Le Movadef et La presse. Le traitement

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LE MOVADEF ET LA PRESSE
Le traitement médiatique d’une organisation
politique liée au Sentier Lumineux (Pérou).
De la tentative d’inscription comme parti
politique à l’Opération Perseo
Mémoire présenté par Jeanne Longué sous la direction
de Valérie Robin Azevedo,
Maître de conférences en anthropologie au sein de
l’Université du Mirail-Toulouse
1 SOMMAIRE
INTRODUCTION
I La naissance du Movadef : idéologie, processus et
implications
A) Une idéologie marxiste basée sur le « Pensamiento Gonzalo »
1) La ligne programmatique du Movadef s’appuie sur une pensée marxiste
classique
2) Qu’est ce que le « Pensamiento Gonzalo »
3) Nous ne sommes pas Sentier Lumineux. Comment les militants insistent
sur la nouveauté politique de leur mouvement
B) Un « nouveau né » politique qui ne nait pas de nulle part
1) Le processus qui conduit à la naissance du Movadef
2) Un organisme généré par Sentier Lumineux
3) La revendication d’une mémoire partisane
4) Une formation idéologique dans la lignée de Sentier Lumineux
2 C) Un regard critique sur le Movadef
1) Le Sentier Lumineux d’aujourd’hui n’est pas celui des années 80
2) Le Sentier Lumineux d’Abimael Guzman n’est pas le SL du VRAEM
3) L’amnistie, nouveau paradigme
II La crispation médiatique face à un mouvement
perçu comme une résurgence du Sentier Lumineux
A) Un rejet unanime et ses conséquences
1) Faire appel aux autorités compétentes pour justifier la légitimité de la
position majoritaire
2) Tous pour la défense de la démocratie
3) Une loi contre les organisations de façade du terrorisme proposée au
même moment : quand la démagogie est saluée par la presse
B) Une amplification des faits et des mots propice au
sensationnalisme
1) Les attaques politiques contre le JNE illustre la fébrilité dans la lutte
contre l’inscription
2) La construction d’une narrative de la terreur
3 C) Des tentatives plus honnêtes de montrer les preuves de
l’illégitimité de son inscription
1) Les comités partisans fantômes et les signatures
2) Une inadaptabilité aux conditions de l’exercice démocratique
(Roncagliolo)
III L’Opération Perseo 2014 et sa couverture
médiatique : l’exploitation de la « panique morale » par
le pouvoir politique rejoint l’aveuglement
journalistique.
A) Une opération saluée par la presse de prestige comme une victoire
contre le terrorisme et pour la défense de la démocratie
1) Un traitement de l’information basée sur l’acceptation sans critique de
l’opération
2) Le lien entre Artemio, Guzman et le Movadef érigé comme preuve de la
volonté du Movadef de reprendre les armes
B) La dénonciation quasiment censurée par la presse de prestige
1) Mensonge ou désinformation. L’argument d’une rencontre a 100 000
soles qui n’a jamais existé
4 2) Une opération « psychosociale » : un changement de stratégie dans la
lutte antiterrorisme qui dérive vers une dangereuse manipulation de
l’opinion
3) Un contexte social et journalistique défavorable à la mise en valeur de
l’esprit critique face aux évènements liés au Movadef et au SL
C) La remise en liberté des « mis en garde a vues » : un tollé général
illustratif du « bluff » de l’opération Perseo
1) Pour faire concorder la libération des accusés avec la peur de la menace
terroristes, les journaux s’en prennent aux juges
2) Une dangereuse inclinaison vers la démagogie qui met en danger
l’indépendance de la justice
CONCLUSION
Bibliographie
Annexes
5 Au Pérou, selon la Commission de la Vérité et de la Réconciliation (CVR)
chargée d’enquêter et de rédiger un rapport sur le conflit armé interne qui sévit
depuis 1980 et se termine véritablement en 2000 avec la chute du président
autoritaire Alberto Fujimori, élu en 1990, le Parti Communiste Péruvien – Sentier
Lumineux (PCP-SL) est déclaré responsable d’environ 53% du total de personnes
tuées pendant cette période de violence estimé à 69 000. Les populations paysannes
pauvres de la « sierra » notamment des régions d’Ayacucho et de Huancavelica, dans
le Sud-Centre du pays sont les plus touchées par les exactions tant des Forces
Armées péruviennes, qui interviennent dans plusieurs régions du pays à partir de
1982 avec pour consigne de mettre fin aux activités « terroristes », que du propre
Sentier Lumineux. En effet, la CVR a prouvé que plus de 75% des victimes du
conflit étaient de petits agriculteurs de langue quechua, alors que, selon les
recensements, cette population ne représentait que 16% de la population nationale
péruvienne à l’époque du conflit. A part le minutieux travail développé par la CVR à
partir de sa création, en 2001, quand s’installe le gouvernement de transition
démocratique de Valentin Paniagua, et qui aboutira au recueil de près de 17 000
témoignages d’acteurs du conflit, d’autres études journalistiques et anthropologiques
ont tenté de comprendre le fonctionnement, l’organisation interne et la logique du
PCP-SL. L’anthropologue Carlos Ivan Degregori notamment a largement analysé,
au cours de ses travaux, l’origine, la logique et l’échec de cette organisation politique
parfois dénommée « guérilla » mais qui constitue une exception notable au sein du
panorama des mouvements révolutionnaires latinoaméricains. D’une part, le
nombre extrêmement élevé de victimes et les caractéristiques particulières de la
population la plus touchée et d’autre part, les spécificités même du mouvement ont
éveillés l’intérêt de nombreux chercheurs en sciences sociales, surtout dans les
années postérieures à la chute de son leader, Abimael Guzman, pour des raisons qui
tiennent en partie à l’incompréhension et à la surprise des propres universitaires face
au développement non anticipé du Sentier Lumineux dans le panorama politique et
social péruvien. Pour replacer le contexte politique dans sa globalité, il s’agit de
signaler que parallèlement, une autre organisation politique a développé des activités
6 de guérilla au Pérou durant la même époque, mais à partir de 1984: le MRTA
(mouvement révolutionnaire Tupac Amaru) cette fois avec des caractéristiques plus
proches ou plus semblables aux activités des autres guérillas latino-américaines, et
qui s’achèvera avec la une spectaculaire prise d’otages, au sein de l’ambassade du
Japon à Lima, en 1997, qui marquera la quasi extinction des activités du groupe
puisque l’Armée anéantira la quasi totalité des combattants du MRTA lors de cet
évènement.
Pendant la longue période du conflit armée, la presse a joué un rôle capital
avec sa « couverture » journalistique, inégale, parfois contradictoire et confuse, et
limitée par la censure lorsque la plupart des régions touchées sont décrétées « zones
d’urgence » à partir de 1982. Peralta, à travers son livre « Sentier Lumineux et la
presse. 1980-1994 : la violence politique péruvienne et sa représentation dans les
médias » décrit comment le sensationnalisme tend à s’imposer dans les publications
de presse, et que même lorsqu’elle a cherché à s’en éloigner, elle finit par y
retomber, en « spéctacularisant » les informations ou les évènements liées au SL.
Malgré cela, la presse a participé de la diffusion des activités du Sentier
Lumineux (SL), comme les plus emblématiques massacres telle que Lucanamarca,
en 1983 ou des forces armées, en reportant les affaires d’exécutions extrajudiciaires,
de tortures durant les interrogatoire ou les disparitions (dans certaines publications
de gauche), grâce au travail de journalistes engagés dans la recherche de la vérité. Un
des journalistes d’investigation spécialiste des questions liées aux conflit interne,
Gustavo Gorriti a été un des premiers à écrire une étude très documentée des deux
premières années d’émergence du Sentier Lumineux, « Sendero, une histoire de la
guerre millénaire au Pérou » dont la première publication s’est effectué relativement
tôt, en 1990 et dans laquelle il révèle les tâtonnements stratégiques de l’État dans la
lutte contre les terroristes. Son opinion sur les évènements qui touchent à l’existence
du SL et plus tard du Movadef, se situe largement à contre courant des idées
répandues dans la presse et a été largement mobilisée dans ce mémoire à la fois pour
son originalité et son autorité intellectuelle
Il est également primordial de relever que les propres journalistes, désireux
d’informer le lectorat de manière satisfaisante sur ce qu’il se passait réellement dans
lesdites zones au vu du peu d’informations qui circulait, et malgré la dangerosité du
7 terrain, seront aussi les victimes de la violence, de manière réitérée. L’affaire la plus
notable est sans aucun doute la massacre d’Uchurracchay, en 1983, qui se solde par
l’assassinat de huit journalistes et bien que les faits n’aient pas été éclaircies jusqu'à
aujourd’hui, une Commission mise en place pour enquêter les faits conclut a la
responsabilité des habitants du village du même nom. Au delà de ces huit morts, de
nombreux correspondants, entre reporters et photographes ont payés leur métier de
leur vie. La peur et le climat de terreur, alimentés par les propres médias, n’ont pas
participé de la pluralité du traitement de l’information. Ajouté à cela, la plupart des
journaux de Lima se confrontaient à un monde socio-culturel, le monde andin, qu’ils
connaissaient peu, ce qui dans un premier temps , comme l’a montré Peralta a
alimenté des théories erronées sur les acteurs du conflit (complot du communisme
international).
Il faut attendre le 12 septembre 1992 pour que le chef du PCP-SL, Abimael
Guzman soit arrêté dans une maison du Sud de Lima, suite au travail de plusieurs
années d’agents d’un groupe Spécial d’Espionnage appelé GEIN (Grupo Especial
de Inteligencia). En compagnie de sa femme, Elena Iparaguirre et d’autres membres
du Comite Politique du Sentier Lumineux, son chef historique sera ensuite
condamné à perpétuité pour crimes contre l’humanité. Cette capture marque la fin
d’une période pour ladite organisation politique désormais privée de son leader,
évidemment contraint à changer les plans de la « guerre populaire ».
Le changement de stratégie s’illustre notamment un an plus tard, en 1993, lorsque
Guzman envoie une série de lettres au président de la République, Alberto Fujimori
pour solliciter des Accords de Paix avec le gouvernement en place, en acceptant et
en reconnaissant la défaite. Ce retournement à la fois de situation et d’idéologie
marquera le début d’une rupture jamais résolue entre deux factions du Sentier
Lumineux : les partisans de la lignée de Guzman, et ceux qui décideront
l’impossibilité d’abdiquer face à l’État péruvien, et qui finiront par se replier dans les
zones peu accessibles du Vraem (Valle del Rio Apurimac, Ene y Mantaro), au sein
duquel ils poursuivront leur lutte armée contre l’État, en alliance avec le narcotrafic.
Au cours de ce long processus qui suit la capture du chef de file du Sentier
Lumineux nait officiellement le 23 novembre 2009, le Mouvement pour l’Amnistie
et les Droits Fondamentaux, aussi appelé Movadef, dont les dirigeants sont en
8 grande partie d’anciens condamnés pour terrorisme et les propres avocats d’Abimael
Guzman, et qui se revendique du « Pensamiento Gonzalo » et pour une l’amnistie
générale afin d’apporter une solution à la réconciliation nationale.
Pour mesurer l’impact et la peur qu’ont réveillé l’apparition de ce
mouvement, il est nécessaire de mesure l’ampleur du conflit interne et ce qu’il
représente pour le Pérou et son histoire récente ainsi que le degré compréhensible
de traumatisme collectif qu’il a généré dans la société péruvienne, de manière très
inégale si l’on parle des zones ou les familles ont été touchées a proprement parler
par des cas d’assassinats ou de disparitions (Lima par exemple ne s’est vu confrontée
de manière « physique » a la réalité du conflit que dans les dernières années) mais
avec un degré de référents communs illustrant l’horreur vécue pendant ces années
de violence. C’est le cas des massacres perpétrées par les militants du PCP-SL,
comme Lucanamarca, en 1983 ou des « apagones », c’est à dire de ces longues
heures durant lesquelles les villages et les villes étaient plongés dans l’obscurité suite
à l’abattement de tours électriques à haute tension par le Sentier Lumineux, actions
destinées à effrayer les populations et à créer un état de panique propice pour
développer leurs activités. Ainsi, en aucun cas, il ne s’agira au cours de cette étude,
de nier l’intensité, le degré de culpabilité ou d’implication des membres du Sentier
Lumineux dans ce qui constitue une des parties les plus « noires » de l’histoire
péruvienne.
Cependant, il est nécessaire d’aller plus loin que la simple peur collective
pour tenter de comprendre quelle est la portée du Movadef, mouvement politique
très récent et surtout très peu étudié. Aller au delà de ce que Caro théorise comme
une « panique morale », à propos de la peur qu’a engendré dans la traitement
médiatique à l’époque du SL l’apparition de femmes militantes
Pour cela nous avons trouvé cohérents d’étudier le traitement médiatique qui a été
effectué du Movadef par les deux plus grands quotidiens péruviens, que sont El
Comercio, journal de droite et très antigouvernemental, et La Republica, journal de
centre gauche, pro-gouvernemental, en privilégiant deux moments forts dans la « vie
politique » du mouvement, que sont le refus de la tentative d’inscription, qui s’étend
de novembre à janvier 2012 et l’Opération Perseo, d’avril 2014, marquée par
l’arrestation de 34 dirigeants et membres du mouvement. Le traitement de
9 l’information
liée
à
ce
mouvement
est-elle
contrastée ?
Uniforme ?
Journalistiquement satisfaisant ? Y a t- il des différences notables d’un journal à
l’autre dans leur manière d’approcher, d’angler, de titrer, les évènements liés au
Movadef ? Nous avons choisi d’aborder l’étude avec ces deux publications car ils
constituent des journaux « de prestige », c’est à dire des « journaux de références »,
défini par Peralta comme des publications « qui projettent un discours social et une
idéologie dans l’espace public, et [étant] des sources de références obligatoires pour
la concurrence, les acteurs politiques et sociaux et l’opinion publique » et sont
capables de « créer une réalité fictive ». D’autre part, pour que, lors de l’illustration
de notre propos il n’y ait pas de doute sur une éventuelle partialité de ce que nous
cherchons à démontrer au vu des différences idéologiques très fortes qui existent
entre les deux journaux.
Au delà de ce premier et nécessaire questionnement très journalistique sur de
possibles (et souhaitables) différences dans le traitement d’une information, nous
avons décidé d’aller plus loin et de toucher à des aspects éthiques : y’a t-il une
diabolisation du Movadef de la part des médias péruviens et est-elle justifiée au vu
des activités concrètes et réelles de ledit mouvement ? Que cherche t-elle a réveillé
dans la société péruvienne ? Comment s’intègre t-elle à un contexte politique
particulier ? Il est également nécessaire d’aller encore plus loin et de se demander si
les deux médias étudiés n’ont pas abdiqués leur rôle de « donneur d’informations »
pour céder au concept de « panique morale » développé par Ricardo Caro, pour des
raisons, à la fois inconscientes, qui viennent de la douloureuse nécessité d’assumer le
passif du conflit interne lorsque la question du Movadef est abordée et de la manière
dont sont abordées les questions liées à ce « passif », ou, plus inquiétants encore, des
raisons conscientes, et qui dans ce cas, se rapprocheraient d’une volonté de
désinformation… Ce sont les principales questions auxquelles nous allons tenter de
répondre. Elles nous paraissent nécessaires au vu des enjeux qu’elles représentent.
I La naissance du Movadef : idéologie, processus et
implications
10 Le 23 novembre 2009 nait le Mouvement pour l’Amnistie et les Droits
Fondamentaux, le Movadef. Son premier congrès s’est tenu sur une longue période
qui court du 27 novembre 2010 au 9 Janvier 2011. Il est nécessaire avant de se
pencher sur une comparaison plus poussée du traitement médiatique qui a été
effectué des évènements liés au Movadef dans les journaux de se pencher sur
l’essence même du mouvement. D’abord d’essayer de définir son idéologie, d’après
l’information publique disponible fournie par le mouvement, et l’opinion d’experts,
et selon ce que défendent les militants eux-mêmes, la manière dont ils
s’autodéfinissent.
A) Une idéologie d’extrême gauche basée sur le « Pensamiento-Gonzalo »
Avant de se pencher sur les aspects critiques qui font réagir la presse et notamment
les deux journaux que nous allons étudier, il est nécessaire d’expliquer certains
aspects du Mouvement pour l’Amnistie et les Droits fondamentaux, afin de
comprendre dans quelle lignée politique il se situe et de commencer à distinguer
quels sont les points à la fois politiques et revendicatifs qui font débat.
1) La ligne programmatique du Movadef s’appuie sur une pensée
marxiste « classique »
La ligne programmatique du Movadef est visible sur son site web. Elle regroupe
l’ensemble des propositions politiques et sociales du mouvement et il est nécessaire
de se pencher sur quelques unes de ces caractéristiques car elles sont d’une part la
carte d’identité politique du mouvement et d’autre part, elles ne sont jamais
mentionnées dans la presse quand il s’agit de parler du Movadef..
La première revendication est tournée vers un changement de Constitution
(l’actuelle Constitution est celle instaurée par Alberto Fujimori en 1993) : une
« Nouvelle Constitution qui prenne en compte les droits fondamentaux du peuple ».
Adepte de la démocratie directe, il prône l’établissement d’une Assemblée
Constituante, ce qui est assez révélateur du changement de paradigme, puisque en
1979, Sentier Lumineux refusa catégoriquement de participer à l’Assemblée
11 Constituante qui devait être votée à l’époque de la transition démocratique,
contrairement à tous les partis de gauche qui avaient décidé, après de longs débats,
de s’intégrer dans le processus démocratique et électoral en cours.
Cette nouvelle Constitution prône des revendications essentiellement liées au
droit du travail : contre toute forme de licenciement, contre les contrats de travails
temporaires, un salaire de base qui corresponde au panier de produits de première
nécessité, pour que les entreprises assument les couts liés aux instruments de travail,
la reconnaissance des heures supplémentaires, contre la vulnération du droit syndical
et le droit à la grève.
Le second volet prône la « restitution des libertés, des droits, des bénéfices et des
conquêtes démocratiques violées ». Ils réitèrent les demandes liées au droit du travail et
ajoute une demande d’augmentation des salaires ou la libre affiliation ou
désaffiliation aux AFP (agences de cotisation privées, très contestées), entre autres.
Il existe d’autres revendications politiques comme la « non criminalisation des
luttes populaires et contre la politique de persécution ». Apparaît ici la première raison d’être
du Movadef : « pour le droit à participer à la vie politique, aux élections (…), initiatives
législatives et référendum ». C’est à dire le droit à s’intégrer de manière pleine et entière à
tous les processus de participation politique. Et,
« pour le droit à l’organisation, comme le précise la Constitution et les traités
internationaux. Pour le respect sans restriction de la liberté d’opinion, de pensée, d’expression, de
presse et de diffusion de l’information et d’enquête. Et contre la discrimination des idées ».
On peut noter ici une certaine propension à s’ériger en défenseur des
libertés et des droits, et contre l’idée d’une certaines persécution politique ; cette
façon de s’exposer comme des victimes de l’Etat est utilisée comme stratégie pour
montrer qu’ils ne peuvent pas accéder aux droits basiques, notamment celui de
participation politique (cf chapitre II).
Le volet 6 de la ligne programmatique est entièrement consacré a la
revendication de la défense de la souveraineté de la « nation » péruvienne, « défendre
son intégrité territoriale (…) contre toute agression impérialiste réactionnaire », en accord avec
12 le respect des traités internationaux et commerciaux. Le « droit des minorités » et « pour
l’unité de classe et du peuple péruvien et du peuple mondial » vient parachever le tout.
Au niveau économique, il est demandé la « liberté économique pour le peuple »,
« contre le néolibéralisme et la globalisation, manifestation actuelle de l’impérialisme » ainsi que
« la terre pour celui qui la travaille ». Une liste de revendications contre une
surimposition de la population et une série de subventions demandée pour la petite
et moyenne entreprise est contenu dans ce volet. Et dans la lignée anti impérialiste
ils se prononcent « contre le dumping des importations étrangères et contre l’importation de
produits subventionnés à l’origine », où se dévoile une sorte de protectionnisme mal
défini. En ce qui concerne les terres agricoles, la ligne programmatique ne va pas
jusqu'à demander leur collectivisation puisqu’il est revendiqué le « respect de droit à la
propriété et possession de la terre » mais surtout « contre la concentration des terres », ajoutée à
une « demande d’indemnisation en cas de dégâts causés par le développement d’activités économiques
(…) dangereuses qui affectent la vie et la santé de la population, la production et l’environnement »
et une « évaluation constante » des terres utilisées par la production minière et
d’exploitation des hydrocarbures.
Au delà de ces revendications qui s’inscrivent dans une lignée marxiste assez
classique, le Movadef se revendique toutefois d’une autre idéologie, celle prônée par
Abimael Guzman, le « pensamiento Gonzalo »
2) Qu’est ce que le « pensamiento Gonzalo » ?
Le « Pensamiento Gonzalo » est l’idéologie qui va poser le plus de problème au
Movadef face à l’opinion publique et à la presse car elle induit une identification
immédiate du mouvement au Sentier Lumineux. En effet, c’est le propre Abimael
Guzman, nommé « Presidente Gonzalo » par ses partisans, qui a théorisé cette
pensée politique afin de développer ce qu’il définissait comme la « guerre populaire ».
Dans la lignée du marxisme léninisme maoïsme, le « pensamiento Gonzalo »
entend compléter ces trois idéologies par un ajout théorique qui serait une
adéquation à la réalité sociale et politique péruvienne, et qui bien sur serait théorisée
par Guzman lui même, d’où son nom.
13 C’est en tout cas ce que déclare le propre Guzman dans ce qui sera appelé
« l’interview du Siècle », concédée au journal pro Sentier Lumineux, « El Diario », en
1988, au cours de laquelle il déclare :
« Le marxisme léninisme nous a toujours enseigné que le problème réside dans l’application
de la vérité universelle. Le président Mao Tse-Tung a suffisamment insisté sur ce point ; si le
marxisme léninime ne s’applique pas à une réalité concrète il n’est pas possible de diriger une
révolution, le vieil ordre ne peut pas être transformé, ni détruit et le nouvel ordre ne peut pas se
former. C’est l’application du marxisme léninisme maoïsme a la révolution péruvienne ce qui a
généré le « pensamiento Gonzalo », au sein de la lutte des classes de notre peuple, du prolétariat
principalement, des incessantes luttes paysannes et dans le grand cadre bouleversant de la révolution
mondiale ; c’est au milieu de ce fracas, en appliquant de la manière la plus fidèle possible la vérité
universelle aux conditions concrètes de notre pays que s’est exprimé le « pensamiento Gonzalo (…).
En résumé, le « pensamiento Gonzalo » n’est rien d’autre que l’application du marxisme léninisme
maoïsme à notre réalité concrète »1.
La violence contenue dans les préceptes du « pensamiento Gonzalo » est ce
qui fait débat à tous les niveaux quand on parle du Movadef puisque ces militants
revendiquent cette pensée politique. Et selon les dires du leader du Sentier
Lumineux, la violence est aussi indispensable que le « pensamiento Gonzalo » lui
même. En effet, Guzman précise que la violence représente
« une loi universelle sans aucune exception, dans le sens de violence révolutionnaire ; cette
violence est celle qui nous permet de résoudre les contradictions fondamentales avec une armée et à
travers la guerre populaire (…) C’est une question substantive du marxisme car sans violence
révolutionnaire il n’est pas possible de substituer une classe pour une autre, il n’est pas possible
d’abattre le vieil ordre pour en créer un nouveau, aujourd’hui un nouvel ordre dirigé par le
prolétariat a travers du Parti Communiste ».
1 “L’interview du siècle”, El Diario, 1988 2 “Le Movadef de l’intérieur”, La República, 12 aout 2012. 14 Selon Gustavo Gorriti, la lignée théorique dans laquelle s’inscrit le
« pensamiento Gonzalo » se situe en opposition avec ce que SL appelait les
« réformistes » ou les « révisionnistes », c’est à dire le communisme développé au
sein de l’Union Soviétique et les dirigeants chinois tels que Deng Xiaoping, dont la
direction communiste chinoise actuelle est issue. Guzman se définit dans la lignée
directe de la pensée de Mao.
« Guzman face à eux [les révisionnistes], proposait demeurer et approfondir la ligne
radicale, « hyperjacobine », de ce qui s’était fait pendant la Révolution culturelle et mettre comme
centre absolue de l’activité du Parti Communiste, la lutte armée, revenir aux bases historiques du
Parti, avec justement un Parti qui conspire pour développer, générer et accélérer les conditions
requises pour organiser la lutte armée ».
Cette « lutte armée » était destinée à apporter un « changement social profond,
radical et perpétuel ». Pour compléter ce panorama dogmatique très clair, il précise que
pour éviter un retour en arrière, selon les propres mots du SL, pour « éviter les reflux
révisionnistes et bourgeois », il serait nécessaire de maintenir une « vigilance implacable par
l’intermédiaire non pas d’une mais de plusieurs révolutions culturelles, comme celle qui a eu lieu en
Chine ».
Gorriti met en avant dans son analyse le culte de la personnalité, un des traits
caractéristiques de l’organisation de SL, puisque le « pensamiento Gonzalo » établi
par le propre Guzman, le « plus grand marxiste léniniste vivant sur la face de la terre », était
« une production intellectuelle sortie de son esprit ». Lui seul avait pu identifié,
« l’alignement des lois dialectiques, historiques et évidemment des grands corps célestes, lui
avait pu synchroniser tous ces aspects autour d’une grande action, orientée vers le futur de
l’humanité, qui devait commencer par les champs de bataille du Pérou et s’étendre au monde entier.
C’était ca le « pensamiento Gonzalo » [Gorriti]
On peut donc constater ici le degré de dogmatisme atteint.
15 En ce qui concerne l’appellation terroriste, en plus d’expliquer qu’il s’agit de
l’arme du révisionniste (c’est à dire de l’Etat et de l’impérialisme) pour écraser la
légitime « guerre populaire », Guzman indique que
« la bombe est devenue l’arme de combat de la classe, du peuple ; que ce n’est plus une
conspiration, une action individuelle isolée, mais l’action d’un Parti, avec un plan, un système, une
armée. Ainsi sont les choses. Ou est le délit de terrorisme ? De l’infamie pure ».
L’ambiguïté réside dans le fait que les militants du Movadef se revendiquent
bien de la lignée politique du « Pensamiento Gonzalo » et également offre un
traitement particulier au leader de Sentier Lumineux mais qu’ils insistent à la fois sur
leur différence et le fait que leur mouvement est né en 2009, et n’est pas le Sentier
Lumineux. Cette ambiguïté se révèle insoluble et pour la société péruvienne et pour
la presse car elle est couplée à une absence d’autocritique des membres du Movadef
envers les milliers de morts causés par le SL selon les estimations de la CVR.
3) « Nous ne sommes pas le Sentier Lumineux ». Comment les militants
insistent sur la « nouveauté » politique de leur mouvement
Pour avoir plus d’éléments sur l’autodéfinition effectuée par les propres militants du
Movadef, nous avons pu recueillir le témoignage de deux d’entre eux que nous
désignerons par une lettre : A. est un ancien « combattant » (ce sont ces mots), du
Sentier Lumineux, qui a passé 20 années de sa vie en prison, et qui milite
aujourd’hui au sein du Movadef, à un niveau proche de la direction. F. est un
« activiste » (autodéfinition), mais nous préfèrerons utiliser le mot ‘militant’,
beaucoup plus jeune, diplômé en économie, qui appartient à ce que Gorriti appelle
« la seconde génération ».
Il est intéressant de noter que plusieurs fois au cours de l’interview F. a
clairement revendiqué la non continuité organisationnelle entre le Sentier Lumineux
et le Movadef, ce qui, logiquement, soustrayait la nécessité pour lui en tant que
militant de devoir justifier les crimes commis par le PCP-SL. « Le Movadef est né en
2009, ce n’es pas le Sentier Lumineux », répétait-il. Ce désir de démarcation claire est
16 apparu plusieurs fois pendant l’interview et elle est souvent exprimée lors
d’interviews télévisées par exemple, et notamment par cette seconde génération de
militants qui cherchent à marquer une différente claire entre les deux organisations.
A. paraissait moins à l’aise avec cette démarcation et laissait, sur ce point parlait son
jeune confrère.
L’argument logique qui lui était apposé de la revendication du « Pensamiento
Gonzalo » dans la propre ligne idéologiques du Movadef n’apparaissait pas pour lui
comme un contradiction, car c’est une pensée qui avait selon lui évolué.
B) Un nouveau né politique qui ne nait pas de nulle part
1) Le processus qui conduit à la naissance du Movadef
La date officielle de création du Movadef est le 23 novembre 2009. Pourtant, dans la
Républica, il n’est pas fait mention du Movadef dans les six premiers mois de sa
création.
Afin de retracer la naissance du Movadef, il est nécessaire de remonter plus
loin que la simple date de création. Dans un article publié par La Republica en aout
2012 2 , Marco Sifuentes, un journaliste d’investigation réputé qui dirige l’agence
Infos, elle même branche de l’Institut de Presse et Société, influente au Pérou
retrace justement la manière dont s’est construite l’idée du Movadef, à travers les
différents associations et activités développées par les proches de Sentier Lumineux
avant 2009.
En effet, la première association liée aux membres du Sentier Lumineux est
l’Afadevig3, crée en décembre 2000 et qui, sans aucune ambiguïté, exhibe la même
maxime que le propre Movadef : Solution Politique, amnistie générale et
réconciliation nationale, Liberté pour les prisonniers politiques, avec d’autres
références du même type qui ne laissent pas de doute sur le jumelage idéologique
2 “Le Movadef de l’intérieur”, La República, 12 aout 2012. http://www.larepublica.pe/11-­‐08-­‐2012/movadef-­‐desde-­‐dentro 3 Asociación de Familiares de Presos Políticos, de Desaparecidos y de Víctimas del genocidio 17 sous-jacent. Cette association servait de courroie de transmission4 entre les détenus
pour terrorisme qui réclament plus de droits et de meilleurs conditions de détention
et ses défenseurs de l’extérieur. Ses membres apparaissent par exemple à Yanamayo,
pendant les audiences de la CVR pour exhiber leurs revendications d’amnistie
générale, de dérogation des lois antisubversives et exigeant de nouveaux procès ainsi
que le rétablissement de bénéfices pénitentiaires.
En 2000, avec la chute de Fujimori, sept ans après avoir sollicité les Accords
de Paix demandant une solution « pacifique » au conflit qui opposa son organisation
à l’État péruvien, Abimael Guzman pose les bases de ce qu’il appelle la « Solution
politique aux problèmes dérivés de la guerre interne ». C’est à ce moment là qu’est exposée
l’idée d’amnistie générale, qui sera au centre de la proposition politique du Movadef,
tant pour ceux qui purgent une peine pour terrorisme que Sentier Lumineux appelle
les « prisonniers politiques », que pour les militaires emprisonnés suite aux abus et
aux crimes commis pendant le conflit.
Cette amnistie générale, véritable changement paradigmatique et idéologique
puisqu’elle entend intégrer les « ennemis historiques » que sont les militaires entend
ainsi forger une réconciliation nationale, qui selon Guzman, serait la « solution
politique que nécessite le peuple, les classes, la nation et la société péruvienne dans son ensemble »5.
En 2002, se crée le Mouvement Populaire de Contrôle Constitutionnel
(MPCC) qui a pour objectif de déroger les lois antiterroristes édictées par le
gouvernement de Fujimori. Pour cela, les principaux créateurs du MPCC (et plus
tard du Movadef), Manuel Fajardo, Walter Humala et Marcelino Tineo s’engagent
dans la collecte de signatures qui permettront de présenter une action
anticonstitutionnelle contre lesdites lois. D’après l’article de Sifuentes, ils
parviennent à rassembler 5186 signatures.
4 “correa de transmisión”, expression utilisée de manière récurrente dans le vocabulaire lié au Sentier Lumineux pour indiquer les voies de transmissions entre dirigeance et militance 5 Tiré de documents écrits par Abimael Guzman en 2000, cités par Esteban Villa Riestra dans “Le Sentier du Movadef : de la lutte armée à la participation politique, IDL reporteros N 227” 18 Le 3 janvier 2003, la sentence 010-2002-AI/TC donne en partie raison à
ceux qui ont présenté l’action légale et le Tribunal Constitutionnel déclare
inconstitutionnelle la perpétuité dictée contre certains détenus pour terrorisme.
Après une série d’autres actions judiciaires et légales, les membres du MPCC
parviennent à de nombreuses avancées en ce qui concerne la libération de leurs
« prisonniers politiques ». En 2002, on comptait dans les prisons péruviennes 2100
détenus liés au Sentier Lumineux, en 2012, ils ne sont plus que 655.
2) Un organisme généré par Sentier Lumineux
Dans la presse, le Movadef est toujours représenté comme la continuité pure et
simple du l’organisation Sentier Lumineux. Or, Gorriti nous donne des éléments
pour comprendre que ce raccourci ne constitue que la moitié de la vérité.
En réalité le Movadef est un « organisme généré » par Sentier Lumineux,
c’est à dire que sur la relation de proximité et de subordination des dirigeants du
Movadef, notamment Manuel Fajardo et Alfredo Crespo, aux dirigeants du Sentier
Lumineux que sont Abimael Guzman et sa femme, Elena Iparaguirre (membre du
Bureau Politique), il n’y a pas de doute. Elles existent bel et bien.
Une autre preuve concrète de cette relation est le fait que Fajardo et Crespo,
furent et pour ce dernier, il l’est toujours, avocats des plus hauts dirigeants de SL.
Gorriti nous dit que
« les dirigeants du Movadef sont identifiés par un intérêt commun et également politiquement (cf
pensamiento Gonzalo). Le Movadef au sein de la description de ce qu’est traditionnellement et
historiquement SL est un organisme généré a l’intérieur de l’organisation qui est destiné a un type
spécifique d’action politique, tout comme c’était le cas d’autres organismes générés comme les
mouvements de quartier, ou le mouvement féministe populaire, chacun dirigé vers un type d’action
politique par rapport à un secteur déterminé ».
Le Movadef est une organisation plus ample que le propre SL, organisation
« beaucoup plus fermée, plus élitiste », c’est à dire que toute personne militante du
19 Movadef n’est pas militante du Parti Communiste- Sentier Lumineux, ce qu’oublie
systématiquement de préciser les journaux de prestige.
Pourtant, Gorriti est clair la dessus : nier le lien qui existe entre les deux, est
une atteinte à la vérité, une « sottise ».
D’autres analystes, comme l’anthropologue Pablo Sandoval sont plus
radicaux sur ce point et assimilent les deux organisations à une même entité. C’est
ainsi qu’ils commencent son article sur la présence du Movadef dans les universités
par cette sentence « Le Movadef est le Sentier Lumineux »6.
Cependant la nuance qu’introduit Gorriti dans l’explication de ce lien nous
paraît assez intéressante car elle permet de clarifier le débat, sans s’aveugler et nier
un fait qui apparaît comme évident.
Et puis Gorriti va encore plus loin, en indiquant que justement, cette nuance
induit une conséquence de poids dans l’analyse qui doit être faite du Movadef, c’est
que l’appartenance à ce mouvement ne signifie aucun danger actuel, ni en terme
d’insurrection armée, ni en terme de terrorisme, de sabotage ou d’assassinats
sélectifs, méthodes utilisées par SL pendant le conflit interne puisque le but du
développement du Movadef est justement l’action politique légale et son intégration
dans la vie politique nationale.
3) La revendication d’une mémoire partisane
Pour comprendre le rejet dont fait l’objet du Movadef, il est également à noter que
ce mouvement a une relation ambigu avec la mémoire du conflit armée, et rejoint en
cela les membres du Sentier Lumineux, qui ne reconnaissent pas les crimes commis
ou en tout cas qui ont élaboré une version « alternative » des faits, ce qui produit,
par exemple, un éloignement de la CVR, qu’ils perçoivent comme illégitime et
« biaisée ». Les actions telles que les divers massacres attribués au SL sont définies
comme des « erreurs », mais qu’il faut replacer dans un contexte de guerre politique
entre l’Etat péruvien et l’insurrection.
6“Le génie et la bouteille : sur le Movadef au sein de San Marcos”, Revue Argumentos, 5 novembre 2012 20 C’est ce qu’explique Pablo Sandoval quand il parle de « mémoire partisane »,
c’est à dire une mémoire construire depuis un point de vue bien particulier, qui ne
reconnait pas la mémoire « officielle », c’est à dire celle construite par la CVR. Et au
Pérou, les débats autour de la mémoire sont encore virulents et absolument pas
résolus. En cela, la manipulation de la mémoire opérée par le Movadef inquiète et
appuie sur un malaise sociétal, que le Pérou affronte de diverses manières, par
rapport à la mémoire qui s’est construite du conflit armé. Sandoval raconte ainsi
comment il a lui même été confronté à ce « combat de mémoire » pendant ces classes,
au cours desquels des élèves militants du Movadef opposaient leur mémoire
partisane.
Selon Esteban Valle Riestra, pendant les audiences de la CVR, les militants
des diverses mouvances proches de Sentier Lumineux ont cherché à être inclus dans
la mémoire en formation qui se forge sur le conflit interne, incarnée par les
audiences publiques où sont convoqués différents acteurs de la guerre.
Sans s’étendre ici sur cet aspect qui mériterait une étude entière au vu de ses
implications, il est tout de même à signaler que ce désir de participer à l’élaboration
historique de la mémoire du conflit armé apparaît dans la ligne programmatique du
Movadef, dans le « point n 5 » qui concerne la liberté politique et la criminalisation
des luttes populaires :
« Contre l’imposition d’une version unique des faits produits pendant la guerre interne.
Pour le droit du peuple à connaître la version historique des faits produits entre 1980 – 1992.
Nous exigeons l’abandon du projet de loi sur le négationnisme qui pointe contre les libertés
d’opinion, d’expression, de pensée et d’enquete »7.
4) Une formation idéologique dans la lignée de Sentier Lumineux
Lors de l’interview de deux militants du Movadef, plusieurs choses se sont
révélées frappantes. D’abord, alors que le rendez vous pris avec l’interviewé
7 Loi de négationnisme, proposée en 2013 qui cherchait à interdire le refus de reconnaitre les crimes commis pendant le conflit interne. 21 principal, A. avait été convenu, la surprise fut de constater qu’il n’est pas arrivé seul,
mais accompagné de F.
D’abord innocemment convaincu que le contacté avait peut etre voulu
m’aider dans mon travail par l’apport du point de vue d’un autre militant, il est
apparu que la raison était tout autre. En effet, lorsque la fin de l’interview
s’amorçait, nous avons demandé à A. et également à F. s’il était possible pour un
prochain rendez vous de les voir en séparé, pour des raisons pratiques – il est plus
difficile d’interviewer deux personnes en même temps car les questions peuvent
moins ciblées chaque personne interviewée et pour d’autres raisons plus
sociologiques et psychologiques comme le fait qu’un interviewé ne va pas dire les
mêmes choses en fonction de s’il est seul ou accompagné.
De manière surprenante, A. a hésité un instant et à commencer à justifier la
non légitimité d’une interview individuelle « Pourquoi vouloir nous interview tout seul, ce
n’est pas l’individu qui compte, c’est l’organisation ». L’argument de sa venue accompagnée
était purement idéologique et marxiste, c’est a dire que l’intérêt de l’individu était ici
largement inférieur à la parole du groupe, du petit collectif qu’à deux ils
représentaient. Mais nous avons pu également constaté qu’au vu de son
comportement, il y avait une gène devant l’éventualité de se retrouver à témoigner
seul, comme si le fait de se retrouver sans son « camarade » allait lui faire perdre ses
moyens, ou de toute façon selon lui, il n’aurait rien d’intéressant a dire sur sa vie
personnelle.
Nous avons tenté d’argumenter en expliquant que bien que l’argument
idéologique du collectif ait toute sa valeur, pour une étude sur les trajectoires
militantes, il était nécessaire que nous puissions aborder individuellement les
trajectoires existentielles individuelles. A moitié convaincu par cet argument, il n’a
pas pu être convenu clairement de deux rendez-vous séparé, et il est intéressant de
voir qu’également le jeune F. partageait ce point de vue.
Cela montre à quel point le travail idéologique est fort et ancré dans la vie de
chaque militant, qui s’approprie les maximes politiques jusque dans ses propres
comportements personnels et face aux autres. L’engagement est total et imprègne la
vie de chaque militant. C’est ce que d’ailleurs relevait Pablo Sandoval, anthropologue
qui a dirigé les travaux de la CVR relatif à la présence de Sentier Lumineux dans les
22 universités, en parlant des étudiants militants captés par le Movadef, « quand ils les
tiennent, il ne les pas »….
Un étudiant du parti socialiste, ancien élève de l’Université de San Marcos, à
Lima, Johnny, lui aussi mettait en avant cette caractéristique d’engagement total en
parlant des étudiants du Movadef qu’il avait pu connaitre, en relevant qu’en général
c’était des étudiants médiocres parce qu’ils s’engageaient pleinement dans leurs
militance et qu’il n’avait pas le temps d’étudier correctement. Sans que cette donnée
soit empiriquement et suffisamment vérifiée, elle est une piste pour s’éclairer sur la
descendance idéologique, au delà de la pensée purement marxiste, en trouvant des
caractéristiques de la militance du Sentier Lumineux dans les propres militants du
Movadef.
C) Un regard critique sur le Movadef.
Il existe donc des liens très forts entre le Sentier Lumineux dirigé par Abimael
Guzman depuis son arrestation et le Movadef, au niveau idéologique et partisan.
Pour autant il convient de clarifier certains aspects qui n’apparaissent jamais
clairement dans la presse et qui participent donc du maintien d’une confusion
propice à entretenir le climat de peur qui régit tout évènement ou information ayant
pour sujet central le Sentier Lumineux ou le Movadef.
1) Le Sentier Lumineux des années 80 n’est pas le Sentier Lumineux
d’aujourd’hui
Au delà des caractéristiques du Movadef qui le lie à Sentier Lumineux de manière
évidente, un des points significatifs, dans le traitement médiatique qui est assigné au
Movadef, s’illustre dans la confusion et la non divulgation qui règne des propres
changements théoriques et pratiques qu’a opéré le Sentier Lumineux depuis
l’arrestation de Guzman, en 1992, mais surtout depuis la négociation des accords de
paix, en 1993.
A propos de ces changements, Gorriti nous offre un panorama révélateur,
car si, comme nous l’avons vu plus tôt, il existe un lien à la fois politique et de
23 subordination du Movadef au Sentier Lumineux, ce dernier a aussi changé de
manière drastique au niveau politique et au niveau de ses méthodes, et c’est ce point
que les médias occultent de manière dangereusement commune.
En effet, il n’est plus possible de regarder SL ou de l’appréhender sans
prendre en compte les changements qui se sont produits depuis les accords de paix,
car ils constituent un « changement de 180 degré » selon Gorriti, et négliger cet état de
fait est une atteinte à la vérité.
Ce changement s’ exprime à travers la reconnaissance pleine et entière de la
défaite, c’est un
« changement politique qui se traduit de la part de SL par la reconnaissance du fait qu’ils
ont été battus. Ce n’est plus un ajustement tactique comme l’a dit Guzman quand il a été capturé,
un « détour du chemin » mais une défaite stratégique entière »
Cela induit un changement radical dans le propre « pensamiento Gonzalo ». Car
du moment que le leader suprême « tombe », la situation concrète du Parti se voit
totalement bouleversée. En effet, dans les jours et les mois qui suivent l’arrestation
de Guzman s’ensuivent de longues discussions à l’intérieur de l’organisation pour
coordonner la conduite à tenir. L’attitude de Guzman, qui va lui même envoyer des
lettres pour négocier avec le gouvernement de Fujimori constitue un des épisodes
durant lequel l’organisation a vu sa dureté idéologique totalement fragilisée. Certains
militants ne croyaient pas à l’existence de ces lettres mais on du se rendre à
l’évidence quand le propre Guzman les a justifié.
C’est ainsi que la plus grande partie de SL abdique et « comprend que les possibilités
de conclure avec succès l’insurrection sont restés derrière eux » dit Gorriti. Ceci signifie
également « que les lois de la dialectique, de l’histoire, des corps célestes changent brusquement et
la nécessité d’arriver à un accord pacifique devient indispensable ».
Il convient de relever ce point historique et théorique car cet brusque
changement de cap vers le « pacifisme » est totalement inédit et surtout inespéré, car
« toutes ces questions qui dans le passé avaient été considérées comme le plus abject, détestable
révisionnisme et qui auraient été anéanties», c’est à dire laisser entrevoir ne serait ce que la
possibilité d’une négociation, deviennent la ligne de conduite du Parti vaincu.
24 « On peut se moquer de la contradiction qu’a signifié [ce changement] mais pour le pays, ce fut
une grande chose qu’ils le fassent » conclut Gorriti. Et surtout, il souligne que le culte du
leader était si grand, l’influence de Guzman était si ample sur ses militants, que
l’immense majorité a accepté d’abdiquer avec lui, ce qui était impensable à l’époque .
Or tout cet épisode de l’histoire de SL reste, pour la presse, dans les limbes de la
suspicion et quasiment du déni. Car le fait que SL s’engage dans une
voie « pacifique » signifie que le « pensamiento Gonzalo » se concentre désormais
sur le règlement d’une « solution politique aux problèmes dérivés de la guerre ». Et
pour les médias c’est une chose impossible à croire et à accepter.
2) Le Sentier Lumineux de Abimael Guzman n’est pas le Sentier
Lumineux du VRAEM
Un autre point qui selon Gorriti constitue une « supercherie », une « très déshonnête
confusion intellectuelle » réside dans le fait que la presse tente, très souvent, de
confondre le lecteur en acceptant de parler du Sentier Lumineux de Guzman et du
Sentier Lumineux des frères « Quispe Palomino », héritiers du « camarade Félicien »
capturé en 1999, qui opère dans le VRAEM (Valle del Rio Apurimac, Ene y
Mantaro) 8 , « définitivement tournée vers la lutte armée » comme une seule et même
organisation. Or rien de plus faux.
C’est justement au moment des Accords de paix en 1993 que « camarade
Félicien » décide de ne pas accepter les conditions exposées par Guzman qui se
tournent vers une stratégie « pacifique », et créé une faction indépendante , qui
revendique l’usage de la violence comme « alternative insurrectionnelle ».
Effectivement, Gorriti indique que ce sont des organisations qui possèdent
« un tronc commun » à la fois idéologique et politique mais qui aujourd’hui « non
seulement sont différentes mais son ennemies à mort ». « Camarade Félicien » a désavoué le
« leadership » de Guzmán depuis la division de 1993 et cette division est
irréconciliable.
8 Zone qui englobe plusieurs régions du Pérou. Caractérisée par son relief très accidenté, avec une végétation type jungle et montagne, c’est aussi la zone où opèrent les narcotrafiquants, qui vont s’allier avec ce qui les factions armées restantes du SL. 25 Carlos Tapia, expert sur les questions de terrorisme et ex militant du
Mouvement de la Gauche Révolutionnaire (MIR) dans les années 70 raconte à ce
propos une anecdote intéressante et édifiante : lors de son entretien avec « Félicien »
lorsqu’il était enquêteur pour la Commission de la Vérité et de la Réconciliation,
celui ci est arrivé dans la salle d’interrogatoire avec une pile de livres. Curieux Tapia
lui demande pourquoi transporter ces livres avec lui, ce à quoi « Félicien » répond
-
« je veux étudier la psychologie »
-
« Ah oui et pourquoi ? » lui demande Tapia
-
« Para entender ese gordo de mierda9 – en référence à Guzman ».
Pour décrire le caractère irréconciliable qui existe entre les deux hommes, il
raconte également que lors de leur retrouvailles, au moment de l’incarcération de
« Félicien », celui ci apparemment aurait mis une gifle a Guzman en lui disant « Tu
aurais du te suicider… »10. D’ailleurs, dit Tapia, « Félicien a toujours douté du fait que sa
capture ait été possible grâce a des informations que Guzman aurait fourni aux services secrets ».
Le jour suivant, lors d’une projection d’une émission culturelle, qui réunit tous les
prisonniers de la Base Navale dont « Félicien », ils constatent l’absence de Guzman.
Le jour d’après, le chef de la Marine communique l’existence d’une carte de
Guzman dans laquelle il demandait à pouvoir voir l’émission culturelle un autre jour
« du au climat de violence » qui existait entre les prisonniers, après son altercation avec
Feliciano. On voit ici qu’entre les deux hommes, pas d’entente possible.
Pour résumer la différence entre les deux groupes Gorriti explique que « l’un est
violent et l’autre est devenu pacifique ».
3) L’amnistie, nouveau paradigme
Comme nous l’avons déjà évoqué, l’amnistie constitue la principale nouvelle
revendication du Movadef. Elle est le point idéologique et revendicatif le plus
sensible avec la revendication du « pensamiento Gonzalo » bien qu’au niveau légal,
prôner l’amnistie est totalement dans les limites que ce qu’autorise la liberté
9 “Pour tenter de comprendre ce gros de ….” 10 En référence au fait qu’il s’est rendu sans qu’une seule balle ne soit tirée 26 d’expression. Malgré tout l’idée est totalement rejetée à la fois par les familles de
victimes du conflit et la population dans sa majorité qui savent ce qu’ont signifié les
années de guerre.
Il faut chercher dans l’histoire du changement idéologique du Sentier
Lumineux, pour comprendre comment le Movadef en est arrivé à une revendication
aussi difficile à comprendre pour la société péruvienne. Après les accords de paix, la
revendication se centrait sur la libération du « Président Gonzalo » et du « combattant
social » Abimael Guzman et va ensuite s’amplifier à tous les acteurs de la guerre.
Selon Carlos Tapia, c’est à partir de la chute du « camarade Félicien », en
1999 que va s’opérer le virage, bien que comme vu précédemment, pour Gorriti la
chute du gouvernement de Fujimori est l’un élément primordial qui a incité le
Sentier Lumineux « reconstitué » a exhibé de nouveaux paradigmes (« Solución
política »).
Tapia va encore plus loin en expliquant que c’est justement l’organisation de
la lutte pour l’amnistie qui conduit à la naissance du Movadef :
« avant, ils demandaient la libération du « President Gonzalo ». L’amnistie générale est
une vision plus politique. Ils veulent que soient libérés Guzman, (Alberto) Fujimori, Vladimiro
Montesinos11, des intégrants du « Groupe Colina »12, tous les civils, politiques et militaires, pour
la réconciliation. Cette troisième phase les pousse à se dire à un moment donné, comment va t-on
pouvoir lutter pour l’amnistie s’ils nous identifient comme Sentier Lumineux ? c’est à partir de là
qu’est donné le feu vert pour que s’organise le Movadef ».
Mais autant pour Gorriti que pour Tapia, accéder à leur requête d’amnistie
constitue quelque chose de totalement impossible et impensable dans la panorama
politique péruvien actuel et impossible aussi par respect pour les victimes et face à
l’horreur de la guerre (crimes contre l’humanité). Comme le métaphorise Gorriti, les
11 Chef des Services secrets et bras droit de Fujimori pendant ses deux mandats. Il est accusé de nombreux crimes contre l’humanité. Instigateur de la création d’un « escadron de la mort » appelé « Groupe Colina », responsables d’assassinats de civils. 12 Entre les massacres les plus emblématiques qui lui sont attribués : celui de « Barrios Altos », en 1991 et celui de « la Cantuta » en 1992. 27 années de conflit, pour lui qui les a couvert, qui a touché la réalité de près, qui a été
sequestré par le gouvernement de Fujimori après la dissolution du Congrès le 5 avril
1992, il n’est pas question de tergiverser le degré d’horreur qui a été vécu au Pérou.
« Amnistie pour des crimes contre l’humanité ? Aucune possibilité.
Amnésie ? Perte de mémoire ? Oublier tout ce qui s’est passé ? Aucune possibilité.
Possiblement, le pardon dans certains cas après une période, une fois que les
responsabilités ont été payées, s’il y a un repentir sincère c’est autre chose, ca peut se
discuter et ca doit se discuter, mais amnistie c’est à dire faire comme s’il ne s’était
absolument rien passé ? Ici tout est arrivé, tout et beaucoup plus que ca. Ici, c’est
l’enfer qui est venu, et jamais nous n’oublierons l’enfer, jamais. Mais ca ne veut pas
dire que pour demander l’amnistie je doive punir ceux qui la demande ! ».
Le point le plus éloquent au sein de cette revendication est contenu dans le
fait que cette amnistie doive être générale, c’est à dire aussi valable pour les ennemis
historiques du SL : les militaires. Et c’est ici que l’on s’aperçoit de l’ampleur du
virage idéologique entreprit, qui peut s’expliquer par un opportunisme politique
désormais nécessaire pour accéder à la lutte légale et pour paraître crédible face au
tollé qu’a représenté la demande de libération exclusive de Guzmán. En effet, en
demandant la libération des militaires, les militants du Movadef cherche un
consensus large, qui s’appuie sur la justification de la réconciliation, mais qui par la
même occasion va faire naitre une proximité idéologique avec le groupe auquel il
était le plus opposé durant les années de guerre.
II Les tentatives d’inscription du Movadef comme Parti
Politique. La crispation médiatique face à un mouvement
perçu comme une résurgence du Sentier Lumineux.
Assez rapidement après sa création, le Movadef va se montrer désireux d’apparaître
comme un acteur politique légal identique aux autres mouvements politiques
notamment pour pourvoir participer aux élections, principale possibilité offerte aux
28 partis politiques. C’est ainsi qu’il va chercher à s’inscrire au sein du Registre des
Organisations Politiques. Pour cela il doit remplir un certain nombre de conditions,
comme réunir des signatures d’adhérents ou attester de l’existence de comités
partisans.
Selon la résolution du Registre des Organisations Politiques (ROP), le
Movadef a présenté sa demande d’inscription le 29 mars 2011. Le 28 novembre de
la même année, le ROP déclare non valide la demande d’inscription du Movadef,
avec l’argument que le recours dans ses statuts au « Pensamiento Gonzalo » lui
fermait les portes d’un accès à la légalisation puisqu’il s’agit d’une idéologie contraire
aux principes démocratiques.
Le 12 janvier 2012, les membres de la session plénière du Jury National des
Elections annulent la résolution du ROP demandant à ce qu’il se prononce à
nouveau en arguant du fait qu’il n’a pas pris en compte certains éléments techniques,
ce qui provoque de vives critiques contre le JNE, accusé de manque de fermeté face
aux velléités du Movadef.
Le 21 janvier 2012, le JNE rejette à nouveau la demande d’inscription du
Movadef toujours avec l’argument du caractère antidémocratique de l’idéologie
revendiquée mais en intégrant aussi avec arguments plus techniques, comme la
double affiliation de certains membres et un manquement aux conditions
nécessaires pour pouvoir s’inscrire, comme le nombre de comités partisans qui ne
s’accorde pas avec ce qui est demandé ou la non existence d’un organe délibératif au
sein du mouvement.
Le 27 janvier, le Movadef appelle encore une fois cette décision mais la retire
le 1e février en déclarant qu’il existe « une persécution politique » à leur encontre. La
raison invoquée par l’un des militants du Movadef est qu’en cas de nouveau refus il
y avait le risque de voir l’organisation devenir illégale. Retirer l’appellation signifie
donc une impossibilité d’accéder aux organismes internationaux comme la CIDH
puisqu’il faut pour cela avoir épuisé les recours devant les institutions nationales.
A) Les stratégies utilisées pour faire campagne contre l’inscription du
Movadef
29 Cette tentative de se « légaliser » est très vite mal perçue par les médias, qui
voient dans cette possible inscription une tentative de s’infiltrer dans la démocratie,
sans pour autant adhérer ni à ces préceptes ni à son esprit mais une manière
insidieuse d’utiliser les procédés offerts par ce système politique comme un moyen
pour arriver à leur fin : reprendre la lutte armée, dans la lignée de Sentier Lumineux.
En aucun cas il ne pourrait s’agir d’une véritable conversion à la démocratie et le
débat se crispe sur la menace que cette inscription représenterait pour l’ensemble de
la société péruvienne, autant dans El Comercio que pour La Republica.
La question de savoir si son inscription ne serait pas une chose souhaitable pour
permettre de maintenir le mouvement visible au sein de la vie politique péruvienne
n’est pas abordée ni traitée comme une opinion possible à débattre, car l’assimilation
du Movadef au Sentier Lumineux ravive des peurs provenant du récent conflit
interne et empêche ledit débat.
1) Faire appel aux autorités compétentes pour justifier le rejet unanime de
l’inscription du Movadef
Pour La Republica comme pour El Comercio, la légitimité du refus de voir s’inscrire le
Movadef est un consensus établi. Et c’est ce qui est reflété dans ces deux médias de
prestige. Il s’agit donc de montrer que tout le monde, de l’opinion publique aux plus
hautes autorités sont d’accord pour interdire l’accès du Movadef, au système
électoral.
Il est intéressant de relever un des traits de la presse de référence que Peralta
définit comme une « plateforme a laquelle doivent recourir les leaders politiques et
sociaux s’ils veulent être en contact de manière adéquate avec la citoyenneté13 »
puisqu’ici, les deux journaux font se rejoindre les deux pôles de la société (opinion
publique et autorité)
Un des premiers articles de La Republica sur le sujet cherche à rassembler la
société autour de ce consensus et évoquer le sentiment général qui règne au sein des
13 Victor Peralta “Sendero Luminoso y la prensa”, p 24 30 autorités pour légitimer le refus de voir le Movadef s’inscrire14. Il est intéressant de
noter que tout l’article à vocation à faire parler des entités éminentes de la justice
pour appuyer et donner du poids à ce point de vue. Ainsi l’article fait parler le Fiscal
de la Nation, José Pelaez, le président du Pouvoir Judiciaire, César San Martin et
l’ancien président Alejandro Toledo qui tous rejettent catégoriquement cette
intention.
Pelaez invoque l’absence d’autocritiques vis a vis des milliers de morts et des
actions terroristes, et San Martin fait référence à des groupes qui « mettent en danger
l’essence de la démocratie ». « Il ne peut pas y avoir de démocratie ‘idiote’. La démocratie
possède un ensemble de principes de libertés mais aussi de règles (…) Il ne peut être admis
des associations qui vont contre l’essence même de l’ordre démocratique ».
Il est aussi état de l’avis de l’ancien président Alejandro Toledo qui résume
son point de vue avec une métaphore « on ne peut permettre que le loup terroriste se
pare d’une peau d’agneau».
Le Défenseur du Peuple, Eduardo Vega est une personnalité également
mobilisée. La journaliste, dans une interview retranscrite fait état d’un « scandale
devant l’éventualité que le Movadef puisse s’inscrire comme parti politique », ce à
quoi Vega répond « mon opinion à ce sujet est claire : le terrorisme et les groupes de façade
du terrorisme sont antidémocratiques et ne peuvent être admis comme parti politique »15. La
journaliste cherche alors à confirmer que le Movadef est bien le groupe de façade du
Sentier Lumineux. Ce à quoi l’interlocuteur répond de manière claire et sans appel
« Oui, dans son statut, son acte de fondation, il est expressément signalé qu’il est guidé, si je
me rappelle bien par le marxisme-léninisme pensamiento Gonzalo. La démocratie ne peut
accepter des groupes qui donnent ouvertement leur aval à l’usage de la violence ».
La journaliste insiste alors en rétorquant que les membres du Movadef disent
que ce n’est pas le cas, ce à quoi Vega répond « Ses statuts le disent, si vous les lisez,
vous verrez qu’ils n’ont pas renoncé au terrorisme comme politique et comme idéologie. Et
cette idéologie et cette manière d’agir pour nous, sont, sans l’ombre d’un doute,
14 « Le rejet de la possible inscription du Movadef comme parti politique
augmente », La Republica, 17 janvier 2012. 15 “Movadef est la façade du terrorisme”, La Republica, 12 janvier 2012 31 antidémocratiques. Le Movadef est aux antipodes de ce qui pourrait être un parti
politique ». Or, la réalité le contredit étant donné que le Movadef n’a jamais effectué
d’action de type violente et c’est ignorer le changement paradigmatique du propre
SL depuis les Accords de paix. La dernière question de l’interview qui concerne le
Movadef est la suivante « Que se passe t-il alors au sein du Jury National des
Elections ? ». Vega rétorque qu’il y a une appellation en cours que doit résoudre le
Jury.
« Mais je ne trouve pas d’arguments justificatifs permettant l’entrée du Movadef
dans le Registre des Organisations Politiques, puisqu’ils reconnaissent qu’ils sont attachés à
une idéologie totalitaire et antidémocratique et nous ne pouvons pas permettre ce genre de
choses ».
Bien que seulement les quatre premières questions de l’interview soient
consacrées au Movadef sur un total de quatorze, le titre de la page s’affiche comme
une sentence sans appel : « La Movadef est le groupe de façade du terrorisme ».
El Comercio s’engage également dans cette voix, c’est à dire celle d’illustrer le
consensus social et politique qui règne contre l’inscription. Et en effet, ce consensus
politique est impressionnant. Comme nous l’avons vu, le ministre de la Justice, le
président du pouvoir Judiciaire, le Procureur de la Nation, José Pelaez, mais aussi les
législateurs, la Confiep (l’équivalent du Medef)16, le premier ministre, Oscar Valdés,
naturellement les associations de victimes du terrorisme, la Confédération Générale
des travailleurs (CGT) 17 , le Président de la Conférence Episcopale Péruvienne
(CEP) et le Président du Conseil pour la Paix, Javier Diez Canseco, qui qualifie le
Movadef de « cheval de Troie » du groupe terroristes SL18 sont tous d’accord pour
condamner sans appel cette tentative du Movadef de se légaliser et d’intégrer le
système démocratique.
16 “Le Pouvoir Judiciaire rejette l’inscription du Movadef”, El Comercio, 17 janvier 17 “Oscar Valdés réitère le rejet du gouvernement vis a vis de l’inscription du movadef”, El Comercio, 18 janvier 2012 18 “Humala affirme que les terrorists n’entreront pas dans la vie politique du pays”, El Comercio, 27 janvier 2012. 32 L’opinion catégorique du Président Humala est également abondamment
relayée dans la presse de prestige.
Or si effectivement le lien entre le Movadef et le Sentier Lumineux est avéré
(comme nous l’avons vu plus tôt), et qu’effectivement le mouvement a recours au
« pensamiento Gonzalo » dire que le Movadef est un parti terroriste est un
raccourci. Car le fait est que le Movadef n’a jamais développé d’action que l’on
pourrait qualifier « d’action armée » depuis sa création, que cela plaise ou non à la
presse et qui plus est il y a confusion ou en tout cas absence de clarification sur le
fait que le Sentier Lumineux d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec le Sentier
Lumineux des années 80 (cf chapitre 1) et que le recours au terrorisme n’est plus
d’actualité.
Si bien l’on peut comprendre que la revendication du « pensamiento
Gonzalo » soit une source légitime de refus de l’inscription d’un mouvement qui
s’en revendique, cela ne doit pas empêcher la presse de bien faire son travail et de ne
pas induire en erreur le lecteur. Or lui faire croire que le Movadef est une association
« terroriste » est une fausseté du point de vue intellectuel et politique.
2) Tous pour la défense de la démocratie
La Republica comme El Comercio s’accordent sur quasiment tous les points qui posent
problème et qui interdisent l’inscription du Movadef comme parti politique. Cela
s’illustre d’abord par la création d’une sorte de barricade politico-médiatique dans la
presse qui entend défendre la démocratie et son essence devant les tentatives de
saper ses fondements.
La différence réside en ce que La Républica est un peu plus prudente et en
règle générale plus distanciée avec l’information qui a trait au Movadef, en utilisant
par exemple dans ses articles le terme « organisation liée au Sentier Lumineux »
quand El Comercio utilise systématiquement « organisation de façades du terrorisme » ou
emploie le mot « terroriste » ou « terrorisme » de manière réitérée. Mais dans le fond,
les deux journaux se placent sur la même ligne éditoriale : le problème réside dans le
caractère antidémocratique du Movadef, notamment parce qu’il s’inscrit dans la
lignée idéologique du Sentier Lumineux, avec le « Pensamiento Gonzalo » et qu’elle
33 repose sur la légitimation de la violence, incompatible avec la démocratie. Le lien
avec Sentier Lumineux et la demande d’amnistie pour ses membres est une insulte à
la mémoire des victimes et à la société péruvienne toute entière, elle est synonyme
d’impunité puisque les militants tant du Movadef que du SL ne manifestent aucun
repentir face aux milliers de victimes du conflit interne.
De plus, la stratégie du Movadef pour conquérir un espace de participation
politique à travers l’accès aux élections n’est qu’une stratégie opportuniste qui a pour
vocation sous jacente de saper les fondements même de la démocratie, en utilisant
ses propres procédés pour la détruire de l’intérieur, et c’est ce pourquoi le
démocratie a le droit de se défendre face à un mouvement qui recherche sa
destruction. Tous ces arguments sont utilisés dans les deux journaux de référence, et
c’est la défense de la démocratie qui apparaît comme l’étendard de la légitimation de
la non inscription du Movadef.
C’est ainsi qu’on peut lire dans la Republica,
« la démocratie ne peut pas être idiote, et attribuer a ses ennemis les mêmes facilités qu’elle
consent aux groupes qui respectent l’État de droit. Les objectifs du Movadef doivent être rejetés
parce que la démocratie qu’ils méprisent et voudraient détruire est immensément supérieure et a le
légitime droit de se défendre »19.
Une argumentation similaire se retrouve dans El Comerio qui qualifie le
Movadef comme un « cheval de Troie » (comme Diez Canseco) :
« Comment croire que ceux qui sympathisent avec le groupe terroriste qui a vidé de sang le
pays et promeut l’amnistie pour le chef Abimael Guzman et ses acolytes voudraient se soumettre
aux règles du jeu démocratique et de la Constitution qu’ils ont piétiné et que maintenant ils veulent
changer ? […] La société démocratique a le droit de se défendre […] Nous ne pouvons pas etre
ingénus »20
19 “La démocratie n’est pas idiote”, Editorial, La Republica, 14 janvier 2012. 20 “Movadef, Non au cheval de troie contre la démocratie”, Edito, El Comercio, 13 janvier 2012. 34 3) Une loi contre les organisations de façade
du terrorisme : quand le
démagogie est saluée par la presse
Au milieu de la polémique crée autour de la possible inscription du Movadef,
l’Exécutif propose juste à ce moment là un projet de loi pour interdire toute
possibilité aux organisations liées au terrorisme de pouvoir s’inscrire comme parti
politique, approuvée en Conseil des Ministres le 18 janvier 2012. Celle loi prévoit
notamment que « toute organisation politique qui dans son acte de fondation, Statut, Acte
de Constitution de Comités Partisans fasse la promotion « d’idéologies orientées a la
destruction de l’État démocratique » ne pourront pas s’inscrire ou si elles « ne
reconnaissent pas les autorités élues conformément à la Constitution et aux lois 21». Une
modification des articles 5 et 14 de la loi relative aux Partis Politiques interviendrait
dans ce projet de loi : l’article 5 précise les conditions que doit remplir une
organisation politique pour s’inscrire, et il s’agirait donc d’ajouter que l’organisation
qui l’a sollicite, n’ait pas un profil « violent » et ne porte pas atteinte aux libertés et
droits fondamentaux. En ce qui concerne l’article 14, il déclarerait désormais que la
JNE puisse décréter illégal un parti quand il considère que ses activités sont
contraires aux principes démocratiques ou légitiment la violence comme méthode
ou comme objectifs.
La Republica détaille le projet de loi impulsé par le ministre de la
Justice de l’époque, Juan Jiménez et le présente comme une réponse a une demande
de l’opinion publique. Elle entrerait en application pour les partis également en
cours d’inscription, donc sans aucune ambiguïté il s’agirait donc d’abord d’une
mesure conjoncturelle destinée à freiner les velléités du Movadef dans sa volonté
d’inscription, malgré la contradiction avec la non rétroactivité des lois et elle serait
l’objet d’une totale adhésion de la part des législateurs.
Tout ceci illustre à quel point le débat est exempt de recul et de vision à long
terme puisque comme l’indique le congressiste Luis Iberico dans El Comercio, la loi
est déjà suffisamment claire sur la nécessaire adhésion à la démocratie auxquelles
21 “Le danger de vivre, et gouverner sans partis politiques solides”, La Republica, 24 janvier 2012. 35 doivent répondre les partis politiques22. Proposer une loi juste au moment où le
climat politique ambiant est en ébullition représente une mesure totalement
conjoncturelle et dans ce cas l’on peut ajouter démagogique mais aucune opinion de
ce genre n’est présente dans les deux journaux.
Rapidement approuvée en Conseil des Ministres puis envoyer au Parlement,
la loi sera approuvée mais 7 mois plus tard, en novembre 201223, preuve que la
situation d’urgence présentée en février était destinée à faire son effet sur l’opinion
publique, c’est à dire à montrer la fermeté du gouvernement face au Movadef et à la
menace qu’il représentait pour la société mais ne possédait pas de véritable
cohérence politique ou légale.
D’ailleurs, il est à noter qu’une loi sur les Partis Politiques proposé par les
organismes électoraux (JNE et Organisme National des Processus Électoraux –
organisme chargé d’organiser les élections et d’auditer les finances des partis) est en
attente de débat au sein de l’organe législatif depuis 2011, et notamment prévoit des
mesures pour renforcer le peu d’institutionnalisation de ceux ci 24 ; au Pérou la
faiblesse des Partis Politiques est un thème récurrent depuis la sortie du
« fujimorisme » puisque l’avènement de Alberto Fujimori a justement signifié un
rejet de la population vis a vis des partis traditionnels, dans un contexte de crise
économique très forte et face à la présence du terrorisme. Cela a engendré une
faiblesse systémique de l’ensemble du système partisan péruvien. Le manque de
conditions requises et le peu de contrôle exercé sur les partis, que ce soit en matière
de financement ou d’institutionnalisation, a donné naissance à de nombreux
mouvements régionaux et locaux hors de contrôle, qui a permis l’infiltration dans le
système politique de candidats et d’argents provenants du narcotrafic ou des mines
illégales.
22 “Ils proposent que le JNE puisse declarer illégal certains partis”, El Comercio, 20 janvier 2012 http://www2.congreso.gob.pe/Sicr/TraDocEstProc/Contdoc01_2011.nsf/d9957
5da99ebfbe305256f2e006d1cf0/b87a4c2489b9411905257ac9006aae65/$FILE/PL0
1777301112.PDF 23
24http://portal.jne.gob.pe/informacioninstitucional/escuelaelectoral/Martes%20E
lectorales%20-­‐%20Exposiciones/ee2010/mar_16feb10.pdf. Document du JNE qui indique les modifications apportées à la LPP (Ley de Partidos Políticos) jusqu`à 2010. 36 Proposer ce projet de loi montre à la fois le manque de vision politique à
long terme et structurelle, car s’il s’agissait de réformer les conditions d’exercice des
partis politiques, dans ce cas, il aurait été plus judicieux de débattre le projet de loi
présenté par les organismes électoraux quelques mois auparavant. Cette décision
semble également illustrer une peur des institutions face à la possibilité que le
Movadef puisse s’inscrire puisqu’elle traduit un malaise et une non confiance dans
les processus démocratiques existants – car si supposément, le Movadef porte
atteinte aux valeurs démocratiques de manière si flagrante on imagine que les
propres mécanismes de protection de la démocratie existants seraient capables de
l’empêcher de pouvoir concrétiser son désir de légalisation.
B) Une amplification des faits et des mots qui contribuent au
sensationnalisme
Même si dans la couverture médiatique concernant le Movadef face à son désir
d’inscription, La Republica essaie de cadrer avec ce que Peralta définit comme la
presse qui a essayer d’aller au delà du sensationnalisme dans la couverture du conflit
armée interne, alors que El Comercio a tendance à y tomber avec la fois, des titres et
un vocabulaire exagéré voire excessif, La Republica tombe aussi parfois dans le
travers de l’amplification pour donner de la valeur à l’information, ou la rendre plus
« vendable ». Cela s’illustre à la fois par le recours à imaginaire de la terreur et à des
attaques contre les institutions qui ne manifestent pas leur opinion « contre le
Movadef », de manière immédiate .
1) Les attaques politiques contre le JNE illustre la fébrilité dans la lutte
contre l’inscription
La crispation politique est d’abord à son comble entre le moment où le Movadef
appelle la décision du ROP de lui refuser l’inscription et celle où le JNE doit
résoudre l’appellation..
El Comercio interprète cette supposée hésitation comme une volonté sous
jacente des membres du JNE d’attribuer l’inscription demandée. « Selon deux médias,
37 trois membres du JNE sont favorables à l’appellation […]. Cela donnerait au Movadef la
majorité dont il a besoin pour rendre effective son inscription ». Il nuance d’emblée cette
version en précisant que cette information n’a pas été confirmée25.
La décision suivante du JNE, qui rejette la résolution du ROP qui refusait
l’inscription au Movadef s’illustre par des attaques politiques contre l’institution, en
qualifiant cette décision du JNE comme irresponsable, estimant que le Movadef
devait être interdit d’emblée et sans aucune claudication légale, c’est notamment le
cas de personnalités réputés pour leur modération, comme Julio Cotler,
anthropologue de trajectoire reconnu qui s’exprime en ces termes : « C’est une folie que
le JNE n’ait pas pris une décision par rapport au Movadef, en pensant aux formalisme légaux
[…]. C’est une honte »26.
Alan García mentionne que « ce serait atroce, une honte internationale qu’une
institution du Pérou permette que ceux qui ont causé tant de destruction contre la démocratie, la
liberté et le peuple péruvien puisse maintenant participer à l’exercice de la démocratie qu’ils ont
voulu détruire »27.
Après que le JNE ait rendu son verdict défavorable au Movadef, le Président
de la République revient sur la première décision de l’organisme électoral en
déclarant « que cela nous a paru étrange que la réponse [à la demande d’inscription] ait nécessité
une période de réflexion quand le thème était clair (autrement dit il fallait interdire sans
attendre) »28.
Mauricio Mulder, de Concertation Parlementaire va même jusqu'à menacer
d’intenter une action contre les membres du JNE devant le Tribunal Constitutionnel
pour ne pas avoir agi avec suffisamment de rapidité face a la volonté du Movadef de
s’inscrire.29
25 “Le Movadef maintient des liens avec les idées “violentistes” d’Abimael Guzman”, El Comercio, 12 janvier 2012 26 “Ils disent que la décision du JNE vis à vis du Movadef est honteuse », El Comercio, 14 janvier 2012 27 Ibid 28 “Humala “Nous ne pouvons pas admettre que la démocratie soit ingénue”, El Comercio, 3 février 2012. 29 « Le Gouvernement propose que le JNE déclare illégaux les groupes qui légitiment les actes violents », La Republica, 20 janvier 2012. 38 2) La construction d’une narrative de la terreur
Tandis que les organismes électoraux révisent la demande d’inscription du
Movadef, l’information selon laquelle plusieurs condamnés pour terrorisme verront
leur peine terminer en 2013 est publié dans les deux journaux de prestige, au mois
de janvier. La Republica lui consacre un maigre bas de page et émet un biais pour le
moins ambigu tandis que El Comercio consacre une page entière à l’information, en
rédigeant un article purement informatif et qui résume les cas détaillés des prochains
libérés et le processus qui a conduis à des changements dans le régime pénitentiaire
de ces condamnés.
« Osman Morote, ex dirigeant du Sentier Lumineux, espère obtenir la
libération d’Abimael Guzman » est le titre de l’article de La Republica. .
L’introduction de l’article signale « qu’au milieu de la polémique générée par l’intention
du dénommé Mouvement pour l’Amnistie et les Droits Fondamentaux (Movadef) de
s’inscrire comme parti politique (…), l’ancien leader de Sentier Lumineux, Osman Morote
assure qu’après sa libération – il purge une peine de 25 ans pour terrorisme - il promouvra
celle d’Abimael Guzman ». Une citation de Morote, provenant de la revue Con Sentido
signale que c’est une obligation de sa part tant que ses camaradent continuent de
purger leur peine. « L’ancien numéro deux de Sentier Lumineux a rappelé que sa
libération sera effective l’année prochaine, date à partie de laquelle il cherchera la libération
de ses camarades ». On voit ici le désir de créer une sorte de danger imminent (dès sa
libération) qui s’annoncerait, en parallèle avec l’affaire d’actualité – l’inscription du
Movadef -. Si le numéro 2 du Sentier Lumineux déclare qu’il va chercher la
libération du leader, comment peut-on laisser s’inscrire le Movadef qui prône
l’amnistie ? Il y a ici une tentative de justifier l’aberration que constituerait
l’acceptation de l’inscription du Movadef, avec comme preuve la détermination d’un
des membres les plus connus du Sentier Lumineux qui sortira de prison sous peu de
prôner la libération du leader le plus redouté. Qui plus est la légende de la photo en
rajoute encore un peu : « Obsession. Deux décennies en prison n’ont pas changé
Morote ».
39 Au contraire, El Comercio indique que les trois prisonniers de SL concernés
par les sorties de prison, notamment Morote, ont « « décroché » de l’organisation
depuis des lustres mais qu’ils seront maintenus sous surveillance policière, par
mesure de sécurité »30.
Quand ce n’est pas La Republica qui tombe dans ce travers, c’est El Comercio
qui forge cette narrative de la terreur, un exemple notamment est un article
intitulé « Le sanglant sentier du Movadef vers la légalité » 31 . Ici, tous les
éléments sont réunis pour une information « sensationnelle ». On peut voir une
photographie de Guzman en tenue rayée de prisonniers, accolée à une photographie
de la Calle Tarata, après l’explosion de la voiture piégée en 1992, dans la quartier de
Miraflores, et l’article détaille minutieusement les curriculum pénitentiaires et
politiques des principaux dirigeants du Movadef, notamment tous ceux qui ont été
emprisonnés pour avoir participé dans des actions politiques ou militaires du groupe
SL. Avec des mots telle que « barbarie terroriste », on ne peut pas dire que ce genre
d’article ait vocation a pacifié le débat et à l’inscrire dans une démarche très
réflexive. L’encadré de l’article qui exhibe des petites photographies des principaux
dirigeants a pour titre : « Les visages de l’arme légale de la terreur ».
Début février, quand le Movadef annonce qu’il désiste de l’appellation contre
le JNE et voit donc son inscription définitivement enterrée, la presse de référence se
tourne donc vers le futur potentiel du Movadef et c’est La Republica qui tombe ici
dans la narrative de la terreur,
puisque la volonté du Movadef est vaincue
provisoirement mais ils ne s’avouent pas perdants pour autant32. Cette fois l’article
s’encadre d’une grande photographie de Guzman et Iparaguirre le poing levé lors de
leurs procès, et d’une petite photographie de peinture d’une faucille et d’un marteau
à la gloire du « Pre[c]idente Gonzalo ». « La terreur a été vaincu, pour le
moment… » constitue l’accroche de l’article, et on y trouve tous les éléments,
comme celui citée par El Comercio qui répondent au cas de « racolage journalistique »
30 “Deux intégrants de la direction de SL auront accompli leur peine de prison en 2013”, El Comercio, 2 janvier 2012. 31 El Comercio, 29 janvier. 32 “Le Movadef ne sera pas un parti politique mais il ne faut pas baisser la garde pour autant”, La Republica, 2 février 2012. 40 « Ses intentions politiques ne sont pas terminées. Tout continue de manière ferme. Cela
pourrait être un second détour de chemin que Guzman a ordonné, mais ils vont revenir avec un
changement de dénomination ou quelque chose d’autre »33
El Comercio, devant la décision du Movadef d’abandonner ses velléités
d’inscription, fait parler les personnes qui dénoncent « cette lacheté » et présente un
panorama futur des activités futures du mouvement, qui vont notamment chercher
à s’infiltrer dans les universités et les syndicats.
On voit donc que malheureusement, l’un et l’autre des journaux de référence
tombent à diverses reprises dans des travers journalistiques « sensationnalistes », qui
cherchent à « faire vendre » en amplifiant l’information ou en la déformant, pour
arriver à une interprétation qui s’illustre par une volonté de construire une
« narrative de la terreur », qui attire le lecteur, puisque dans tous les cas de figure sur
ce thème il s’agit de lier le Movadef au Sentier Lumineux, et pour ce faire, utiliser
parfois des méthodes journalistiques contestables, au prix de la précision et de la
vérité.
C) Des tentatives plus honnêtes de montrer des preuves de la l’illégitimité de
son inscription de la part de La Republica
Alors que El Comercio se cantonne à relayer les voix médiatiques qui se prononcent
contre l’inscription et tente de réaliser une chronologie du Movadef, ainsi qu’une
biographie de ses dirigeants, La Republica va adopter lors d’une enquête, une posture
intéressante, en essayant de montrer que le Movadef véhicule non seulement une
idéologie répudiable mais qu’en plus, il n’a pas su remplir les conditions légales qui
régissent le fonctionnement d’un véritable parti politique
1) Les comités partisans « fantômes » et les signatures
33 Citation de Pedre Yaranga, expert sur les themes de “subversion” (dixit l’article), Ibid. 41 Une tentative plus journalistique et moins rhétorique de montrer que le Movadef
ne peut pas obtenir son inscription a été de prouver que l’organisation a registré des
faux comités partisans.
Ainsi, un travail d’enquête et de terrain va lui permettre d’établir qu’un grand
nombre des 68 comités partisans présents dans au moins 18 régions nécessaires
pour valider une inscription comme parti politique sont, dans le cas du Movadef,
inexistants. Elle prouve que dans la région de Cusco, Áncash, d’Ayacucho, il n’y a
pas de locaux, ainsi que dans la ville de Huancayo et Arequipa.
Les locaux partisans registrés par le Movadef au JNE, avec adresse à l’appui
pour prouver sa présence militante sur le territoire ne sont en fait que des
habitations, ou des restaurants voire sont corroborés comme de fausses adresses34.
Plus grave encore, il semble que le Movadef aurait eu recours à des falsifications
de signatures et recours au mensonge pour en obtenir d’autres35. Le groupe avait
présenté au ROP, 355 964 signatures, ce qui avait participé de l’effroi généré par la
surprise que représente un si grand nombre de sympathisants. En contactant un
certain nombre de signataires, la journaliste s’est confrontée à l’indignation de
plusieurs d’entre eux qui affirment n’avoir jamais signé pour le Movadef. Par
exemple l’un d’entre eux qui s’était rendu au Reniec (Registre National
d’Identification) pour effectuer des démarches administratives, s’est vu interpellé par
des gens qui lui ont proposé de signer une pétition en faveur des fonavistes36. « s’ils
me disaient que c’était pour libérer des terroristes, je n’aurai jamais signé », dit-il. D’autres
signataires se sont vus offerts des biens alimentaires en échange de leur signature
sans savoir pourquoi ils signaient.
Mais le fait qu’un policier ait vu son nom apparaître dans le registre des
signatures du Movadef prouve qu’il existe aussi des signatures falsifiées puisque cet
agent n’aurait jamais donné sa signature pour un groupe comme le Movadef.
34 “Le Movadef a présenté au JNE des comités politiques qui ne sont que des locaux fantômes”, La Republica, 21 janvier 2012. 35 “Movadef a recueilli des signatures par tromperie et en a falsifié d’autres pour prétendre s’inscrire comme parti politique au sein du JNE », La Republica, 22 janvier 2012. 36 Les fonavistes sont des citoyens qui ont cotisé pendant des années pour pouvoir se construire une maison propre et qui ont vu leur argent spolié par l’État sous le fujimorisme 42 Les preuves peuvent paraitres légères mais elles montrent tout de même un
effort pour tenter de corroborer le manque d’exercice de la démocratie pour un parti
qui veut s’y assimiler. Malgré tout, le 29 novembre 2011, le président du JNE, Hugo
Sivina avait remis au Congrès un projet de loi sur le Code Électoral et Code
Procédural Électoral qui avait pour objectif d’ ordonner, de systématiser et de
couvrir » les vides juridiques de la législation en la matière. Le but était notamment
de renforcer la capacité de contrôle de la ONPE vis a vis des comités partisans et
vis a vis de la politique même des organisations. En effet, si ce type de vérification
est effectuée pour le Movadef, il devrait également l’être pour les autres partis
politiques, car notamment en ce qui concerne les locaux partisans, il n’est pas à
exclure qu’ils soient dans la même situation que le Movadef.
2) Une inadaptabilité aux conditions de l’exercice démocratique
A la fin du mois de janvier, La Republica publie une interview intéressante car à
contre courant des idées habituellement répandues. C’est celle de Santiago
Roncagliolo, personnalité littéraire interviewée par Claudia Cisneros. Pendant la
conversation éditée, Roncagliolo exprime une certaine vision plus modérée et
surtout plus réfléchie du problème de l’inscription du Movadef avec des arguments
peu entendus jusqu’à alors. Cela est peut être du au fait qu’il vit en Espagne et
possède donc une certaine distance qui lui permet d’observer ce problème politique
avec un recul et une vision différente, et avec une approche plus comparatiste.
Ce qui est assez flagrant c’est à la fois le ton de la journaliste qui paraît au
départ choquée par sa position (« cela me surprend que tu vois comme positive le
fait qu’ils demandent une amnistie générale car cela pourrait n’être qu’une
mascarade ») mais aussi la manipulation qui est faite, encore une fois au niveau du
titrage et de la légende photographique qui décide du message qui veut être
transmis. Que ce soit le propre journaliste, qui en général titre et écrit la légende de
la photo ou l’éditeur de la section politique, qui a le droit de modifier les deux, il y
une certaine manipulation de l’information qui est effectuée car elle ne correspond
43 pas exactement au fond de ce que dit l’interviewé. Et le fait est que le titre et la
photo sont les premiers éléments vers lesquels le lecteur est attiré.
En effet, il est intéressant d’observer que le titre ne correspond pas à la
teneur de l’interview, qui justement, pour une fois, se démarque des opinions
publiées dans le journal. Voici le titre : « S’ils continuent de revendiquer la
violence comme voie pour accéder au pouvoir, il faut les interdire ».
Effectivement, Roncagliolo à un moment de l’interview dit cette phrase mais elle ne
reflète pas le contenu de l’interview. D’autre part, la légende de la photo est la
suivante : « Roncagliolo, remis en question quelques années auparavant à cause de
« Abril Rojo »37, son livre sur Sentier Lumineux affirme que fait que le Movadef ait
des adhérents devrait nous préoccuper ». Alors que plus grave, à aucun moment il
n’exprime cette idée.
Déjà quand la journaliste lui demande, comme première question, d’effectuer
un diagnostic de la situation par rapport à la préoccupation qui existe de voir des
jeunes revendiquant le « pensamiento Gonzalo », il répond « Je suis moins
apocalyptique que ce que je lis dans la presse par rapport au Movadef ». Son argument est
que le fait qu’ils cherchent à s’inscrire comme parti politique et deuxièmement
l’inclusion dans la demande d’amnistie des policiers et des militaires lui apparaissent
comme « un grand pas en avant en considérant d’ou ils viennent. Maintenant, c’est vrai
qu’ils manquent d’autres avancées ». Dans une autre question il développe cette idée en
répétant que « le fait qu’ils (les militants du Sentier Lumineux ou du Movadef)
reconnaissent à ses ennemis comme égaux, est un grand pas »
Et devant le questionnement de la journaliste qui lui demande s’il ne s’agirait
pas d’une stratégie du au fait que le Movadef ne pouvait pas demander uniquement
la libération d’Abimael Guzman, il répond que de toute manière le problème réside
en ce qu’une demande d’amnistie, qu’elle soit générale ou cantonnée à un individu
ne constitue pas un programme politique global capable d’affronter d’autres forces
37 Thriller publié en 2006 qui a pour toile de fond Ayacucho dans les années 2000 et ou l’on retrouve de nombreuses références à la situation d’horreur vécue pendant le conflit armé. Roncagliolo avait été accusé de sympathiser avec le Sentier Lumineux et avait crée la polémique. Cela illustre à quel point le rapport de la population avec la mémoire de la guerre est conflictuel. 44 politiques et que c’est la que réside la faiblesse du Movadef. C’est un argument
intéressant car il est totalement original vis a vis des autres positions qui s’exposent
dans la presse habituellement.
Le passage le plus intéressant qui montre que sa vision est novatrice et quasi
contraire aux opinions communes tient dans ce passage que nous reproduisons ici et
qui est d’autant plus éloquent car il ne répond pas ou répond de manière plus
intelligente à une question posée qui attendait effectivement une autre réponse.
Cisneros demande « ce qui hérisse le poil sur les os c’est de voir ces jeunes de 20
ans, répéter les mêmes slogans d’il y a 20 ans, non ? ». La réponse est intéressante :
« Oui c’est dur…Mais de toute façon, le fait que tout cela s’articule autour d’une
proposition politique me paraît beaucoup mieux qu’avant. Avant c’était « Pas de politique,
pas de système, pas de partis. Il faut tout faire exploser ». Peut être que mon point de vue est
très particuliers parce que c’est celui de quelqu’un qui a été avec eux, qui les a étudié. Mais
une des choses les plus frappantes de Sendero était précisément son intransigeance et son
incapacité de négocier. Et c’est une des raisons pour laquelle tout le monde les déteste, à la
différence d’autres mouvements subversifs d’Amérique Latine qui ont plus de défenseurs.
Eux (SL) n’ont jamais voulu parler ni négocier avec personne. Et si tu viens de si loin,
vouloir faire parti du système politique c’est déjà un pas. Ca ne le serait pas pour moi mais
ca l’est pour eux ».
La suite suit cette pensée à contre courant, et répond à une journaliste un peu
prise au dépourvue, qui s’attendant peut être trouver un allié, voit que la situation est
plus compliquée, puisqu’elle lui demande « Mais toi, les connaissant, tu crois que
genre de pas est possible ? Par exemple abjurer du « pensamiento Gonzalo » ? ». Et
là, on retrouve la vision de tous les analystes connaisseurs du sujet, et dont la pensée
n’est quasiment jamais reproduite dans sa complexité.
« Si tu participes à des élections, tu as déjà abjuré du « Pensamiento Gonzalo »,
c’est ca le pas franchi. Le « pensamiento Gonzalo » c’était en finir avec l’État. Et
45 précisément devoir entrer dans un processus politique t’oblige à dialoguer, à négocier, quelque
chose qu’ils n’ont jamais voulu faire »
Roncagliolo ne va pas aussi loin que Tapia pour qui justement, inclure le
« pensamiento Gonzalo » est soit une stratégie soit une imposition d’une petite
fraction à l’intérieur du Movadef et qui conduit au suicide politique qu’est le refus de
l’inscription. Mais en tout cas reconnaître que la revendication du « Pensamiento
Gonzalo », entre en contradiction avec la volonté de participer au système politique
est que cette contradiction résulte être positive pour la société péruvienne
puisqu’elle reflète un changement total dans l’esprit idéologique du SL est une
opinion peu courante et surtout peu médiatisée D’habitude l’opinion communément
exposée est qu’il s’agit d’un mensonge, d’une vile stratégie pour reprendre les armes
en se servant de la démocratie.
A ce propos, Roncagliolo tout au long de l’interview développe aussi l’idée
que c’est dans les failles face aux processus démocratique même qu’il faut chercher à
ne pas autoriser le Movadef à être un parti et que c’est avec des idées débattues à
l’intérieur de la démocratie que le combat idéologique peut se gagner et doit
s’effectuer.
Il pointe donc du doigt notamment les irrégularités commises comme les
signatures acquises dans des conditions peu claires et à ce propos conclut dit
« qu’[il] ne croit pas qu’ils faillent leur exposer un veto pour ce qu’ils disent ». Un
peu plus loin : « Ils doivent faire un grand effort. S’ils veulent former un parti politique ils
doivent faire beaucoup plus d’efforts que ce qu’ils ont fait ». « Je suis d’accord pour qu’ils
soient refusés. Mais pas pour ce qu’ils disent, répète t-il encore un peu plus loin, mais parce
qu’ils doivent remplir un certain nombre de conditions pour être un parti ».
Roncagliolo se sert également d’une vision comparatiste pour expliquer son
argument selon lequel ce n’est pas en interdisant un mouvement qu’on le fait
disparaître ou qu’on l’empêche réellement d’exister, et il cite le cas des mouvements
indépendantistes de gauche en Espagne qui ont obtenu un grand nombre de votes
46 ou l’ETA (mouvement qui prône l’indépendance du Pays Basque et revendique des
actions terroristes ), en disant qu’effectivement s’ils ne peuvent pas illustrer qu’ils
sont autre chose que le « bras légal » de l’ETA ils ne peuvent pas participer au
système politique légal. Il cite aussi la montée de l’extrême droite en France dont les
idées doivent être combattues, à l’intérieur même de la démocratie. « Ce n’est pas
nécessaire de les interdire, nous pouvons les vaincre au sein du système démocratique, en
respectant les normes du système démocratique ». Le dernier élément de comparaison
« intercontinental » s’exprime dans la dernière réponse de l’écrivain qui regrette
qu’en Europe il n’y ait pas de « liberté d’expression totale » puisqu’en ce qui concerne
l’Holocauste, effectivement un certain nombre de lois empêchent de nier
l’évènement, c’est ce qui s’appelle le négationnisme, sous peine d’amendes voire
d’emprisonnement. A propos de la non liberté d’expression totale il dit que « c’est une
erreur, car cela parait montrer que nous avons peur d’eux. Si tu les obliges a sortir, à défendre ce
qu’ils pensent et que tu leur démontres qu’ils sont dans l’erreur, la lutte est beaucoup plus efficace ».
Cet article est donc intéressant par son contenu puisqu’il évoque des idées et
arguments peu souvent utilisés : la volonté de conversion au système électoral est
une chose positive pour la pays, il ne faut pas chercher à interdire ce genre de
mouvements pour leur idée mais parce que le Movadef est encore incapable d’être
en adéquation avec ce que demande véritablement une démocratie, c’est à dire
répondre à un certain nombre de conditions et proposer un programme politique.
C’est a dire que si le Movadef veut vraiment jouer le jeu de la démocratie, il reste du
chemin à faire.
Pour autant, même les analystes les plus critiques vis à vis de la politique du
gouvernement et de la « panique morale » entretenue par les médias comme le
journaliste Gorriti ou l’analyste Carlos Tapia s’accordent pour dire que l’inscription
du Movadef n’était pas souhaitable car la démocratie péruvienne ne peut pas
accepter ce qu’implique son inscription notamment à cause de la référence toujours
contenue dans les statuts officiels du Movadef au « pensamiento Gonzalo ».
47 Comme le souligne Lerner, le Parti Nazi n’est pas autorisé en Allemagne pour
des raisons biens compréhensibles38 . Cette comparaison est utilisé par les deux
experts pour illustrer ce qui se passe avec le Movadef et la situation péruvienne.
Carlos Tapia explique que
« ce serait comme si en Allemagne, un groupe de personne défendrait le fait qu’Hitler non
seulement était dans le droit chemin mais que ce qu’il a fait était la chose la plus grandiose de
l’humanité ».
Pour Gorriti, le Movadef pourrait s’inscrire uniquement s’ils « jurent » leur
« totale loyauté » à la démocratie et rejettent catégoriquement tout recours à la lutte
armée, dans les statuts mêmes.
« En démocratie il doit y avoir un lieu pour tout le monde mais pour tous ceux qui jouent
à l’intérieur des règles de la démocratie, ceux qui considèrent par exemple que la violence ou
l’insurrection de type guérilla ou le coup d’état est une forme d’arriver au pouvoir n’ont pas de place
au sein de la démocratie. C’est la mémé chose pour les partis politiques qui revendiquent des
idéologies ou ils légitiment l’exclusion raciale ou basée sur la haine culturelle ».
Le traitement médiatique d’un évènement comme la demande d’inscription
d’une organisation liée au Sentier Lumineux, mais qui cherche volontairement à
rentrer dans le système légal pour pouvoir participer de la vie politique du pays, se
polarise d’emblée, autant dans La Republica que El Comercio sur un rejet « phobique »
de cette possibilité. Les deux journaux s’évertuent à publier les opinions des
autorités pour faire valoir la légitimité de l’argumentation contre l’inscription mais
oublient de faire parler ceux qui pensent différemment ou de manière plus nuancée,
avec une exception pour l’interview de Roncagliolo dans La Republica, fin janvier.
Pour autant, la peur qu’inspire le Sentier Lumineux et son petit frère politique
qu’est le Movadef, au delà d’une identification directe à la terreur produit un
discours et des productions journalistiques déformés qui vont à l’encontre de la
38 “Inscrire le Movadef serait un excés de la démocratie”. Interview a Salomon Lerner, ancient président de la CVR, La Republica, 18 janvier 2012. 48 qualité, de la précision et parfois de la vérité ou simplement exagèrent les faits sans
confronter leurs opinions à la réalité.
II L’Opération Perseo 2014 et sa couverture médiatique :
l’exploitation de la « panique morale » par le pouvoir politique
rejoint l’aveuglement journalistique
De la capture de 34 chefs et membres du Movadef a la libération de tous les
accusés. Comment les médias péruviens tombent dans le jeu du
gouvernement.
Dans la soirée du 9 avril 2014, 24 militants du Movadef, entre dirigeants et militants
à responsabilité, sont arrêtés simultanément dans plusieurs villes du Pérou (Lima,
Lambayeque, Puno, Huánuco, Áncash, Junín) par des membres de la Brigade des
Forces Spéciales39 conformée par des centaines de policiers et militaires avec l’appui
et l’assistance du Ministère Public et du Pouvoir Judiciaire sur ordre du Procureur.
Parmi les personnes arrêtées se trouvent les deux activistes les plus connus,
Manuel Fajardo et Alfredo Crespo, respectivement ancien et actuel avocat de
Abimael Guzman ainsi que divers membres du Comité Exécutif de l’organisation,
comme le secrétaire d’organisation, Claudio Olortegui Crispin, le secrétaire de
presse et de propagande, Oswaldo Esquivel Caycho, et le sous secrétaire des
Affaires Légales, Carlos Alfonso Gamero Quispe.
En voyage officiel au Canada,
le président de la République Ollanta Humala
déclare en direct sur la télévision publique (RPP Television) quelques heures après
l’opération pour détailler les captures effectuées, en appuyant le chiffre du nombre
d’agents déployés : 300 effectifs de la Police Nationale et de Forces Armées, plus
précisément des membres de la DIRCOTE (Police Anti Terrorisme), de la
DIRANDO (Police Anti-Drogue) et de la DIRINDRI (Police Spécialisée dans les
39
Brigada Especial de Inteligencia
49 Enquêtes Criminelles), 47 procureurs ainsi que des avocats du Ministère de
l’Intérieur. Il s’agit donc d’une opération qui se veut de grande ampleur et l’impact
médiatique doit être à la hauteur de la grandiloquence des captures.
Les deux chefs d’accusations sont le délit de terrorisme (appartenance ou
affiliation à une organisation terroriste) et financement du terrorisme lié au
narcotrafic.
Le 10 avril, le lendemain de l’opération, tant El Comercio que La Republica
reprennent les informations de l’agence d’informations officielle, l’Agence
“Andina”, en donnant les quelques détails de la capture. La note de presse du
Ministère de l’Intérieur du 9 avril conclut par des paroles du chef de l’Etat, qui
indique que malgré la poursuite des efforts dans la capture des impliqués non encore
arretés, « il était nécessaire d’informer le pays de cette bonne nouvelle pour la consécration de la
pacification nationale ». Avec cette phrase, le ton donné à l’opération serait celle d’une
action consensuelle puisqu’il s’agit de la paix nationale, du rétablissement de l’ordre
public, fragilisés par des « éléments terroristes ». Le ton des paroles officielles
rappelle l’effervescence induite par l’arrestation d’Abimal en 1992, de Feliciano en
1999 ou d’Artemio en 2012.
A) Une opération saluée par la presse de prestige comme une victoire contre le
terrorisme et pour la défense de la démocratie…
Dès l’annonce de la capture, la totalité des médias péruviens sont unanimes : il s’agit
d’une action bénéfique pour la société péruvienne, et c’était la seule voie possible
pour tenter de freiner les velléités d’un groupe d’emblée qualifié de terroriste qui
n’avait de toute façon pas sa place dans le système électoral du pays.
Deux jours après les captures, l’éditorial de El Comercio , normalement avare
de commentaires positifs envers le gouvernement va même jusqu’à le féliciter pour
cette réussite en terme de lutte contre le terrorisme (même si quelques lignes plus
loin il l’attaque violemment pour sa faiblesse en terme de lutte contre la délinquance
commune). En règle générale, il est illustratif de constater que l’opération est saluée
comme une réussite, une victoire contre un ennemi commun et que l’heure n’est pas
au questionnement critique.
50 1) Un traitement de l’information basée sur l’acceptation sans critique de
l’Operation Perseo
Les publications qui suivent l’opération Perseo, tant dans La Republica que
pour El Comercio partent sur une ligne commune : illustrer le lien qui existe entre le
Movadef et le Sentier Lumineux pour légitimer le traitement du mouvement comme
organisation terroriste. La différence réside en ce que La Republica a accès, dès les
premiers jours au dossier d’enquête, ce qui ne semble pas être le cas de El Comercio.
Deux jours après les arrestations, soit le 11 avril, El Comercio déploie en
Une : « Movadef a recu plus de 500 000 soles de Artemio ». En page intérieur, le
titre est le suivant : « Movadef recevait des directives d’Abimael Guzman selon
les interceptions téléphoniques ». Selon le chapo de l’article, les informateurs
(anciens membres du repentis du PCP-SL) seraient l’élément clé pour prouver le lien
entre Artemio, faction armée du Haut Huallaga et le Movadef.
Un des principaux arguments qui présidera la justification et la légitimation
de l’opération Perseo sont deux années d’investigation policières.
Des documents trouvés en possession d’Artemio lors de sa capture en février
2012 auraient déclenché les débuts de l’enquête car ils auraient permis d’établir qu’il
existe un lien entre l’organisation terroriste – Sentier Lumineux et le Movadef -,
(selon le Fiscal Cubas), sans donner plus de détails sur la nature de ces documents,
et il existerait également d’autres preuves tels que des témoignages et des
informations fournies par des informateurs ainsi que des interceptions
téléphoniques.
Le procureur Cubas assure que le Movadef est un organe de SL avec des
bases sur le territoire national mais que ces sources de financement ne sont pas
avérées. En accord avec ce qui a été déclaré par les informateurs il est considéré
que le Movadef serait directement financé par de l’argent sale provenant du
narcotrafic.
51 Selon le premier ministre de l’époque, Walter Alban cette version est fiable
car au cours des enquêtes réalisées, il existerait « des preuves suffisantes qui permettent
d’attester qu’il y a affluence de ressources financières provenant de la zone du Huallaga et du
Vraem ». A noter, une confusion non éclairci. Les « terroristes » qui opèrent dans le
Vraem, au début sous les ordres du commandant Feliciano (capturée en 1999) font
partie de la section opposée à Abimael Guzman, et ils ne reconnaissent pas le leader
historique du SL comme le chef légitime de l’organisation depuis la signature des
Accords de Paix, on voit ici que les imprécisions commencent déjà à pointer.
El Comercio cite des sources de la Direction contre le Terrorisme qui
indiquent le témoignage de deux informateurs sur une réunion entre Artemio et
deux dirigeants du Movadef. Or cette réunion, comme nous le verrons plus tard,
n’a jamais existé.
En effectuant une corrélation hasardeuse entre le demi million de soles qu’il
aurait fallu au Movadef pour rendre effective sa demande d’inscription et l’argent du
narcotrafic que gère la faction d’Artemio, l’enquête conclut, sans aucune preuve
que l’argent doit venir du Haut Huallaga, avec remise en main propre de l’argent en
effectif d’Artemio aux dirigeants du Movadef, et arrive au chiffre de 500 milles
soles, sans aucune preuve.
Des écoutes téléphoniques permettent également de confirmer des
communications entre Artemio et des militants du Movadef afin que ces derniers
coordonnent des directives avec Abimael Guzman. Ces écoutes seraient à l’origine
de l’ordre d’arrestations des 34 militants du Movadef .
Pour résumer : des documents trouvés en possession d’Artemio, des témoignages et
des informations fournies par les informateurs, dont une réunion qui s’avère être
inventée ainsi que des interceptions téléphoniques. Qu’en est-il du coté de son
concurrent ?
La Republica , le même jour titre « Interceptions téléphoniques et
témoignages d’ex membres de Sentier Lumineux accusent les leaders du
Movadef ». On voit donc que la base est la même.
La couverture médiatique est confiée à la section investigation du journal
dans un souci, comme l’avait dejà exposé Peralta, « de recourir à un journalisme
52 d’investigation et de précision qui garan[tit] le traitement avec sérieux de
l’information-spectacle », selon l’une des caractéristiques qui définit les journaux de
référence.
Les preuves qui auraient conduits à l’arrestation des 34 membres du
Movadef proviennent des déclarations d’informateurs et de témoins clés, anciens
membres du Sentier Lumineux ainsi que des transcriptions de 16 dialogues entre
Artemio et des membres du Movadef, nombre qui illustrerait l’étroitesse de la
collaboration entre les deux factions. Il est également indiqué que l’ancien chef du
Haut Huallaga serait le responsable direct du financement du groupe par l’argent
provenant du narcotrafic, mais toujours sans en apporter la preuve.
D’autres sources provenant de la DIRCOTE et de la procureur anti
terrorisme affirme que le Movadef a été creée pour libérer Guzman, obtenir le
retour des partisans du Sentier Lumineux qui se trouvent hors du pays et annuler les
ordres de capture contre eux. Une fois accomplie les libérations, le but serait de
reprendre la lutte armée, toujours selon la résolution judiciaire qui s’appuie sur des
preuves collectées dans les cellules des ‘terroristes’ en prison et de membres du
Movadef.
La República mentionne, comme son concurrent, - c’est donc la preuve que
cette fausse piste est détaillée dans le propre dossier d’enquête -, une réunion entre
Artemio et les leaders du Movadef, dans le Haut Huallaga. La journaliste raconte qui
avec force détails la rencontre entre les deux bandes, avec le même scénario : 100
000 soles auraient été confiés aux membres du Movadef par Artemio pour leur
permettre d’effectuer leurs activités.
Le contenu des interceptions téléphoniques et les témoignages ne laissent
aucun doute sur le lien qui existe entre l’organisation de Artemio et le Movadef, selon
le Procureur et les autorités judiciaires. Comme dans El Comercio, il est question des
perquisitions effectuées dans les cellules des ‘terroristes’ incarcérés suite à la
découverte d’un réseau clandestin qui permettaient aux emprisonnés et aux gens du
Movadef de communiquer. En sachant que Crespo est l’avocat officiel de Guzman
et qu’il lui rend régulièrement visite au sein de la « Base Naval » (prison où est
incarcérée Guzman) qu’y a t-il de vraiment clandestin dans ce genre de rencontres ?
53 Mais l’article ajoute que justement, lors des visites des avocats à leurs clients,
ils recevaient des directives de la direction de Sentier Lumineux, et servaient de
« courroies de transmission » des directives transmises par le chef du SL. En 2010,
certains membres du personnel de l’INPE ont trouvé dans les affaires de Gamero
Quispe, un des avocats de Guzman, un document remis par celui-ci. Après analyse
du document, la DIRCOTE conclut qu’il s’agissait de directives pour une des
campagnes politiques du Movadef.
Si l’on résume ici : des déclarations d’informateurs et de témoins clés, 16
dialogues entre Artemio et des dirigeants du Movadef lors d’interceptions
téléphoniques, une fausse réunion et des documents trouvés dans les cellules des
membres du SL incarcérés.
C’est le début de l’affaire, et les sources auxquelles ont accès les journalistes de
El Comercio ou de La Republica proviennent à la fois des procureurs en charge du
dossier et de ce qui est divulgué par la Police du dossier d’enquête, voir dans le cas
de La Republica un accès direct à ce dernier. Chacun d’entre eux a accès également de
différente manière à des sources propres de la Police Antiterrorisme.
Le 12 avril, le titre de l’article consacré au Movadef du coté de El Comercio :
« Abimael Guzman prétendait obtenir l’amnistie a travers le système
électoral»
La Republica : « Il a été prouvé que Guzman dirige le Movadef depuis la Base
Navale du Callao (prison) ».
Si bien La Republica tente de donner plus de détails provenant du dossier
d’enquête, il est clair que El Comercio, n’a pu qu’avoir recours à des sources
policières.
En effet, selon le titre il est annoncé que le chef de Sentier Lumineux, Abimael
Guzman chercherait l’amnistie à traves le système électoral légal. En ce qui concerne
le Movadef rien de très nouveau là dedans étant donné que l’amnistie des
prisonniers politiques et des militaires constitue leur première revendication. Il
semble que l’effet recherché en associant les mots « Abimael Guzman »,
« Amnistie » et « Système électoral » semble plutôt attiser la peur de la population
54 que réellement apporter une information nouvelle et valable au débat, comme cela
avait deja été effectué pendant la campagne pour son inscription, en 2012.
Selon El Comercio, c’est le propre Guzman qui décida de la création du
Movadef. Quelles sont les preuves sur lesquelles se base cette accusation ? Des
conclusions d’agents de la DIRCOTE, anonymes, et surtout, l’emphase est mise sur
les deux ans d’enquêtes et d’analyses de la documentation collectée dans la cellule du
leader de Sentier Lumineux.
On est en droit de se demander s’il est nécessaire deux années pour analyser des
documents…Mais l’article précise qu’ils comptent également sur des informations
données par le propre Crespo (mais il n’est pas précisé quel type d’informations) et
des écoutes téléphoniques qui permettent de déterminer que le propre Guzman
convoquait les dirigeants du Movadef dans sa cellule pour leur donner des directives
– cette information avait déjà été utilisée la veille.
Avant de retracer les évènements au cours desquels Guzman a exposé la
nécessité des Accords de Paix et de la « solution politique », l’article précise que c’est
en 2006 que les avocats de Guzman annoncent le début d’une campagne de
réconciliation nationale et de « solution politique dérivée des problèmes de la
guerre » en précisant qu’il s’agit d’une consigne de Guzman.
La police aurait commencé à trouver des prospectus sur des « scènes d’actions
armées » qui exposaient cette « solution politique » sans précisé toutefois dans quel
contexte exact ces volants ont été trouvés. « Et c’est la que nous commençons à nous rendre
compte qu’il s’agit peut être d’un mouvement pro-amnistie et qui, pour cela vise à user le système
électoral. Cela apparaît dans leurs propres documents : « utiliser le système électoral 40». Le
paradoxe qui existe entre la première action armée du SL en 1980, consacrée à
bruler les amphores électorales dans la communauté de Chuschi et la volonté
désormais de vouloir s’intégrer à la vie politique ne peut être qu’une vile stratégie
d’infiltration destinée à miner la démocratie par l’intérieur.
Si l’on tente de résumer cet article, le manque de nouveaux éléments sur
l’enquête ou de nouvelles informations fait incliner la journaliste vers une confusion
40 Citation de sources policières anonymes utilisées dans l’article 55 du propos qui ne sert pas le lecteur. En effet, dire que la campagne de réconciliation
nationale est une directive de Guzman n’est pas nouveau. Et surtout, aucune
personne un peu connaisseuse du mouvement n’est dupe : les membres du Movadef
s’appuient sur le pensamiento Gonzalo pour forger leur idéologie, et ne s’en cache pas.
De là le journaliste effectue une mise en relation peu précise et confuse entre le SL
et le Movadef, dont le lien serait le propre Guzman, ce qui en soi n’est pas une
information nouvelle. Le plus grave étant l’effet panique recherché par le fait de
mentionner un retour évident vers la lutte armée à la fin de l’article, alors que le
propre Guzman indique depuis des années le contraire.
La Republica dans un souci de rigueur entend développer d’autres éléments
contenus dans le dossier d’enquête. Les preuves sont toujours les mêmes : des
témoignages et des interceptions téléphoniques, et le but aussi : montrer les liens
supposés entre le Movadef, le terrorisme du Haut Huallaga et le propre Guzman.
Il est ainsi détaillé que la police antiterroriste a prouvé qu’Abimael Guzman a
crée le Movadef et qu’il dirigeait le groupe depuis sa cellule tandis que son avocat,
Crespo se chargeait de retransmettre les ordres. C’est lui qui autorisa ce dernier à
voyager dans le Haut Huallaga pour chercher l’appui de Artemio qu’il voulait
transformer en son bras armé. Un informateur a été témoin, en 2005 de la rencontre
entre Crespo et Camarade Julian, alias Atilio Cahuana Luyali, « l’idéologue du SL ».
Ils se sont réunis pendant deux heures durant lesquelles Crespo avait apporté des
documents fournis par Guzman et Miriam (la femme de Guzman, Elena
Iparaguirre). Cette version a été confirmée par trois autres informateurs. Crespo lui
ordonna alors de « ne plus faire voler les ponts » jusqu’à ce qu’ils obtiennent la
libération de Guzman.
En 2007 Camarade Julian est arrêté et Crespo devient son avocat. Il le visitait en
prison et lui donna des fiches pour que les prisonniers du SL signent leur adhésion
afin de pouvoir inscrire le Movadef. Julian est la personne qui aurait permis a
Crespo et Fajardo de rencontrer Artemio. La preuve du lien entre ce dernier et le
Movadef vient du fait que Crespo se présenta également comme son avocat. En
2007, le chef d’organisation du Movadef, Olortegui Crispín aurait également
rencontré les chefs terroristes du Huallaga.
56 Des écoutes téléphoniques dans ladite région aurait permis de corroborer
l’existence d’un lien entre Artemio et le Movadef notamment des communications
entre Julian et Artemio. Ce dernier aurait confié a Julian qu’il fallait recueillir des
signatures pour le Movadef, « un organisme dirigé par le docteur Fajardo ».
Le dossier d’enquête détaille plusieurs interceptions téléphoniques notamment
suite au refus du JNE en novembre 2011 d’accepter l’inscription du Movadef entre
Crespo et Fajardo qui parle des directives données par Iparaguirre sur la conduite à
suivre. Plus rocambolesque, il est également mentionné de nombreux appels
effectués depuis la prison de Chorillos par une dirigeante du SL, Victoria Trujillo à
Crespo, par rapport au thème de la non inscription. Une parenthèse : cela semble
normal que des prisonniers puissent avoir un portable et passer des coups de
téléphones à l’extérieur, cela pointe du doigt le manque de mesures de sécurité
promises par le Président de la République qui annonça pendant sa campagne les
blocages des communications possibles depuis les prisons puisqu’il a été prouvé que
la plupart des crimes de délinquance commune étaient organisés et dirigeaient
depuis les centres pénitentiaires.
Une dernière information pour le moins contestable est donnée sur des réunions
entre les leaders du SL et les avocats Crespo et Fajardo, selon un rapport de
l’Institut National Pénitentiaire. Si effectivement ils sont les avocats de la plupart des
anciens chefs du SL, rien d’étonnant à ce qu’ils se réunissent.
Au mois d’avril, El Comercio publie six autres articles sur le thème, en répétant
certains arguments déjà exposées dans La Republica, notamment celui de l’appel
téléphonique entre Victoria Trujillo, membre du comité central de SL et recluse
dans la prison de Chorillos avec Crespo par rapport à la conduite à tenir suite au
rejet du JNE. Elle demande à Crespo d’apporter la résolution du JNE à Guzman et
ce même document a été retrouvé dans la cellule de Guzman41. Ce fait était déjà
détaillé dans un précédent article quelques jours auparavant alors qu’il est présenté
comme élément clé dans la décision de la procureur Wendy Calero d’intégrer dix
41 “Procureur dénonce a Guzman pour diriger les actions du Movadef depuis la prison”, El Comercio, 26 avril 2014 57 membres du SL dans l’accusation judiciaire formulée contre les membres du
Movadef42.
On voit donc que malgré la volonté du coté de La Republica de confier la
couverture de l’opération à une journaliste d’investigation, il apparaît déjà de
nombreuses failles dans le propre dossier d’enquête, ce qui aurait nécessité un recul
critique un peu plus accru, et une retenue plus visible avant de vendre l’information
du lien entre Artemio et le Movadef comme totalement corroborée. Si
effectivement, il s’agit d’un document de la Police antiterroriste et que les
journalistes sont bien obligés de croire leurs sources, quand elles sont recoupées, il y
a déjà eu des précédents, tels que des fausses affaires répandues par les forces de
l’ordre. Sur un thème aussi sensible que celle du ‘terrorisme’, la prudence
journalistique est de mise. Mais le journal est enclint naturellement à suivre la ligne
du gouvernement ce qui réduit le champ possible de la critique. El Comercio quand à
lui, « gonfle » l’information à propos, en évoquant des chiffres non vérifiés et en
attisant, encore une fois, la peur que représente le Sentier Lumineux au sein de
l’opinion publique pour publier des papiers qui ne sont qu’une malformation de la
vérité.
2) Le lien entre Artemio, Guzman et le Movadef érigé comme preuve de la
volonté de reprendre les armes
Tous les articles écrits postérieurement à l’opération Perseo ont vocation à
rendre plausible, logique et inéluctable le retour du Sentier Lumineux « endormi »
vers la lutte armée. A cet effet, il est mis en avant dans la mesure du possible, la
sournoiserie des membres du SL et surtout du Movadef pour faire croire à une
stratégie pacifique, en demandant une « solution politique », quand il s’agit en réalité,
selon la presse d’une vaste supercherie destinée à tromper l’État et la démocratie.
Cela est tout à fait corroboré dans El Comercio et dans une moindre mesure, dans La
Republica.
42 “Abimael Guzman a revisé l’appelation du Movadef présenté devant le JNE”, El Comercio, 19 avril 2014 58 El Comercio a recours à par exemple recours à une chute d’article brutale et
inquiétante. La journaliste Rocío La Rosa se pose la question de la nouvelle stratégie
employée par le Movadef après l’échec de sa demande d’inscription légale comme
parti politique. Et la source policière de répondre « de manière implacable » : « Ils allaient
attendre que les conditions soient de nouveau réunies pour reprendre la lutte armée » 43 .
Evidemment, aucune preuve ne vient étayer cette affirmation, provenant d’une
source policière anonyme.
D’ailleurs selon El Comercio, c’est l’État le grand responsable, puisqu’en
acceptant de laisser sortir de prison ou en autorisant des bénéfices pénitentiaires
tout au long des gouvernements successifs depuis la sortie du fujimorisme, de
Valentin Paniagua à Alejandro Toledo, avec la promulgation de décrets, cela a
favorisé la libération de nombreux militants du SL 44 . Or, la libération des
prisonniers signifie forcément que ceux-ci vont se rattacher à la lutte. 3400 anciens
prisonniers de SL sont ainsi sortis de prison entre 2000 et 2011. « Nous furent bien
innocents et bien confiants, nous avons cru comme évident un fait qui n’était pas corroboré :
Abimael Guzman ne s’est jamais rendu et chaque mouvement qu’effectue quelqu’un en guerre fait
partie de cette guerre »45.
De nombreuses références à la reprise de la lutte armée apparaissent dans
différents articles d’El Comercio, notamment lors de la description de la réunion de
2008 (cf grand B), qui est une preuve fausse. Les citations attribuées au propre
Crespo sont publiées telles quelles : « Le Plan de 2008 devait être différent, se concentrer sur
l’objectif de sortir les camarades des prisons pour continuer la lutte armée » peut-on lire.
Ou encore un encadré faisant allusion aux actions du Movadef : « les autorités
affirment que ce qui se connaissait jusqu'à présent du Movadef n’était que 5% de son action. Les
documents saisis pendant l’Opération Perseo vont aider à percer le reste »46
43 “Le Movadef recevait des directives d’Abimael Guzman selon les interceptions téléphoniques”, El Comercio, 11 avril 2014. 44 “La passivité de l’Etat a permis les avancées de la stratégie sentiériste”, El Comercio, 13 avril 2014. 45 Citation de Marco Ibazeta, ancient président de la Salle pénale Antiterrorisme parue dans El Comercio. 46 “Procureur dénonce Guzman pour diriger les actions du Movadef depuis la prison”, El Comercio, 26 avril. 59 Tout est rédigé pour faire croire à la théorie du complot, et surtout sans
s’appuyer sur des preuves réelles.
La Republica de manière moins évidente, tombe aussi dans ce travers, en
« enflant » dans son contenu ce qui a trait au Movadef. C’est ainsi qu’elle consacre
une page à alarmer la population sur le fait qu’un des dirigeants « en fuite » n’est
autre que Sermin Trujillo, un membre du SL qui avait participé à l’assassinat, en
1992, d’un colonel. La journaliste d’investigation s’appui sur des sources policières
anonymes pour illustrer que c’est un des fugitifs les plus dangereux puisque « c’est un
combattant capable d’organiser des cellules armés. Il en a déjà l’expérience »47.
Par la suite, le traitement de l’information liée au Movadef passe à la section
policière, et la Republica va même jusqu’à publier une information sur « la campagne
internationale de discrédit de l’Opération Perseo » 48 . On retombe dans le complot
communiste international développé par la presse lors de l’avènement du SL dans
les années 80. Cette information proviendrait de messages qui circulent sur les
réseaux sociaux des bases du Movadef en Bolivie, Argentine, Chili, Mexique, France
et Suisse. Le caractère alarmant et le ton de l’article est tout à fait caractéristique
d’une volonté de gonfler l’information, qui se veut alarmante. Les sympathisants du
Mouvement auraient envoyé des messages de soutien et demanderaient la libération
immédiate des récemment mis en garde en vue. Cela permettrait de montrer le degré
de militance internationale atteint par le Movadef, un espèce de réseau terroriste
dont la ministre des Relations Extérieures, Eda Rivas annonce une prompte mise en
observation.
B) La dénonciation de l’opération quasiment censurée par la presse de prestige
Suite à l’opération Perseo et malgré le choix des journaux de prestige de s’appuyer
sur le dossier d’enquête, certains analystes et experts sur les questions de terrorisme
ainsi que certains journalistes comme Gustavo Gorriti dénoncent très vite les
dessous de l’opération et surtout son objectif politique : réveiller la peur qu’inspire
47 “Un fugitif du Movadef est accusé d’avoir tué un officier de la Dincote”, La Republica, 48 “Ils détectent une campagne, à l’extérieur pour libérer les dirigeants du Movadef”, La Republica, 18 avril 2014. 60 tout ce qui a trait au Sentier Lumineux pour ériger le Movadef en organisation
stratégique de retour vers la lutte armée. Le plus préoccupant est le manque de recul
critique de la presse, qui ne montre aucune volonté de critiquer cette opération
revendiquée par le gouvernement comme une ‘victoire’ vis a vis d’ennemis qui ne
sont absolument pas reclus dans la clandestinité et qui s’appuient sur des preuves
très contestables.
1) Mensonge ou désinformation. L’argument d’une rencontre a 100 000
soles qui n’a jamais existé
Le 16 avril de cette année, la journaliste Gustavo Gorriti, qui dirige la revue IDLReporteros consacré au journalisme d’investigation, publie une colonne sur son site
web49, qui sera reprise dans la revue hebdomadaire « Caretas » en montrant du doigt
la Une de El Comercio qui publie sur trois lignes, le même jour une supposée
citation de Alfredo Crespo, l’avocat de Guzman : « Il faut appuyer nos
camarades pour que la lutte armée ne cesse pas ». En page 2-3, un long article
est consacré à expliquer comment les dirigeants du Movadef auraient reçu de
l’argent en effectif de la part des « terroristes » armés du Haut Huallaga (faction
armée fidèle au Pensamiento Gonzalo) notamment lors d’une réunion le 14 avril
200850. Crespo et Fajardo auraient voyagé sous le pseudonyme de ‘Lucas’ et Bartolo
pour se réunir avec Artemio qui leur auraient donné 100 000 euros destinés à
poursuivre les activités du Movadef. Fajardo, selon plusieurs témoignages
d’informateurs aurait été logé dans un hotel de Tingo María, appelé ‘La Muralla’.
Or, Gorriti réitère que cette supposé réunion n’a en effet jamais eu lieu et
que le propre Ministre de l’Intérieur de l’époque, Walter Alban avait demandé à des
agents spéciaux de la Dircote de vérifier la possibilité de sa tenue. Après avoir
recroisé les informations nécessaires, il a été prouvé que non, cette réunion, décrite
avec force détails par des « informateurs n’a jamais eu lieu. Et Fajardo ne s’est
49 Désinformation, Quand se propage comme prémisse d’enquête une information fausse, IDL Reporteros, 16 avril 2014 (https://idl-­‐reporteros.pe/desinformacion/) 50 “Les avocats d’Abimael ont solicités de l’argent à Artemio pour reprendre la lute armée”, El Comercio, 16 avril 2014 61 jamais trouvé dans l’hotel du Huallaga puisqu’il se trouvait le meme jour en visite à
la prison de la Base Navale, en visite avec son client, Abimael Guzman.
Et pourtant elle est reprise par la Une d’un des plus grands quotidiens
nationaux, se lamente Gorriti, comme s’il s’agissait d’une information nouvelle. Au
passage, le journaliste en profite pour critiquer la décision du journal d’avoir fermé
son unité d’investigation, quelques semaines auparavant. Mais ce n’est pas le plus
grave.
L’argument de cette réunion au cours de laquelle 100 000 soles en effectifs
auraient été remis directement entre les mains des avocats de Abimael Guzman,
Alfredo Crespo et Manuel Fajardo est si romanesque, si pratique comme supposée
« preuve », qu’elle est aussi utilisée par La Republica. Le 11 avril, l’article de Doris
Aguirre où sont censés être exposé les arguments sur lesquels se sont basés les
détentions pour accuser les leaders arrêtés, il est question d’une réunion avec une
remise en main propre de 100 000 soles citée dans le chapo de l’article, puis dans
son développement. Bien que le jour exact ne soit pas précisé, il s’agit bien de la
même réunion « d’avril 2008 », au cours de laquelle de l’argent aurait été échangé
entre Artemio, leader des membres du Haut Huallaga et ceux du Movadef.
Une volonté explicite de désinformer ou une erreur dans le recoupage de
l’information, dans tous les cas il s’agit d’une faute journalistique très grave.
De plus, cette réunion sera utilisée de très nombreuses fois comme argument
valide pour justifier les liens que les membres du Movadef entretiendraient avec les
terroristes armés. Car au delà de ce qu’elle prouverait au niveau du financement par
trafic de drogues, les gens identifient rapidement aussi cette faction armée avec le
fait que les propres membres du Movadef auraient également pour idée de
reprendre les armes, autrement dit une sorte entraide entre combattants d’une même
lutte. Or, rien n’est moins vrai.
Il est donc ici préoccupant de constater l’absence totale de respect des règles
journalistiques les plus élémentaires : le respect de la vérité. Car Si l’article de La
Republica, ou de El Comercio de suite après l’opération peuvent être de bonne foi,
étant donné que cette supposé preuve faisait partie du dossier d’enquête, il n’en va
pas de même de ce qui a pu être publié après la mise au point de Gorriti, lu par tous
les journalistes.
62 Et le fait est que postérieurement à l’écriture de sa colonne d’opinion, la
réunion est utilisée, de manière réitérée, sans qu’aucun démenti ne soit jamais publié
ou sans que le lecteur soit jamais mis au courant de la fausseté de cette information.
Au delà de ces questionnements, cette fausse réunion permet également de
douter de la solidité des preuves de l’enquête judiciaire, essentiellement basée sur
des témoignages d’informateurs provenant des files de membres du Sentier
Lumineux repentis et d’écoutes téléphoniques.
2) Une opération « psychosociale » : un changement de stratégie dans la
lutte ‘antiterrorisme’ qui dérive en dangereuse manipulation de l’opinion
publique
Jusqu'à l’opération Perseo, la stratégie de lutte antiterrorisme du
gouvernement de Ollanta Humala suivait une logique basée sur le travail
d’espionnage, notamment dans le Vrae et le Haut Huallaga, et en n’excluant pas les
actions armés51 mais en la combinant avec des mesures destinées au développement
socio-économiques de la zone, puisqu’elle englobe certaines des régions les plus
pauvres du Pérou, comme Huancavelica, Ayacucho…etc.
Cette stratégie avait porté ses fruits notamment en février 2012 avec la
capture d’Artemio vivant dans le Haut Huallaga ce qui avait permis le quasi
démantèlement de son organisation. En 2013, l’Armée a également abattu deux
chefs « terroristes » opérant dans le Vrae, Alipio et Gabriel, de la faction des Quispe
Palomino, ce qui a signifié également un changement dans l’équilibre des forces qui
régissait la région jusqu'à présent puisque c’est l’Etat qui a repris l’initiative,
obligeant les éléments terroristes a se replier et se mettre sur la défensive.
L’opération Perseo, revendiquée comme une action antiterroriste par le
gouvernement signifie un changement de tactique tout à fait impromptu et
surprenant, et surtout contraire à l’esprit de rationalité qui régissait jusqu’à présent
cette lutte.
Pour Gorriti, à propos de la stratégie de lutte antisubversive
51 Dans le Vrae, l’Armée est charge de l’action antiterroriste alors que la Police s’occupe de la lutte contre le narcotrafic. 63 « si les choses marchent bien, tu as une stratégie propre [comme c’était le cas pour le
gouvernement de Humala ], tu la continues, tu l’approfondis, tu améliores tes méthodes, tu les
amplifies, car tu sais qu’elles vont être un succès à long terme […] mais au lieu de cela ils changent
la donne, peut être face à la faim de réussites face aux autres problèmes politiques ». Il explique,
en tant qu’expert sur les questions de sécurité qu’il ne saisit pas la rationalité qui
sous tend l’opération Perso « je le vois comme un acte d’auto sabotage du gouvernement, c’est
se tirer une balle dans le pied ! ».
Le presse quand à elle, entend démontrer l’existence de la relation entre le
Movadef et la faction d’Artemio, en ayant recours à de fausses preuves, contenues
dans le dossier d’enquête mais qui auraient pu faire l’objet d’une recherche
journalistique, d’une analyse permettant de ne pas publier des informations non
corroborées ou déjà déclarées comme fausses dans d’autres médias. Notamment en
ce qui concerne la réunion mentionnée de 2008, une recherche rapide ou un accès à
des sources policières informées aurait permis d’éviter qu’elle soit reprise sans arrêt
comme une preuve de poids alors qu’il s’agissait en réalité d’un mensonge.
Pour Gorriti
« les journaux ont suivi ce qu’a fait l’enquête du gouvernement et l’enquête du gouvernement s’est
appuyé sur ce que voulaient les journaux, une opération je crois de guerre psychologique ou ce qu’ils
aiment appeler ici un « psychosocial » ou guerre d’action psychologique au sein de laquelle pour faire
la démonstration de la relation entre Artemio et le Movadef en fin de compte des preuves ont été
falsifiées et il a été utilisé de faux témoignages ».
Pour cela le gouvernement a compté sur le fait que tout ce qui a trait au
Sentier Lumineux dans l’opinion publique depuis la fin du conflit interne a tendance
à prendre des proportions qui n’illustrent pas toujours une concordance avec la
réalité. L’Opération Perseo a joué sur la peur de la population, l’a exploitée pour la
transformer en un consensus commun, et de ce fait a récupéré des bénéfices
politiques acquis de manière plus que questionnable.
64 4) Un contexte social et journalistique défavorable à la mise en valeur de
l’esprit critique face aux évènements en lien au SL
Une chasse à la sorcière injustifiée, c’est ce que Gorriti utilise comme métaphore
pour parler de l’Opération Perseo. Pour expliquer alors une telle adhésion de la part
des journalistes ou en tout cas dans ce qui est publié au sein des deux journaux de
prestige par rapport à une opération de ce type, plusieurs explications sont avancées.
D’abord, aussi étonnant que cela puisse paraître, le manque de connaissance
des propres journalistes sur ce qu’est réellement le Sentier Lumineux permet
l’existence et la persistance de confusion voire d’éléments mensongers dans leurs
articles. En effet, la différence entre ce qu’à représenté le SL dans les années 80 et
90 et le SL d’après 1993 n’est pas bien établi dans la presse. Or, comme nous l’avons
vu précédemment, la différence est de taille, mais soit elle est minimisé, soit elle est
complètement ignorée. Clarifier les différences à la fois idéologiques et politiques
entre les différents Sentier Lumineux, à la fois historiques et géographiques
permettrait au lecteur d’avoir une vision plus précise et de savoir à quoi exactement
il est fait référence. Ce manque de connaissance est palliée par une exagération des
faits, un recours au « sensationnalisme », au « spectaculaire » dont parle Peralta car
elle permet ainsi de faire peur à la population, de diaboliser le Movadef, et comme
on dit dans le jargon journalistique « de vendre du papier », car c’est un type
d’information qui attire l’œil du lecteur.
Additionné à la peur qu’inspire tout ce qui a trait à Sentier Lumineux dans
l’opinion publique péruvienne, les éléments sont réunis pour que les faits véritables,
le véritable lien qui existe en Guzman et le Movadef, la véritable logique du groupe
d’Artemio, la volonté de s’inscrire dans le système électoral ne soit pas décryptés de
manière rigoureuse et sérieuse.
Un autre élément qui vient s’ajouter concerne, selon Gorriti, la « pensée
profondément réactionnaire de la plus grande partie des directeurs de publication ».
Dans le cas de La Republica, il est de notoriété publique que le journal suit la
ligne du gouvernement. Depuis la campagne de Humala en 2011, il a commencé à
faire campagne pour le candidat nationaliste et par la suite il ne s’est pas illustré pour
65 être très critique envers le gouvernement, mis à part lorsqu’un scandale, ou de
corruption ou d’ordre politique (Cornejoleaks en 2014) vient entacher son image.
En tout cas, la Republica est réputée être indulgente avec le chef de l’État et
ses politiques 52 en règle générale et en ce qui concerne l’Opération Perseo, le
directeur a suivi cette ligne d’adhésion au gouvernement, en applaudissant les
captures et en participant de l’euphorie de la victoire contre le terrorisme. On
retrouve le « sensationnalisme » exposée par Peralta qui correspond tout à fait à ce
cas de figure.
Peralta dit que :
« les journaux de référence se caractérisent par la légitimité historique de ceux qui en sont
les chefs […]. Il fait partie d’un vaste clan familial avec de vastes influences politiques et des
projections économiques au sein de son média. […] Du a ce role central et déterminant, le pouvoir
de décider l’orientation d’un journal d’élite dépend d’une structure verticale qui se concentre dans la
direction ».
Pour le cas de La Republica, Gustavo Mohme Seminario, directeur du journal
est le fils du légendaire journaliste Gustavo Mohme Llona,. Et surtout, plus
intéressant encore, Peralta ajoute que
« les valeurs, représentations et conduites qui régentent la vie de ce type de journaux ont été
intériorisés sans etre remis en question par les chefs de rédactions ou les journalistes ».
Sans adhérer pleinement à cette maxime qui occulte le libre arbitre et les
propres luttes d’intérêts des journalistes pour pouvoir immiscer leur opinion et leurs
points de vue dans des articles, cette observation conserve cependant une grande
part de vérité.
52 Rappelons que Humala a effectué un virage à droite politique tout à fait
impressionnant bien qu’ayant été élu avec un programme de gauche, ce qui a
contribué à l’éloignement progressif de tous ces alliés politiques les plus à gauche de
l’échiquier politique, ceux la même qui avaient été les plus actifs pendant sa
campagne. 66 Gorriti ajoute un autre élément en disant que :
« n’importe quelle chose qui soit SL, c’est la déclaration de haine, c’est le pire, et c’est la réaction
simplement phobique et les gens qui pensent différemment ne parlent pas parce qu’ils ont peur » .
Dans cette phrase, il existe donc un dernier élément à prendre en compte,
c’est qu’au delà de la peur viscérale inspirée par l’organisation SL puisque rappelant
tout le passif du groupe en termes de morts et de destructions au sein de la
population, est la peur même des journalistes d’être assimilés à des partisans du
terrorisme, à être qualifié comme le dit Gorriti de « pro-terruco » 53 . Malgré
l’anachronisme potentiel de cette accusation, elle est toujours en vigueur, au moins
dans l’imaginaire collectif des journalistes et face aux concurrents. Il ne faut pas
oublier qu’un certain nombre de journalistes présents dans les différents rédactions
ont couverts le conflit armée interne (Edmundo Cruz, Angel Páez notamment) et
dans un journal comme La Republica, réputé être de gauche l’accusation peut surgir
et décrédibiliser d’emblée toute tentative d’opinion divergente.
C’est pour cela qu’a part quelques chroniqueurs connus (Raul Wiener, Carlos
Tapia, Gorriti), le traitement informatif est aussi le même. Il existe donc peut être
une autocensure de la part de « ceux qui savent » dans les journaux, qui se sachant
en minorité et exposés à la critique ne préfèrent pas s’aventurer sur ce terrain
glissant. Carlos Tapia souligne que notamment Edmundo Cruz ou Paez n’ont
pas écrits les articles faisant référence au Movadef dans La Republica. C’est Doris
Aguirre, de la section investigation qui s’est chargée d’assumer ce rôle, puis plus tard
les journalistes de la section policière.
C) La remise en liberté des « mis en garde a vues » : un tollé général illustratif du
bluff de l’opération Perseo
Après trois mois de relatif calme médiatique par rapport au Movadef, le thème
revient sur le devant de la scène lors de la sentence des juges du « Colegiado F » de
53 ‘terruco’ est un mot d’argot très utilisé au Pérou qui signifie ‘terroriste’ 67 la Salle Pénale Nationale en charge de se prononcer sur le maintien en garde à vue
de 6 des membres du Movadef arrêtés lors de l’Opération Perseo.
En avril dernier, sur les 34 capturés, seuls Alfredo Crespo, avocat de
Guzmán, Carlos Gamero, sous secrétaire des thèmes légaux, Olmer Apac Vega,
Walter Huamanchumo, Fernando Olortegui Crispin et Cyndi Raimondi (étudiante)
sont placés en garde à vue. Tous les autres avaient été placés sous comparution
restreinte et assignation à domicile.
On pouvait déjà constater un décalage entre la grandiloquence de l’annonce
des arrestations et le fait que seulement 6 des accusés aient été placés en garde à vue.
Le 5 aout, tous les accusés sont relâchés. Il ne s’agit pas d’un verdict sur le
fond de l’affaire mais les juges estiment que les conditions à remplir pour
condamner les suspects à la prison préventive ne sont pas remplis. Il faut rappeler
que pour pouvoir faire en faire l’objet il faut présenter des preuves indiquant que les
suspects sont susceptibles d’entraver la bonne marche de l’affaire et de la justice ou
sont potentiellement capables de s’enfuir du pays.
1) Pour faire concorder la libération des accusés avec un réveil de la menace
terroriste, les journaux s’en prennent aux juges
Cette sentence, comme le souligne un Augusto Alvarez Rodrich prudent mais
critique, dans une colonne d’opinion publiée dans La Republica, le lendemain du
verdict, va à contre courant à la fois de la volonté de l’opinion publique et surtout
du gouvernement. En cela il l’a relève comme un élément positif puisqu’elle « fait
passer la loi avant la politique ». En effet ce verdict fait se dégonfler comme un ballon
de baudruche la grandiloquence de l’annonce et de l’opération en elle même,
annoncée comme un évènement de grande envergure puisque les juges estiment que
les preuves présentés par le Ministère Public telles que les déclarations des
informateurs ne sont pas suffisamment étayées et recoupées.
La Republica, au niveau des articles de la section politique, dont la rédaction
est confiée au journaliste de la section judiciaire, au contraire de la retenue et de la
distance critique montrée par le chroniqueur, continue dans la logique qu’elle avait
développé jusqu’à présent et considère que c’est une décision grave, puisque les
68 juges ont décidé de ne pas valoriser les preuves, et laisse sous entendre que c’est une
décision irresponsable. En Une du journal, on peut y lire « Le Pouvoir Judiciaire,
véritable passoire » ( !) et dans l’accroche du premier papier « un jugement très critiqué
par les hautes autorités du pays, y compris par le Président Ollanta Humala »54.
Le journal a recours à l’opinion du procureur Julio Galindo, de l’ex président
de la Salle pénale Antiterrorisme, deux personnages contestés et bien sur du
président de la République. En se donnant au jeu du gouvernement, la Republica se
décrédibilise en allant très loin, avec des citations du haut mandataire qui frôlent
l’atteinte à l’indépendance des pouvoirs et qui ne font qu’illustrer et confirmer le
caractère surfait de l’Opération Perseo.
Humala exprime sa non conformité avec « certains jugements complaisants avec ce
type de personnes [les terroristes] qui au final ont permis qu’à certains moments le pays entier ait
vécu dans l’angoisse et l’insécurité produits de l’insanité de ces cohortes de terroristes », et ceci le
lendemain de la rendu du verdict.
Ou encore : « il y a un énorme effort que la Police a effectué pour enquêter. Ce furent des
mois d’enquête, de recueil d’informations. Il y a eu des dénonces de procureurs en même temps. C’est
pour cette raison nous sommes préoccupés de voir que cet effort de la Police et du Ministère Public
puisse n’avoir servi à rien ». Comme le dit Rodrich, plutôt que de demander aux juges
de « réfléchir » sur leur sentence, il serait plutôt du coté de la Police et de
l’accusation de se demander pourquoi les preuves présentées n’ont pas été retenues
comme suffisantes.
El Comercio s’inscrit totalement dans la même démarche, en critiquant le
jugement, qualifié de « surprenant » et accusant les juges de « saboter » l’enquête, ou
pire encore de « mettre en danger la société péruvienne en remettant dans la rue ces accusés de
terrorisme »55. La « panique morale » est à son comble. L’emphase mise sur le danger
que représente cette sentence est multiplié par le vocabulaire utilisé : « actions
sanguinaires », « tentacule », « organisation criminelle que le pays a payé de son
sang », « menace sentiériste ». C’est tout à fait le vocabulaire du monstre que
représente Sentier Lumineux, et qui avait dominé dans la presse de prestige pendant
54 “Dirigeants du Movadef sortent de prison malgré les preuves présentées par le Ministère Public”, La Republica, 6 aout 2014. 55 “La Terreur dans la rue” Edito, El Comercio, 7 aout 2014 69 le conflit armée. On cherche à faire renaitre le monstre, réveiller la peur, et ainsi
attiser les tensions.
Deux jours après la sentence, la Republica reprend les paroles du Président du
Pouvoir Judiciaire, Enrique Mendoza qui annonce avec grand fracas que les deux
juges responsables de la sentence feront l’objet d’une enquête de « caractère
urgent ».
Tous les acteurs de l’opération, Police, Ministère Public déplorent ce
jugement qui risque de compromettre tous les efforts investis pour arrêter les
dirigeants du Movadef 56 et cette indignation est partagée par la majorité des
autorités du pays, comme le président du Pouvoir judiciaire, le Défenseur du
peuble…etc
L’effervescence est à son comble. Et les critiques contre le sentence rendu
par Victor Valladolid Zeta et Olga Lidia Inga Michue et Ana Mirella Vasquez
Bustamante est quasiment unanime au sein des pouvoirs politiques, du pouvoir
judiciaire et des policiers ainsi que des procureurs. Le Président du pouvoir
Judiciaire réclame un enquête immédiate sur les trois magistrats tandis que la
procureur anti terroriste et le Ministère Public font appel de la sentence.
2) Une dangereuse inclinaison vers la démagogie qui met en danger
l’indépendance de la justice
En réponse aux critiques surgies de tous les fronts et plutôt que de défendre des
juges qui ont soutenu leur travail sur des fondements uniquement juridiques, le
président du Pouvoir Judiciaire annonce que les juges responsables du « Colegiado
F » de la Salle Pénale National, responsables de la sentence vont être « déplacés »
vers leurs charges juridictionnelles d’origine, selon un décision du Conseil Exécutif
du Pouvoir Judiciaire.
Au lieu de féliciter l’indépendance dont ont fait preuve les trois magistrats, ils
sont donc l’objet d’une punition, qui n’est même pas assumée par Enrique
56 “L’enquete policière révélait le lien qui existait avec les dirigeants du SL en prison”, La Republica, 7 aout 2014 70 Mendoza, qui prétend que cette décision obéit à un renouvellement annuel de la
Salle pénale.
Si la Republica souligne l’absence de coïncidence dans cette décision, elle
indique qu’elle répond à la « vague de critiques contre le jugement qui a disposé de la libération
des six membres du Movadef » et donne une largue place à la version indignée de la
procureur chargée d’écrire le dossier d’enquête, Wendy Calero qui déplore la non
prise en compte de toutes les preuves recueillies. 57 La majorité des opinions
recueillis dans les articles autant de la Republica que El Comercio sont ceux qui étaient
contre le jugement rendu et beaucoup se félicitent de la sanction (qui ne se reconnaît
pas comme telle) imposée aux juges : le Procureur de la Nation, Carlos Ramos, le
procureur antiterrorisme, Julio Galindo, le chef de l’Institut National Pénitentiaire,
José Guadalupe…etc
La seule instance qui expriment son appui aux juges est l’Association
Nationale de la Magistrature et a aucun moment il n’est état d’un article qui irait à
l’encontre de la critique unanime contre les juges, en se demandant si effectivement
ils ont eu raison de relâcher les accusés au vu du peu de preuve. La Republica
renouvelle même son rejet de la sentence dans un Edito du 12 aout : « Il est aussi vrai
que la libération des chefs du Sentier Lumineux a généré une juste indignation publique. Comme
l’a deja exprimé ce journal la sentence n’a pas rendu mérite au travail d’interceptions
téléphoniques..etc ».
L’Opération Perseo, de manière plus vive que lors de la tentative
d’inscription a incité les journaux à devenir les « caisses de résonance » du
gouvernement et à abandonner tout esprit critique face à un évènement qui encore
une fois pour s’agir d’un thème lié au Sentier Lumineux, a polarisé les opinions en
une approbation légitimée sur tous les fronts. Bien qu’encore une fois l’on retrouve
de la part de La Republica une volonté de rigueur et de conformité avec la réalité plus
visible que pour El Comercio, elle tombe elle aussi dans les travers de la déformation
journalistique, en ne vérifiant pas les informations fournies par la Police et en
restant aveuglée par un désir de saluer le travail de Humala face à la montée d’un
57 “PJ change les juges qui ont liberé les dirigeants du Movadef”, La Republica, 8 aout. 71 nouveau terrorisme, menace très relative et jusqu’à présent non prouvé de manière
fiable.
CONCLUSION
Publier aujourd’hui des articles en donnant l’impression que l’on parle du
Sentier Lumineux prônant la lutte armée comme c’était le cas dans les années 80 n’a
pas de sens, car historiquement il contient une fausseté intellectuelle qui semble
seulement servir à attiser la peur de la population envers tout ce qui peut être lié de
près ou de loin au Sentier Lumineux. Cela empêche tout débat démocratique, porte
atteinte à la vérité journalistique, et d’autre part dissimule la gravité de la situation
des partis politiques désorganisés et très faiblement institutionnalisés, alors même
qu’ils devraient être l’arme démocratique majeure dans le combat idéologique qui
devrait se développer contre le Movadef, combat logique et tout à fait légitime.
Au contraire, les journaux de référence cherchent à tout prix à maintenir une
image de « guérilla » et de « lutte armée », en unissant dès que possible et sans grand
souci de précision, le Movadef au SL ou a la faction armée du Movadef dans le Haut
Huallaga. Les médias de référence que constituent la Republica et El Comercio , malgré
leur très grand éloignement idéologique, se rejoignent dans cette volonté de créer un
ennemi commun, ennemi de la démocratie, de la société qui doit être combattu, sans
se demander si le combat qu’ils prônent est complètement déphasé et fait appel à
des images et à un imaginaire collectif qui doit être dépassé.
Une image diabolisée et sournoise du Movadef est véhiculée et que ce soit
dans le cas de la démarche d’inscription comme parti politique ou dans le cas de
l’Operation Perseo, évènement spectaculaire qui n’a pas trouvé de détracteur dans
les deux journaux de référence cités, car cela « fait vendre du papier ». Comme le
souligne Peralta,
« Ces médias savent qu’ils agissent au sein d’un marché où l’information d’impact est
l’unique forme d’entrer en compétition avec le reste des journaux et de maintenir un grand nombre
de tirages ».
72 Et puis comme le dit Gorriti, aller à l’encontre de l’opinion répandu, dire que
le Movadef fait preuve d’une volonté honnête de s’établir dans le régime
démocratique, accepter que si, le SL s’est rendu, sont des positions impopulaires, et
qui ne séduisent pas ni les journalistes ni le public.
Nous finissons sur un extrait de l’interview de Gorriti qui s’effraie du
manque de clairvoyance de la société face au désir de SL de négocier et de se
rapprocher de l’existence d’un parti politique normal
« Une des choses qui réellement me surprend, c’est le degré de stupidité qu’il y. Si tu as
l’immense chance, l’immense chance, qu’un mouvement si féroce comme l’était SL dans le passé
décide d’opter pour un changement complet et vers une participation politique et l’unique chose
qu’ ils demandent, c’est négocier, des bénéfices pénitentiaires, ce genre de choses […] et en échange il
est possible de formaliser leur reddition, si tu as la merveilleuse chance de pouvoir gagner la bataille
stratégique, sans verser une goutte de sang, à travers la pure négociation et que au lieu de ca, tu
recules, tu craches, tu dises Vade retro, tu apportes des exorcistes pour éviter cela, cela me paraît
suicidaire, contreproductif dans un pays comme le notre. C’est une immense opportunité pour aider
à terminer avec la pacification du pays, une immense opportunité que n’importe quelle personne qui
a étudié un minimum les problématiques de contre insurrection, sait qu’elle doit être appliquée,
utilisée et non au contraire approuver des idioties comme l’Opération Perseo ».
73 Bibliographie
PERALTA RUIZ, Víctor. “Sendero luminoso y la prensa, 1980 – 1994, la violencia
política peruana y su representación en los medios.” Cusco: CBC; 2000.
CARO, Ricardo, “ Ser mujer, joven y senderista :género y pánico moral en las
percepciones de Sendero Luminoso”
DEGREGORI, Carlos Ivan. “Que difícil es Ser Dios, El Partido Comunista del
Peru – Sendero Luminoso y el conflicto armado interno : 1980-1999” Obras
Escogidas, Instituto de Estudios Peruanos, 2013
GORRITI, Gustavo “Sendero, Una historia de la guerra milenaria en el Peru”
74 Rapport final de la Comission de la Vérité et de la Réconciliation.
Archives de La Republica 2009 – 2010 – 2012 - 2014
Archives de El Comercio 2009 – 2010 – 2012 – 2014
…
Interviews effectuées en aout 2014
-
Pablo Sandoval, anthropologue
-
Carlos Tapia, expert sur les questions de terrorisme
-
Gustavo Gorriti, journaliste d’investigation
-
Agustin Machuca, membre du Movadef
-
Fair Quezada, membre du Movadef
Annexes Annexe 1 - Entrevista Gustavo Gorriti, periodista, aout 2014
Estoy haciendo un trabajo sobre el tratamiento mediático y noticioso que se hizo acerca del
Movadef. Parece que hay un especie de consenso en la prensa diaria para despertar el viejo miedo
que representa Sendero Luminoso y sobre todo una ausencia total de distancia critica sobre lo que es
realmente el Movadef. Quisiera saber como usted analiza la situación. El Movadef es un
organismo generado?
75 -
Para tratar de describir el escenario de la manera más objetiva posible hay
una relación de cercanía entre el Movadef y Sendero, si por supuesto que si,
hay una vinculación entre el uno y el otro, pues si claro, hay una
subordinación de parte de los directivos fundamentales del Movadef, crespo
y fajardo a la dirección de A Guzman y de Elena Iparraguirre, por supuesto
que si. Además de lo cual son abogados defensores de ellos, estan
identificados con sus intereses y están identificados además políticamente. El
movadef para propósito practica dentro de la descripción de lo que ha sido
tradicional e históricamente Sendero, es un organismo generado que esta
destinado a un tipo especifico de acción política como sucedía con todos los
organismos generados, cuando tenia los movimientos barriales, el
movimiento feminista popular cada uno de ellos estaba dirigido a un tipo de
acción política abierta de determinado ámbito
-
Entonces Sendero es Movadef, eso es claro ?
-
No, Sendero no es el Movadef. Movadef esta vinculado con Sendero como
un organismo generado. Y no toda persona que esta en Movadef es de
Sendero. Pero que exista la vinculación a través de la metodología, del
partido, cuando estamos hablando de Sendero estamos hablando de lo que
ellos definan, consideran y hacen funcionar como el Partido comunista del
peru. Verdad ? el partido que es el partido que tiene la organización leninista
que es un grupo mucho más cerrado, elitista, y dentro de eso una
organización mas amplia para una función especifica que es el movadef.
Sobre eso, desde mi punto de vista, no hay ninguna duda . esta le dando
vuelta respeto de eso, es una necedad. Corresponde es. De repente salga la
policía que en un registro de la celda de Guzmán encontramos un
documento sobre la cuestión del JNE, y que lo presentan como si fueran los
Arquímedes del arte policial, es realmente una necedad, pero por supuesto
que si, encima son sus abogados, están discutiendo como el movadef quieren
lograr su libertad, quieren lograr cuestión de amnistía. Que sopresa de que
esta eso allí ? desde el punto de vista de que usan el recurso del estado
peruano, a través de la policía, para lograr ese supuesto tipo de hallazgo
mejor que lo gastan para decir que el agua moja. Digo esto esta establecido, y
76 no se necesita darle más vueltas. Y lo que lo niegan no están diciendo la
verdad. Pero del otro lado, significa la pertenencia del Movadef, incluso
significa la pertenencia de Sendero, el grupo partidario que obedece a
Guzman a Iparaguire, significa algun peligro actual, de insurrección armado,
de terrorismo, de sabotaje , de violencia armada, de asesinato selectivo ?, la
respuesta es claramente NO.
-
Es no ? porque desde los acuerdos de paz ha cambiado el accionar…
-
Hubo un cambio político cualitativo de 180 grados que se dio a partir de las
negociaciones por el acuerdo de paz, en los noventa y que ha seguido, es un
cambio política que asume por parte de sendero en reconocer que han sido
derrotados, derrotados no en un contraste táctico como lo dijo Guzman
cuando recién fue capturado, se refirió a un recodo en el camino sino una
derrota estratégica plena.
Superchería en los diarios, confusión intelectual entre VRAE y Movadef
-
Eso lo reconocieron pero en los medios no se ve ?
-
No se ve y esa allí donde existe la superchería, la muy deshonesta confusión
intelectual que se esta buscando de hacer entre lo que es ahora Sendero que
esta alzado en armas, sendero dirigido por los hermanos Quispe palomino y
con sus acciones fundamentalmente centradas en el VRAE, respeto del
sendero que es dirigido por Guzman, por Iparaguirre, son organizaciones
que tienen un tronco común, un comienzo común pero que son no
solamente diferentes sino enemigas a muerte y donde de un lado, del sendero
de palomino existe la plena determinación de continuar por la via de las
armas, por hacer crecer la alternativa insurreccional de todas las formas
posibles y del otro lado por el lado del que obedece a de dejar de lado por
completo la via de las armas y llevar a cabo un proceso de ingreso dentro de
la legalidad, de la republica buscando terminar con todas aquellos saldos que
han estado vinculados con la guerra, lo que ellos llaman las soluciones
políticas a los problemas derivados de la guerra interna. El un es violento y el
otro es ahora pacifico
77 -
Pero justamente en la operación Perseo se trataba de vincular el
Movadef con la facción de Artemio en el Huallaga, que es otra
facción…
-
Artemio que fue otra cosa, si estuvo levantado en armas pero con una serie
de condicionantes, Artemio esta derrotado, esta en la cárcel, esta sentenciado
y su organización esta destruida, no significa el menor peligro de seguridad ni
nacional, ni regional ni siquiera distrital.
-
Los diarios trataban de mostrar que había un vinculo, que eran
financiados…
-
Los diarios han seguido aquello que hizo la investigación del gobierno, y la
investigación del gobierno seguramente se baso en lo que querían los diarios,
básicamente una operación creo yo de guerra psicológica, o que aca les gusta
llamar un psicosocial o de acción psicológica, en la cual para hacer esa
demonstración de la relación entre el movadef con el grupo de Artemio en
sus postrimerías se falsifico pruebas, se utilizo falsos testimonios
-
Justamente, ese argumento de la reunión del 2008, es alucinante,
porque es usada todavía, en la república ..
-
La usan en la republica, veo que incluso fiscales que deberían ser mucho mas
cuidadosos, en el razonamiento que tienen indican que es una demostración
de múltiples, de varios colaboradores eficaces incluso algunos policías que
han salido a defender esa investigación ahora dicen que los colaboradores
eficaces no mencionan fecha cuando por supuesto las mencionan , bueno yo
he visto los documentos, las declaraciones y por supuesto que las mencionan,
ha sido el deseo el intento yo creo, yo no me explica la racionalidad que hay
detrás de eso
-
De la operación Perseo…
-
Realmente no me la explico. Me parece tan una cosa de auto sabotaje del
gobierno, es dispararse a los pies
-
Porque los victimizan…
-
No solamente eso sino que el gobierno había logrado resultados operativos
muy exitosos
En el Vraem ?
78 -
Primero la captura de Artemio y la demantelación de su organización que
fue un logro notable, realmente. Luego de eso han cambiado la dirección de
la iniciativa en el conflicto hasta determinado momento, toda la iniciativa la
tenia Sendero en el Vraem , y acumulada la fuerza de seguridad acumulan
contraste tras contraste tras contraste.. y aquí con un conjunto de acciones
entre las cuales estuvo el abatimiento de « guillermo », , Alipio y Gabriel,
junto con el de varios otras, y otras acciones menores, hubo varias otras
acciones menores, que les han significado perdidas importantes. Con eso
Sendero ha tenido que replegarse, ponerse a la defensiva, revisar todos sus
mecanismos para tratar de evitar golpes adicionales, de tal manera que en el
Vraem contra los Quispe palomino ese gobierno empezó a ganar la iniciativa.
Entonces no me explico que ha pasado porque si un director estratégico con
algún sentido de todo el asunto de seguridad de la guerra con el mínimo
noción de cabeza política... Es decir tu tienes una trayectoria limpia, hasta ese
momento estas caminado bien, la continuas, la profundizas, mejoras tus
métodos, los amplias, sabes que te van a dar éxito en el largo plazo, tuvieron
contraste significativos, lo de Quepachiato, inmediatamente después de lo de
Artemio, se apresuraron significo un tremendo contraste para las fuerzas de
seguridad, aprendieron, les dieron la vuelta al asunto , empezaron a mejorar,
si hubieran seguido mejorando, afinando esa metodología , entonces los
éxitos hubieran llegado, después salieron con otros problemas con los “narco
vuelos”, inmediatamente hubieron tenido tomar acciones para poder
afrontarlo adecuadamente hubieran tenido buenos resultados, en lugar de eso
cambia la cosa cambia quizá por el hambre de poder tener antes las otras
crisis políticas, el hambre de poner tener supuestos logros y hacen algo que
me recuerda mucho algo que sucedió en la época de Alan García, cuando el
jefe de la policía del Ministro de Interior anuncio que habían logrado destruir
una banda de “pishtacos”. Sabes lo que son los pishtacos ?
El episodio de los pishtacos durante Alan García
79 En la mitologia andina son esos en generales blancos, gringos, que matan a la
gente para sacarles la grasa, y comercializarla en EEUU o en Canada donde
supuestamente es muy deseada.
Si ok
Dijeron eso salía, ese ahora un congresista fujimorista, Octavio Salazar
diciendo que habían logrado esa espectacular captura de “pishtacos”, por
supuesto inicialmente ganó existen los pishtacos, es como que te dijeras
pucha madre , capturaron a Drácula, el Conde de Transilvania, eso es todavía
mejor una banda de pishtacos, y ese dijo que si era cierto y forzó a algunos
de los mejores detectives de la DIRINCRI, tipos especializados en secuetsros
en lidiar con bandas organizadas los forzó a decir que era verdad. Yo fui a
entrevistarlo, absolutamente sorprendido, y vi a esos policías veteranos
haciendo realmente esfuerzos heroicos, de que eso era verdad, cuando tu les
hacia preguntas incomodas, como por ejemplo como era el sistema de
explotación de grasa, como hacían para mantenerla mas o menos que no se
malograra, que pudiera llegar a EEU, como extraían la grasa, te lo podían, te
decían que lo estaban investigando, que era una cosa compleja. Por supuesto
al final la cosa nosotros publicamos algo en IDL reporteros , realmente
conteniendo la risa pero a la vez absolutamente pasmados del dinero
peruano y la carrera de policías respetables se hubiera lanzado así al water, la
carrera de esos policías no se recupero jamás, el ministro se hizo fujimorista
y si mientes por supuesto que te va bien allí.
En este caso te dices han buscado mantenerse una especie de ola de la atención
publica, han bizcado poder como tu no puedes tener goles todos los días en ese
campo, y tienes que ser paciente y esperar, algunas cosas fallan, había necesidad se
estaban cayendo las cosas, una escandaleta aqui, otra escandaleta alla, que esta
abogado, que cornejo, enfin, entonces BOOM, preparan ese operativo Perseo, que
supuestamente la gran cosa, con el poco conocimiento de la gente buscando
realmente meter una mentira dentro de todo eso, cuentan con la ignorancia de los
periodistas, con el pensamiento profundamente reaccionario de la mayor parte de
los dueños, con además el rechazo que existe hacia cualquier cosa que este
vinculado con Sendero una gran parte de la población como para ser esa estúpida
80 casa de brujos, que realmente lo único que ha hecho es un tremendo daño a la lucha
verdadera contra el Sendero
-
Es totalmente contraproductivo ?
-
Es totalmente contraproducente
-
Justamente usted habla de la ignorancia de los periodistas, pero en los
diarios hay buenos periodistas de investigación porque no hay
ninguna manera…
-
Muchísimos tienen miedo que les llaman pro-terrucos, que puedan decir los
del Movadef, se mueren de miedo, eso no tiene que ver con el Movadef. Yo
creo que el Movadef no debe ser legalizado, mientras ellos no hagan
formalmente hagan una renuncia estatutaria y jurada en forma perpetua a
toda forma de violencia, y no declaran perpetua a la democracia y renieguen
de lo que hicieron y pidan perdón, mientras tanto no pueden ingresar
-
No pueden ingresar ?
-
Pero eso no significa ok mientras tanto creo por supuesto en cualquier caso
asi, de una organización derrotado que puede tener una serie de gente que
puede tener una variedad de comportamientos, tienen que estar muy
vigilados, eso esta muy claro, cualquier gobierno que tiene la mínima
experiencia en ese tipo de cosa, saben que hay que vigilar, monitorear,
infiltrar, , seguir, ver en que están …pero eso no significa meterlos en la
cárcel, perseguirlos, o arrinconarlos, no significa negarle la posibilidad de
tener una vida normal
-
Ya bueno acerca de eso yo he revisado un poco los diarios en eso de
2011 2012 cuando buscaron su inscripción, y había un rechazo sin
debate , usted dice que no pueden ser legalizados si no piden
perdon…
-
No, no, y además si no juran rechazan esa cuestión de la lucha armada y
juran su total lealtad perpetua a la democracia, y su abandono de la violencia,
mientras . En democracia debe haber lugar para todos, pero para todos los
que juegan dentro de la democracia, aquellos que consideran que la violencia
por ejemplo, el golpe de estado o la insurrección guerrillera terrorista, es una
forma, esa gente no tiene lugar dentro de la democracia o partidos políticos
81 que tengan ideologías donde hay exclusión racial, basados en el odio por
ejemplo que se pronuncian en contra de los homosexuales y que hay que
erradicarlos, al margen de la posición que uno tenga, no puede ser legal, un
partido que esta en contra de determinado grupo racial, un grupo racial o
cultural, no puede
-
En el caso de Movadef seria la cuestión de la violencia
-
Un partido que postula la violencia
-
Pero justamente si usted me dice me desde el 1992 (1993…) han
cambiado, que el pensamiento gonzalo ha evolucionado, yo quisiera
saber… porque el pensamiento gonzalo es lo que les trae muchos
problemas…porque no se han…
-
Pero el pensamiento, el pensamiento gonalo, que es el pensamiento
gonzalo…
-
Si justamente que es (risas)
El pensamiento Gonzalo
-
El pensamiento gonzalo es el producto de la actividad neuronal que sale del
encéfalo de Abimael Guzman. No es cierto? ese pensamiento esa producción
intelectual ha ido cambiado a lo largo de los anos, de forma realmente
considerable, las cosas que Guzman dedico su energía intelectual para
programar, planear, defender, llevar adelante durante los anos previos a la
guerra y durante los anos de la guerra son una cosa. Aquellas pensamiento
que dedico a partir de la negociación de los acuerdos de paz, de la torta de
chocolate, de la canción de Franck Sinatra de allí en adelante son otra cosa
por completo diferente
-
Porque el pensamiento Gonzalo en teoría es la aplicación del
marxismo leninismo maoísmo, a la realidad concreta del Perú, es lo
que dice Guzmán en la entrevista del siglo…
-
A la situación concreta del perú y a la situación concreta del mundo en el
momento histórico que les toco vivir
82 -
Entonces cual seria la evolución? el hecho de haber dicho estamos
derrotado? porque la referencia a la violencia en el pensamiento
gonzalo es el problema no ?
-
Para ellos, una de las razones que justificaba la existencia de su partido, que
identifica el pensamiento de Guzmán era precisamente el hecho de que
frente al reformismo, lo que llamaban el revisionismo de los soviéticos, y
luego el que se dio de Ya qo Phen, Den Xhiao Ping, todo el grupo que ha
terminado en la dirigencia de la china actual, frente a eso el planteaba el
permanecer sino profundizar la línea radical hiperjacobina de lo que se había
la revolución cultural, y poner como centro absoluto de la actividad del partido
comunista, la lucha armada, volver a las bases históricas del partido comunista
con un partido que conspira para llevar a cabo y generar identificar y acelerar
las condiciones y organizarse para la insurrección armada, llevar a cabo un
cambio social profundo, radical y perpetuo y que luego para evitar los
reflujos revisionistas y burgueses, mantenga una actividad de vigilancia
implacable mediante no una sino muchas revoluciones culturales como hubo
en China, eso era grosso modo el proyecto, lo que llamaban primero el
pensamiento Guía, luego Gonzalo, por supuesto estaba expresada por un
leader, alguien que había identificado muy bien la convulsión precisa, el
alineamiento de las leyes dialécticas, históricas y por supuesto del también de
los grandes cuerpos celestes, había llegado a poder sincronizar todos esos
aspectos en torno a una gran acción, orientada en el futuro de la humanidad,
que iba a empezar a decidirse en los campos de batalla del peru, y que
después que se iba a expandir al mundo entero, eso era el pensamiento
Gonzalo
-
Escalofriante..
-
Entonces cae Gonzalo que era el mas grande marxista leninista viviente
sobre la faz de la tierra , quería decir automáticamente el mas grande hombre
que existía sobre la faz de la tierral porque no se había explorado otros
mundos entonces el cae. Es preso después de ese momento se anula su
liderazgo, y el resto del partido comunista llega a la conclusión de que las
posibilidades de llevar a cabo y de concluir con éxito la insurrección han
83 quedado atrás, entonces cambian de pensamiento entonces las leyes de la
dialéctica, de la historia, de los cuerpos celestes, bruscamente cambia y
empieza la necesidad
-
De integrarse a la política…
-
De llevar a un acuerdo pacifico, hacia una solución de todos esos problemas.
Ha empezar a ver con tranquilidad , a ser en suma todas esas cuestiones que
ellos en el pasado habían considerado como el mas despreciable revisionismo
detestable, penable con un inmediato aniquilamiento pero lo hicieron en
buena hora, unos pueden burlarse mucho sobre la contradicción que
significó pero para el país fue una gran cosa que lo hicieron
-
Si…
-
Una gran cosa, que quisieran convertirse en pacifistas, y tiene tal fuerza, tal
influencia sobre sus seguidores que los convencen , a la inmensa mayoría, y
la inmensa mayoría los sigue.
-
Pero justamente en el Movadef eso quisiera decir que según usted hay
una voluntad honesta de integrarse a la vida política del país ..
-
Yo, digamos si es que hubiera que aplicar algunos de las diferencias de
psicología al aspecto político, yo me proclamaría conductista, es decir
prefiero no entrar a interpretar la piscis profunda de la gente porque pienso
que es imposible, este, hay que tratar de lograr confesiones, pero no siempre
son sinceras, y más bien seguir estrechamente su conducta, a lo largo del
tiempo
-
Y el hecho es que no hubo acciones violentas
-
No las habido, no las habido… y hay otra cosa importante que no es menor.
No en absoluto menor. Gran parte de los que estan en la dirigencia, han
estado encarcelados, una gran parte ha pasado ha pasado 15 20 anos en
prisión, entraron de una manera, muchos de ellos están en la ancianidad,
otros están en las puertas de la ancianidad, otros sencillamente son gente
técnicamente viejos
-
Hay también los jóvenes…
-
Bueno hay una segunda generación, pero digamos quienes están llevando
eso, la dirigencia, es una dirigencia vieja, hay varios casos geriátricos, una
84 cuantidad importante, hay casos de salud, importantes también pero sobre
todo hay una variación global, importante en los conceptos y en la acción
que emerge digamos de este colectivo de viejos, de viejos, esos viejos,
ninguno de esos viejos, como el ayatollah khomeino estan tras las rejas, la
mayor parte de los que desean esos viejos es tranquilidad y paz
-
Pero militan…
-
No van a dejar de hacerlo
-
Es su vida…
-
Son conocidos, su vida, el único que les impide caer en la locura, la
esquizofrenia, por lo menos tu puedes decir que esta siguiendo la línea del
partido , no es cierto, y entonces eso te da un cierto elemento, después de
todo lo que paso en el pasado, todo lo que sucedió, tu agarrar y cambiar así
individualmente seria muy difícil, pero están dentro de un partido, ha tenido
eses inmensos cambios y además están en situaciones personales,
económicas, cuando salen de la prisión, durísimas
-
Esto no esta tomado en cuenta
-
Esta no esta tomando en cuenta en absoluto. Y yo digo, una de las cosas que
realmente me sorprende por el grado de necedad que hay. Es que si tu tienes
la inmensa fortuna, la inmensa fortuna…de que un movimiento tan feroz
han decidido como sendero en el pasado, haya optado por cambiar
completamente, hacia una participación pacifica y lo único que están
pidiendo es negociar, negociar mejoras penitenciarias, ese tipo de cosas, y a
eso le llaman problemas derivados de la guerra, , y a cambio de eso poder
formalizar su rendición, renuncia, a todo etc. si tu tienes esa manera, esa
maravillosa de poder ganar batallas estratégicas sin derramar una gota de
sangre, mediante la pura negociación y todo eso que tu retrocedas, escupas,
digas vade retro, traigas exorcistas para evitar eso me parece suicida,
contraproducente, en todo sentido, solamente me parece explicable que
suceda en un país como este, el territorio donde estuvo el visitador Areche, el
centro de la reacción virreinal en contra de cualquier otro esfuerzo porque
tener ese tipo de reacción…
O sea que es una oportunidad…
85 -
.Es una inmensa oportunidad para ayudar a terminar con la pacificación del
país, una inmensa oportunidad que cualquier persona que hubiera estudiado
lo mínimo de contrainsurgencia democrática, de la salvaje contrainsurgencia
militar no me ocupo, contrainsurgencia democrática los casos mas exitosos
en eso de hecho que una intención bienvenida, que debe aprovecharse,
siempre con cuidado, siempre con vigilancia pero debe aprovecharse, es otra
victoria que se da, la victoria final, de que reconocen su derrota, y no por lo
contrario se saca idioteces como la operación Perseo
-
Pero otra vez yo le pregunto, en los medios que eso de ninguna
manera se refleja…
-
Son ignorantes, de un lado son ignorantes, tu te das cuenta en tu periódico
cuanto lo son y de un lado es eso, del otro lado es la cosa que cualquiera cosa
que sea Sendero, declarar odio, esos solo lo peor, y es la reacción sencillamente fóbica, y la
de gente que piensa diferente, no hablan porque tienen miedo que les digan pro terrucos
-
Porque en las notas que he visto, si básicamente hay un consenso para
decir que el movadef quiere retomar las armas
-
Si por supuesto, es una manera de tratar de llegar a eso, y que todo lo que
están haciendo es un engaña muchachos, etc, tras eso no existe la menor la
menor evidencia, mientras no haya evidencia, guíate por la conducta, vigila,
vigila los síntomas, estate cerca, alerta, pero no mientas no fabricas, no
intentes compartir lo que no existe, no lo utilices como propaganda, porque
una vez que engañes engañes engañes, una vez que tengas los problemas
reales no los vas a ver.
-
Si, por un diario como la republica bueno si comparamos con El
Comercio, no le parece sorprendente que tengan la misma línea de…
-
Porque no quieren que les digan caviares ni terrucos no ninguna cosa por el
estilo, tienen miedo a ese tipo de cosa mínimas, de cosas realmente mínimas,
deberían saber mejor, Castro es un ex miembro del partido comunista, y esta
tan metido en el otro lado, todos son así, Paredes castro fue un velazquista
feroz, apoyando la exportación de periodistas, raul vargas otro más, Mirko
Lauer, no se diga trabajando en la cronica para Velazco, pero este, el miedo a
que le recuerdan eso, el miedo, además es falta de conocimiento
86 -
Pero sobre un tema tan importante
-
Sobre un tema tan importante es una vergüenza que haya esa falta de
conocimiento. Además no les cuesta nada porque suena bonito. Porque
obviamente lo que te estoy diciendo ahora, no es popular, no es popular , Ah
no la gente de Sendero al pozo, y tiren la llave en el pozo, que se pudran
terroristas desgraciados, es la posición de la mayoría, pero si es necesario hay
que estar en posición de minoría, si es que corresponde con la verdad.
-
Porque justamente lo que ha pasado, han removido los jueces, y los
argumentos que decían que la opinión publica reclamaba la
excarcelación….
-
Eso es lo que dice el idiota de Galindo.
-
Si
-
Ese un submental, es realmente tremendo.
-
Pero el presidente del poder judicial lo ha hecho…
-
Pero el presidente del poder judicial es … yo escribo sobre el que me hace
recordad a Medrano y a la gente del fujimorato, es increíble lo que han
hecho. Debería ser removido de su puesto. Pero la cosa es que esta gente de
derecha , como Villa Stein, se ha declarado en contra de lo que ha hecho este
idiota,
-
Y eso?
-
Eso sencillamente para complacer a Humala, porque Humala no tiene
ningún criterio, pesimamente asesorado, no tiene idea de como están las
cosas, da ordenes absurdas, y tiene una serie de chicheros que se encargan y
dentro de la policía la gente que sabe conoce que tiene que subir, cumplir las
ordenes porque los asciendes
-
Porque la excarcelación es una ilustración de esa « farsa », de que no
había pruebas…
-
Los jueces fueron removidos por hacer exactamente lo que debieron hacer.
Es una vergüenza, es iniquidad, eso por supuesto tiene que ser castigados
-
Justo para precisar sobre la relación entre Artemio y el Movadef, hay
pruebas realmente ?
Se mencionaron el viaje de Crespo y de Fajardo
87 -
Eso es falso…
-
Resulta comprobadamente falso
-
Pero hablaron de escuchas telefónicas, de otros testimonios…porque
si se acredita ese vinculo, es grave según usted?
-
Yo creo que no hubo vinculo directo pero luego de un tiempo en que
Artemio repudio a Guzmán, reconsideró y regresó y allí se peleo con los del
VRAE y a partir de ese momento bajo totalmente las cuestiones ofensivas
pero no se entrego porque no quería que lo metan preso entonces mantuvo
su organización como un medio de presión pero básicamente sin atacar,
desde el 2006 y los asesinatos fueron de los que creían que eran traidores en
fin. Este, entonces el declaraba su lealtad a Guzmán pero la diferencia que el
mismo declaraba era que el estaba levantado en armas frente a la posición de
guzman, cuando yo entrevisté a Artemio antes de que caiga preso, hablamos
de eso, pero el decía que estaba de acuerdo con la solución y que quería
negociar, y que había tratado de negociar desde el ano 2001
-
Pero eso no era una posibilidad…
-
No lo dejaron, y de allí cayo preso y se acabo todo
-
Usted ha dicho que la reunión del 2008 no era la única falsedad
incluida en la investigación, de los otros testimonios y en las escuchas
hubo otras cosas falsas ?
-
La otra falsedad fue la asistencia de Fajardo a un hotel determinado. Son dos
partes. La primera es la presencia de Crespo y que después estuvo Fajardo.
Las dos son falsas, después en la captura que se hizo de dirigentes cocaleros
después del arresto de Artemio se emplearon testimonios de colaboradores
eficaces posiblemente los mismos, que eran igualmente falsos, y todavía están
presos. Entonces algunos de esos testimonios eran claramente falsos.
-
Si hacia un ano que sabían que era falsa, como es posible que se haya
incluido en el expediente?
-
Porque el expediente es de una torpeza inaudita. Si lo leen lo que dice la
Wendy Calero, es torpeza total, para que el juez lo tira y le diga vayanse a la
universidad de nuevo aunque sea Alas Peruanas, aprenda a hacer un
expediente, en fin cosas irracionales, inexcusables que le hacen daño al país,
88 que esta en contra de la seguridad interna del país, que no obedece a los
mejores principios de contrainsurgencia dentro de la democracia, que no
ayuda a derrotar al enemigo sino eventualmente lo favorece, esos ataques
contra la razón que te hacen pensar que pidas a Gastón que estudie bien los
ingredientes de la comida nacional para ver si hay uno que puede fortalecer la
capacidad de pensamiento
-
En cuanto a la amnistía, por ejemplo, el hecho de que la reclaman
para Guzmán pero también para los militares, es oportunismo
político ?
-
Si. Claro una des cosas que se ha ignorado totalmente dentro de eso es que
dentro del Movadef han estado colaborando militares, generales, y muchos
de que los que están preso por Colina. Dentro del Movadef y del pedido de
amnistía no solamente esta los terrucos están los de colina, y están juntos en
la prisión y estudian derecho, se llevan fantásticamente bien porque ahora les
une el común deseo de que se olvide todo, se haga una amnistía general para
que puedan regresar. Pero naturalmente no habido ninguna mención a lo
generales, coroneles, que están apoyando esa iniciativa
-
En los medios ?
-
Una de las razones para yo te digo por supuesto que todo se puede hablar y
discutir pero amnistía para los crímenes de lesa humanidad, ninguna
posibilidad, amnesia, desmemoria, olvidarse de todo lo que ha pasado ,
sucedido ninguna posibilidad, posiblemente perdón en algunos casos
después de un tiempo, una de que se han pagado las culpas si hubo un
arrepentimiento verdadero eso es otra cosa, se puede discutirse y debe
discutirse, pero amnistía que no paso absolutamente nada, aca paso todo y
mucho mas, aca paso el infierno, no vamos a olvidar el infierno jamás, eso
no es posible, eso no significa que por pedirlo tengo que castigarlos
-
Aca en Perú, apología por terrorismo no es castigada?
-
Si, la pertenencia a una organización, pero amnistía no es apología
-
En el juicio por la Operacion Perseo, que va a pasar?
-
Vamos a ver que pasa en el poder judicial si se recompone este infamia que
ha sucedido con la remoción del colegiado F, entonces es posible que se va
89 va tener un juzgamiento adecuado si por lo contrario ponen un conjunto de
chichinos gente que esta dispuesta a decir sí a todo, entonces cualquier cosa
va apoder suceder.
-
Y en cuanto a la militancia joven, usted ha dicho que es falta de
conocimiento ?
-
Si.
-
Es falta de conocimiento o es una memoria partidaria, sesgada
básicamente
-
Digamos Sendero ha mantenido, tiene una versión una idea comunista de lo
que se hizo, organizaciones estrechas vínculos familiares, y todo aquello que
suele suceder con toda organización disciplina cerrada, entonces de alli ha
salido una militancia juvenil que tiene las cualidades de persistencia, de
disciplina, continuidad que son propia de la cultura en la cual fueron
formadas, están profunda, lamentablemente terriblemente equivocados, pero
son chicos como quiera que no los están entrenando, que se preparen para
una lucha armada, sino para los objetivos que ellos tiene, chicos con los que
se puede discutir, con los que se debe discutir.
- Annexe 2 : Entrevista a Carlos Tapia, especialista en temas de terrorismo.
Como usted definiría el Movadef, es un organismo generado por Sendero?
Sendero es Movadef? Cual sería su definición?
- El problema es Sendero Luminoso primero. Porque a que Sendero Luminoso te
refieres, al SL de 1980, o el SL después de los acuerdos de paz que quiso tomar con
90 Montesinos y que cambio la estructura del partido. Entonces, el SL 1980 era una
organización fundamentalista, subversiva, terrorista, pero el SL después del acuerdo
de paz, en 1993 94 ya no es el mismo partido cambia. Cambia en los aspectos
esenciales. Para los maoístas, la reconstitución del partido es formar un nuevo
partido porque le cambia la estrategia, la táctica, la manera de organización y sus
objetivos, por lo tanto cambia su método de lucha. Pero no es porque cambian sus
métodos de lucha nada mas, sino que cambian los métodos de lucha porque
cambian los objetivos, la forma de organización. Eso lo llaman una nueva gran
Decisión y Definición. Lo hicieron hacia 1970 para iniciar la lucha armada,
cambiaron todo su partido. Y lo militarizaron. Pero ahora es al revés, cambian todo
lo que tenían militarizado para la lucha política legal. Por eso es tan torpe decir ellos
dicen tal coso, pero en cualquier momento van a retomar la lucha armada, no es asi.
Han reconstituido el partido. En la primera reconstitución se demoraron 15 años.
La primera, del 1965 al 80, y esta también 15 anos. Del 94 hasta ahora. Porque eso?
Porque ellos son muy ideologizados, discuten mucho. Toman la cita de Mao
textualmente, como un grupo cristiano, Pablo dijo no se que no se cuenta y lo
interpretan, por eso hay tanta discusión. Eso es una lógica de grupo encerrado en si
mismo que no contraste lo que discute con la realidad. Viven para eso.
- Justamente cuales fueron los cambios, usted me dice que es un nuevo
partido….
- Ni siquiera un nuevo partido, es una nueva fracción porque ellos cuando
constituyen una fracción en el 70, siempre hay que referirse a esa época. Y de esa
fracción, estando dentro de un partido comunista están luchando contra todos. Y al
final se quedan solo. Esa nueva fracción constituye la nueva fracción del partido
comunista del Peru Sendero Luminoso. Ahora igualito, han constituido su propia
fracción. En parte es una nueva visión mas o menos leninista, las fracciones
bolcheviques contra la fracción menchevique, yo le llamaba la fracción roja…Ahora
han constituido esa nueva fracción. Pero que cosa quiere decir reconstituir? Mao
Tse Tung, en oct 1965, estaba en una reunión del comité central pero no era nada.
Había el presidente de china, estaba Deng Xhiapoing, se paro Mao se fue a la
puerta, saco una cosa que tenia escrito y clavo en la puerta ”queda destituido el
comité central, todos los organismos del partido dejan de existir”. Entonces en
91 19893, es lo que hizo A Guzmán: dijo todas las organizaciones del partido quedan
disueltas. Salvo la dirección histórica, el y Miriam. Y para los comunistas maoístas el
Partido no es un numero de militantes, es un numero de militantes organizados en
instancias, entonces para disolver el partido, disuelven los organismos, quedan los
militantes pero no es un partido. Esa nueva fracción es la que esta reconstituyendo
el partido anterior pero adaptándolo. El mismo Guzman dice a lo mejor nos
quedaremos el 10% de los militantes antiguos. Que importa? Pero necesitamos dar
ese gran viraje que lo denomina la gran Definición y Decisión.
- El Movadef seria…
-Todavía no estamos al Movadef. Cuando se refiera ahora al PCP SL, a que cosa se
refiere, la gente cree que se esta refiriendo al PCP SL de los anos 80 cuando no.
Hubo disolución hacia que esta formado una nueva cosa partidaria
-Que es hacia la pacificación…
-Hacia la paz, todo, que dice, tienen que salir, mostrar la cara. Pero la táctica esta
que tiene un aspecto interno que es la reconstitución y un aspecto externo, que es
bueno tenemos que luchar por que haya amnistía general. Primero un acuerdo de
paz, Guzmán dijo que iba a conseguirlos pero estando presos, sin tener fuerza
afuera de la prisión para que le iban a hacer caso. Un acuerdo de paz. Las Farc si
porque tiene gente. Entonces desde el 93 que plantean eso y favorecen a Fujimori, el
triunfo de la reforma constitucional, eso es lo que negocian, hasta el 96 con el
acuerdo de paz, siguen acuerdo de paz, pero no son brutos se dan cuenta que no le
van a dar. Además, los que estaban afuera estaban en contra del acuerdo de paz.
Feliciano, entonces que ibas a negociar. Entonces cambian esa táctica, la perfilan y
dicen solución política a los problemas derivados de la guerra , ya no es acuerdo de
paz porque sabia que había fracasado. Porque solución política? Porque todavía
estaba Feliciano en el VRAEM. Pero en 1999, cae Feliciano, entonces ya cambia la
táctica, en 2000 y dicen amnistía y amplían.
- Es a partir de la caída de Feliciano que se plantea la amnistía?
- Claro, porque hasta antes decían amnistía para Guzmán, libertad del presidente
Gonzalo. Entonces comienzan con la amnistía general que es una visión más
política. Saben que es larga pero la lucha quieren que salga Guzmán, Fujimori,
montesinas, colina, todos los civiles, políticos militar, para la reconciliación. Esa
92 tercera fase lleva a que digan en un momento como vamos a luchar por eso si no se
nos estan identificando como SL entonces dan el visto bueno para que se organice
el Movadef. Y se va organizando.
- O sea para organizar esa lucha para la amnistía se crea el Movadef?
- Claro pero para hacer política
- Es un grupo adentro de Sendero
- No al revés, Sendero es un grupo adentro del Movadef.
-Ah si, usted lo vee así?
- Si pues, el Movadef han presentado, 350 mil firmas. Habrán cien de SL adentro del
Movadef. Pero Porque ¿ porque no pueden hacer su congreso. El texto dice así,
Luchar para una nueva gran Decisión y Definición, luchar por un acuerdo de Paz y
sentar bases para un Segundo Congreso. Pero no puede Ellos son bien
institucionalistas. El primer Congreso de SL se realiza en plena guerra en 1988, ni
siquiera se atreven a hacerlo antes, Guzmán dice nooo, tiene que ser
- En medio de la luchar armada?
-Claro, porque era la primera reconstitución. Entonces ahora, necesitan hacer un
segundo nuevo Congreso en el espacio en libertad pero no lo pueden hacer porque
Guzmán esta preso. Y entonces parece ser que han utilizado el Movadef, el segundo
Congreso del Movadef para meterse y hacer el segundo congreso del PCP SL.
Movadef no es un organismo generado al estilo de Socorro Popular. Porque eran
organismos generados para la lucha armada, eso es organismo generado para la
lucha abierta política y legal.
-Si usted me dice que el Movadef es mas grande que Sendero, entonces no se
podría decir que es un organismo generado para la lucha política?
-No porque ellos están en transición elos. Primero del 100% de los senderistas que
han salido libres, 10% están con Guzmán, los demás ya no.. Si te ponene 25 anos de
cárcel y luego sales no te pones a decir viva la lucha armada! Ya no, ya quieres hacer
otra cosa. Se han quedado 10%.
-Los dirigentes del Movadef por ejemplo hacen parte de esos 10%?
-Claro, pero no son los…como te puedo decir…el señor Fajardo no ha participado
de la luchar armada, Crespo tampoco. Los han escogido bien, son gente que no
participó y los meten presos, pero ellos son filial de SL entonces presos.
93 -No han participado en la época de la guerra interna?
-Si seguramente sí, simpatizantes, han sido abogados pero no han sido…por eso
Crespo se ríe y dice ustedes creen que me voy a esconder, que me voy a escapar…el
esta cumpliendo su misión, lo meten preso, no tiene problemas, porque saben que
están propagandizandolos para la lucha política legal. Cuando Crespo sale libre, que
cosa dice, saludo a todos los periodistas que nos han apoyado, Rosa Maria Palacios,
a pesar de que tengo discrepancias, la saludo. Raul Wiener también no es cierto, a
Fernando Rospigliosi (risas). Asi como hicieron la lucha armada, tan radical, igual
hacen la lucha política. Se ajustan a la democracia, a la ley, no vees que son
comunistas por aca. Lo hacen, cuantas firmas, 150 mil les traemos 350, o sea son
muy eficientes…
- Justamente acerca de los medios, ese cambio de ideología, ese muevo
partido que se ha creado en 1993 no esta reflejado. De ninguna manera…
- A mi me están sacando de la televisión porque he escrito eso. Ya no me invitan
porque inteligencia porque yo que estoy una persona que conoce del tema, estoy
diciendo eso es equivocado. A jefe de la dircote, le he mandado no sabes tu. Esta
pensando en otras tonterías. Eso no les conviene y como Inteligencia controla todas
las relaciones con los medios, Tapia sale. Bueno, entonces esa es la situación. Creo
que es un error no facilitar que poco a poco el Movadef lo que es SL reconstituido
que es otro partido con otra estrategia, con otro tipo de organización se integre a la
vida política legal. Yo fui un combatiente anti senderista. Dinamitaron mi casa. Con
12 kilo de dinamito. Me tuve que ir a chaclacayos escondido
-Felizmente usted no estaba adentro…
-Felizmente no estaba adentro…entonces pero cuenta de que para el Peru se debe
facilitar, es un tontería. Cuando iba a prisión a dar charlas, al INPE, me daba cuenta
gritaban “pensamiento Gonzalo siempre triunfara…”Entonces a los funcionarios
les
decía es un error porque los están recluyendo, no les dejan ver televisión periódicos
en 1993, entonces aislarlos de la realidad endurece su ideológica. Al contrario
preséntenles los desfiles de moda en Pekín para que se den cuenta cual es el mundo.
Yo cumplía con lo que pensaba. Entonces, porque la prensa en esos temas esta en
una posición absurda, no son comunistas senderistas, le he escuchado e Urresti decir
94 de acá a 20 anos van a estar de nuevo (en la lucha armada). A mi me interesa un
pepino porque mi esperanza de vida son 4 anos…de aca hasta 20 anos quien puede
decir eso. También los otros son fundamentalistas, es como la mala hierba que crece
por eso dicen erradicar sendero. Tu dices erradicas cuando una planta la sacas de
raíz. Pero como la mala hierba se reproduce, tienen que ser permanentemente
erradicando, es lo que dicen los militares es una tragedia porque lo utilizan para
corrupción. Los de la DRICOTE, siguen siendo la Dircote aunque no tengan contra
quien luchar. Pero aharhrhr, gana bonificaciones, en el VRAEM mismo, hay 6000
hombres que están luchando contra quien? Hace anos, cuando era asesor de
Humala el me decía allí esta la gran corrupción pero eso no se puede decir porque
me meten preso. Pero la situación es esa
- Pero como es posible, porque la prensa no refleja de ninguna manera ¿
-porque tienen orientaciones, de Inteligencia. Segundo lugar, para vender tu no vas a
vender si dices a SL hay que integrarlos a la vía legal. Te tiran piedras. Porque los
militares aprendieron de la experiencia argentina que no deberían permitir que nadie
se alinee, que no diga las cosas que ellos están diciendo.
-no hay un tratamiento diferenciado en la prensa, por ejemplo acerca de la
operación Perseo, todo el mundo esta de acuerdo para decir que es un gran
victoria contra el terrorismo sin ninguno espíritu critico, estoy viendo la
republica y el comercio y tienen casi la misma línea…
- A pesar de que algunos decíamos, y yo que escribía en Peru21
-Analistas sí…
- ..tocar asi porque sabia que también me botaban de Peru21. De todas manera
cuando nos reunimos analistas decimos si es una porquería.
-Analistas si hay pero en los medios de referencia
-No eso es manejado. Hay un acuerdo desde la época de lucha en la época de SL,
para que la prensa se alinea con lo que el Estado señala en la lucha por la
pacificación. Todo el mundo plantea lo mismo. La republica lamentablemente
también se ha alineado. En otras épocas, la rep no hacia eso. La Republica le dan un
pequeño espacio, critican a los militares desde hacia 25 anos. Pero en eso
-En la operación Perseo…Este, usted me dicen que están en la misma línea
porque están obligado a tenerla
95 -Y porque venden. Porque sino no tienen esa línea no vende. Parecería un pasquín
decir queremos que los senderistas se incorporan a la vida política legal. Pero
imagínate. Pero en la radio no es asi RMP, Radio Exitosa tienen otro matiz porque
no son parte de la institucionalidad de la prensa que en cierto punto cierra
totalmente.
-La operación Perseo, Gorriti me contaba que hubo un cambio de estrategia,
había logros como la captura de Artemio y decidieron cambiar de golpe la
estrategia no sabemos muy bien porque. Esta de acuerdo con esta análisis?
-Si siii, yo creo que primero Humala estaba en Canada, lo hacen hacer una
declaración como si fuera algo muy importante. Yo creo lo engatusan un poco a
Humala. No es que Humala no quería eso pero no ha tenido tiempo de ver eso a
profundidad. Pero le dicen vamos a cubrir los medios y mostrar que el gobierno es
firme, eso le gusta a Humala, da el visto bueno para el show. Montan un aparataje,
ya lo han aprendido, saben que los medios son muy importantes, filman a dos
generales en una pizarra con los nombres de los nombres de los de movadef
gritando, este ya cayo, este ya cayo . Porque fue tan impresionante la captura de
Guzman que quisieran hacer algo parecido, es una caricatura, es bien triste los que
conocemos eso. O sea, han manejado la policías a su antojo. Imagínate los que han
hecho ese operativo como se deben sentir, manipulados, tienen que hacer aparecer,
que vayan 300 hombres, pero están en tu casa. Cuando inscribes el Movadef dice yo
vivo en tal sitio, tienes que decirlos, los traen en helicópteros, es una vergüenza.
Pero la prensa no te lo presenta, no puede. Pero hablas en voz baja si te lo dicen
-Justamente, en la Republica me sorprende que no haya ninguna distancia
tomada hacia eso. En todas las notas que han salido después de la operación
Perseo por ejemplo son cosas sacadas del expediente, que es cuestionable sin
ninguna distancia, no siempre fue así, la republica tiene buenos periodistas
de investigación. ..
-Justo Edmundo Cruz y Angel Paez, no han entrado. Porque la Republica es un
empresa periodística que tiene acciones en grupos de la televisiones, cuando tu vas
subiendo de categorías, tu relaciones directas con el poder y particularmente en eso
son muy claras. Sabes que chicho había que rebajar eso u poco porque el presidente
dice tal cosa. La republica esta en la visaje presidencia, el gobierno. En provincia no
96 es asi. La radio provinciana, dijo que es una porquería. La radio de Ayacucho
también, pero Si caminaban por las calles
-Es en Lima que se concentraba…
-En la prensa limeña, pero la prensa limeña es el 90% de la prensa nacional
-Y lo que a pasado después cuando decidieron su excarcelación, con todo el
chongo que ha pasado con Galindo con los jueces removidos. Es una
ilustración mas que cuando se habla de algo relacionado con Sendero hay
una especie de demonización…
-Claro, claro. Pero se ha portado bien a Asociación de jueces y fiscales, el Consejo
nacional de la magistratura, la vergüenza es el PJ lo que te muestra como se maneja
el PJ en el Peru
-Si porque que el señor Galindo diga que en ese caso había que seguir lo que
quería la opinión publica que no quería que sean excarcelados…
-Ese señor es un débil mental. Osioso, no sabe nada de nada. Es amante de su
secretaria, es terrible, y lo tienen allí porque lo pueden manejar inteligencia por todo
sitio.
-El expediente en si mismo se ha adjuntado pruebas falsas, la famosa
reunión entre Artemio, fajardo y Crespo…
-Pero eso en el propio juicio de Artemio, ya se vio como prueba falsa
-Pero entonces porque se adjunto al expediente?
-porque se llaman operativos psicosociales.
-Que es exactamente?
-Es tan uniformidad en los medios y tal fuera de expresión de los medios que a la
gente los que les queda los han soltado que miserables, porque van a poner una
bomba de nuevo.
-Usted me dice que se permitieron poner pruebas falsas porque de todos
modos iba a pasar desapercibido…
-Si si si.
-Me choqua, Si se sabía que era falsa desde ya más de un año, lo adjuntan en
el expediente. Se usa en todos los medios…
- Por eso es tan difícil ser un analista critico. Justo tu que eres investigadora, en los
momentos en que eso se va a producir empiezan a aparecer pintas de la hoz y del
97 martillo, en San Miguel en el VRAEM. Pero una hoz y un martillo. Como le han
dicho a la gente de inteligencia que son jóvenes que no conocen, aca en el peru no
se usa la hoz, una barrana. Han hecho y nos han puesto el manga de la hoz es un
puntito y el martillo en lugar de poner la cabeza del martillo dentro de la hoz hacia
fuera, en el piso. Y aparecen encomiendas. Donde hay unos polos.
-Es luego de la operación Perseo?
-Paralelo, o antes. Porque ya sabían que iba a parecer Perseo. Se descubren polos
que dicen, que vergüenza carajo, Partido Comunista Peruano, VRAEM. Jamás SL
dijo PCP, es decir PCP, nada mas. Y no va a poner PCP, tuviera que poner Bases
Usaban polos negro con amarillo. Este es un polo plomo.
-O sea que todo fue montado?
-Claro, claro, todo fue montado. Es lo que se llaman psicosociales
-Que quiere decir exactamente eso de psicosociales?
-Es una mentira que la arman verdad para conseguir miedo o aplausos a la vez
-Claro, porque es que consiguen aplausos porque derrotan al miedo. Dicen miren
miren los que nos vienen, a yo les ha agarrado pues.
-Acerca de la relación que existiría entre Artemio y el Movadef?
-Artemio era el numero 17 del comité Central de PCP en 1988 y eran 19. Era unos
de los mas brutos. De los menos calificados. Cuando lo mandan al Huallaga, en un
primer tiempo, con los cocaleros, Artemio no aparece. Artemio aparece cuando
PCP esta en recontra caída. Porque? Porque Guzmán plantea Acuerdo de paz y
acuerda desactivar todas las acciones armadas..
-Artemio no estaba de acuerdo en un primer momento…
-No porque se dio cuenta de que su vida y su negocio respondía a continuar.
Entonces empieza una negociación, diciendo no voy a continuar. Para tener fuerza.
Sigo matando pero para que liberen A Guzmán. O sea era un táctica tan
contradictoria, era ceviche con mango, obvio. Tan cierto de que Artemio era medio
idiota de que era tan mal que contrataba su seguridad lunes a viernes y sábado y
domingo se iban a ser mototaxi. La inteligencia lo traía Artemio, se servían de
Artemio para los psicosociales.
-En la operación Perseo, eso era el asunto, vincular los dos para que el
Movadef sea identificado con la lucha armada
98 -Había recibido a crespo y Fajardo 100 mil soles para recoger firmas del
narcotráfico. Tu crees que van a ser tan idiotas los senderistas de mandar al Huallaga
Crespo y Fajardo podrían haber mandado a Felipe Quispe, todo esta montado. Mi
mujer me dice a que mierda te importa eso.
-Ese expediente y la operación ni siquiera hay algo de verdad en eso
-No, es la idea, fue correcto la decisión peruana de no aceptar la inscripción del
Movadef . No acepto porque pusieron que la base ideológica era del pensamiento
Gonzalo
-Pero usted me dice que el pensamiento Gonzalo ha evolucionado…
-Es que el pensamiento Gonzalo nace de la guerra y esta anclado en la guerra, Y
ahora dicen ahora no podemos hacer guerra, pero llegará el momento en que
hagamos guerra.
-El pensamiento Gonzalo lo dice
-Claro. Entonces pero el pensamiento Gonzalo de la guerra y después cuando sacan
el documento por el acuerdo de paz. Imagínate los problemas que tuvo Guzman
para convencer a los otros de que iban a participar en las elecciones. No, les hizo
mucha concesiones. Les decía vamos a participar porque no hay condiciones. Pero
después vamos a continuar cuando los partidos comunistas se militaricen, ya una
locura. Pero entonces ese pensamiento Gonzalo que considera que lo que hizo SL
que la mas gran transformación política y social del pueblo peruano, mas grande que
la de Túpac Amaru. Entonces es bien difícil de un partido es como..
-los cambios que hubo en el pensamiento Gonzalo fueron algo estratégico
pero que si quieren retomar la lucha armada?
-No , pero tienes que cubrirse, O sea. Yo también he pasado lo mismo en el MIR.
Participaremos en las elecciones porque somos débiles pero en algún momento
porque el poder se consigue por la violencia únicamente. Es muy difícil que el JNE
diga esta bien que usted se integra como partido democrático y me están diciendo
ahora participamos en las elecciones pero apenas haya las condiciones vamos a
poner coche bombas vamos a ponerlos…
-Todavía lo dice…
- Es que lo dicen así pero cuando tu lees el documento Luchar para una nueva
Definición. Allí dicen todo eso. Porque? La DIRCOTE no lo tenia. Porque, cuando
99 fui miembro de la comisión de la verdad nos dieron las transcripciones. Es del 1993
cuando Guzmán trata de convencerlos. Entonces Montesinos en el acuerdo con
Guzmán le permite que grabe y después lo edita. Dice que viene de Francia, con una
pequeña lladita qu dice esta transcripción esta condicionada a una edición.
-Pero si Guzman era preso en Peru como pueden decir que viene de Francia
-Porque asi sucedían en esas cosas, Pero primero lo publican con sello.. Como
diciendo viene de Francia porque sino tendrían que decir y como ha salido quien ha
permitido eso. Pero es muy clave porque permite. Guzmán y la cúpula de SL que
Montesinosn los ha traído de Yaramayo, para que conversan. Guzmán tiene que
convencerlos. Montesinos le dice tienes las citas de Mao Guzman empieza a
convencerlos.
-No me queda claro, el pensamiento Gonzalo no ha evolucionado entonces
-Al contrario el pensamiento Gonzalo, Primero Guzmán es un cobarde, porque
debió salir y decir se acabo
- Pero aceptaron la derrota…
-No pero no puede decir internamente es la mas grande movimiento revolucionario
del peru y del mundo tenemos que ser orgullosos de eso, no nos autocriticamos, no
reconocemos a las victimas solamente nos hemos equivocado porque en la guerra
no hay arrepentimiento. Entonces mucha gente dice vamos a participar en las
elecciones pero llegaremos como se llama a momento en el que tendremos que ser
la lucha armada. Porque el pensamiento Gonzalo ratifica que la guerra es el único
camino para tomar el poder, porque si no ratifica eso ya no es pensamiento
Gonzalo.
-Entonces, usted me dice que los dirigentes no participaron en la lucha
armada, es decir, lo que plantea el Movadef es un engaño?
-No pero hay un sector duro del Movadef que dice tiene que ponerse el
pensamiento Gonzalo porque tendrían que ser demasiado idiotas para no darse
cuenta de que no iban a aceptarlos en el Jurado. A propósito ponen pensamiento
Gonzalo, Y a no aceptarlos dicen ahh no están persiguiendo
-Es una estrategia?
-Es que el Movadef no es el PCP SL. Entonces hay muchas fracciones, tendencias,
gente que paso a la clandestinidad.
100 -Entonces usted me dice que poner el pensamiento Gonzalo en los estatutos
es para que los rechazen…
-Pero Claro, seria un suicidio si tu quieres que te inscriban, tienes 350 mil
adherentes, los comités y pones el pensamiento Gonzalo, me van a aceptar eso, noo
me van a rechazar pues. Asi podemos decir que somos perseguidos. Que lógica hay
que haya alguien que diga voy a recoger firmas para presentar la inscripción y no
quiero que me inscriba, cual es el objetivo
-Victimizarse?
-Claro pues te digo. Tampoco del otro lado hay todo eso. Esa pelea es ajustada al
Movadef pero derrotando a la gente mas primitiva que sigue pensando en la guerra
popular. Una guerra, hace 21 anos que SL no hace acciones armadas lo de Artemio
lo dejo de lado. Entonces tu no puedes hacer un aguerra, diciendo tengo un atregua
de 21 anos. Tres meses, pero no 21 nos. Porque el combatiente que tenia 35 años
ahora tiene 65 anos, ya tiene hijos nietos, ya le importa un pepino. Y sirve para que
la derecha cavernaria los utilice.
-El JNE ha hecho bien de no aceptar la inscripción
-por el pensamiento si si si, Después el JNE hace lo que quiere. Dice los comités.
Primero era imposible destituían al JNE pero a la verdad no corresponde en un país
como el nuestro en que la población esta enervada, por los medios, Sendero,
cochebombas que te digan si han hecho eso, que siguen la consigna del pensamiento
Gonzalo como lo va a recibir como partido político. Es como si en Alemania dijera,
Hitler no solamente estuvo bien sino que es lo mas grande de la humanidad. Puta
madre te dice. Si quiero estar un partido, no pues hermano un partido democrático
no es asi.
-Es hablado con un militante del Movadef. Para el no es contradictorio decir
que Movadef no es Sendero pero que sí reconocen el pensamiento Gonzalo.
Como sacar esa contradicción?
-Es que el pensamiento Gonzalo es la aplicación del marxismo Leninismo a la
situación concreta del Perú. En todos partidos maoístas. Epro dice la guerra popular
es una ley y por lo tanto no existe otra forma de capturar el poder mediante la
aplicación de la ley
-Actualmente también dice eso
101 -Si pues, por eso te digo. Ahora han cambiado las condiciones. Como vamos a hacer
la guerra si el capitalismo burocrático ya se legitimo, al nivel mundial se están
produciendo grandes transformaciones. Hay que darle la lucha ideológica contra el
neoliberalismo entonces estamos participando en la lucha política. Es que Guzmán
es el cobarde. El se hizo poner el pensamiento Gonzalo, es una vergüenza
-Es un dios…
-Si y su mujer. Y Se queda callado. Cuando lo llevan a los juicios que dice. No hablo.
Por maricon. Cobarde. Feliciano que era el verdadero responsable militar habla. Nos
hemos equivocados, hemos matado a niños. Pero Guzmán nada porque no se
atreve a decir nos equivocamos porque se equivoco ello. Dejo de ser leader no
solamente de la revolución peruana sino de la revolución mundial.
-Vaya derrota
- que triste es todo eso.
-En los medios, al momento de la inscripción no había en los medios ni
siquiera la posibilidad del debate de decir que pudiera ser una idea…
-En ese país. Si a veces me invitan a las escuelas militares, quedaba sorprendido.
Porque lo invitamos porque es la voz de Sendero. Entonces para ver como
organizan como Sendeor. Nunca mas fui. Es una cosa de locos
-Por ejemplo el hecho de que haya habido ese viraje a 180 grados en la
estrategia en todo, desde los acuerdos de paz…
-Ni Inteligencia no reconoce eso. Todo fue un bluff. Todo en mentira. Aca hay un
dicho gallina que come huevo aunque le queman el pico. E que fue terrorista seguirá
siendo terrorista e hijo. Porque tienen tiempo, y además es apoyado por la extrema
derecha. Para ser política sobre eso, amedrentar a la izquierda.
-Podría ser una oportunidad para negociar.
-Cuando Santos ha tenido la negociación en Colombia, Humala se quedaba callado
pero apenas EEUU felicito Humala felicito. Estaba felicitando a un presidente de
Colombia que hace negociaciones con un grupo armado y terrorista, han
secuestrado a 10 mil. Alla pero acá no.
-Es incentivado por los medios. La población no esta lista para el debate?
-No no no. Una vez yo soy un grupo que es Ciudadano por el Cambio. Lynch por
recibirlos porque son peruanos no podían ser del Movadef pero decían Libertad por
102 Guzmán, Frente a la puerta de la embajada. Les recibió en la puerta con el
argumento que soy embajador tengo que recibir a todos los peruanos.
-Porque el Movadef no saca el pensamiento Gonzalo. En la pagina web no
hay el pensamiento Gonzalo
-En la época de las cruzadas, a los cruzados les ponían un crucifijo y les decían pise
el crucifijo, no me matan pues, El fundamentalismo puede ser religioso, político. Te
pongo ese caso como extremo. Pero hay un grupo que metió el pensamiento
Gonzalo para la unidad porque no todos estaban de acuerdo. Lo que no estaban de
acuerdo dicen esta bien pero que ponga el pensamiento Gonzalo. Es un grupo, he
dicho hay un grupo duro que exige eso. Si no lo ponen, de repente ese grupo sale a
hacer terrorismo, no sé. Pero la mayoría del Movadef no. Le han impuesto eso
internamente por eso cuando voy a las universidades me dirijo a los jóvenes.
-Esa segunda generación de militantes, justamente o sea, de donde vienen?
-La mayoría son familiares, hijos de desaparecidos, de muertos, amigos. Si tiene una
familia a la tia la violaron los soldados, el tio lo desaparecieron se hace una leyendo,
el sobrino el amigo del sobrino. Ellos creen que es una salida para la reconciliación
nacional
-Pero es un pensamiento sin reflexión, circular
-Es Mao. Fue un profesor primario rural, da vueltas y repite es un pensamiento
helicoidal Todo esta amarrado. En mi época he sido profesor en Huamanga. En mi
época hasta el amor, el sexo tenían carácter de clase, para llegar acá, que cosa era
primero la materia o el pensamiento. Es una manera derivada de algo que no se
discute, y de eso sacas todo. Es como la Biblia. Hace poco había un joven de una
iglesia cristiana que se murió, me fui al ano de su conmemoración, y me han visto
entonces porque los políticos, para que mierda he venido . porque te decían. Yo no
tengo formación pero como dice Pablo no se que cosa, hay que…igualito era
Guzmán como dice Mao no hay que sonreír no puede bajar de la carroza como si
fuera una virrey eso significa. Jodido es. Jodido y aburrido
-Es lo fundamentalismo. Entonces para resumir, usted considera que el
Movadef no es un peligro?
-No al contrario. Debería ser una salida. Una alternativa si se maneja bien. Si el
temor es que jóvenes pro senderistas convenzan a jóvenes porque no pueden
103 convencer el Apra, el PPC, no se cuantos, porque no los convence, no discuten.
Porque en el fondo esta democracia es una democracia de baja intensidad. Es difícil
defenderla
-Con el estado de los partidos políticos…
-Por eso es bien dificll. No es que sea. Es que no se puede defender la democracia,
esta no se puede defender, tiene que producir cambios radicales, es es el asunto
-Usted me dice que no se puede legalizar, la operación Perseo es una
tontería. entonces como pueden actuar?
-Perdón, individualmente hacen política. Están en la lista de Democracia Directa,
los etnocaceristas, alcaldes distritales, regidores. Crepo dice nadie va a impedir que
sigamos opinando porque mas que no se me reconozca legalmente. Ciudadanos por
el cambio tampoco es reconocido. No puede ser un partido que pueda tener
candidatos presidenciales pero hacemos política. Ellos apostaron una cosa mas
grande, un partido legal. Pero como cometieron ese error, o es parte de su táctica.
Yo discuti con gente del movadef. De lo que son duros, ya no quiero conversar no
tengo tiempo. A los jóvenes si voy a las universidades. Ojala harían eso los partidos
-El combate ideológico…
-Claro, el Movadef hay que combatirlo ideológicamente, es una estupidez meterlos
presos. Quiero libertad para Guzman es apología, como pueden decir eso, los
fortalece a ellos. Las cosas están al revés.
-Acerca de la amnistía, usted considera que es oportunismo político?
- Nono, es una táctica comenzó con la libertad de Guzmán porque era un luchador
social, y después amnistía. Es un acuerdo del Congreso. Es imposible que en este
país el Pais el congreso de amnistía. Hay juristas como Valle Riestra que esta de
acuerdo pero en ese caos no porque hay tantos muertos.
-Pero que planteen también la amnistía de los militares?
-Por eso te digo. Se dieron cuenta que cuando pidieron la libertad para guzmán se
dieron cuenta que puta…la amnistía de quien esta pidiendo? Montesisnons, del
grupo Colina de Fujimori. Te das cuenta que es un jugarreta y mas aun cuando
Guzman queda en silencia, debería salir. Te imaginas, si haría como victor Polay nos
arrepentimos, pedimos perdón a las victimas, no pide perdón a nadie
-Parece difícil que lo haga
104 -Pero si el cree que es un triunfo.
-Un triunfo pero aceptan la derrota…
-Aceptan la derrota apero el movimiento es lo mas trascendental del peru. Entonces
bien jodido que te digan o sea que si lo hago de nuevo es una cosa muy buena, no
pues, no. Yo creo que guzmán debe ser alejado de la realidad, sabe que va a morir
en prisión. Ya le interesará poco. Pero es un irresponsable, un cobarde. Yo cuando
estuve en la comisión lo entrevisté a Feliciano. Viene con libros. Teníamos un
protocolo, Señor Oscar Ramirez Durand, hemos venido en nombre de la CVR del
decreto, del estado, no somos independientes, queremos encontrar la verdad.
Feliciano me digo ya pe carlitos que te pasa. Hay cámaras de la marina. Y porque
tienes esos libros, estoy estudiando psicología. Para que. Para entender a ese gordo
de mierda, hablando de Guzmán. Cuando lo vio le metió una cachetada, diciéndole
viejo de mierda tu te hubieras tenido que suicidar. Porque se entrego sin un tiro.
Feliciano siempre dudo de que su captura no hubiera sido informada por gente de
Guzman. La Mirian salió y lo araño. Al dia siguiente cuando se reunieron todos los
presos de la Base Naval. Guzmán no estaba. Al día siguiente el jefe marino
comunico al SEREP que había llegado una carta de Guzmán que el pedía ver le
programa en otra hora porque había un ambiente muy violento. O sea marica.
-Parece tan coherente, como los jóvenes del Movadef pueden defender
alguien asi….que no hablaba quechua
-No no no mentira. Yo lo conoci en 1982, no hablaba quechua. Sabes lo que hacia
en los sitios en lo que actuaba sendero soltaban el DNI de Guzmán ha pasado por
aca el camarada. Pero un bluff con miles de muertos.
-
Annexe 3,.
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