Le séquestre cornéen chez le chat

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Focus 015
20 avril 2011
Le séquestre cornéen chez le chat :
Quels sont les traitements possibles ?
Par Dr Franck Ollivier, DMV, Ph.D, Dipl. ACVO et ECVO
Le séquestre cornéen félin est une pathologie oculaire fréquente, caractérisée par une pigmentation brunâtre
de la cornée avec fréquemment un écoulement de même couleur. Cette pigmentation peut être plus ou moins
intense et s’accompagner d’un œdème et de vascularisation cornéens (fig. 1 et 2). La douleur oculaire
engendrée est plus ou moins importante (avec un blépharospasme, un épiphora plus ou moins marqué).
Cette maladie est considérée comme spécifique du chat, mais elle a été décrite chez le cheval et chez un
chien. Le séquestre, généralement unilatéral, peut se développer rapidement ou rester atone. Certaines races
de chats semblent prédisposées (Persan, Colorpoint, Himalayen, Birman et Siamois). Les symptômes
apparaissent chez des individus âgés de 2 à 7 ans. La pathogénie de cette maladie de la cornée n’est pas très
bien établie. Des pathologies entraînant un traumatisme de la cornée ou une irritation chronique de celle-ci
comme la brachycéphalie, les pathologies des annexes de l’œil (entropion, trichiasis), des anomalies du film
pré-cornéen, des kératites herpétiques (dues à VHF-1), des dystrophies primaires de la cornée sont
suggérées comme des facteurs prédisposant au séquestre.
Les diagnostics différentiels possibles pour une lésion pigmentée de la cornée sont un séquestre cornéen, un
dermoïde cornée, une tumeur (mélanome du limbe), une kératite pigmentaire, une hernie de l’iris et un corps étranger
cornéen.
1.
2.
Le séquestre peut se développer rapidement ou rester statique et le choix thérapeutique va dépendre de cette
évolution : du traitement médical conservateur dans les cas où le séquestre est plus superficiel et la douleur moindre, au
traitement chirurgical dans les cas où le séquestre est plus profond et la douleur plus importante.
Les traitements médicaux peuvent inclure des larmes artificielles, des lentilles de contact thérapeutiques, des
collyres d’interférons alpah-2b, d’antibiotiques, d’antiviraux. Le séquestre peut éventuellement se détacher du stroma
sous-jacent de façon naturelle; cela peut prendre des mois à des années. Cette guérison est donc généralement plus
lente à obtenir avec un traitement médical qu’avec un traitement chirurgical.
Les traitements chirurgicaux du séquestre qui ont été décrits sont variés mais les kératectomies lamellaires avec
ou sans greffe sont les procédures les plus fréquemment effectuées. L’exérèse chirurgicale par une kératectomie lamellaire
du séquestre cornéen constitue le premier temps chirurgical des différentes techniques proposées pour traiter un
séquestre. Sous anesthésie générale, l’épithélium cornéen non adhérent est débridé, le séquestre cornéen est retiré,
laissant une perte de substance cornéenne plus ou moins large, atteignant une profondeur variable : l’objectif étant de
retirer tout tissu cornéen ayant une décoloration brunâtre. (fig. 3 a,b,c) En effet, 38% de rechutes ont été observées lors
de kératectomie incomplète, ce qui suggère que la persistance de pigmentation résiduelle peut être un facteur de risque
de récidive.
Traitement chirurgical : la kératectomie lamellaire, un premier temps chirurgical commun a toute technique chirurgicale du traitement
du séquestre cornéen (fig. 3 a,b,c)
3a
3b
3c
Un risque de récidive de la pigmentation est possible mais semble moindre si une kératectomie est suivie d’une greffe. Un
taux de 12% de rechute est observé après une kératectomie complète seule alors qu’aucune rechute n’est observée
lorsque la kératectomie a été suivie d’une transposition conjonctivo-cornéenne par exemple.
Les greffes suivant la kératectomie lamellaire décrites dans ces cas-là sont : des greffes de conjonctive, des greffes
autologues (dans le cas de la transposition conjonctivo-cornéenne ou TCC) ou hétérologues (kératoplastie lamellaire), et
des greffes de biomatériaux (sous muqueuse d’intestin ou de vessie de porc Biosist, membrane amniotique). Parmi ces
techniques, la TCC est très intéressante. Celle-ci est préconisée pour des pertes de substances cornéennes des petites et
centrales car les résultats obtenus sont plus cosmétiques et fonctionnels (visuel). Une meilleure transparence cornéenne
est obtenue avec une TCC car la cicatrice cornéenne est bien moins importante que lors d’une greffe de conjonctive (fig.
4 a,b,c,d).
Traitement chirurgical :deuxième temps, perte de substance cornéenne comblée par une transposition
conjonctivo-cornéenne (fig 4 a,b,c,d)
4a. Initial
4b. 4 semaines post-op
4c. 24 semaines post-op
4d. 40 semaines post-op
Références:
Andrew SE, Tou S, Brooks DE. Corneoconjunctival transposition for the treatment of feline corneal sequestra: a retrospective study of 17 cases (1990-1998). Vet
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Featherstone HJ, Sansom J, Heinrich CL. The use of porcine small intestinal submucosa in ten cases of feline corneal disease. Vet Ophthalmol 2001;4:147-153.
Featherstone HJ, Sansom J. Feline corneal sequestrum: a review of 64 cases (80 eyes) from 1993-2000. Vet Ophthalmol 2004;7:213-227.
Gimenez MT, Farina IM. Lamellar keratoplasty for the treatment of feline corneal sequestrum. Vet Ophthalmol 1998;1:163-166.
Morgan RV. Feline corneal sequestration: A retrospective study of 42 cases (1987-1991). J Am Anim Hosp Assoc 1994;30:24-28.
Textes : Dr Franck Ollivier
Conception graphique :
Isabelle Paquette
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