I.3.5. Les stupéfiants I.3.5.1. La réglementation Le contrôle mondial des substances psycho-actives est régi par des conventions multilatérales conclues entre 1912 et 1972. En ce qui concerne les stupéfiants, l'ensemble du système constitué par les conventions existantes a été révisé et modernisé par la convention unique sur les stupéfiants de 1961 (amendée en partie par le protocole du 25 mars 1972) à laquelle la France a adhéré. Cette convention institue notamment l'organe international de contrôle des stupéfiants (OICS) à Vienne (Autriche). Elle prévoit aussi que des contrôles spéciaux seront exercés sur l'importation et l'exportation des substances sous surveillance. En Nouvelle-Calédonie, la procédure suivie pour l'importation de stupéfiants - en provenance exclusive de la Métropole - est directement inspirée de la Convention de 1961. La direction des affaires sanitaires et sociales de la Nouvelle-Calédonie (DASS-NC), pour le gouvernement, délivre à l'importateur, pour chaque substance à importer et pour chaque opération, un certificat officiel d'importation numéroté dont un duplicata est remis à la direction des douanes de la Nouvelle-Calédonie, et à l’unité stupéfiants et psychotropes de l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) en France. Au vu de ce document, l'agence délivre à l'exportateur une autorisation d'exportation de stupéfiants comportant toutes les mentions réglementaires, et en adresse deux copies à la DASS-NC, qui les transmet à l'importateur : ce dernier doit en faire retour, après endossement, à la réception de la marchandise. Après enregistrement, la DASS-NC communique un exemplaire endossé à l'agence des produits de santé qui est ainsi informée de l'arrivée à bon port de la marchandise exportée, et des quantités effectivement livrées. Les exportations sont effectuées dans la limite des évaluations annuelles adressées chaque année par la DASS-NC à l'organe international de contrôle des stupéfiants, via l’AFSSAPS. I.3.5.2. Evolution de la consommation globale de stupéfiants Les principales modifications par rapport aux années précédentes concernent d’une part la disparition de la péthidine (commercialisée sous le nom de Dolosal®) du marché pharmaceutique et, par conséquent, de l’arsenal thérapeutique ainsi que l’arrivée en Nouvelle-Calédonie de l’hydromorphone par voie orale (commercialisée sous le nom de Sophidone®). Cette dernière molécule, déjà ancienne mais d’introduction récente sur le marché français, constitue une alternative possible à la morphine par voie orale dans le traitement de la douleur. Les modalités du calcul de la consommation des stupéfiants ont été entièrement revues. En effet, les chiffres des années antérieures à 1999 étaient une synthèse des mouvements de stupéfiants. Certains, notamment pour les médicaments importés par les grossistes pharmaceutiques, pouvaient être comptabilisés deux fois : une première fois lors de la cession du grossiste au pharmacien, la deuxième fois lors de la cession du pharmacien au client. Depuis 1999, ce double compte est écarté. Les chiffres donnés sont par conséquent beaucoup plus proches de la consommation réelle de stupéfiants à des fins médicales qu’auparavant. Ils ne sont, par contre, pas comparables aux chiffres des années précédentes. Les données antérieures à 1999 ne sont donc plus reprises dans les tableaux de synthèse. L’ensemble des données présentées ci-dessous est donné en grammes de molécule base anhydre consommés au cours de l’année. Selon la définition donnée par l’OICS, on entend par consommation « l’action de fournir un stupéfiant à toute personne ou entreprise pour la distribution au détail, pour l’usage médical ou pour la recherche scientifique ». A défaut de recherche scientifique locale dans le domaine, demeure donc uniquement la distribution pharmaceutique pour l’usage médical. Situation sanitaire en Nouvelle-Calédonie – Année 2002 - Les stupéfiants I.3.5 – p 1 Stupéfiants Alfentanil Cocaïne Codénie Fentanyl Hydromorphone Méthadone Morphine Péthidine Rémifentanil Sufentanil Méthylphénidate 1999 0,9 1,5 18,8 22,1 0 1240 286,9 0,1 0,1 15,3 2000 0,4 0,9 0 52,2 0 1190,5 260,5 0,1 0,7 16,4 2001 1,3 0 0 49,9 2,3 0 1353 15,7 0,1 0,6 19,1 2002 1,4 0 0 56,1 21,4 1,7 1686,1 0,5 0,7 23 A noter une petite consommation de méthadone en 2002 pour le suivi du traitement de deux toxicomanes aux opiacés dont les traitements de substitution ont été initiés en Métropole I.3.5.3. Stupéfiants du traitement de la douleur Les deux principaux stupéfiants utilisés dans le traitement de la douleur sont maintenant la morphine par voies orale et injectable et le fentanyl par voie transdermique, sous forme de patchs. Cette dernière présentation a été introduite sur le territoire en 1998 sous le nom de spécialité Durogésic®. Consommation de morphine (en base anhydre) 1686 1800 1600 1412 grammes 1400 1200 1191 891 1000 800 670 600 400 1353 1240 1126 397 213 200 0 02 98 01 00 97 93 99 96 95 94 20 19 20 20 19 19 19 19 n 19 19 n n n n n n n n n o o o o o o o o o o ati ati ati ati ati ati ati ati ati ati tim tim tim omm omm omm omm omm tim tim Es Es Es Es Es s s s s s n n n n n Co Co Co Co Co Après un tassement de la consommation de la morphine en 1999 et 2000 lié à l’adoption massive du fentanyl transdermique (Durogésic®) dans le traitement de la douleur, l’emploi thérapeutique de la molécule de référence reprend du terrain avec une augmentation de plus de 40 % sur les trois dernières années. Les années 2001 et 2002 voient ainsi le retour de la croissance régulière de la consommation de morphine de 200 à 300 grammes par an, comparable à celle antérieure à 1999. p 2 – I.3.5. Les stupéfiants - Situation sanitaire en Nouvelle-Calédonie – Année 2002 Consommation de fentanyl transdermique (en base anhydre) 60,0 45,1 grammes 50,0 49,5 41,0 40,0 30,0 21,8 20,0 10,0 0,0 1999 2000 2001 2002 L’utilisation de l’hydromorphone comme antalgique majeur est encore trop récente pour tirer des éléments relatifs à son évolution. Cependant, cette molécule occupe déjà une place significative dans le traitement de la douleur en ambulatoire. En employant les échelles d’équianalgésie figurant dans le résumé des caractéristiques des produits (RCP) des spécialités figurant dans l’édition 2003 du dictionnaire Vidal, il est possible de donner l’importance relative des différentes molécules employées en 2002 dans le traitement de la douleur hors anesthésie. La référence employée est le gramme de morphine base par voie orale par 24 heures. Hydro mo rpho ne; 3,9% Fentanyl; 44,2% M o rphine; 51,9% Parts relatives des antalgiques majeurs dans le traitement de la douleur I.3.5.4. Toxicomanie – Saisie des stupéfiants Il s’agit d’un nouveau chapitre consacré à la toxicomanie et aux saisies de stupéfiants opérées par les services de police, de gendarmerie et des douanes. Le principal produit en cause en Nouvelle-Calédonie demeure, de très loin, le cannabis. Il convient cependant de noter une saisie exceptionnelle de cocaïne, d’héroïne et d’ecstasy (MDMA) en 2000. De petites saisies d’ecstasy ont également été réalisées les deux années suivantes. Situation sanitaire en Nouvelle-Calédonie – Année 2002 - Les stupéfiants I.3.5 – p 3 Saisies (en g) Cannabis Résine de cannabis Cocaïne Crack Héroïne Morphine Opium LSD MDMA Méthamphétamine 1996 137 700 100 0 0 0 0 0 0 0 0 1997 133 610 2 0 0 0 0 0 0 0 0 1998 98 192 200 2 0 0 0 0 0 0 0,2 1999 132 341 126 0 0 0 0 0 0 0 0 2000 205 571 15 631 50 0 55 0 0 0 44,26 0 2001 110 632 365 0 0 0 0 0 0 1 0 2002 349 201 0 0 0 0 0 0 0 4 0 Un phénomène nouveau mais mal cerné apparaît. Il s’agit d’une toxicomanie à la codéine au moyen de la spécialité Codoliprane® (association de 20 mg de phosphate de codéine à 400 mg de paracétamol). Outre l’aspect toxicomaniaque pur, l’emploi abusif de cette spécialité est doublement inquiétant du fait de sa teneur en paracétamol. En effet, il existe un risque réel de cytolyse hépatique – pouvant être mortelle – entraîné par l’absorption de doses supérieures à 10 grammes de paracétamol, soit deux boîtes de Codoliprane®. p 4 – I.3.5. Les stupéfiants - Situation sanitaire en Nouvelle-Calédonie – Année 2002 I.3.5.5. Importations de psychotropes Courant 1999, l’AFSSAPS a mis en place une nouvelle procédure pour l’exportation des substances classées comme psychotropes. La principale conséquence en est que toutes les importations de psychotropes en provenance de métropole sont désormais comptabilisées. Cette procédure ayant été mise en place progressivement, les données antérieures à l’année 2000 ne sont pas exploitables. Psychotrope TABLEAU III Buprénorphine Flunitrazépam TABLEAU IV Alprazolam Bromazépam Chlordiazépoxide Clobazam Clonazépam Clorazépate Clotiazépam Diazépam Estazolam Ethyle loflazépate GHB Loprazolam Lorazépam Lormétazépam Méprobamate Midazolam Nitrazépam Nordazépam Oxazépam Phénobarbital Prazépam Témazépam Tétrazépam Triazolam Zolpidem HORS TABLEAU Zopiclone 2000 2001 2002 7,26 81,17 14,24 47,21 23,48 11 63 2 494 90 472 254 2 629 87 625 0 4,2 0 8,2 294 16 54 090 532 80 0 1 350 20 181 2 525 128 7 946 0,5 1 096 68 2 558 60 649 206 2 601 96 447 6 5,4 0 3,6 376 46 67 892 981 67 0 1 898 18 684 2 413 189 10 679 0,4 3 261 32,48 2 757 110 566 185 2 836 83 378 9 3 0 4 294 24 63 486 573 176 2 1 890 9 152 1 963 110 7 983 0,4 3 727 1 137 1 249 1 137 L’augmentation importante de la consommation de buprénorphine déjà notée pour l’année 2000, a été attribuée à l’arrivée sur le territoire de toxicomanes aux opiacés sous traitement de substitution par Subutex®. Outre le cas de la buprénorphine, les évolutions les plus remarquables au sujet des importations de médicaments psychotropes concernent trois substances : le flunitrazépam, le phénobarbital et le zolpidem. La consommation de flunitrazépam, molécule employée pour ses propriétés hypnotiques et commercialisée sous le nom de Rohypnol®, a été divisée par 7 en deux ans du fait du durcissement de ses conditions de prescription. Depuis le mois de mars 2001, sa prescription doit se faire sur ordonnance de stupéfiants avec une durée maximale de prescription de 14 jours, non renouvelable. Cette mesure a été prise sur le constat d’usage abusif ou détourné de ce médicament. Situation sanitaire en Nouvelle-Calédonie – Année 2002 - Les stupéfiants I.3.5 – p 5 Les importations de phénobarbital ont été réduites de plus de moitié sur deux ans. Cette diminution majeure coïncide approximativement au retrait du marché d’une quinzaine de spécialités dans la composition desquelles le phénobarbital entrait pour ses propriétés sédatives. Ce retrait du marché avait été prononcé du fait de l’observation de réactions cutanées graves mais extrêmement rares pour des spécialités à base de phénobarbital, l’intérêt en tant que sédatif léger ne compensant pas le risque associé. Cependant, les quantités de phénobarbital importées en Nouvelle-Calédonie avec ces spécialités étaient déjà très faibles et n’expliquent en aucun cas cette diminution. Bien que l’intérêt du phénobarbital dans le traitement de l’épilepsie n’ait à aucun moment été remise en cause, la seule explication de la baisse majeure de l’importation de cette substance réside dans une forte diminution de son utilisation comme antiépileptique au bénéfice probable d’antiépileptiques plus récents. Enfin, l’accroissement considérable des importations de zolpidem, commercialisé pour ses propriétés hypnotiques sous le nom de Stilnox®, est également remarquable. Elles ont en effet été multipliées par plus de 3 en deux ans. Cette augmentation massive des prescriptions n’est expliquée que de façon très partielle par la diminution parallèle de la consommation de flunitrazépam. Aucune autre diminution significative des importations de psychotropes commercialisés comme hypnotique n’étant constatée, il s’agit bien d’une augmentation importante des prescriptions d’hypnotiques en Nouvelle-Calédonie, avec une orientation marquée vers le zolpidem. A noter que cette molécule a été récemment inscrite au tableau IV des substances psychotropes, selon la classification de l’OICS, du fait des risques d’accoutumance et de dépendance liés à son utilisation. p 6 – I.3.5. Les stupéfiants - Situation sanitaire en Nouvelle-Calédonie – Année 2002