
correspondrait à la perte d’indépendance référentielle du N et son
intégration au sein du GV. Mais, il est possible d’arriver à une autre
explication. Par exemple, la séquence faire + N exprime souvent des
procès Relationnels ou Mentaux avec un sémantisme parfois très
régulier : faire + beau, chaud, froid… faire + éclat, face, honte, peur,
rage … faire + banqueroute, chou blanc, défaut, erreur, faillite, fausse
route…. De même, la séquence faire + le / la + N exprime souvent des
procès Matériels ou Comportementaux : faire la + fête, foire, java,
nouba …, faire le + amour, beau, con, enfant, fier, point.... Ces
prosodies ne peuvent être expliquées par la présence ou l’absence de
l’article ; ce sont plutôt des paradigmes formés par analogie à un emploi
prototypique. Les séquences de ce type ressemblent aux « constructions »,
de Goldberg (1995) ou aux « lexical patterns » de Hunston et Francis
(2000). Selon ces deux approches, les séquences grammaticales
possèdent des prosodies sémantiques régulières indépendamment des
lexèmes spécifiques dont elles sont composées (Louw 1993). Nous
verrons plus loin que les constructions VN n’échappent pas à cette
tendance générale.
L’aspect paradoxalement productif du figement a été souligné par
Martinet, qui utilise le terme synthème pour toute expression
idiomatique dans laquelle il est possible de reconstituer les processus de
composition (chemin de fer, poser une question). Le synthème est un
« monème complexe » :
[…] il s’agit d’une unité linguistique signifiante, désignant une notion bien définie,
mais où la forme permet de distinguer des éléments successifs porteurs au départ
de sens distinctifs. (1999, 11)
La cohésion du synthème dépend de sa fonction syntaxique. Les critères
de sa définition sont ainsi:
a) l’impossibilité de déterminer individuellement les monèmes constituants, b)
l’obligation de tout synthème de s’intégrer dans une classe préétablie de monèmes.
(1999, 15)
Mais la littérature sur les parties de discours semble indiquer qu’il est
difficile, sinon impossible, de déterminer des « classes préétablies de
monèmes » (Boisson et al. 1994, Pottier 1994, Sinclair 1991, 1996). De
même, on peut se demander s’il est utile de citer des locutions hors
contexte comme au fur et à mesure (adverbe ou préposition ?) ou avoir
maille à (locution verbale ?), car ces expressions n’ont pratiquement
aucune existence sans des contextes plus étendus (au fur et à mesure +
de / que , avoir maille à + partir avec quelqu’un). Il n’est donc pas
suffisant de pouvoir catégoriser les phénomènes comme les locutions ou
les synthèmes : le fait d’accorder à certaines expressions VN une