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le shofar
par Philippe Lewkowicz
Lorsque, bientôt, nous entendrons sonner le
shofar à T ish r i, nos cœurs et nos â mes v ibre -
ront comme ont vibré ceux de nos frères et
sœurs depuis des générations. Comme ont
vibré aussi le cœur et l’âme des Juifs d’Israël
et du monde entier quand le Grand Rabbin
Goren a soufflé dans la corne de bélier en
juin 1967 lorsque les soldats de Tzahal ont
enfin pu s’approcher du Mur des Lamenta-
tions. A ces occasions, le son du shofar est
l’appel millénaire à l’unité du peuple juif.
C’est un son de vérité et de création.
Quand, par contre, ont retenti les trompet-
tes des assiégeants juifs de Jéricho, les murs
de la cité se sont effondrés. Cette fois le son
était de destruction, même si celui-ci prove-
nait d’un commandement divin.
Au-delà de l’aspect instrumental, le point
commun entre ces moments est l’importance
du rôle du prêtre ou, aujourd’hui, du rabbin ;
c’est lui qui dit comment et quand il faut agir.
Il peut ainsi avoir un immense pouvoir aussi
bien de constr uction que de de st r uction. Fa ce
à un tel pouvoir, il nous est difficile de croire
que ceux qui en sont investis ne soient pas
pleinement conscients de la responsabilité
qui pèse sur eux au moment d’agir. Nous ne
doutons pas qu’ils aient reçu, au cours de leur
formation, les outils et la sagesse nécessaires
pour apprécier le bien et le mal, en d’autres
mots qu’ils aient une attitude éthique.
C’est tellement vrai qu’une grande partie de
la savoureuse littérature ashkénaze raconte
comment, pour chaque acte de la vie, du
plus simple ou plus compliqué, on deman-
dait l’avis ou même parfois l’autorisation du
« rebbe », car « il » sait et on « lui » fait
confiance.
Le mot est lâché : confiance.
Nous sommes encore tous sous le choc de
cette photo du New Jersey où l’on voit deux
rabbins orthodoxes, les mains menottées
dans le dos, emmenés suite au scandale
de corruption, de blanchiment d’argent et
de différents trafics, dont celui d’organes
humains. Parmi les suspects, 5 rabbins et 3
maires.
Pour commettre leurs forfaits, les rabbins
avaient, pour blanchir de l’argent sale, uti-
lisé les canaux des organisations caritatives
communautaires. J’avoue ne pas compren-
dre comment ils ont pu en arriver là. Pour
un rabbin, ne pas voir que cela minerait
la confiance et la crédibilité vis-à-vis des
associations caritatives, cela me dépasse.
Ils ont utilisé la tzedaka – l’acte de justice –
pour commettre l’injustice. Les dégâts sont
importants et seront longs à réparer.
Mais, au-delà des moyens utilisés, exami-
nons le fond du problème. Des hommes
nommés ou élus à des postes de responsabi-
lité et présentant une forte image d’intégrité
usent du pouvoir associé à leurs fonctions
pour commettre des actes que la loi et la
morale réprouvent.
En ce qui concerne les politiques, nous avons
malheureusement en Belgique une certaine
expérience et si cela reste inacceptable, cela
nous surprend moins.
Que des rabbins, des hommes qui prêchent
la rigueur, l’altruisme, le respect des 613
mitzvot, qui se veulent des exemples pour
leurs communautés, se conduisent sous le
manteau comme de vulgaires hors la loi, c’est
au-delà des mots. Le monde juif a assez souf-
Shofar et éthique
LE MOT DU PRÉSIDENT EXÉCUTIF