Zazen 1
L’un des sutras les plus anciens est le Sutra du Diamant, le Kongo Kyo. Celui-ci
a été écrit avant la scission qui eut lieu entre le bouddhisme Hinayana et le bouddhisme
Mahayana. Ce sutra a été commenté de façon extensive par Maître Deshimaru en 1976
et publié dans le recueil I Shin den Shin, aux numéros 84-88, dont peu de gens
disposent actuellement. Nous allons donc suivre ses enseignements, dont je vous lirai
beaucoup de passages, ainsi que certains commentaires de Sangharakshita. De temps à
autre, modestement, j’ajouterai quelques illustrations de façon à projeter l’enseignement
de ce sutra dans notre vie quotidienne, qui aujourd’hui à Genève est différente de celle
des temps passés et de celle définie par des modes de vie d’autres pays.
Kongo signifie diamant : kon, c’est le métal ; go signifie couper tous les doutes,
tous les bonno, tous les attachements. La vraie signification est couper le diamant. Et
donc Kongo Kyo signifie couper le diamant par la sagesse, et non le diamant qui coupe.
C’est à dire que la grande sagesse peut même couper ce qui est le plus dur, le diamant.
Le diamant signifie les bonno qui sont aussi durs que le diamant, le karma aussi.
A l’époque où ce sutra fut écrit l’hinayana et le mahayana n’étaient pas encore
divisés. Pourtant le sutra mentionne que nous ne devons pas ressembler aux gens qui
suivent une voie étroite, mais chercher la Voie dans la foi et donc il annonce, et est
même la source, du bouddhisme mahayana. Alors comment approcher déjà le titre du
sutra : la sagesse qui coupe les attachements ?
Généralement dans l’esprit de beaucoup de gens le terme sagesse évoque un état
dans lequel quelqu’un est devenu un vrai sage. Il maîtrise la patience, l’éthique, fait
preuve d’un jugement impartial, ne se met pas en colère, est d’humeur toujours égale,
écoute les autres avec attention et met en pratique toutes les qualités que la vie lui a
apprises grâce aux efforts qu’il a fournis. C’est plutôt une image de l’âge mûr, voir du
vieux sage consulté par le village sur toutes les questions de conflit. Cela correspond un
peu au personnage de l’arhat, auquel aspirent tous les auditeurs, les Sravakas, dans le
bouddhisme hinayana. Tous les bonnos doivent être coupés, tous les attachements
abandonnés, comme si cet être pouvait annihiler en lui-même l’énergie brute, animale et
spontanée qui l’habite dès sa naissance. Un tel volontarisme risque de se transformer en
mortification et en lassitude, la joie disparaît, le bonheur d’être vivant se dissout, on
peut quasiment dire que l’on serait comme en dehors de la vie qui est en constant
changement. N’est-ce point une illusion ?
Bien sûr les gens sont attirés par leurs bonnos et souvent s’en trouvent
prisonniers. Mais aussi les bonno sont nécessaires et vitaux sinon c’est l’extinction, la
disparition des phénomènes et la fin de l’activité, la fin de la vie, la mort, dit Maître
Deshimaru. Mais aussi, cela apparaît contradictoire, il faut aussi couper les bonno sinon
il ne peut y avoir le moindre espoir d’accéder à la grande sagesse. Dans le bouddhisme
mahayana, ceci est très important car les bonno eux-mêmes, toutes nos illusions sont la
source de notre éveil. Le mahayana ne prêche aucunement l’ascétisme. La grande
sagesse du bodhisattva est de comprendre vraiment que tous les phénomènes sont sans
existence propre et ne résultent que de la chaîne des causes et des effets. Il ne s’agit