FOUCHER L’intégration fonctionnelle cérébrale dans la schizophrénie
Introduction
Quelques pas de plus…
Cette thèse s’inscrit dans la continuité des hypothèses de sejonction (ou de disconnectivité)
dans la schizophrénie, et des avancées théoriques proposées par Giulio Tononi.
Cet auteur a proposé qu’un fonctionnement cérébral efficace, serait le fait d’une population
de neurones intégrés, appelée “assemblée dynamique”, qui fonctionnerait indépendamment
du “reste” du cerveau. Il ne s’agit pas d’une structure anatomique, mais bien d’une structure
fonctionnelle, les neurones qui en font partie changeant à chaque instant.
Nous proposons de prendre en compte l’apport majeur que Tononi laisse inexplicablement
dans l’ombre, alors qu’il s’agit réellement d’un nouvel apport s’ajoutant aux concepts
antérieurs. À la lecture des formules qu’il propose, on se rend compte qu’il est au moins
aussi important de savoir ce qui est intégré avec quoi (l’assemblée dynamique), que de
savoir ce qui n’y est PAS intégré. Ce fait n’est pas discuté par l’auteur au point de ne pas
donner de nom à cette partie du système cérébral qui ne participe pas à l’assemblée
dynamique, que par défaut nous avons nommé “reste”.
Ce nouveau point de vue, intégrant le reste du système dans l’équation, et pas simplement
la partie du système qui joue un rôle dans une tâche donnée, offre de nouvelles perspectives
quant à la physiopathologie de la schizophrénie. Ainsi pourrait-on schématiquement
distinguer 2 types d’anomalies de l’intégration fonctionnelle cérébrale délétères et
potentiellement impliquées dans la schizophrénie :
-Un défaut d’intégration de l’assemblée dynamique, qui est la théorie dominante à
l’heure actuelle,
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-Mais aussi un défaut d’isolement de cette assemblée par rapport au reste. L’activité
du reste du système pourrait en effet venir perturber, bruiter l’activité de l’assemblée
dynamique. Cette anomalie pourrait être primitive, découler d’une insuffisance
d’intégration de l’assemblée dynamique ou encore être secondaire à un excès
d’intégration du reste.
L’objectif de cette thèse est de valider l’une et/ou l’autre de ces hypothèses qui ne sont pas
mutuellement exclusives, mais qui mènent à des observations très différentes. Il s’agit donc
d’une étude de trait, car l’anomalie est recherchée chez des patients stabilisés. L’approche
est catégorielle, puisqu’on compare les patients à des sujets contrôles.
La question qui suit logiquement est de savoir si ces indices sont corrélés à certains
symptômes de la maladie. La première approche est corrélative entre les paramètres de
l’intégration fonctionnelle et les signes cliniques résiduels de chaque patient. Il s’agit cette
fois d’une étude de trait paramétrique. La seconde approche consiste à comparer la
dynamique cérébrale chez un même patient lorsqu’il présente un symptôme (une
hallucination) par rapport au moment il n’en souffre pas. Il s’agit d’une étude d’état
catégorielle.
Le travail
Le premier travail est historique pour retracer la généalogie des concepts d’intégration et de
l’hypothèse d’une altération de celle-ci dans la schizophrénie.
Le second travail est théorique, pour prendre en main et étendre l’instrument conceptuel
proposé par Tononi, ainsi que les techniques de traitement du signal permettant de dépasser
la simple corrélation comme la valeur de verrouillage de phase (ou phase locking value). Ce
travail se prolonge par l’implémentation informatique et la proposition d’un algorithme
capable de converger vers l’identification de l’assemblée dynamique.
Puis, pour dépasser le stade théorique, il faut disposer de l’enregistrement simultané de
l’activité de l’ensemble du système cérébral (ou de sa plus grande part). Les techniques
d’imagerie fonctionnelle disponibles à l’heure actuelle offrent cette possibilité. Le choix des
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instruments et leur mise en œuvre constituent la seconde partie du travail de cette thèse. En
effet, pour valider les résultats il paraît important de pouvoir vérifier leur indépendance par
rapport à la méthode de mesure employée. C’est pourquoi deux techniques très différentes
furent utilisées, l’IRM fonctionnelle et la magnétoencéphalographie.
Ce travail comporte donc 7 chapitres :
-Un premier chapitre retraçant l’historique de l’hypothèse d’une atteinte de l’intégration
fonctionnelle dans la schizophrénie, qui n’est pas nouvelle.
-Un second chapitre sur les données actuelles en s’inspirant des modèles
neurologiques.
-Un troisième chapitre théorique et algorithmique.
-Un quatrième consacré à la validation des algorithmes appliqués à la
magnétoencéphalographie chez le sujet sain.
-Un cinquième utilisant l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle pour établir
les différences entre patients et témoins (marqueur de trait).
-Un sixième ayant le même objectif, mais utilisant la magnétoencéphalographie
(marqueur de trait).
-Enfin un septième chapitre initiant la mise en évidence de l’implication des problèmes
d’intégration dans les symptômes psychotiques, en commençant par les
hallucinations (marqueur d’état).
Bien qu’une discussion soit faite à la fin de chaque chapitre, une discussion générale tente
d’intégrer les différents résultats entre eux, de les situer par rapport aux données de la
littérature, et d’entrevoir les extensions futures .
Au-delà de leur intérêt scientifique, nous avons l’espoir que ces travaux permettront :
-de mieux comprendre la maladie,
-de déboucher sur un éventuel instrument pronostic surtout au stade initial de la
maladie,
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-de permettre la mise au point de modèles animaux plus proches de la
physiopathologie
-et d’initier de nouvelles approches thérapeutiques.
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Chapitre 1
Introduction historique
Pourquoi parler d’histoire ? Parce que l’idée que nous testons date d’un peu plus d’un siècle,
un peu comme si cette thèse voulait marquer ce centenaire. De plus, le recul historique
permet de préciser certains des concepts que nous serons amenés à utiliser. Enfin, j’espère
faire partager l’intérêt que j’ai trouvé dans la généalogie des concepts de schizophrénie et de
disconnectivité. Bien sûr il n’était pas possible de tout rapporter, il a fallu faire des choix,
parfois interpréter ou prendre position.
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