Les progrès de la science nous permettent d`aller vers une

Santé Mag: Comment se présente la
réunion de concertation pluridiscipli-
naire (RCP), en Algérie ?
Pr Kamel Bouzid: La réunion de concer-
tation pluridisciplinaire, en Algérie,
n’existe que par la volonté des person-
nels soignants et par le souhait des pa-
tients, qui ne sont pas sans ignorer l’in-
térêt de cette approche thérapeutique,
pour leur bien-être.
En eet, pour une bonne prise en charge
d’une maladie, il faut que plusieurs spé-
cialistes agissent en synergie. En ORL,
par exemple, il y a une RCP à Blida et
une autre à Alger. Léquipe, dans ce cas
précis, sera composée d’au moins trois
spécialistes; à savoir, un chirurgien ORL,
un radiothérapeute et un oncologue
médical. Dans d’autres cas, l’équipe de
la RCP sera élargie au médecin de l’ana-
tomopathologie, un imageur, le méde-
cin-référent, le praticien, qui intervient,
en amont et en aval, dans les soins de
support.
Le problème, en Algérie, est que la RCP
est, certes, prévue dans le Plan national
de lutte anti-cancer; mais, n’est pas, en-
core, rendue obligatoire. Nous espérons
qu’elle le soit, le plus tôt possible.
Néanmoins, la RCP fonctionne, déjà, au
niveau des traitements des cancers di-
gestifs et des cancers neuroendocrines
et est coordonnée par le professeur
Mohamed Oukkal.
En tout état de cause, il est à souligner
que la RCP est le seul moyen de faire
progresser le pronostic vital de nos
malades.
Le patient assiste-t-il à la RCP-réu-
nions ?
Pour l’heure, ce n’est pas une recom-
mandation; mais, ce serait bien que le
patient assiste aux réunions de concer-
tation pluridisciplinaire, étant donné
que le maître-mot du Plan national de
lutte anti-cancer est de mettre le patient
au centre de la stratégie thérapeutique.
Qui décide, au demeurant, du traite-
ment à administrer au patient ?
La décision est prise de manière consen-
suelle, au sein de l’équipe, où chacun
avance ses arguments scientifiques. Je
reprendrais l’exemple du cancer ORL, où
la tendance est, aujourd’hui, à la préser-
vation du larynx et de sa fonction, par
un traitement optimal visant la réduc-
tion de la tumeur. De toute évidence, le
choix du traitement dépend de la loca-
lisation de la tumeur et de son stade
d’évolution.
Lorsqu’il n y a pas d’autres moyens que
l’ablation, doit-on informer, directe-
ment, le patient ?
Directement, non. Toutefois, le patient
a le droit d’être informé et le médecin
est tenu de le faire, en toute honnêteté,
dans ce qu’on appelle le programme
personnalisé de soins, relatif à certaines
techniques; en l’occurrence, lorsqu’il
s’agit de devoir procéder à l’ablation
du larynx. Toujours est-il, le patient a
le droit de refuser une laryngectomie,
dans le cas du cancer du larynx, ou, par
ailleurs, une colectomie, pour le cancer
du côlon. Léquipe ira, alors, vers une
autre thérapie, en tenant compte de son
point de vue.
Les progrès de la science
nous permettent d’aller
vers une médecine personnalisée
Pr Kamel Bouzid* à Santé Mag
Propos recueillis par Tanina Ait
Le problème, en Algérie, est que la RCP est, certes, prévue dans le Plan
national de lutte anti-cancer; mais, n’est pas, encore, rendue obligatoire
Santé-MAG N°51 - Mai 201
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Propos recueillis par Tanina Ait
Des acquis, mais beaucoup
reste à faire dans la lutte
anti-tabac
Pr Mustapha Boubrit* à Santé Mag
Le "testing" des mutations du biomar-
queur (RAS) par biopsie liquide repré-
sente une avancée majeure. Est-il pra-
tiqué, en Algérie?
Tout à fait. Ce test est pratiqué après le
diagnostic; notamment, dans le cas du
cancer colorectal métastatique, de sorte
à choisir le type de thérapie ciblée, en
fonction du stade tumoral. Cela est pra-
tiqué sur la pièce opératoire prélevée.
A cet eet, notre collègue de Nice,
le professeur Gérard Milano, qui est
membre de plusieurs conseils scienti-
fiques, dont la Ligue nationale contre
le cancer, nous a présenté les nouvelles
techniques par biopsie liquide, qui
permettent, sans faire de biopsie, de
connaître le stade de la tumeur, afin de
prescrire le traitement idoine au patient.
En outre, je rappellerai, nonobstant le
prix fort élevé de ces médicaments, il y
a leurs eets secondaires indésirables,
qui sont diciles à gérer et peuvent,
même, être mortels; que ce soit l’anti-
EGFR ou l’anti-VEGF.
Ceci est, donc, à la limite de la méde-
cine légale. En eet, administrer un trai-
tement au patient, dont on ne sait pas
s’il s’avérera ecace, est une lourde res-
ponsabilité, pour le praticien.
C’est pour cela que le test RAS sert à
guider l’oncologue, afin de prescrire le
meilleur traitement, qui correspond à
chaque malade; c'est-à-dire, une thé-
rapie ciblée et comme vient de le dire
notre collègue, le professeur Gérard Mi-
lano, dans sa communication, «un bon
médecin soigne une maladie, un grand
médecin soigne un patient sourant
d’une maladie».
Donc, de plus en plus, on se dirige vers
une médecine personnalisée
* Professeur Kamel Bouzid,
chef de service d’oncologie médicale, au
CHU Mustapha Bacha- Alger.
- Président de la Société algérienne
d’oncologie médicale.
Santé Mag: Peut-on parler, aujourd’hui,
grâce aux mesures émises par l’OMS,
que l’Algérie a, d’ailleurs, adoptées, de
progrès dans la lutte anti tabac ?
Pr Mustapha Boubrit: Eectivement,
nous constatons, indéniablement, des
avancées, puisque nous ne voyons pas
de personnes fumer dans les lieux pu-
blics, les transports, les salles de réu-
nions, à l’intérieur des entreprises; car,
cela est interdit, sous peine de sanction
et mêmes les zones fumeurs ont ten-
dance à disparaître des espaces collec-
tifs; ce qui est une bonne chose en soi.
Néanmoins, des progrès restent à faire,
pour dissuader les jeunes d’apprendre à
fumer; c’est cela, le nœud gordien.
Justement, par rapport au Plan cancer,
quels sont les objectifs, dans ce sens ?
Dans ce cadre, plusieurs objectif sont fixés;
notamment, la dissuasion de prendre
sa première cigarette, pour l’enfant et
l’adolescent. Aussi, nous devons agir, en
l’occurrence, dans les écoles, les collèges,
les lycées, ainsi que dans les universi-
tés. Cette sensibilisation s’avère positive,
car nous agissons à l’aide d’images qui
frappent les esprits, sur les conséquences
du tabagisme sur la santé. Cette sensibili-
sation s’entreprend en continu et non pas
par des campagnes intermittentes, sinon
cela ne peut être positif, car on oublie très
vite ces images choquantes. En tout état
de cause, tout le monde doit s’impliquer,
les parents, l’école, les médias, les pro-
fessionnels de la santé, les stars du foot-
ball et les artistes. Ces derniers ont une
grande influence sur la psychologie des
jeunes, qui s’identifient, inconsciemment,
à eux. Ils doivent, donc, s’impliquer.
Il importe de dire que fumer est une fai-
blesse de l’être humain, à la recherche de
dérivatifs à ses angoisses et si ce n’est le
tabac, cela peut-être autre chose. C’est
dire, par ailleurs, si le sevrage est di-
cile à obtenir; aussi, l’action de sensibili-
sation doit être menée, également, vers
les parents, qui ne doivent pas donner le
mauvais exemple à leurs enfants et faire
prendre conscience, à ces mêmes parents,
des impacts négatifs sur l’avenir de leurs
enfants, s’ils sont touchés par un cancer.
Qu’en est –il des centres de sevrage ?
Comme je vous disais tantôt, le sevrage
est une opération tres dicile. C’est
pourquoi l’action est, d’abord, à me-
ner vers les jeunes. Ceci étant, il existe
eectivement des centres d’aide au
sevrage, d’autres vont ouvrir; mais, tou-
jours est-il que le sevrage pendant un
temps à des eets diciles sur le plan
psychologique, car la personne peut de-
venir violente, à cause de son addiction
à la nicotine. C’est dire si le tabagisme
est dangereux
* Professeur Mustapha Boubrit,
chef du service de radiologie, à l'hôpital
de Béni-Messous.
- Membre du comité de pilotage et
d’évaluation du Plan cancer.
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