des mots ou des phrases, les bordures de la route, mais aussi marcher sur un trottoir sans en sortir, et apparier des chaussettes
noires, grises et blanches.
Après l'implantation, 19 des 30 patients n'ont pas eu d'effets secondaires en rapport avec l'appareil ou la chirurgie. En revanche,
onze participants ont subi 23 événements indésirables graves : érosions conjonctivales, endophtalmies, déhiscences
conjonctivales, décollements de la rétine, déchirement de rétine, ré-attachements du clou rétinien, inflammation, hypotonies, ulcère
cornéen infectieux, kératite infectieuse, opacité cornéenne, uvéite.
Plus d'une centaine d'évènements indésirables non graves liés au dispositif ou à la procédure a été recensée, principalement des
congestions conjonctivales, des hypotonies, des décollements choroïdiens, des irritations au niveau de la suture et des douleurs
oculaires.
France : un avis plus mitigé
En France, la Commission Nationale d'Evaluation des Dispositifs Médicaux et des Technologies de Santé (CNEDiMTS) a estimé,
en novembre 2012, que le Service Attendu de l'Argus II était insuffisant pour l'inscription sur la liste des Produits et Prestations
prévue à l'article L.165-1 du code de la sécurité sociale : « Compte tenu du faible niveau de preuve des données fournies, l'intérêt
du système ARGUS II ne peut être établi, dans la prise en charge de patients atteints de rétinopathie pigmentaire [3]. »
Le groupe de travail chargé de l'évaluation souligne plusieurs limites de l'étude de faisabilité :
les tests évaluant la fonction visuelle sont réalisés dans des conditions de contraste extrêmes, éloignées de la vie réelle ;
en fonction du temps, un même test peut être réalisé sous des modalités différentes (test de la capacité à suivre une ligne
au sol et de la reconnaissance d'une porte) ;
il n'est pas garanti que le recueil des mesures du questionnaire FLORA (capacité à réaliser des tâches de la vie
quotidienne) soit indépendant (possibilité d'intervention d'un technicien de la firme) ;
l'étude ne permet pas d'évaluer les effets à long terme (au-delà de 3 ans) de la stimulation électrique chronique sur la rétine
et le nerf optique ;
à 12 mois, le système ne semble pas améliorer la qualité de vie des patients. Au-delà de 12 mois, les résultats ne sont pas
interprétables compte tenu du nombre important de données manquantes.
Le 12 décembre, le Collège de la Haute Autorité de Santé a recommandé un recueil de données cliniques complémentaires avec
un encadrement spécifique en proposant la mise en oeuvre d'une prise en charge temporaire et dérogatoire de la prothèse
épirétinienne ARGUS II au titre de l'article L.165-1-1 du code de la sécurité sociale [2].
Cette dérogation repose sur « le caractère innovant du dispositif, le caractère orphelin de la pathologie concernée, l'absence
d'alternative thérapeutique, le fort potentiel d'amélioration de la qualité de vie des patients, le fort potentiel de compensation du
handicap lié à la cécité et la probable balance bénéfice / risques favorable. »
Le groupe de la HAS estime que les indications du système ARGUS II devraient se restreindre aux patients atteints de rétinopathie
pigmentaire dont l'acuité visuelle se limite à la détection des mouvements de la main mais ne comptant pas les doigts (perception
résiduelle de la lumière > 2,9 LogMar) et ayant eu une vision utile des formes dans le passé.
L'agence souligne que « le patient doit être informé sur les incertitudes relatives à l'efficacité de la technique et de ses possibles
complications afin d'éviter une demande d'explantation au motif d'un défaut de satisfaction. »
Le développement du dispositif a été soutenu financièrement par trois agences gouvernementales (Department of Energy,
National Eye Institute au NIH et National Science Foundation).
L'étude de faisabilité a été financé par le fabriquant : Second Sight Medical Products.
Références
1. Communiqué FDA. FDA approves first retinal implant for adults with rare genetic eye disease. 14 février 2013
2. Vidéo de présentation du système par le fabriquant (en anglais).
3. Groupe de travail mandaté par la HAS 2012. Evaluation d'une prothèse épirétinienne et de son acte d'implantation. 12
décembre 2012.
Aude Lecrubier
Diplômée d'une maîtrise de biologie moléculaire (Paris VI) et d'un Master de journalisme scientifique et médical (New York