comporte également une dimension cognitive, notamment dans le cas des entreprises innovantes. Des
travaux récents révèlent cependant que l’approche traditionnelle de la gouvernance s’inscrit dans une
perspective relativement étroite de la création de valeur, car purement disciplinaire (Charreaux, 2002a,
2002b ; Ricart, 2000). Ainsi, la théorie de l’agence traditionnelle ne s’intéresse pas à l’origine des
opportunités d’investissement, la plupart des modèles considérant ces dernières comme un ensemble
donné. Or, la recherche en stratégie met en exergue le rôle central des connaissances, capacités et
compétences (Kogut et Zander, 1992 ; Nonaka, 1994 ; Prahalad et Hamel, 1990 ; Rumelt, 1984 ;
Teece et al., 1997), souvent tacites, pour favoriser l’innovation et conforter un avantage concurrentiel,
qui seraient autant de vecteurs potentiels d’une création de valeur durable.
A la lumière de cette gouvernance cognitive, nous pouvons raisonner en termes de coûts cognitifs. Ces
derniers peuvent être définis comme les coûts résultant de l’incompréhension mutuelle entre les
dirigeants et les autres parties prenantes. (Peter Wirtz, 2005). Ils comprennent les pertes de valeur liées
aux dysfonctionnements dus à l’incompréhension, ainsi que l’ensemble des coûts devant être engagés
pour surmonter les différences dans l’appréciation des opportunités (temps et moyens consacrés à la
discussion, à l’explication, etc.).
Les actionnaires sont susceptibles donc de jouer leur rôle cognitif, au-delà du seul rôle disciplinaire.
d. La gouvernance des entreprises : une théorie synthétique
En effet, il existe désormais différentes tentatives d’intégrer des concepts disciplinaires et cognitifs
pour l’étude des phénomènes de gouvernance (Aoki, 2000a, 2000b, 2001 ; Charreaux, 2002a, 2002b ;
Lazonick et O’Sullivan, 1997, O’Sullivan, 2000). Or, selon Peter Wirtz (2005) afin de pouvoir
produire des propositions testables, une théorie synthétique, intégrant à la fois les variables cognitives
et disciplinaires, doit chercher à répondre à la question du poids respectif de ces différentes variables.
Dans ce contexte, il paraît plausible de supposer que la nature du principal vecteur de création de
valeur est variable dans le temps, l’enjeu central de la gouvernance étant, selon les circonstances,
tantôt cognitif tantôt disciplinaire.
La question est alors de comprendre l’intensité variable des facteurs cognitifs et disciplinaires agissant
sur la création de valeur des entreprises. Selon Peter Wirtz (2005), le poids respectif des facteurs
disciplinaires et cognitifs dépend notamment du stade de développement de l’entreprise et du degré
d’incertitude caractérisant son secteur d’activité. Cette hypothèse procède de l’idée, selon laquelle,
pour une jeune entreprise évoluant dans un environnement (notamment technologique) hautement
incertain, la maîtrise du processus de création de valeur est essentiellement tributaire d’un ensemble de
connaissances tacites et de compétences spécifiques. En revanche, les problèmes de discipline
deviennent de plus en plus prégnants, lorsque la technologie se vulgarise plus et l’entreprise accroît sa
taille et le nombre de ses bailleurs de fonds. Dans une optique de création de valeur, le rôle des acteurs
– dirigeants et bailleurs de fonds - et leur manière d’aborder les mécanismes de gouvernance évoluent
alors en conséquence.
II. Le rôle des plans d’actionnariat salarié dans les différentes approches de la
gouvernance des entreprises : l’identification des conditions de succès
a. Le rôle des plans d’actionnariat salarié dans la gouvernance des entreprises
Selon Dondi (1992), l’actionnariat salarié est défini comme étant « l’ouverture du capital aux salariés
sous forme individuelle ou collective. Elle ne se traduit pas forcément par une détention d’actions
puisqu’elle peut revêtir différentes formes aussi diverses que : parts de fonds communs de placements,