O OP PH HT TA ALLM MO OLLO OG GIIE E 26 LE DEPISTAGE VISUEL DES ENFANTS : UN ENJEU DE SANTE PUBLIQUE Un enfant sur six est atteint d’une anomalie visuelle. Défauts de réfraction*, amétropies (myopie, hypermétropie, strabisme, amblyopie ou astigmatisme), maladies congénitales : plus le dépistage est effectué tôt, plus les chances d’amélioration ou de guérison sont grandes. *Réfraction : mesure et correction des amétropies 18 % des enfants souffrent d’un trouble visuel, soit 125.000 enfants par année d’âge. Pour protéger leurs yeux, il est indispensable d’en prendre soin très tôt. En cas d’anomalie, le moment du diagnostic est décisif. A la naissance, en effet, les cellules visuelles du cerveau sont immatures et sensiblement identiques, c’est le fait de les utiliser qui va entraîner leur spécialisation : si un œil ne fonctionne pas (ce qu’on appelle l’am- Parents, soyez vigilants ! • si vous voyez une lueur blanche dans la pupille de votre bébé •si votre enfant plisse les yeux •s’il se frotte souvent les yeux •s’il ferme un œil au soleil •s’il penche la tête pour regarder (torticolis) •s’il a souvent un œil ou les deux yeux blyopie), ces cellules ne se différencieront pas. Résultat : l’enfant ne verra pas d’un œil, n’aura pas de vision binoculaire et son appréciation du relief sera donc mauvaise . Seul le dépistage systématique et la coopération active des parents, du médecin de famille, du pédiatre et de l’ophtalmologiste permettront de déceler un trouble à temps et de le prendre en charge en limitant ou en éliminant toute séquelle pour la vision future de l’enfant. Tout se joue avant 3 ans Quels sont les dépistages souhaitables ? On peut globalement regrouper les enfants en 3 catégories : • les enfants qui présentent des signes d’appel, tels pupille blanche ou reflet blanc dans l’œil, strabisme, larmoiement, nystagmus (mouvements anormaux des yeux)… Il faut alors impérativement consulter d’urgence. • les enfants à risques : ceux qui sont issus d’une famille à lunettes ou dont l’un des membres (parents mais aussi tante, cousin, etc.) présente un strabisme ; les enfants nés dans des familles où existent des pathologies oculaires ; enfin, les prématurés et les bébés qui ont souffert de problèmes néo-natals. La prévention est primordiale : les pédiatres doivent en être conscients et demander lors du bilan de santé de 9 mois, prévu dans le carnet de santé, un examen ophtalmologique systématique. Ces enfants à risques doivent impérativement être examinés avant 1 an. On peut, en effet, dès les premiers mois évaluer la réfraction et la motilité oculaire (voir si les yeux se déplacent normalement quand ils suivent un objet qui bouge). Le partenariat avec les pédiatres demanderait d’être renforcé mais la disparition programmée des médecins spécialistes des enfants rend cette coopération de plus en plus difficile. • Tous les autres enfants sans risque particulier : pour ceux-là, 2 ans et demi à 3 ans est l’âge idéal pour réaliser un examen complet. L’enfant peut alors répondre aux tests d’acuité visuelle verbalement ou par la méthode d’appariement et aux tests de relief ; l’étude de la réfraction, du fond d’œil et de la motilité oculaire font partie du bilan ophtalmologique complet. “ On peut, en effet, dès les premiers mois évaluer la réfraction et la motilité oculaire ” Les principales pathologies dépistées sont l’amblyopie (un œil qui ne " travaille " pas), les strabismes (l’enfant louche, de façon évidente ou non, mais le risque LE DEPISTAGE VISUEL DES ENFANTS : UN ENJEU DE SANTE PUBLIQUE d’amblyopie est le même) et les troubles de la réfraction (myopie, hypermétropie, astigmatisme) d’un œil ou des deux. Sur le plan de la santé publique, un examen systématique à 3 ans, pris en charge à 100 %, permettrait de traiter à temps des enfants dont on ne dépiste aujourd’hui les anomalies visuelles que lors de l’apprentissage de la lecture, à un moment où il n’est plus possible de guérir totalement une amblyopie et bien tard pour obtenir une bonne acuité visuelle chez les enfants souffrant de fortes amétropies (myopie, hypermétropie ou astigmatisme). Seul l’ophtalmologiste, par l’étude de la réfraction, pourra dépister une anisométropie (différence de réfraction entre les deux yeux), grande génératrice d’amblyopie méconnue ou dépistée trop tardivement au bilan de 4 ans, car sans signe d’appel (l’enfant n’est pas gêné puisqu’un œil voit bien). Enfin, chez l’enfant comme chez l’adulte, c’est au cours d’une consultation pour prescription de lunettes que l’ophtalmologiste peut orienter son examen sur une maladie associée (rétinopathie diabétique débutante, examens électrophysiologiques oculaires en cas d‘antécédents familiaux de maladies rétiniennes héréditaires…). C’est la précocité du diagnostic, et donc du traitement, qui évitera l’apparition de complications redoutables pour la vision. L’ophtalmologiste est beaucoup plus qu’un prescripteur de verres. Ses années d’études en médecine générale et ses stages dans différents services spécialisés lui ont appris que des troubles visuels apparemment banals peuvent être associés à des pathologies graves. O OP PH HT TA ALLM MO OLLO OG GIIE E Le strabisme 4 % des enfants, soit 30.000 par année d’âge souffrent de strabisme. 85 % des strabismes apparaissent avant 2 ans. La moitié des enfants qui louchent, de façon visible ou non, souffre également d’amblyopie. Plus tôt les yeux sont droits, plus l’enfant a de chances d’avoir une certaine appréciation du relief. La récupération est meilleure si le strabisme est pris en charge dès son apparition (80 % d’amélioration à 3 ans, 30 % à 6 ans et 5 % à 10 ans). D’où l’importance d’emmener son enfant chez l’ophtalmologiste dès qu’il se met à loucher. En cas d’antécédents familiaux, les parents doivent impérativement faire examiner leur bébé : 65 % des strabismes se déclarent en effet dans des familles à strabisme. Pris à temps, on peut prévenir et guérir l’amblyopie et traiter le strabisme dans de bonnes conditions. L’opération, si elle est nécessaire, est pratiquée avant 5 ans, avant l’entrée à la grande école. Le strabisme est une pathologie très com- L’amblyopie Pour obliger l’œil " paresseux " à travailler, l’ophtalmologiste va cacher l’autre œil. La durée et le résultat du traitement varient selon l’âge de découverte de l’anomalie. Un traitement débuté avant 2 ans permet souvent une récupération totale ou quasi-totale de l’acuité visuelle, sauf en cas de pathologie grave. Après 4 ans, la guérison de l’amblyopie devient aléatoire et partielle. plexe. Son traitement exige une hyperspécialisation. Il existe depuis peu un diplôme universitaire de strabologie. Seul un ophtalmologiste, habitué au traitement des strabismes, pourra suivre efficacement l’enfant qui louche. Médecin de famille-pédiatreophtalmologiste-orthoptiste : un partenariat indispensable Dès la maternité (1er bilan de santé obli- 27 LE DEPISTAGE VISUEL DES ENFANTS: UN ENJEU DE SANTE PUBLIQUE O OP PH HT TA ALLM MO OLLO OG GIIE E 28 gatoire à 8 jours) et la crèche, les parents, le médecin de famille, qui connaît les antécédents familiaux, ou le pédiatre, en interrogeant les parents, doivent orienter les enfants à risques vers l’ophtalmologiste. Celui-ci intervient alors en deuxième intention. “ Autre signe à repérer : l’enfant qui n’aime pas lire ” Tous les enfants doivent bénéficier d’un examen de la réfraction et de la motilité oculaire et un fond d’œil. L’orthoptiste peut évaluer la réfraction, la motilité oculaire et la vision du relief ou diagnostiquer un micro-strabisme, mais seul l’ophtalmologiste peut examiner le fond d’œil, dépister les anomalies du système oculaire, dresser le bilan des handicaps. Le 3e bilan de santé avec contrôle visuel est pratiqué à 4 ans par la PMI (Protection Maternelle et Infantile) mais il est alors souvent trop tard pour guérir une amblyopie. A partir de l’entrée à la grande école, les 3 visites obligatoires de santé scolaire à 6 ans, 11 ans et 15 ans doivent comporter un bilan visuel. A 6 ans, il est important de repérer les enfants qui se plaignent de maux de tête. Ils peuvent traduire un déséquilibre oculo- Le traitement de l’amblyopie varie suivant son origine. Il comprend : •le port, indispensable, de verres correcteurs ; • une occlusion pour faire " démarrer " le " mauvais " œil ; • un traitement pénalisant le " bon " œil. Ce traitement peut durer plusieurs années, pour contraindre le moteur qui sera aisément guéri avec quelques séances d’orthoptie. Autre signe à repérer, l’enfant qui n’aime pas lire : ce peut être un signe d’une insuffisance de convergence. Enfin, mal de tête et refus de lecture peuvent exprimer une hypermétropie latente révélée par l’effort d’accommodation demandé par la lecture. En 2 ou 3 ans de verres faibles, la difficulté sera surmontée car l’hypermétropie va diminuer avec l’âge. Là encore, seul l’ophtalmologiste peut mesurer le degré d’hypermétropie latente grâce à un examen de réfraction avec gouttes de collyre cycloplégique (qui bloque l’accommodation). Deux autres examens systématiques sont prévus, à 11 et 15 ans. Toute baisse d’acuité doit être signalée à la famille qui doit immédiatement consulter un ophtalmologiste. Il s’agit souvent d’une apparition ou d’une aggravation de la myopie (elle apparaît Test C.A.D.E.T. - Lettres