressifs et que 15% présentent une cyclicité des épisodes maniaques. L’étude des dimensions cliniques montre que les caractéristiques thymiques, suicidaires, psychotiques et l’agressivité apparaissent subirent des fluctuations saisonnières, probablement influencées par des facteurs climatiques possiblement communs (notamment pour les symptômes thymiques et les symptômes suicidaires). Conclusion : Il existe une saisonnalité du TB, dont la spécification serait utilement intégrée dans les algorithmes de décision thérapeutique, de prévention et de dépistage. Composition du Jury : Président : Monsieur le Professeur Pierre THOMAS Assesseurs : Messieurs le Professeur Guillaume VAIVA, le Professeur Olivier COTTENCIN, le Professeur Frank BELLIVIER, le Docteur Renaud JARDRI. 96