Comment faire pire en croyant faire bien ? Par Katryn DRIFFIELD Psychologue Clinicienne 47è journées d’Études de l’A.F.D.N Reims, le Vendredi 5 juin 2009 Un peu d’humour pour commencer… Le poids des mots… • Une parole peut être lourde de conséquences et induire des croyances et des comportements délétères… quand elle n’enkyste pas, voire ne crée pas la pathologie elle-même (Cf. ici : les effets de la restriction cognitive…) Paroles de diététicien(ne)s Des phrases qui en disent long… sur des questions non posées mais qui s’imposent : - que met en jeu la relation patient /diététicien ? - Que peut induire une parole ? ۩ Comment ne pas faire pire en croyant faire bien ? Paroles et maux des patients Comment croit-on bien faire ? • En prodiguant les bons conseils, les bons soins • En remplaçant le ‘credo’ du régime par celui de l ’hygiène/l’équilibre alimentaire • En posant des objectifs avant tout médicaux • En faisant de ‘l’éducation’ à la santé • En faisant maigrir un patient, etc. Mais comment peut-on faire pire ? • En étant limité, contraint, par ses propres représentations, ses propres croyances • En méconnaissant la complexité du problème de l’obésité • En ignorant les motivations inconscientes justifiant certains comportements paradoxaux du patient • En prescrivant d’une manière ou d’une autre des régimes qui induisent la R.C. • En ne comprenant pas la diversité des fonctionnements psychiques... Comment faire pire en croyant faire bien ? (suite) • En étant plus pressé que le patient lui-même • En pensant que toutes les formes d’obésité ou de problème de poids se valent • En méconnaissant le caractère de ‘bénéfice’ que revêt l’obésité (cad: comme symptôme) • En oubliant que l’obésité relève d’une problématique psychosomatique • En ne percevant pas ce qui fait obstacle au patient lui-même, etc. I- Les interactions dans la relation de soins : une approche complexe Quelle place pour le diététicien ? Quelle place pour le patient ? La place de la maladie chez le patient/malade Quelques pistes de réflexion et de travail : • Le lien entre la maladie, ses symptômes et l’homéostasie familiale • Le rapport au corps chez le patient • Maladie et identité • Le vécu intra subjectif de la maladie par le patient (les fonctions du symptôme) • La notion d’urgence et de crise L’approche relationnelle du patient : mais encore ? La relation « patient /soignant » (ici, diététicien/ne) : – – – – Complexe (multiplicité des situations possibles) Dissymétrique (l’une sait, l’autre pas) met en jeu plusieurs réalités fait intervenir plusieurs représentations (fantasmes, angoisses…) – dépend des capacités de communication du soignant – s’inscrit dans un dynamique temporelle Qu’est ce que la relation ? Notion de rencontre • La façon d’être en relation (empathie…) • Le travail d’équipe ou en équipe Les fantasmes en jeu S’en servir ou s’en défaire • La place du sujet Qu’est ce qu’un sujet malade ? Les impasses du professionnel face au patient Qu’est-ce que le transfert ? • La relation qu’un sujet établit avec une autre personne est fonction : - en partie de ce qu’est la situation réelle ; le contexte de la rencontre - en partie de ce qu’il est, de ce qu’il apporte de son histoire, de son organisation mentale, de ses modes de relation au passé Expression type du transfert… • Telle personne vivra le soignant comme un personnage protecteur et tout puissant alors que telle autre le percevra comme un rival. Elle sera attirée par telle manière d’être au monde ou par tel type de personnalité, et rebutée par telle autre. Des ex. de contre-transferts : • Sentiments d’ennui, de monotonie, ressentis avec certains patients ayant des difficultés à gérer, à verbaliser leurs émotions. • Sentiment agressif qui renvoie à une difficulté à éprouver de l’empathie, par ex. Cela implique à mon sens qq précautions (un minimum de réflexion, de ‘travail sur soi’) D’où l’intérêt de la neutralité ! • Comme travail actif du soignant pour être au clair avec sa problématique personnelle. • Pour que l’Inconscient du thérapeute puisse entrer en contact avec celui du malade • Pour être à l’écoute de ce qui dans l’autre nous touche, pour lui être utile. • Pour rester bienveillant… La neutralité bienveillante : … « la neutralité n’est pas seulement de ne pas paraître ce qu’on éprouve, c’est prendre conscience de ce qu’on éprouve et n’être pas gouverné par des réactions non contrôlées dans la compréhension du patient et dans la réponse qu’on lui donnera ». Colette CHILAND En résumé : 3 pièges qui guettent tout soignant: • La pesée des systèmes de valeurs qui définissent les positions de chacun des protagonistes : quel ‘bien’ recherche t-on ? • La pesée de ses propres modes de fonctionnement psychique (notion de transfert et contre-transfert…) • L’écran des théories (la meilleure et la pire des choses !) Au-delà du soin : privilégier la relation : savoir être à l’écoute ! II- ECOUTE ET ATTITUDE D’ENTRETIEN : - Quelle attitude ? - pour quelle finalités ? - avec quelles précautions ? Place et enjeux de l’entretien ? • L’objectif de l’entretien (est-il clair pour tous?) • Renvoie à divers aspects de la relation de soins (voir la question de la demande + attitude du soignant, etc.) • Que mobilise un entretien de part et d’autre ? • Notions d’attitudes et de contre-attitude • L’écoute (laquelle et comment ?)… ATTITUDES D’ENTRETIEN • Recevoir une demande (et la travailler) • Repérer 3 niveaux d’écoute : - ce qui est dit - la communication non verbale - l’écoute de soi-même • • • • L’acceptation du patient tel qu’il est L’absence de jugement L’empathie La congruence entre les mots et les actes… Les buts possibles de l’entretien • Le souci de comprendre son patient. • L’aider…plutôt que de satisfaire sa curiosité. • Lui redonner une certaine responsabilité, et une certaine liberté d’agir. • Dégager les ressources dont il dispose ou qu’il peut acquérir. • Ouvrir le champ des possibles pour le patient... Objectifs in fine ? • Amorcer une stratégie de changement. - Décoller le patient de son symptôme - Faire bouger ses représentations - Le rendre acteur de ses soins • Aider son patient à faire des choix. - Le sortir de l’impression de subir - Lui apporter de nouveaux moyens - Lui permettre de s’engager. Les 3 principaux pièges de (votre) l’inconscient dans l’entretien… 1. La séduction De part la position asymétrique de la relation, cette dimension existe de fait. Elle peut se trouver renforcée par une manière ‘naturelle’, ‘spontanée’ d’être brillant, de paraître intelligent, etc. chez le soignant. (gratification narcissique) Dangers dans la relation d’entretien (suite) 2. La maîtrise Au moins ‘grave’, elle s’exerce dans la directivité ‘pédagogique’ ou ‘éducative’ Au pôle le plus important, elle agit sous forme de manipulation plus ou moins forte, à son propre insu → Cela nécessite donc d’être très vigilant sur soi-même Dangers dans la relation d’entretien (suite) 3. La réparation Il est tentant et agréable de se sentir ‘bon’ surtout face à des situation de détresse, MAIS… Attention à la place que l’on nous fait rejouer là ! (celle d’un parent, d’un maître, d’un précédent médecin… ?) Sans méconnaître les émotions du patient, il faut éviter de se faire prendre dans des enjeux, par ex., de répétition (côté patient); ou dans un engagement personnel dont on ne peut plus sortir ! Un peu d’humour pour finir ! MERCI DE VOTRE ATTENTION Katryn DRIFFIELD Psychologue Clinicienne Reims, le 5 juin 2009