La correction optique de l’anomalie de réfraction oculaire avant le développement du
strabisme peut prévenir tant le strabisme que l’amblyopie8, 12.
Un autre point de confusion provient du fait que, si le strabisme survient suite à des
anomalies de la réfraction oculaire dans le développement de l’amblyopie, le risque
amblyogène associé au strabisme, une fois présent, est plus important que celui associé aux
anomalies de la réfraction oculaire. Le tableau 1 rassemble des données de plusieurs
études1, 8-10, 13, 16-21 pour préciser les risques d’amblyopie et de strabisme relatifs aux
principaux facteurs amblyogènes.
Résumé : Il est bien connu que les
anomalies de la réfraction* oculaire jouent
un rôle déterminant dans la genèse de
l’amblyopie*. L’objectif actuel d’un
dépistage précoce des troubles de la
fonction visuelle est de rechercher ces
anomalies de réfraction ainsi que le
strabisme et les opacités des milieux
intraoculaires. Ce numéro de Update
présente une revue de la fréquence des
anomalies de la réfraction oculaire dans la
population d’âge préscolaire*, du risque
amblyogène et des différentes méthodes de
dépistage des troubles de la réfraction
oculaire, y compris le matériel requis, les
coûts et la performance diagnostique.
(Comprehensive Ophthalmology Update 7:
63-75, 2006)
Mots-clés : facteurs amblyogènes •
amblyopie • troubles de la réfraction
oculaire • dépistage des troubles de la
réfraction oculaire • méthodes de dépistage
des troubles de la fonction visuelle
Le Dr Cordonnier est affiliée à l’Université
Libre de Bruxelles, Service d’ophtalmologie,
Bruxelles, Belgique.
Adresse de demande de nouvelle
publication : Monique Cordonnier, MD,
PhD, Université Libre de Bruxelles, Service
d’ophtalmologie, 808, Route de Lennik,
1070 Bruxelles, Belgique e-mail :
Introduction
Comme le strabisme* et les anomalies de la
réfraction oculaire sont des causes
d’amblyopie étroitement liées entre elles, les
chiffres attribuant la responsabilité de l’une
ou l’autre cause à l’amblyopie dépendent de
l’âge des sujets étudiés et de la recherche
effective d’anomalies de la réfraction
oculaire. Par exemple, une étude1réalisée en
1966 parmi 1215 enfants belges âgés de six
à dix ans a trouvé 52 (4%) cas d’amblyopie.
54% de ces cas étaient causés par le
strabisme, et 38% par un trouble de la
réfraction oculaire. De même, un traité2et
des revues générales3antérieurs ont attribué
au strabisme le rôle principal dans la genèse
de l’amblyopie. Cependant, des études4-6
plus récentes mesurant la réfraction chez des
enfants plus jeunes, âgés de trois à sept ans,
donnent aux anomalies de la réfraction
oculaire un rôle prépondérant dans la
genèse de l’amblyopie (Figure 1) : 55% à
65% de cause réfractive à l’amblyopie pour
25% à 45% de cause d’origine strabique.
D’autres causes rares de l’amblyopie sont les
opacités des milieux intraoculaires, le
ptosis* et le nystagmus* moteur7. La
discordance entre les études plus anciennes
et les études plus récentes émane du fait que
les troubles de la réfraction, tels que
l’anisométropie* et en particulier
l’hypermétropie*, peuvent conduire
ultérieurement au strabisme8-12. Comparée à
l’ésotropie* précoce survenant avant l’âge de
six mois et dont la prévalence est faible (+/-
1%)8, 13, l’ésotropie accommodative est au
moins deux fois aussi fréquente et apparaît
le plus souvent après l’âge de deux ou trois
ans14, 15. Si les données concernant la
réfraction sont inconnues, on peut attribuer
à tort une amblyopie à une ésotropie
d'origine accommodative. En réalité, c’est le
trouble de la réfraction oculaire qui favorise
le strabisme et conduit à l’amblyopie.
Chronique
médicale
ATTENTION AUX FAUX
DÉMARCHEURS!
Des personnes malhonnêtes vendent des objets
soi-disant au profit des «Amis des Aveugles».
C’est inexact.
Si vous voulez aider notre A.S.B.L., versez plutôt
vos dons au compte de l’Association mais
n’achetez rien à ces imposteurs.
Plein Jour •N°4/2009 3
PRATIQUE CLINIQUE: Dépistage des troubles de la réfraction oculaire chez l’enfant
MONIQUE CORDONNIER, MD, PhD COMPREHENSIVE OPHTHALMOLOGY UPDATE VOLUME 7, n° 2 - MARS-AVRIL 2006
Fig. 1. Rôle proportionnel moyen (%) des facteurs amblyogènes dans la genèse de l’amblyopie parmi les enfants
âgés de trois à sept ans.
Les mots définis dans ce glossaire seront signalés
par un astérisque* lorsqu’ils apparaissent pour la
première fois dans le texte du présent travail
Age préscolaire: enfant de 6 mois à 5 ans.
Age scolaire : enfant de 5 ans à 18 ans.
Accommodation: correspond à un changement de
forme du cristallin causé par la contraction du muscle
ciliaire situé à l'intérieur de l'œil. L'innervation de ce
muscle dépend du système parasympathique.
L'accommodation permet de focaliser les images plus
près du centre optique de l'œil. Elle est nécessaire pour
l'activité de lecture chez la plupart des sujets. Elle est
aussi nécessaire en dehors de l'activité de lecture chez les
hypermétropes car elle permet de compenser
partiellement ou totalement ce défaut sans
intermédiaire de lunettes.
Amblyopie: mauvaise vision par défaut d'expérience
visuelle entraînant une anomalie de développement du
cortex visuel. N'implique pas nécessairement un défaut
de structure de l'œil.
Amétropie: état contraire à l'emmétropie, défaut réfractif
significatif.
Anisométropie: désigne un état réfractif d'un œil
différent de celui de l'autre.
Astigmatisme: amétropie cylindrique. Défaut réfractif de
l'œil responsable d'un flou des repères visuels orientés
selon un méridien.
Axe: lorsqu'on parle d'astigmatisme, oriente la direction
à donner au cylindre pour corriger cet astigmatisme.
L'axe se quantifie en degrés, le degré zéro correspondant
au méridien horizontal.
Cycloplégie: paralysie de l'accommodation. En clinique,
celle-ci est obtenue avec des gouttes qui diminuent la
contraction du muscle ciliaire (effet
parasympathicolytique).
Cylindre: correspond à un des trois paramètres
caractérisant la réfraction d'un œil. Le cylindre se
quantifie en dioptries et caractérise l'astigmatisme. Il est
orienté en degrés par la valeur de son axe qui
accompagne toujours une valeur de cylindre.
D=dioptrie : unité de mesure des anomalies réfractives.
Correspond à l'inverse de la distance focale (en mètres)
de l'œil concerné.
Emmétropie: état réfractif « idéal» d'un œil qui fait que
les images d'objets situés au loin sont exactement
focalisées sur sa rétine sans aucun besoin de correction
optique ni d'accommodation.
Esotropie : désigne un strabisme convergent.
Hypermétropie ou hyperopie: amétropie sphérique.
Défaut réfractif d'un œil responsable d'un flou global
des repères visuels qui sont focalisés en arrière de la
rétine. Cette défocalisation peut être en partie
compensée par l'accommodation.
Myopie: amétropie sphérique. Défaut réfractif d'un œil
responsable d'un flou global des repères visuels, les
images d'objets situés au loin étant focalisées en avant
de la rétine.
Nystagmus: désigne un mouvement involontaire de va-
et-vient permanent des yeux.
Ptosis: terme utilisé pour désigner une paupière
supérieure tombante. S'il est important, le ptosis peut
constituer un obstacle à la pénétration de la lumière
dans l'œil.
Réfraction: se rapporte aux caractéristiques réfractives
d'un œil (myopie, hypermétropie, astigmatisme). La
réfraction d'un œil s'exprime communément par trois
paramètres: la sphère, le cylindre et l'axe.
Rétinoscopie ou skiascopie : correspond à une
technique de mesure de la réfraction. L'examinateur
dirige vers l'œil une fente lumineuse à laquelle il
imprime un mouvement de va et vient et il analyse la
manière dont le fond d'œil réfléchit cette fente
lumineuse, celle-ci étant directement liée à la réfraction
de l’œil examiné.
Sphère: correspond à un des trois paramètres
caractérisant la réfraction d'un œil. Elle se quantifie en
dioptries et correspond à l'hypermétropie si elle est
positive, la myopie si elle est négative.
Strabisme: communément parlant, quelqu'un qui a du
strabisme est quelqu'un qui louche. Correspond à un
désalignement des yeux: un œil fixe avec la macula,
l'autre pas. Le strabisme se quantifie en dioptries
prismatiques ou en degré. On peut loucher beaucoup ou
si peu que cela ne se voit pas.
GLOSSAIRE
TABLEAU 1
Le risque d’amblyopie et de strabisme en fonction des principaux facteurs amblyogènes
Facteur amblyogène Amblyopie (%)
Strabisme
Vereecken 1(enfants 6 à 10 ans) 53
Friedmann 13 (enfants 1 à 2,5 ans) 41
Quéré 16 (âge moyen = 7,5 ans) 47
Latvala 17 (enfants 1 à 6 ans) 52
Shaw 17 (enfants 1 à 15 ans) 45
Malbran 19 (âge inconnu) 65-70
Anomalie réfractive Risque amblyogène (%) Risque strabogène (%)
sous cycloplégie à 1 an à 4 ans à 4 ans
Hypermétropie (> 3,5 D)
Abrahamsson 20 24
Atkinson 837,5 21
Ingram 10 48 45
Astigmatisme (> 1 D)
Abrahamsson 20 7 (5 à 35)*
Astigmatisme (> 1,5 D)
Ingram 10 9,3
Anisométropie (> 1 D)
Abrahamsson 21 10,3 à 28,6*
Anisométropie (> 3 D)
Abrahamsson 960 25
Les études portant sur le strabisme font une estimation de la proportion d’amblyopie parmi les
patients présentant un strabisme concomitant chez les enfants âgés de un an à quinze ans 1, 13, 16-19. Les
études portant sur le risque amblyogène et strabogène dû aux anomalies de la réfraction oculaire sont
menées à différents moments dans la même population (la réfraction est mesurée à l’âge d’un an, le
strabisme et l’amblyopie sont évalués à l’âge de quatre ans environ) 8-10,20,21.
* Différents scores selon que l’anomalie de la réfraction oculaire diminue, persiste ou augmente entre
l’âge d’un an et l’âge de quatre ans.
Enfin, bien qu’il y ait de nombreuses preuves que des troubles de la réfraction oculaire précèdent le
strabisme et l’amblyopie chez de nombreux enfants, l’inverse peut parfois se produire, ce qui est une
cause supplémentaire de confusion : dans l’amblyopie unilatérale, l’œil fixateur, quant à son statut
réfractif, devient plus myope, tandis que l’œil amblyope reste hypermétrope, ce qui conduit à une
anisométropie secondaire 22.
NUMEROS DE COMPTE
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numéros de compte? Pas d’inquiétude!
Ils ont été prévus pour donner à notre
administration un meilleur moyen de
contrôle sur nos rentrées.
Vous n’avez donc aucune crainte à avoir
lorsque vous utilisez le bulletin de virement
qui est joint à votre périodique.
Encore merci pour votre précieuse aide!
Point fort n°1
Les anomalies de la réfraction oculaire ont un rôle prépondérant dans la genèse de
l’amblyopie. Parmi elles, la cause la plus fréquente de strabisme et d’amblyopie est
l’hypermétropie forte.