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le shofar
revue mensuelle de la communauté israélite libérale de belgique
N° d’agréation P401059 septembre/octobre 2008— n°297 / Eloul 5768/Tichri 5769
synagogue
beth hillel
bruxelles
Un Temps qui parle
Racismes
La CILB en Israël
n°297
septembre/octobre 2008/
Eloul 5768/Tichri 5769
N° d’agréation P401059
re vue mensuelle de l a
communauté isr aélite
libér ale de belgique
EDITEUR RESPONSABLE : 
Rabbin Floriane Chinsky
Rédactrice en chef :  
Jacqueline Wiener
COMITÉ DE RÉDACTION : 
Rabbi Abraham Dahan, Rabbi
Floriane Chinsky, Ralph Bisschops,
Gilbert Lederman, Philippe
Lewkowicz, Jacqueline Wiener,
Emmanuel Wolf
ONT EGALEMENT COLLABORÉ a
cette livraison : 
Rabbin Daniel Fahri, Elie Bok, Monique
Ebstein, Rachel Namias, Deborah
Peruch et Gaëlle Szyffer
Mise en page : 
www.inextremis.be
Le Shofar est édité par la
COMMUNAUTÉ ISRAÉLITE LIBÉRALE
DE BELGIQUE A.S.B.L.
N° d’entreprise : 408.710.191
Synagogue Beth Hillel
80, rue des Primeurs,
B-1190 Bruxelles
Tél. 02 332 25 28
Fax 02 376 72 19
www.beth-hillel.org
[email protected]
CBC 192-5133742-59
RABBINS : Abraham Dahan
et Floriane Chinsky
président exécutif : 
Philippe Lewkowicz
CONSEIL D’ADMINISTRATION : 
Président : Gilbert Lederman
Avishaï Ben David, Ralph Bisschops,
Patrick Ebstein, Paul-Gérard Ebstein,
Ephraïm Fischgrund, Josiane
Goldschmidt, Gilbert Lederman, Willy
Pomeranc, Elie Vulfs, Serge Weinber,
Jacqueline Wiener, Emmanuel Wolf.
Les textes publiés n’engagent que
leurs auteurs.
Photo de couverture :
Jacques Noach - mai 2008
Sommaire
05
EDITORIAL
06
Le mot du président
Vérité, Droit et Justice
par Jacqueline Wiener
par Philippe Lewkowicz
08
JUDAÏSME
De profondes racines pour des branches
florissantes
Roch Hachana et Kipour 5769, quelques outils
pour un nouveau départ
par Rabbi Floriane Chinsky
13
Un temps qui parle
par Rabbi Abraham Dahan
07
16
Racismes
par Jacqueline Wiener
20
Le judaïsme libéral, c’est d’abord le judaïsme
23
La pensée de Leo Baeck
(1873-1956) - suite
par le Rabbin Daniel Fahri
par Monique Ebstein
23
27
Les fêtes de Tichri à Beth Hillel
28
AGENDA
30
Carnet
32
Nos Bné Mitsva
36
VIE COMMUNAUTAIRE
Beth Hillel en Israël
ou Le voyage des émotions
par Rachel Namias
36
42
Un jeune pianiste à «l’Heureux Séjour»
48
Nouvelles d’Israël et d’ailleurs
52
Limoud revient
54
Un peu d’humour
55
Informations utiles
par Monique Ebstein
par Gaëlle Szyffer
Pour l’organisation de vos Simhot
Un nom: Solange!
Un numéro: 0497.57.47.27!
le shofar
Editorial
Par Jacqueline Wiener
Cette livraison constitue le premier « gros »
numéro du Shofar édité par la CILB depuis
la publication, en mai dernier, du livre « Le
Judaïsme Libéral en Belgique - Petite Anthologie du Shofar »1.
Le travail bénévole pour mener à bien la
rédaction et la parution régulière de la revue,
encouragé ces dernières semaines par les
nombreuses manifestations d’enthousiasme
exprimées à l’occasion de la sortie de cette
« petite anthologie », est, entre autres, inspiré
par notre conscience du rôle fondamental
que joue aujourd’hui la tendance libérale du
Judaïsme dans la transmission de celui-ci à
un peuple auquel les règles de vie du Shulhan
Arouh d’avant l’émancipation napoléonienne,
les progrès de la science, l’égalité des sexes
ou la Shoah ne peuvent raisonnablement plus
s’appliquer sans modifications et adaptations
appropriées.
Face aux nombreux défis d’aujourd’hui auxquels le Judaïsme dans son ensemble a à
faire face, plutôt que de nouer un dialogue
constructif qu’appellent de leurs vœux « les
libéraux », à l’instar de notre président exécutif dans son billet du mois, certains, en Israël
comme en diaspora, s’évertuent encore et
toujours à jeter l’anathème sur le Judaïsme
réformé. Ainsi en va-t-il du nouveau Grand
Rabbin consistorial de France évoqué dans
ce Shofar et à propos duquel nous reproduisons, comme en écho à son propos, un article précédemment écrit par le rabbin Daniel
Fahri et dans lequel celui-ci rappelle pourquoi nous n’avons pas fondé une religion nouvelle ni opéré un schisme.
Les fêtes de Tichri arrivent à grands pas.
Nos rabbins se sont penchés sur ce Temps qui
construit l’Homme, sur ce moment de l’année
juive de remise en question de soi, occasion,
par ailleurs, pour nous de nous attarder sur
quelques uns de ces racismes dont nous sommes tous chaque jour tantôt témoins, tantôt
victimes, parfois coupables.
Et pour terminer sur une note plus légère ce
Shofar de la rentrée, le voyage en mai dernier
de Beth Hillel en Israël n’a guère été oublié,
avec la narration d’un joyeux périple chargé
d’émotions, de Jérusalem à Safed en passant
par Beth Daniel, les enfants de l’internat
Levovitch ou le moshav Yonathan.
Bonne lecture, donc, à tous et chaleureux
vœux de chana tova ! ■
1 « Le Judaïsme Libéral en Belgique -Petite Anthologie du Shofar », Le Shofar hors série, mai 2008/Yiar 5768, 102 pages
5
Le m ot d u pr és i dent
Vérité, Droit et Justice
par Philippe Lewkowicz
« La vérité germera de la terre et des cieux se penchera la justice »
(ps 85 :12)
Lors du voyage de Beth Hillel en Israël en
mai dernier, nous avons visité le magnifique
bâtiment abritant la Cour Suprême à Jérusalem.
6
Parfaitement intégrée dans la cité administrative et le parc de l’Indépendance, cette
maison de justice tout de blanc vêtue est
une suite ininterrompue de symboles inspirés par la Torah, la tradition et l’histoire
juive. Ces symboles sont souvent directement reliés à des notions de justice mais
aussi à l’idée de
l’ordon n a nce ment du monde
temporel et spirituel.
», sa vérité, car, bien sûr, il y en a plus d’une.
Ce concret, c’est le bâtiment lui-même et la
ville de Jérusalem qu’on voit par les fenêtres.
Ces nombreuses et hautes baies vitrées, les
ouvertures vers le ciel, représentent l’aspiration à la « Justice », divine peut être, inspirée à l’homme sûrement. Pour que ces
vérités, parfois en conflit, aboutissent à
la justice, intervient le droit qui est le lien
entre les deux. Le « Droit » est représenté
par les salles d’audience et la bibliothèque
abritant la jurisprudence. Ces espaces sont
au premier étage, qu’on atteint par un
escalier majestueux
et au bas duquel on
n’aperçoit que le
ciel. Ainsi le Droit
est entre la terre la Vérité - et le ciel
- la Justice.
Pour
nous
indiquer ces
symboles
et
Cette démarche,
pour nous les
belle et simple a
ex pl iquer,
priori, pourrait
nous avons
être universelle;
eu la chance
je crois en tout
d’avoir
un
cas qu’elle corguide d’une
respond bien à
qualité rare. Plaque d'inauguration du bosquet de la CILB
Je ne peux que vivement conseiller à chaque la tradition juive et certainement à celle de
visiteur à Jérusalem de s’inscrire à une telle Beth Hillel, puisque nos rabbins nous enseignent que la pensée ne suffit pas et qu’il faut
visite.
agir en sachant que toute action a des conséNotre guide nous a cité le psaume ci-dessus quences sur le prochain et qu’il convient donc
qui avait guidé les architectes du bâtiment d’être responsable de nos actes. De même,
et qui est celui du concept de justice dans la l’action non réfléchie peut être dangereuse.
tradition juive. Les pieds sur terre, dans le On retrouve ici toute la symbolique des teficoncret, l’homme doit rechercher la « Vérité lin qu’on pose sur la tête et le bras.
le shofar
Mais si plusieurs vérités existent, ou coexistent plus exactement, cela ne devrait
pas entraîner nécessairement un conflit
car la justice peut aussi reconnaître cette
coexistence; dans les relations humaines,
c’est même un a priori de bonne justice. On
peut extrapoler en affirmant que la coexistence d’idées, même opposées, peut être
une source de richesse au lieu de conflit.
Telle devrait être la situation au sein de
la communauté juive où les différentes
tendances s’opposent au lieu de travailler
ensemble au bien commun. Sur un certain
nombre de points, la «Vérité» des orthodoxes est différente de la «Vérité» des libéraux. Mais qui a déjà rencontré D’ieu pour
lui demander de trancher ? La loi de la Bible
est parfois différente de la loi rabbinique;
citons à titre d’exemple la problématique
de la transmission de la judéité: à la patrilinéarité reconnue dans la Torah s’oppose
la matrilinéarité instaurée par les rabbins.
Devons-nous affirmer que si l’un a raison,
l’autre a tort ?
Il y a tant de domaines où nous nous rejoignons et qui sont bien plus importants que
les points où nous divergeons. Les plus
obtus parmi les orthodoxes nous considèrent comme leurs adversaires, ils ne sont pas
les nôtres. Ils cherchent une justice absolue,
manichéenne, celle du « Gott mit uns ». Le
scandale récent de l’annulation de milliers
de conversions (pourtant orthodoxes) en
Israël et la détresse d’autant de familles
montre les excès d’une telle philosophie. Ce
n’est pas et cela ne sera pas la nôtre.
En cette veille de fêtes où la balance divine
pèsera les actes et les pensées de chacun, ce
qui nous tient le plus à cœur est de travailler
à l’épanouissement et à l’unité du peuple juif
dans sa riche diversité.
Pour cela, nous devons continuer tous
ensemble à militer, à soutenir, à être présents à Beth Hillel pour montrer à la fois
notre attachement à notre riche et ancienne
tradition ancrée dans la vie actuelle et notre
détermination à promouvoir un judaïsme
de fidélité et d’ouverture pour des jeunes
d’aujourd’hui et de demain qui, sans cela,
trop souvent, rompent définitivement cette
chaîne fondamentale de la transmission.
Si nous sommes suffisamment nombreux
pour dire à nos frères orthodoxes que nos
routes sont complémentaires, peut-être
nous entendront-ils.
Je vous souhaite une belle année 5769 dans
la santé, la paix et la prospérité.
■
7
J U DA Ï SM E
De profondes racines pour
des branches florissantes
Roch Hachana et Kipour 5769, quelques outils
pour un nouveau départ
Par Rabbi Floriane Chinsky
8
Le changement est une chose qui
inquiète. Notre instinct nous met
sur nos gardes lorsque nous sommes
confrontés à de nouvelles situations
ou à des personnes étrangères. Il
s’agit au départ de l’instinct de survie, qui nous pousse à examiner les
dangers éventuels et à nous préparer
à y faire face. Au contraire, ce qui est
familier est rassurant, il suscite en
nous un doux sentiment de sécurité et
de chaleur.
Ce sentiment est parfois totalement
artificiel et trompeur. Ainsi fonctionne la publicité, qui par la répétition de ses messages, nous donne
un sentiment de familiarité avec les
produits qu’elle promeut. Les études
comparatives prouvent que les produits les mieux vantés sont loin d’être
les meilleurs, voire les plus inoffensifs. Sommes-nous prêts à renoncer à
la sécurité au bénéfice du sentiment
de la sécurité ? Nous sommes alors
prisonniers de l’illusion. Nous enfreignons alors à mon sens le commandement « vélo tatourou aHaré lévavéHem véaHaré einéHem »1.
Et pourtant, n’est-il pas naturel et normal de
rechercher le bien-être ?
La question devient alors de concilier notre
esprit d’initiative et notre curiosité du monde
qui nous entoure avec le sentiment de familiarité de bien-être auquel nous aspirons.
Cette question est d’actualité à notre époque
où chacun voyage et doit recréer ses repères.
Elle a été d’actualité pour notre peuple depuis
avant même sa création, à travers la quête
d’Avraham et de Sarah, et leur courage pour
partir en exploration de terres géographiques et spirituelles inconnues. De ce voyage
périlleux, ils ont su nous ramener des trésors.
Au cours de nos exodes et de nos exils, nous
avons traversé bien des difficultés et bien
des dangers. Pourtant, nous ne nous sommes pas laissés happer par le tourbillon de
l’insécurité. Depuis le couple abrahamique,
nos capacités de recréer notre maison dans
les lieux et les conditions les plus invraisemblables se sont développées, affinées, rôdées
et renforcées, jusqu’à ce que certains d’entrenous soient capable de célébrer PessaH dans
les camps de concentration, d’y composer de
la musique, de la poésie, de l’humanité.
Comment avons-nous développé ces ressources ? Sont-elles encore nôtres aujourd’hui ?
1 N b. Chap. 15, repris dans le troisième paragraphe du Chéma Israël.
le shofar
Qu’est-ce qui nous donne le courage d’envisager l’avenir, ses imprévus et ses évolutions
avec sérénité malgré toutes les difficultés
que nous avons rencontrées ?
Cette question se pose autant pour nous en
tant que peuple qu’en tant qu’individus.
J’invite chacun d’entre nous à chercher des
réponses à cette question. Pour ma part, il
me semble que trois éléments sont à l’origine
de notre grande liberté de penser, de notre
capacité de repousser les frontières du possible et de défier l’histoire, sans jamais nous
laisser dicter notre destinée, trois éléments
d’une importance égale, et qui sont restés au
cœur de notre identité à travers les âges :
L’étude, la mémoire, la solidarité et la chaleur familiale. Les pirké avot (chapitres des
pères, recueil de michna) diraient, al hatorah, al haavoda véal guémilout Hassadim2,
sur ces trois choses repose le monde, notre
monde, celui dont nous disons que sa valeur
est jugée à Roch Hachana et scellée à Yom
Kipour, celui qui est scruté et décrété soit
viable soit irrécupérable une fois par an, au
jour anniversaire de sa création.
L’étude, la Tora
Lorsque la sociologie étudie les personnes
xénophobes, racistes ou réactionnaires, elle
constate que ces attitudes sont souvent liées
à un sentiment d’insécurité matérielle et à un
manque d’éducation. L’ignorance du monde
nous laisse imaginer qu’il n’existe qu’une
façon de penser ou d’agir, nous poussant à
nous méfier de tout ceux qui pensent ou agissent différemment ainsi que des sociétés et
des climats qui fonctionnent sur des modèles autres que ceux que nous connaissons.
L’ignorance se combat par l’étude.
Dans notre tradition, l’étude joue un rôle central. Etudier est un commandement. Il n’est
pas exigé de nous que nous soyons intelligents ou savants, mais avant tout que nous
nous penchions sur les textes et que nous
étudions leurs significations possibles. La
multitude d’interprétations, toutes légitimes3 nous invite à changer de perspectives
pour comprendre des opinions différentes, à
la manière dont les sociologues s’obligent à
considérer toute vérité comme d’une valeur
égale pour celui qui l’énonce. Avec l’étude, le
caractère complexe de la vérité4 n’est plus un
danger mais un monde familier, lieu de partage humain. Avec l’étude, le partage des opinions concernant certaines interprétations
de la Torah ou de la HalaHa5, ce sont aussi
des modes de vies et des sentiments humains
qui sont comparés, réévalués, qui permettent
un nouveau départ, une reprise en main. De
cette façon, il nous est donné de renouer avec
celui ou celle que nous sommes vraiment,
lorsque nous nous perdons parfois dans les
méandres de la vie, de faire Téchouva6.
L’amour du savoir et de la réflexion, une
insoumission vis-à-vis de la réalité, voilà qui
caractérise bien, à mon avis, notre judaïsme
belge et bruxellois.
La mémoire réactivée - la Tefila
Nous savons instinctivement que l’amplitude
de notre présence dans l’avenir dépend de la
profondeur des racines que nous plongeons
dans le terreau fertile de notre passé. Pour
prendre une image sylvestre, les branches de
l’arbre poussent d’autant plus haut que ses
racines sont profondes. Cette intuition a été
récemment confirmée par des recherches7
qui corrèlent la capacité d’envisager l’avenir à la mémoire du passé. C’est le sens que
revêt pour moi le magnifique texte de Yaalé
2 Ces trois principes sont énoncés par Rabbi Chimon Hatsadik dans la michna avot 1 :2 voir également le mot de
Rabban Chimon ben Gamliel : « al hadin véal haémet véal hachalom » (michna avot 1 :18).
3 Selon le principe énoncé par le Talmud, Élou véélou divré élohim Haim (méguila 13b).
4 C hivim panim latorah, la Tora a 70 facettes.
5 L oi juive, chemin juif, mode de vie forgé par les rabbins et développé au fil des générations.
6 Un retour sur soi, traduit généralement par repentance et thème principal des fêtes de Tichri.
7 Cf. Science et Vie n°1089, juin 2008, « Notre passé invente notre futur », pp. 62-66.
9
J U DA Ï SM E
Véyavo, que nous ajoutons à la Amida ainsi
qu’au Birkat Hamazon les jours de fête :
« Que monte et que vienne, et qu’arrive et que
soit souhaitable, et que soit agréé et rappelé,
que soit recompté notre souvenir et le souvenir de nos ancêtres et le souvenir du Messie
fils de David ton serviteur et le souvenir de
Jérusalem ta ville sainte, et le souvenir de
tout ton peuple Israël, devant toi. »
10
Il semble naturel que nous voulions rappeler notre souvenir, ainsi que le souvenir des
patriarches et de nos ancêtres, qui appartiennent au passé. Mais le Machiah ben David,
le messie qui doit permettre cette ère nouvelle de fraternité sur la terre, comment son
souvenir pourrait-il être rappelé, alors qu’il
appartient à l’avenir ? La pensée occidentale,
et la mienne avec elle, a du mal à envisager
le temps autrement que divisé par le moment
présent, d’un côté en un passé qui s’enrichit
et de l’autre en un avenir qui fuit. Pourtant,
l’hébreu ancien fonctionne différemment. Le
parfait, l’achevé, le définitif d’une part et l’imparfait, l’inachevé, le « en voie »8 de l’autre
sont les catégories dans lesquelles le verbe,
c’est-à-dire l’action humaine, se catégorise.
L’imparfait, ce qui est en voie de création,
peut inclure à la fois le passé inaccompli et le
futur. Alors, le souvenir du futur peut exister.
Alors, nous rappelons nos actes passés, au
même titre que nos projets futurs.
C’est ce qu’on appelle la émouna, injustement
traduite par « foi » et qui signifie la fidélité. La
réalité à venir n’est pas moins certaine que
celle du passé. Notre fidélité à nos principes,
et la fidélité des deux partenaires de la Brit,
de l’alliance entre Dieu et le peuple juif, font
de nos promesses des réalités tangibles. La
certitude du but que nous nous fixons nous
aide à tracer le chemin jusqu’au présent et à
réaliser nos projets. Plutôt que de chercher,
comme l’eau, le chemin de moindre dénivelé
et de suivre une voie tracée à l’avance qui
nous mènera à un océan impersonnel et subi,
nous envisageons notre destination et choisissons au fur et à mesure les embranchements du chemin qui nous en rapprochent.
Le Avoda, le « service », les « offices », la «
prière », le Avoda chébalev, le « service du
cœur » ainsi que nous nommons la prière,
est à l’image de ce magnifique texte de Yaalé
véyavo. Nous y rappelons nos principes, nous
nous les rappelons les uns aux autres, ensemble pour qu’ils nous entrent au cœur au plus
profond, et que l’accomplissement du bien
nous réchauffe sans jamais nous accabler.
Ce lieu est également un lieu de sécurisation,
qui nous permet de nous remettre en phase
avec nous-mêmes et d’aborder l’inconnu de
l’année à venir avec sérénité.
Je suis consciente que nous ne voyons pas tous
dans « les prières » ce rééquilibrage et cette
culture d’une mémoire mise au service de
l’avenir. Pourtant, il me semble que c’est bien
ainsi que la Tefila9, aux côtés de la Téchouva
que nous venons d’évoquer, « fait passer le
mauvais décret »10 , nous délivre des conséquences de nos erreurs. Cette dimension s’incarne à travers la participation aux offices des
grandes fêtes ainsi qu’aux SeliHot11.
La solidarité, la Tsédaka
Le troisième élément qui a caractérisé les
sociétés juives à travers l’histoire est la chaleur du milieu social et familial, la solidarité
qui s’y exprime. La michna reprend les obli-
8 De façon intéressante, le mot « voie » en araméen OraH reprend à la fois le sens de « mode de vie » (oraH Haïm) et de EreH, qui
signifie le principe moral. Ceci rejoint le sens du mot halaHa qui désigne le système juridique juif et vient de la racine h-l-H, qui
renvoie à l’idée de mouvement.
9 Le développement de notre capacité à nous juger nous-mêmes (palal) et à nous remettre en prise avec les aspects beaux de la vie
(pala).
10 « Maavir et roa hagézéra » ainsi qu’exprimé dans la prière ountané tokef, spécifique aux fêtes de Tichri.
11 Offices du matin agrémentés de poésies incitant à la Téchouva, qui précèdent Yom Kipour.
le shofar
gations de la Tora et rappelle les « devarim
chéein lahem chiour »12, toutes ces lois dont
la quantité est laissée à l’appréciation de chacun et qui permettent aux personnes dans le
besoin de se servir dans les surplus de production des autres13. Elle rappelle également les
« devarim chéaadam oHel pérotéhem baolam
hazé véhakéren kayémet lo laolam haba »14, le
respect des parents, faire le bien autour de soi,
accueillir des hôtes de passage, la visite des
malades, la dotation des fiancées, le respect
de la dignité humaine dans la mort, favoriser
la paix entre les gens15. Ces textes sont répétés
de façon quotidienne dans la Tefila (prière),
sont intégrés dans la HalaHa, et se sont incarnés socialement pour développer la famille
juive au sens intime comme au sens large. Ces
éléments peuvent être rassemblés comme le
font les pirké avot sous l’appellation de « guemilout Hassadim », ou comme le fait ountané
tokef sous le nom de « Tsédaka ». Cette Tsédaka, ce rétablissement de la justice sociale,
s’incarne de la façon la plus directe avant les
fêtes par des dons à la communauté.
Ainsi, les trois piliers sur lesquels repose le
monde, l’étude, la reviviscence de la mémoire,
les actes d’entraide généreuse sont également
les piliers de notre sentiment de sécurité et
de confiance16, sentiments qui sont le fondement de notre sérénité lorsque nous devons
faire face aux défis de l’avenir.
Des outils destinés à nous permettre d’aller de l’avant
Ce sont ces outils que nous devons mettre dans
nos bagages pour garder confiance et bonheur
au cours de notre voyage vers l’avenir.
Ce sont ces défis que nous devons relever
pour l’année à venir et pour les années suivantes, pour notre génération et pour les
générations futures.
Ce défi, c’est celui de faire vivre ce verset17 que
nous rappelons chaque fois que nous remettons le Sefer Torah dans l’arche : Hachivénou
hachem éléHa vénachouva Hadech yaménou kékédem : renouvelle nos jours comme
aux temps jadis. Il est remarquable que
cette phrase était déjà vraie du temps de la
rédaction du livre des lamentations, elle l’est
encore aujourd’hui. Ainsi, notre tradition est
une tradition de la fidélité dans l’évolution,
ainsi que des auteurs contemporains le développent18. Plus que jamais, l’avenir de notre
tradition dépend de notre capacité à prendre
confiance dans sa force et dans la profondeur de ses racines, de façon à oser lui faire
pousser des branches jusqu’ici inexplorées,
magnifiques de créativité et de profondeur.
Ce défi, c’est celui qu’on relevé nos ancêtres
depuis le premier couple fondateur d’Avraham et Sarah. Ils ont exploré l’inconnu théologique, en refusant les faux dieux rassurants
de leurs pères. Ils ont accepté le vide théologique avant de découvrir ce qui deviendra
par la suite le Dieu d’Israël. Ils ont accepté
l’inconnu géographique, en partant vers une
terre indéterminée, non pas encore la terre
de Canaan ou la terre où ruisselle le lait et
le miel, mais bien la terre « que je t’indiquerai »19. Il a accepté l’inconnu émotionnel en
conduisant son fils sur le mont Moria20, sans
savoir encore ce qu’il y adviendrait exactement. C’est ce dernier courage que nous
12 Michna Péa 1 :1
13 Ajoutant également la générosité et l’étude de la Tora.
14 Guémara chabbat 127
15 Encore une fois, s’intéresser à la tefila et l’étude de la torah sont mis en valeur ici également.
16 Ces notions se rattachent également à mon sens à notre première et magnifique phrase du Chéma Israël : « Tu aimeras l’éternel
ton dieu de tout ton cœur- béHol lévavéHa, de toute ton âme – ouvéHol nafchéHa – et de tout ton pouvoir – ouvéHol méodéHa.
» (Extrait de Deut. Chap.6). Le travail du cœur (avoda, avoda chébalev, tefila), le travail de l’âme (torah, téchouva), le travail
social (guémilout Hassadim, tsédaka), sont ce qui nous renforce dans notre amour de Dieu et notre sentiment de bien-être dans
le monde.
17 L amentations, chap. 5.
18 Cf. par exemple Mordecai Waxman et son livre, Tradition and Change: the Development of Conservative Judaism.
19 El haaretz acher aréKa, Gen. 12 :1.
20 Gen. Chap.22.
11
J U DA Ï SM E
rappelle le son du Chofar 21. Cet appel plein
d’émotion, le cri du chofar, ses espoirs, ses
pleurs, expriment nos sentiments lorsque
nous nous rappelons que notre avenir est
dans nos mains. Nous savons l’importance
de nos défis personnels, nous sentons la chaleur que procure le fait de partager nos challenges avec les enfants de notre peuple.
Certes les risques pris par nos ancêtres
en créant un monothéisme antisocial et
contestataire étaient énormes. Mais quel risque bien plus grand encore que de passer à
côté de sa vie sans s’en rendre compte, par
simple paresse, par crainte ou par manque
d’outillage. L’artiste énonçait cela d’une
façon magnifique22 lorsqu’il affirmait que le
plus grand risque est de ne pas en prendre.
Avec des racines solides, avec des perspectives nettes, il est possible d’envisager le
chemin avec souplesse et faire vivre avec
sérénité l’aphorisme de Rabbi NaHman de
Bratslav :
« Ne demande pas ton chemin à celui qui
le connaîtrait, tu risquerais de ne pas te
perdre. »
Chacun à notre façon nous sommes en chemin vers l’inconnu, vers « la terre qui nous
sera indiquée ». Je souhaite que nous embarquions à nouveau ensemble dans cette
nouvelle épopée qui s’appelle 5769. Nous y
développerons les outils de notre sérénité et
de notre souplesse, l’étude, la mémoire vive
dans la prière, les actes de bonté, pour nous
inscrire dans le bon côté des décrets parfois
durs de la vie, et pour nous projeter ensemble vers un avenir plein de fruits et de fleurs
encore inconnus.
Chana tova
■
12
Dans la continuité de cet article, vous êtes invités à vous joindre à nos différentes activités et à vous tenir informés à travers notre newsletter électronique hebdomadaire
([email protected]).
Dans l’ordre de l’étude : étude « Judaïsme Pensée et Pratique » le lundi soir, enseignement aux Facultés Universitaires Saint Louis, étude sur le thème des fêtes de Tichri
5769 autour de la havdala, Talmidi pour les jeunes de 5 à 13 ans.
Dans l’ordre de la Avoda : havdala, nigounim de kipour, seliHot, offices des fêtes de
Tichri.
Dans l’ordre de la solidarité : visite des malades, tahara, dons pour la communauté et
son développement, pour les pauvres, pour le talmud torah.
21 L e chofar, la corne de bélier dont on sonne à Roch Hachana et à la fin de Kipour, rappelle l’animal qui a remplacé Isaac sur l’autel.
22 L éonard de Vinci.
le shofar
Un temps qui parle
Par Rabbi Abraham Dahan
«Pendant six jours tu travailleras et feras tout
ton ouvrage et le septième, shabbat, cessation, en l’honneur de l’Eternel…» (Exode 20)
«Béni sois-tu Eternel qui change le moment
et remplace le temps, qui fais passer le jour et
apporte la nuit «(Liturgie quotidienne).
La Tora s’ouvre sur les jours de la Création,
avec chacun d’eux sa spécificité.
Il y a, dans la Tora et le Judaïsme dont elle est
la source, comme une obsession du temps et,
en tout cas, la conscience aigue qu’il est une
dimension du réel et de nos vies que nous ne
pouvons pas ignorer.
Il y a, en hébreu, deux termes pour dire le
temps: Ett et Zman. Ett désigne la succession
des instants, les temps qui filent, qui défilent
et nous emportent. Dans la prière du soir,
nous disons «mechané ittim oumaHalif et
hazmanim»que l’on pourrait traduire par «qui
fait défiler le temps et donne un contenu à des
moments». Ett, c’est le temps apparemment
incolore, ordinaire. Mais même ce temps n’est
pas neutre, ni vide «Ett laledet ve’ett lamout»,
«il est un temps pour naître et un temps pour
mourir, un temps pour planter et un temps
pour déraciner, un temps pour démolir et un
temps pour bâtir…» (Eccl. Ch. 3)
Zman, par contre, désigne le temps qui a sa
couleur particulière, le temps sanctifié en ce
qu’il rappelle, révèle et ouvre un horizon: vous
connaissez la bénédiction pour les moments
heureux, rehaussés de nos vies: «che’heHeyanou vekyimanou, vehigyanou lazman
hazé», qui nous a fait vivre, réellement exister et nous a fait atteindre ce moment.
Pessach, c’est zman Hérouténou, temps
de notre libération; sept semaines après
Chavouot, c’est zman natan toraténou,
le temps du don de la Loi; Roch Hachana,
c’est yom hazikaron, le temps du souvenir
ve hadin et du jugement; Kippour, le temps
du pardon possible: «ki bayom hazé yeHaper aléHem», ce jour-là il sera fait expiation pour vous (Liturgie de Kippour); Souccot enfin, zman simHaténou, le temps de
la joie.
Le temps juif est donc comme sculpté par le
sens qui le remplit, l’éclaire et déborde l’ordinaire. C’est cela le temps sanctifié. Mais
cette sanctification, cette couleur n’est pas la
même pour toutes les fêtes. Chaque moment
a comme sa vibration particulière. Nous
disons dans la prière «hamavdil ben kodech
leHol» béni sois-tu Eternel qui différencie
entre le temps ordinaire et le temps de sanctification. Mais aussi, quand Yom Kippour
tombe le shabbat par exemple, nous disons
«hamavdil ben kodech lekodech». Pour nous
apprendre à comprendre et à distinguer que,
même dans l’ordre de la sanctification, il faut
savoir discerner.
Il y a aussi, dans notre tradition, le souci de
désenchanter le temps, de lui arracher sa
dimension de temps subi, de destin, le fatum,
en le remplissant par la mitsva, l’acte qui
donne sens et direction.
Quand je dis désenchantement, je pense à la
volonté d’arracher au temps les peurs et les
superstitions, les magies qui l’enveloppent.
La peur de la nuit, par exemple. C’est pour
cela que nos fêtes commencent toujours le
soir. Faire que la nuit ne soit pas le temps
13
J U DA Ï SM E
de la peur et des djinns, mais le temps de la
célébration, de la réunion et de la joie.
Le calendrier juif est luni-solaire. Il y a certes
là une raison technique, faire en sorte que les
fêtes correspondent au temps de la moisson:
Pessach, moisson de l’orge; Chavouot, le blé;
Souccot, les vendanges… Mais il y a une autre
raison. Le peuple juif, dit le Talmud, n’est pas
soumis aux astres. Ce n’est pas l’astre - le
soleil ou la lune - qui me dictera mon temps
comme cela se passe pour les autres cultures. J’utilise les deux astres et mes calculs
pour fixer mes temps. Comment exprimer
de manière plus claire que le temps, au lieu
d’être subi, peut et doit être dominé, utilisé,
rempli de ce qui positive et construit.
14
Le temps juif n’est jamais un temps vide, ni
non plus un temps cyclique, celui de l’éternel
recommencement comme dans le mythe de
Sisyphe qui roule sa pierre jusqu’en haut de
la colline, elle dégringole, il redescend et la
roule à nouveau, à l’infini. Ce n’est pas un
temps passif, le temps de l’Attente, c’est un
temps en tension, nerveux, rempli, agi. La tradition dit «yotsim mimitsva veniHnassim le
mitsva»A peine est on sorti de l’accomplissement d’une mitsva, d’un devoir humain, que
nous devons aller vers la prochaine mitsva.
Le temps juif est donc travaillé, comme sculpté
par les actes. Abraham Heschel a même parlé
d’une architecture du temps. Le premier
repère de cette architecture, c’est le shabbat,
la cessation qui rythme et enveloppe tous les
autres moments. Temps d’arrêt, de respiration
humaine, de recul, comme le peintre qui peint
sa toile et lève son pinceau… temps de retrait
et de conscience de mes limites: je ne suis pas
le maître, je ne peux pas tout ni tout le temps.
Le shabbat qui fait de notre temps autre chose
que celui de l’horloge, de la fuite en avant, du
divertissement et des mondanités.
Le shabbat, c’est le septième jour. Pour les
semaines, il y a les sept semaines entre Pessach et Chavouot, sept shabbatot entre le
temps de la Libération et celui de la Loi, pour
symboliser et indiquer le long, long chemin
entre la liberté et l’intégration de ce qui lui
donne sens et direction, la Loi. Le septième
mois, Tichri, est plein, chargé comme un
œuf: le premier, c’est Roch Hachana, comme
nous l’avons déjà indiqué temps de responsabilité et de jugement; le 10, c’est Kippour,
temps de grâce et de pardon possible quand,
dans nos vies, se réinscrit la Loi, les Dix Paroles, comme les dix jours qui séparent Roch
Hachana de Kippour, le Jugement du Pardon;
le 15, c’est Souccot, la fête qui en même temps
clôture et ouvre la nouvelle année, temps de
sagesse et d’espérance.
Cette succession dessine d’une façon forte
et bouleversante comme une image de notre
vie. Pessach, la libération, c’est le printemps,
la liberté, c’est le temps de la jeunesse. C’est
peut-être pourquoi le shabbat de Pessach,
nous lisons dans nos synagogues Chir Hachirim, chant d’amour et de jeunesse; Chavouot,
la Loi, l’étude, c’est l’été de nos vies, le temps
de la maturité. Bien plus tard, en automne,
Tichri, comme à l’automne de nos vies, c’est
Roch Hachana, le Jugement. Avec l’âge, nous
sommes plus aptes à comprendre que nous
sommes responsables de nos choix et que
nos actes nous jugent. Yom Kippour vient
tempérer par la grâce du pardon possible le
côté implacable de notre responsabilité. Je
peux tomber, certes, mais je peux me relever,
je peux recommencer. Je ne peux pas effacer
l’ardoise, mais cela n’empêche pas l’effort de
renouveler mon chemin.
Enfin, Souccot, tout au bout de l’automne, à
l’entrée de l’hiver, comme l’hiver de nos vies,
est un magnifique condensé de tout ce qui
précède et qui ouvre à une forme de sagesse.
La cabane de Souccot, c’est nos vies éphémères et fragiles. Nos vies qui doivent rester
ouvertes sur le monde comme la Soucca est
dehors. Nos vies, qui ne doivent pas laisser
s’éteindre le miracle qui nous porte, comme
à travers le toit de la Soucca on voit le ciel et
les étoiles.
le shofar
Tout au bout du parcours, la Soucca nous
appelle aussi à la simplicité, au dépouillement,
à l’humilité, mais aussi à la beauté des choses
de nos vies. La Soucca, c’est aussi la conscience
que nous sommes toujours en chemin; quand
les Hébreux sortent d’Egypte et sont dans le
désert, tout au bout du long parcours, la cabane
c’est encore la cabane du désert.
La Soucca, c’est la fête qui clôture le cycle
et, soudain, le commandement, la mitsva qui
me porte et que je porte n’est pas seulement
un acte, un geste, un rite. Elle est comme
la Soucca, ma maison. La Loi de Dieu, sa
mitsva, c’est ma maison, mon toit et mon
mur. Souccot, c’est Hag ha’assif, la moisson
des derniers fruits d’automne et des vendanges. De quels fruits s’agit-il? Peut-être aussi
les fruits de la tête, ceux d’une vie pleine
qui peut ouvrir, avec l’âge, à une forme de
sagesse. C’est peut-être pourquoi le shabbat de Souccot, nous lisons l’Ecclésiaste,
ce livre en même temps sceptique, sans illusions, lucide, mais qui ouvre à une foi profonde dont la source est la compréhension
des choses de nos vies.
Dans Souccot, enfin, il y a l’expression du
rêve messianique millénaire d’Israël: les 70
offrandes au nom des 70 nations de la terre.
La liturgie qui exprime le rêve d’unité, d’une
humanité réconciliée et la fin des violences.
Le loulav, c’est le rite qui traduit ce rêve.
Nous avons parcouru le temps juif et
constaté que le rythme dont il bat, c’est le 7,
septième jour, septième semaine, septième
mois. Il y a la septième année, l’année shabbatique, le repos de la terre, la libération des
esclaves, l’annulation des dettes et 7 x 7, la
cinquantième année, c’est le yovel, le jubilé,
qui inclut toutes les lois de la septième
année, plus la libération de la terre, c’està-dire comme une réforme agraire permanente pour éviter les disparités indécentes
de richesse. Il y a là comme une prodigieuse
utopie. Un temps qui raconte une histoire et
pose des repères puissants et concrets d’un
chemin long mais possible d’espérance et
de libération pour l’humanité entière. C’est
peut-être celui là le chemin du messie. ■
15
J U DA Ï SM E
Racismes
Par Jacqueline Wiener
mètre dans le choix précis d’une stratégie
internationale et d’une politique économique et sociale intérieure que devra opérer
En son nom, on massacre, déporte, assas- l’électeur américain en novembre prochain.
sine, humilie, méprise, ghettoise, exclu, Celui-ci se retrouvera confronté au refus ou
discrimine. Lorsque plus simplement, on non du brassage culturel, de l’altérité incarné
n’édicte pas des normes juridiques, reli- par un prétendant « coloré » au titre de chef
suprême de la plus
gieuses,
politiques,
puissante démocratie
sociales ; ou qu’on ne
« Le racisme constitue un
du monde, reléguant
formule pas d’autres
triste paramètre dans le
par là-même au second
expressions
pseudo
choix précis d’une stratégie plan les effets sur la
légitimes de singularivie de millions de gens,
sation qui annihilent
politique, économique et
aux Etats-Unis comme
l’unicité fondamentale
sociale que devra opérer
ailleurs, de l’élection
de l’être humain.
d’une politique plutôt
l’électeur américain en
qu’une autre.
Le racisme nuit à
novembre prochain »
l’Homme. A sa proie.
La seconde fait réféMais aussi à celui qui
rence aux bambins de Belgique ne s’exle génère.
primant pas en flamand qui sont devenus
L’actualité de ces derniers temps nous en interdits de loisirs dans certaines plaines
démontre sa vertigineuse fertilité, dont nous de jeux de Flandre ou à la délation des comne retiendrons que trois manifestations aux merçants s’exprimant autrement que dans
la langue de Vondel légalement organisée
conséquences encore incertaines.
depuis peu dans des communes proches de
La première nous vient d’Outre Atlantique, Bruxelles. Sur fond justificatif de supposée
où le candidat préféré de nombre d’Euro- paresse wallone ou en mémoire aux soldats
péens à la Maison Blanche est devenu flamands massacrés en quatorze sur le front
« noir » et parfois même « musulman », sous de l’Yser pour cause d’inintelligibilité linjustification d’ascendance paternelle afri- guistique.
caine et islamique. Si les autres étiquetages
racistes les plus communément utilisés dans Or voilà que la Belgique se meurt malgré
notre partie du globe auront été épargnés, elle, spectatrice impuissante des graves
au cours de la campagne présidentielle, au remous institutionnels pour cause de revenbrillant orateur Barak Obama, c’est grâce à dications nationalistes flamandes qui la
sa possession d’un conjoint du sexe opposé rongent depuis une quinzaine de mois déjà,
et d’une génitrice non juive. Son épiderme et qui font aujourd’hui magistralement fi
noirâtre au référent talibanesque constitue, non seulement de la crise financière monlui par contre, un triste mais bien réel para- diale actuelle, de l’effondrement des indices
Le racisme frappe à toutes les portes de l’esprit humain.
16
le shofar
boursiers, de l’augmentation des prix de d’une frange minoritaire de la population
l’énergie, mais aussi, sur le plan national, sensible à un discours populiste d’un parti
politique originaid’un taux d’inflarement marginal,
tion en progrespeut éclore d’une
sion constante
manière exquiséinquiétante
ment démocratiparmi les plus
que, se disséminer
élevés d’Europe
dans l’ensemble
occidentale, d’un
d’un région, d’un
ra lentissement
Etat ou d’une
préoccupant de
Nation et finir par
la
croissance,
d’une accélération démesurée de la pau- donner libre cours à un racisme légitimé,
périsation des plus démunis du pays. Sans dont plus personne n’ose se distancier et
même parler des retards apportés à l’ajuste- aux funestes conséquences.
ment adéquat des dépenses publiques sociales et autres ou des conséquences à terme La troisième touche au Judaïsme, avec des
dizaines de milliers
de l’image de marque
d’habitants d’Israël qui
à l’étranger d’une Bel« Toute idée de ségrégation se voient actuellement
gique déliquescente
pour cause de rejet de générée au sein d’une frange de facto rétroactiveretirer leur statut
l’Autre…
minoritaire de la population ment
de Juifs au motif que si
une personne d’origine
L’opposition omnipopeut éclore d’une manière
juive n’observe pas
tente
d’aujourd’hui,
exquisément démocratique et non
le shabbat, sa converdans le microcosme
politique des Flandres finir par donner libre cours à sion peut être annulée
(alors qu’un Juif « de
belges, entre cultures
un racisme légitimé »
souche » ne pourra
flamande et française,
jamais voir sa judéité
a oublié de se tourner
vers l’Histoire ; elle a omis de comprendre contestée de ce fait-là). Cette situation, au
que toute idée de ségrégation culturelle, contour de lutte de pouvoirs entre religieux
religieuse ou ethnique générée au sein ultras et monde politique israélien1, résulte
1 Face aux questions de statut personnel soulevées par l’immigration significative en Israël de non Juifs et de personnes d’ascendance
juive notamment en provenance de l’ex-URSS et afin de favoriser leur intégration, les responsables politiques israéliens préconisèrent l’allègement des procédures de conversion, ce qui augmenterait la proportion de Juifs au sein de la population israélienne,
enjeu démographique fondamental pour les dirigeants du pays. A cette fin, l’Etat dissocia le Beth Din chargé des conversions des
autres tribunaux rabbiniques. Le rabbin Haïm Drukman, nommé à la tête de cette juridiction, suivit les souhaits du gouvernement et
organisa l’assouplissement des règles en application qui impliquaient que toute conversion officielle (donnant accès à la nationalité
israélienne en qualité de Juif à part entière) se fasse selon les règles de l’orthodoxie. Les changements qu’il appliqua portaient, par
exemple, sur la suppression des témoins devant confirmer l’engagement des candidats à la conversion d’observer les mitsvot ou sur
l’abolition de l’obligation d’un parent converti d’envoyer ses enfants à l’école religieuse. Décidant ainsi, le rabbin Haïm Drukman
rejoignit l’approche libérale consistant à considérer que l’essentiel de la conversion devait résider davantage dans la volonté sincère
de s’engager dans une véritable vie juive plutôt que de se focaliser sur le respect scrupuleux des 613 mitsvot.
2 Suite à cette affaire, le Rabbin Haim Drukman s’est vu signifié par le gouvernement sa mise à la retraite à dater du 30 juin dernier.
17
J U DA Ï SM E
18
d’une décision sans précédent de la Haute Le Judaïsme se dénature de son éthique fondamentale lorsque les
Cour Rabbinique d’Issupposés gardiens de
raël, laquelle a annulé
« Le Talmud nous rappelle la Torah manifestent,
en mai dernier toutes
les conversions inter- que les positions intolérantes à travers de telles décisions, la tentation de
venues depuis 1999 et
sont susceptibles de donner transformer son peuconduites sous la houple, celui du Livre, en
lette du Rabbin Haim
naissance à l’horreur »
une race imaginaire.
Drukman, responsable
en chef du Département de la Conversion2
mise en place par le gouvernement israé- Car il y a là, bien sur, un mépris des filles
spirituelles de Ruth qui ne dit son nom
lien3 .
et qui oblige, selon un goût douteux ou
Cette juridiction avait à connaître, en dernier nécessaire, des chercheurs israéliens à
rappeler, à l’occasion,
ressort, d’une demande
que la génétique ne
en délivrance d’un guet
« Des dizaines de milliers
reconnaît point de
au profit d’une femme
différence entre les
convertie des années
d’habitants d’Israël se
humains,
auparavant. Or, il était
voient actuellement de facto groupes
qu’il n’existe aucune
de notoriété publique
rétroactivement retirer leur commune
mesure
que cette mère de quaentre les 700 milliards
tre enfants nés après la
statut
de
Juifs
au
motif
que
de génomes inhérents
houppa n’avait jamais
si une personne d’origine
à chaque individu
adhéré à l’observance
et le nombre réduit
telle que préconisée
non juive n’observe pas le
de séquences d’ADN
par les religieux orthoshabbat, sa conversion peut propres à étudier les
doxes. Il n’en avait pas
populations du globe,
fallu de plus à la Haute
être annulée »
leurs flux migratoiCour pour considérer
res, la mixité résulque puisqu’il en était
ainsi, la conversion de cette dame devait tant de leurs rencontres et que celle-ci,
être annulée ; que partant, son mariage était s’agissant de l’histoire des Juifs, procède
automatiquement frappé de nullité –et le de l’exemple par excellence d’un magistral
guet devenu sans objet- ; qu’il y avait, au vu mélange des genres 4.
de tout ceci, une suspicion sur l’honnêteté
des juges –dont le Rabbin Drukman- ayant Mais il y a là, surtout, une méconnaissance
accueilli la conversion ; et qu’en consé- absolue de cet impératif de base selon
quence, tous les Beth Din où avaient siégé lequel le racisme est hors la Loi juive, une
les rabbins concernés n’étaient pas casher !
ignorance de l’insécurité juridique produite
3 « Le processus de conversion consiste à suivre un cours de 500 heures de préparation dont le programme a pour but d’enrichir les
connaissances du candidat en matière de pratique religieuse et d’histoire du peuple juif et à l’issue duquel les tribunaux rabbiniques
complètent cet enseignement en vue de l’obtention du certificat de conversion » - extrait du fascicule « Informations sur la conversion » édité par le Bureau du Premier Ministre de l’Etat d’Israël, section des conversions.
4 Selon un midrash, alors que pour frapper monnaie, un moule unique suffit à fabriquer une multitude de pièces identiques et de
valeur égale, le Créateur, lui, a utilisé un moule unique pour donner vie à une multitude d’êtres humains tous différents mais aussi
précieux les uns que les autres.
le shofar
sur le statut personnel d’enfants présents voulant devenir juive et après avoir été
ou futurs, une incurie à mesurer le risque rejetée par Abraham, Isaac et Jacob, devint
la concubine du fils
de
comportements
d’Esau et enfanta
déviants ou situations
« Le racisme est hors la Loi Amalec : les positions
incongrues où brachot
intolérantes sont susdevenues
caduques
juive »
ceptibles de donner
s’ent r e cho q uer a ie nt
aux délations pour cause de débarras aisé naissance à l’horreur.
d’une encombrante épouse.
Mais qui est Amalec, le mal absolu ? Un
Voilà donc un noir, quelques franstallige et inconnu, indéfinissable, sans visage prédes shikse pour quel monde de paix, quelle défini, afin de ne pas donner légitimaBelgique ou quelle démographie juive proje- tion au bouc émissaire, à la stigmatisatés ? Quelles conséquences demain pour ces tion. Comme pour mieux nous rappeler,
à la veille des fêtes austères, temps de la
trois péripéties de racismes d’aujourd’hui ?
remise en question de soi, cette parole du
Comme nous le rappelle cet étonnant pas- Sage selon laquelle est seul respectable
■
sage du Talmud, à propos d’un verset de la l’homme qui respecte les autres...
Genèse5 sur Timna, la sœur de Latan, qui,
5 Gen.36 :22
19
Construction de la Soucca
Le dimanche 12 octobre, dès 11h00
Apportez feuillages, fruits et légumes pour décorer la Soucca.
Si vous avez des instruments de musique, apportez-les pour préparer Simhat Tora.
Erev Souccot
Le lundi 13 octobre office à 19h00
Souccot 1.
Le mardi 14 octobre office à 10h00
J U DA Ï SM E
Le judaïsme libéral, c’est
d’abord le judaïsme
Par le Rabbin Daniel Fahri 1
20
Le judaïsme libéral, c’est d’abord le judaïsme.
Cette évidence, nous nous devons de la rappeler sans cesse. Aujourd’hui comme hier,
c’est sur la tradition écrite et morale que
nous nous basons, sur les écrits de tous les
grands penseurs de l’histoire juive, sur ceux
de ses décisionnaires même si, sur de nombreux points, nous divergeons de leurs opinions. Nous n’avons pas fondé une religion
nouvelle, nous n’avons pas opéré un schisme
au sein du peuple juif, nous ne sommes pas
une secte comme il s’en est trouvé au cours
des siècles. Nous sommes une tendance du
judaïsme contemporain. On peut nous juger
sur nos positions, mais sûrement pas nous
jeter un quelconque anathème. Nous sommes toujours prêts à discuter sereinement
de nos options et à les confronter à d’autres
tendances actuelles du judaïsme. Nous
avons conscience de l’unité qui doit s’opérer au sein de la grande communauté juive
et nous voulons agir de manière à ne pas la
compromettre, surtout à notre époque où
notre peuple est menacé, attaqué de toutes
parts.
Si nous jetons un coup d’œil à l’évolution de
la pensée juive à travers les siècles, nous
nous apercevons qu’il a toujours existé et
même co-existé de multiples courants, ce
qui n’a pas compromis sa continuité ni son
unité. C’est même sans doute la multipli-
cité de ces courants de pensée qui a permis
au judaïsme de se maintenir vivant, de se
régénérer et de rayonner. C’est donc sans
inquiétude que nous devons aborder la tendance qu’est le judaïsme libéral, conscients
non seulement de ne pas mettre en danger
l’existence de notre religion, mais encore de
l’enrichir et de lui permettre de rester fidèle
à son idéal de justice, d’amour et d’universalité.
Sans s’étendre trop longtemps sur l’Histoire,
il est bon de rappeler que le judaïsme libéral,
ou réformé, est né d’une situation tout à fait
exceptionnelle. En effet, après la Révolution
française, l’Emancipation a posé aux Juifs
le problème de leur intégration dans une
société qui, jusqu’ici, leur avait refusé droit
de cité et dont ils ignoraient à peu près la
culture. Mis soudainement en contact avec
elle, beaucoup d’entre eux furent éblouis et
tentés de la rejoindre totalement en abandonnant une religion qui ne savait plus les
retenir en son sein. Ce courant d’assimilation fut considérable, aussi bien dans les
milieux très traditionalistes que dans des
milieux plus laïcisés. C’est en grande partie à ce phénomène que tenta de répondre
la réforme naissante. Elle s’attacha à donner au judaïsme traditionnel des formes et
une formulation plus actuelles, à réfléchir
aux problèmes juridiques à la lumière des
1 Ce texte est extrait de l’Anthologie du Judaïsme libéral paru à l’occasion du trentenaire du MJLF et dont le rabbin Fahri préside aux
fonctions rabbiniques depuis sa fondation, en juin 1977.
le shofar
conditions nouvelles, à mettre en relief l’universalité d’une religion qui pouvait sembler
trop particulariste et à prouver aux Juifs la
«compétitivité» de leur culture et de leur
pensée face au monde qu’ils découvraient.
Le judaïsme libéral a donc été, avant tout,
un coup de frein au courant d’assimilation
et non pas, comme le laissent entendre certains, un produit de ce courant. Sinon, comment expliquer que deux siècles plus tard il
y ait encore, et de plus en plus nombreux,
des Juifs libéraux?
En fait, à travers son histoire, le judaïsme a
souvent été amené à faire face à des situations aussi exceptionnelles que celles de
l’Emancipation. Et à chaque fois, il a dû
imaginer des réponses appropriées. Ce fut
le cas, notamment, lors de la destruction
des deux Temples de Jérusalem. A la suite
de ces deux bouleversements majeurs pour
le peuple juif et pour ses théologiens, des
changements radicaux furent mis en œuvre,
tant dans le domaine de la pratique que dans
celui de la pensée pour s’adapter et ne pas
disparaître.
Il est vrai que les réformateurs firent toujours en sorte que ces changements n’apparaissent pas comme une rupture avec la
Tradition, mais comme son prolongement
par le jeu des interprétations de la Loi. Il
n’en reste pas moins que le judaïsme ainsi
remodelé ne fut jamais tout à fait semblable
à ce qu’il avait été auparavant ni à ce qu’il a
été depuis lors. Quant aux tendances diverses, on les retrouve présentes à presque toutes les époques, qu’il s’agisse de rigorisme
ou de libéralisme, d’universalisme ou de
particularisme, de mysticisme ou de rationalisme, de légalisme ou de symbolisme,
etc. Notre judaïsme libéral actuel n’a donc
rien de révolutionnaire a priori. Il est une
des réponses à une situation donnée. Il se
place dans la lignée de grands penseurs et
décisionnaires. Il y fonde sa raison d’être et
son autorité.
Evidemment, on peut se poser la question de
l’unité de la tradition juive face à l’existence
de courants souvent opposés. A cette question, un grand penseur contemporain, Jacob
Agus, répond de façon imagée: «L’unité d’une
rivière, c’est son lit et ses rives, le mélange
des affluents et la direction de son flot. Dans
le judaïsme, l’unité de la source est la chaîne
de la littérature sacrée, l’unité du lit est la
structure sociale de la vie juive, et l’unité du
flot est l’effort pour réaliser dans la personnalité humaine les qualités divines… Le flot
s’écoule, et de l’eau s’évapore sous le vent
ou le soleil; des ruisseaux amènent une eau
nouvelle; des mares stagnantes se forment
dans les bas-fonds et des chutes dans les
défilés; mais le fleuve est Un.» (…)
Parmi les nombreuses réformes initiées par
le judaïsme libéral, il en est une, souvent
méconnue, qui mérite d’être rappelée: ce
sont les premiers rabbins libéraux qui introduisirent un sermon hebdomadaire dans la
langue du pays le vendredi soir ou le samedi
matin. Cette réforme était primordiale et
sans précédent. Jusque là, en effet, le rabbin
adressait deux sermons par an à sa communauté: à PessaH et à Kippour. Et encore
était-ce pour rappeler les principales prescriptions relatives à ces deux fêtes!
C’est surtout dans le domaine halakhique
que la réforme a apporté des changements
profonds. Elle tient d’abord compte de ce
que la Halakha, la Loi juive, est évolutive.
Preuves en sont les milliers d’interprétations que l’on trouve dans le Talmud sur les
lois de la Tora. La Halakha, qui règle les problèmes de personnes, doit évidemment tenir
compte des situations nouvelles. Elle ne doit
pas déboucher sur des anachronismes ou
des injustices. C’est pour éviter cela que les
rabbins libéraux assouplissent la législation
existante en matière d’état civil, de filiation,
de mariage et de divorce notamment. Il est
entendu que lorsque la législation traditionnelle peut s’appliquer sans anomalie et sans
21
J U DA Ï SM E
drame humain, le judaïsme libéral la retient;
mais dans les cas contraires, il cherche
d’abord à résoudre le problème humain qui
lui est présenté. Il veut éviter qu’une rigoureuse application de la Loi aboutisse à un
drame et à un abandon du judaïsme.
Enfin, et ce n’est pas le moins important,
le judaïsme libéral s’est trouvé confronté
au problème des rites et des pratiques. Le
judaïsme libéral pense que, là aussi, il s’agit
de lois d’origine humaine inspirées par la
volonté de ne pas laisser les Juifs s’assimiler. Cependant, il reconnaît aussi qu’il s’y
mêle d’autres considérations telles que la
pureté et la discipline personnelle.
22
Une question reste posée: celle de savoir ce
qu’est le judaïsme. Une religion de rites ou
une religion de cœur? La réponse ne saurait
être exclusive. Il faut accepter que le cœur
et la pratique aient tous deux une place dans
le judaïsme, mais il faut en contrôler la proportion. Sinon, il existe un grave danger de
sclérose. D’où le dilemme: il n’y a pas de religion sans rite, mais les rites étouffent souvent la vie intérieure de la foi. Le judaïsme
libéral s’efforce de ménager une place pré-
pondérante dans la religion pour le cœur
et l’intellect, sans pour autant sacrifier les
pratiques indispensables à l’expression de
la foi. Ce n’est pas la quadrature du cercle,
mais cela demande beaucoup de réflexion et
d’étude de la Tradition pour tenter de déterminer ce que la religion a voulu expliquer
aux hommes.
Dans la perspective de ce propos, nous
devrions éviter, entre courants différents
du judaïsme, de nous jeter l’anathème.
Mieux vaut engager le dialogue: ce sera
plus constructif pour l’avenir du peuple
juif confronté quotidiennement à de graves
problèmes, tant politiques que religieux,
en Israël surtout. Dans le passé, et même
aujourd’hui dans certains pays, des tendances très éloignées ont pu s’unir pour faire
face à des situations dramatiques. Il faut
que cela continue d’être. Si nous ne sommes
pas des prophètes, nous sommes des fils de
prophètes, chercheurs obstinés de la vérité.
A nous donc, ensemble, même par des
voies différentes, de continuer le judaïsme,
de l’embellir, de le rendre sans cesse plus
vivant et plus universel. ■
le shofar
La pensée de Leo Baeck
(1873-1956) - suite
par Monique Ebstein
Dans le précédent numéro
du Shofar1, nous avons commencé à étudier la pensée de
Leo Baeck. Nous voudrions
maintenant nous pencher
plus précisément sur le texte
de son premier livre: L'Essence du Judaïsme2. Comme
nous l'avons déjà dit, L'Essence du Judaïsme3 répond
à L'Essence du Christianisme du théologien protestant Adolf von Harnack. Il
y a donc dans l'ouvrage de
Leo Baeck un côté polémique et comparatif, entre les
deux religions, que nous ne
prendrons pas en compte.
Ce que nous voulons c'est mettre en lumière
son enseignement, car il fut, rappelons-le,
Président du Conseil international de la
"World Union for Progressive Judaism" de
1939 jusqu'en 1955, année qui précéda celle
de sa mort. Notre communauté se rattache
ainsi fièrement à une filiation qui la lie à un
héritage remontant à Hillel en passant par
Maïmonide et Mendelssohn.
Les caractéristiques du judaïsme.
1) Unité et évolution
Dans leurs différences tous les Juifs "vivent
au sein d'une même patrie religieuse". Cependant même si en certaines époques et dans
certains pays, les Juifs ont
été contraints à l'enfermement au sein de leur communauté, ils n'ont jamais cessé
de tourner leur regard vers
le monde extérieur auquel
ils ont apporté ou transmis
leur savoir.
La doctrine de la foi juive
est avant tout une "philosophie religieuse". Elle est,
non pas affirmations ni
credo, mais quête, recherche, réflexion et méditation
infinies. A partir de l'époque
où il n'y eut plus de Grande
Assemblée, les Sages d'Israël furent avant tout des érudits de la foi,
ils n'essayèrent jamais d'imposer leurs idées,
mais les discutèrent entre eux dans des
controverses sans fin. D'où l'abandon d'un
édifice doctrinal aux règles indiscutables,
ce qui peut parfois être ressenti comme une
carence. Aucune autorité ne possédait plus
les pleins pouvoirs nécessaires pour établir
des vérités, des dogmes.... Aucune ne pouvait
définir des limites valables pour tous. Aussi
depuis lors n'y a-t-il plus d'orthodoxie. Cette
infinie liberté de penser est un des éléments
de l'essence du judaïsme. La conviction et la
volonté d'appartenir au judaïsme en demeurent les éléments déterminants. Tout Israël
est appelé à former "un royaume de prêtres et
1 Le Shofar, avril 2008 n°293, p.40
2 publié pour la 1ère fois en 1905, puis en 1922, 1924 et pour la 4ème fois en 1926. Léo Baeck avait alors 53 ans.
3 Leo Baeck, «L’essence du judaïsme» traduit de l’allemand par Maurice-Ruben Hayoun, ed. PUF, disponible à la bibliothèque
23
J U DA Ï SM E
24
à être un peuple saint". L'élément unificateur
est l'acte juste et bon. Cet acte juste et bon,
prescrit dans les commandements auquel
chaque Juif est astreint, est plus important
que la recherche de la connaissance de Dieu
qui, elle, appartient à la sphère de l'inconnaissable.
chaque Juif est-elle l'étude: chercher encore
et toujours le sens du texte, examiner les
différents points de vue, y compris celui des
contradicteurs. Ce qui explique le sentiment
d'être engagé dans une quête perpétuelle où
l'importance de la question dépasse de loin
celle de la réponse.
Le judaïsme a apporté le monothéisme aux
nations. Minoritaire au sein de grands empires, il n'a jamais transigé en ce qui concerne
cette affirmation absolue. La révélation d'un
Dieu unique s'est faite par l'intermédiaire
de Moïse, elle renvoie au chemin parcouru
depuis Abraham et se précisera par la bouche des prophètes. L'élément stable au travers des siècles et des générations reste le
Livre saint des Ecritures qui contient le récit
du temps des ancêtres, les paroles des hommes de Dieu et les oracles des Prophètes. Ce
Livre, la Bible, représente ce qui est invariable alors que tout le reste change. Au long de
trois millénaires, de grandes personnalités,
les prophètes d'abord, les sages et les rabbins
ensuite, puis les philosophes, ont jalonné
l'évolution de la religion juive. L'enseignement des uns ne fut jamais considéré par
leurs successeurs comme étant dépassé. En
effet, les prophètes furent et demeurent les
annonciateurs de vérités éternelles.
2) L
a religion prophétique et la communauté
religieuse
Si nous voulons comprendre l'essence du
judaïsme, nous devons faire connaissance
avec les prophètes. La différence entre les
prophètes d'Israël et les prophètes païens,
leurs contemporains, réside dans le fait que
ce ne sont pas eux qui choisissent leur voie.
Une puissance supérieure décide de s'exprimer par leur bouche et leur enjoint de parler.
Ils sont imprégnés par "la force et l'esprit
de Dieu", et finissent par acquiescer. "Leur
message jaillit de l'insondable profondeur
de l'âme". Mais tout en acceptant l'ordre qui
leur est donné, ils gardent leur moi personnel, leur volonté propre, ils poursuivent leur
recherche et leur quête. Dieu exige qu'ils
parlent et ils parlent, mais ils discutent aussi
avec Lui. Ils participent à la décision qui
est exigée d'eux, leur conscience livre des
batailles. Devant eux se trouvent plusieurs
chemins entre lesquels ils doivent choisir.
Dans différents psaumes, dans le livre de
Job, ils se plaignent des absurdités et des
énigmes du destin humain, cependant il leur
paraîtrait totalement impensable d'en faire
un grief dirigé contre Dieu et l'ordre éthique
qu'Il a établi dans l'univers. Jamais ils n'essaient de prouver Son existence, ce serait
pour eux le signe de l'incroyance absolue, la
manifestation de la perte de Dieu. Or, Il est
pour eux une évidence, et eux sont les hommes de Dieu.
Mais si la Bible est la plus haute autorité du
judaïsme, elle n'en est pas la seule. Elle est
suivie par la Loi orale, le Talmud, qui l'interprète afin de déterminer l'éthique qui guidera
tous les évènements de la vie des hommes.
Le caractère canonique de la Bible et l'autorité normative du Talmud sont absolument
essentiels pour l'équilibre et la stabilité du
judaïsme. "Si la Bible renferme la parole de
Dieu qui doit être celle de tous les temps,
chacun doit pouvoir y trouver son présent"
car "C'est toi l'homme auquel Je m'adresse"
(II Sam. 12, 7). Le judaïsme a bien compris
que la vérité n'était pas gratuitement offerte
dans les Ecritures, mais qu'il fallait des
efforts infinis pour la conquérir. Aussi une
des principales obligations qui incombe à
Cette foi en Dieu donne aux prophètes la
totale certitude d'être unis à Lui, de transmettre l'éthique invariable de Sa parole,
d'où l'actualité de leur message. Il ne cherchent pas à analyser Sa nature, ils veulent
expliquer Son rapport au monde, porter
le shofar
aux hommes le message de Sa volonté. La
"connaissance divine" n'est pas pour eux une
perception mystique de la nature de Dieu,
mais bien plutôt la connaissance de Ses commandements, elle est la nécessité de mettre
l'éthique en pratique par crainte révérencielle
et par amour. C'est au nom de cette connaissance de l'éthique révélée qu'Abraham a pu
s'écrier: "Le juge de la terre entière ne pratiquerait-il pas la justice ?" (Gen.18, 25).
La religion se voit ainsi débarrassée de tout
élément fantastique ou mystérieux. Car si les
pensées de Dieu sont insondables, Ses commandements par contre "ne sont ni éloignés
de toi ni dérobés à ton regard". (Deut, 30,11).
Les prophètes n'ont pas élaboré une nouvelle
conception de l'univers, ils ont orienté leur
discours vers la vie des hommes, ils ont exigé
la pratique de l'éthique des commandements.
L'univers appartient à Dieu, mais Dieu est le
Dieu des hommes.
Pour le prophète, savoir comment Dieu a
créé le monde a peu d'importance, aussi
le judaïsme ne s'est-il jamais opposé à la
science et put admettre sans difficulté le système astronomique moderne. Le prophète
ne s'attarde pas non plus au problème de la
vie après la mort, sa préoccupation première
est d'indiquer le chemin éthique que l'homme
doit suivre au cours de sa vie ici-bas. Il ne
veut pas développer la nature des attributs
divins, mais enseigner ce que ces attributs
signifient dans notre vie, ainsi que l'a commenté le Talmud: "Tu dis que Dieu est miséricordieux et qu'Il dispense Sa grâce, alors
sois toi aussi miséricordieux, fais du bien à
chacun et de façon désintéressée. Tu dis que
Dieu est juste, alors sois juste toi aussi. Tu
dis que Dieu fait preuve d'amour dans toutes Ses actions, alors fais-en autant" (Sifré
sur Deut, 11,22).
La religion prophétique est sans classe ni
hiérarchie, elle est la même pour chaque
individu. A chacun elle fait la même promesse, elle présente la même exigence. Il y
eut jadis une prêtrise, l'Histoire y a mis fin.
Aujourd'hui la communauté juive est simplement formée d'enseignants et d'enseignés. Et
si par moments un homme ressent le besoin
de se retirer dans le silence de l'étude et de
la méditation, il n'en demeure pas moins que
ces moments doivent rester l'exception: ce
peuvent être des moments de la vie, ce ne
doit pas être toute la vie, car la voie qui mène
à Dieu conduit en priorité vers l'homme. Le
judaïsme n'a jamais accordé de valeur à celui
que sa quête conduit à s'isoler, préoccupé
uniquement par son âme. L'aspect essentiel
de la religion juive est la doctrine de l'action
et de l'engagement, telle qu'elle est enseignée
par la Tora. L'essence du judaïsme s'enracine dans l'alliance de chaque homme avec
Dieu.
Le judaïsme exige aussi que l'homme ne se
contente pas "d'éprouver" des sentiments religieux. Car manifester sa foi avec ferveur est
plus facile que d'accomplir une bonne action.
Seule l'action juste place l'homme constamment devant Dieu tout en le rattachant à
son prochain. Ce qui compte le plus pour
l'homme à la recherche de Dieu, c'est l'acte.
Comme nos pères au Sinaï "Nous ferons
(d'abord) et nous écouterons (ensuite) (Ex.
24,7). L'époque messianique sera celle où les
hommes feront le bien et banniront le mal. La
mission essentielle du judaïsme est d'arriver
par l'action juste et bonne à "la sanctification
du Nom de Dieu".
3) Révélation et religion universelle
Le judaïsme ne résulte pas du développement
d'une religion naturelle. Celles-ci divinisent
les forces de la nature. Elles n'ont jamais
abouti à une religion éthique où Dieu est radicalement Autre, transcendant. Le passage
d'une religion naturelle au monothéisme peut
se réaliser uniquement par l'intermédiaire
d'une personnalité hors du commun, d'un
"fondateur de religion". Or dans la mesure où
le monothéisme constitue un principe tout à
fait nouveau, on peut, au regard de l'Histoire,
et indépendamment de tout évènement surnaturel, parler d'une révélation.
25
J U DA Ï SM E
26
C'est au sein d'Israël que le monothéisme
éthique a été révélé: d'où son "élection". Ce
terme traduit le simple constat d'une spécificité essentielle. L'élection est une obligation
supérieure à laquelle le peuple et l'individu
doivent rester fidèles, elle est la conscience
que possède une communauté religieuse de
son alliance avec Dieu, et cette alliance lui
donne la force d'assumer sa différence face
au grand nombre. Certes, un certain exclusivisme s'attache à l'idée d'élection, car
reconnaître une vérité signifie se tenir loin
de l'erreur, comme il est écrit: "Ce peuple, il
vit solitaire, il ne se confondra point avec
les nations" (Nb.23,9). L'exclusivisme est,
comme on l'a souligné avec raison, "l'aspect
négatif du devoir de préserver son appartenance religieuse". Le commandement: "Tu
n'auras pas d'autre Dieu que moi" (Ex.20,3)
exige la "sainteté" tant pour l'individu que
pour la communauté qui, "séparés" de ceux
qui appartiennent aux nations, sont engagés
au service du Dieu Un.
Israël a été choisi par Dieu, Il est son juge.
Cette idée traverse les discours prophétiques.
Israël a pour vocation de respecter le droit, et
ce n'est que lorsque il l'a respecté qu'il peut
et doit exister en qualité de peuple élu: "Moi
l'Eternel je t'ai appelé dans la justice, j'ai
pris ta main, je te préserve et t'institue
comme une alliance parmi les peuples, une
lumière pour les nations afin d'ouvrir les
yeux qui sont fermés et de tirer du cachot
ceux qui croupissent dans les ténèbres"
(Is. 42, 6). Ainsi conçue, l'élection a comme
corollaire absolu l'idée d'universalisme.
Israël est appelé "le fils aîné de Dieu", cela
signifie que tous les peuples sont les enfants
de Dieu. L'universalisme est le fondement
ainsi que la conséquence du monothéisme
éthique, car au Dieu unique correspond une
religion unique à laquelle sont appelés tous
les hommes. Le message des prophètes et de
leurs successeurs a donc une double orientation: l'espoir pour Israël et l'espoir pour l'humanité. Un "craignant Dieu" est un homme,
juif ou non-juif, qui croit au Dieu Un et pratique la justice. On alla jusqu'à attribuer les
désignations de "hassid" et de "tsaddiq" à des
non-Juifs qui pratiquaient ces vertus. Rien
de l'enfer de Dante où croupissent même les
meilleurs d'entre les païens ! L'expression "un
bon Juif" est totalement étrangère à l'Ecriture et au Talmud. On y parle uniquement de
"l'homme bon" car "Un païen qui pratique
la justice est aussi important qu'un grand
prêtre en Israël".
Toutefois, bien que faisant partie dès l'origine
de l'essence de la religion juive, ce caractère
universel n'est pas apparu d'un seul coup.
Comme tant d'autres choses, il s'est développé progressivement pour parvenir clairement à la conscience. Il ne faut pas confondre religion universelle et religion de tout le
monde, car l'universalisme authentique est
celui de l'idée et non pas celui du nombre. Il
existe dans le judaïsme le commandement de
la mission: il n'est pas dicté par des impératifs de domination et d'expansion, mais il naît
du besoin religieux très intime d'instruire les
hommes: "A travers toi seront bénies toutes
les familles de la terre" (Gen. 12,3). Même la
dispersion d'Israël dans le monde peut être
comprise comme une semence universelle
d'où germera la parole divine. Par l'élargissement de la communauté religieuse, le terme
national de "peuple d'Israël" devrait pouvoir
être remplacé par "peuple de Dieu". C'est
pourquoi Maïmonide recommande au prosélyte de considérer les patriarches comme les
siens, et l'élection d'Israël comme une dignité
qui l'englobe lui aussi: "Toi aussi Dieu t'a élu
et choisi....Abraham est ton père tout comme
il est le nôtre; il est le père de tous les hommes pieux et justes".
■
(à suivre)
le shofar
Les fêtes de tichri a beth Hillel
ROSH HASHANA
Lundi 29 septembre
office à 19h00
Mardi 30 septembre
office à 10h00
Office des enfants à 11h00
Office du soir à 19h00
Mercredi 1er octobre
office à 10h00
PELERINAGE À GAN HASHALOM :
Dimanche 5 octobre à 11h00
YOM KIPPOUR
Mercredi 8 octobre à 19h00
KOL NIDRE
Jeudi 9 octobre
office à 10h00
Office des enfants à 11h00
Mousaf-minha 13h45
Yiskor à 17h45
Fin du jeûne à 19h52
SOUCCOT – SIMHAT TORA
Construction de la Soucca le dimanche 12 octobre à 11h00
Apportez feuillages, fruits, légumes pour la décorer !
Erev Souccot le lundi 13 octobre – office à 19h00
Souccot I. le mardi 14 octobre – office à 10h00
Chmini Atseret/Simhat Tora le lundi 20 octobre - office à 19h00
le mardi 21 octobre
office (+Yiskor) à 10h00
27
AG EN DA
Septembre/Octobre 2008
Lundi 1er septembre 2008
Roch Hodech Eloul
Mercredi 3 septembre 2008
19h30: Réunion d’information de Talmidi
Vendredi 5 septembre 2008
20h00: Office de Kabbalat Chabbat
Samedi 6 septembre 2008 – 6 Eloul
5768
CHOFTIM
10h30: Office
Mercredi 10 septembre 2008
14h15 à 16h15: Rentrée des classes à Talmidi
28
Jeudi 11 septembre 2008
20h00: Midrach dans le texte avec Rabbi
Abraham Dahan
Vendredi 12 septembre 2008
20h00: Office de Kabbalat Chabbat
Samedi 13 septembre 2008 – 13 Eloul
5768
KI TETSE
10h30: Office - Chabbat des nouveaux
membres
Suivi d’un kiddouch communautaire
Mercredi 17 septembre 2008
14h15 à 16h15: Talmidi
Jeudi 18 septembre 2008
9h00: Pose des Tefilin de Nathan Azizollahoff
Vendredi 19 septembre 2008
20h00: Office de Kabbalat Chabbat
Oneg Chabbat offert par la famille Azizollahoff
Samedi 20 septembre 2008 – 20 Eloul
5768
KI TAVO
10h30: Office
Bar Mitsva de Nathan Azizollahoff
Mercredi 24 septembre 2008
14h15 à 16h15: Talmidi
Jeudi 25 septembre 2008
20h00: Midrach dans le texte avec Rabbi
Abraham Dahan
Vendredi 26 septembre 2008
20h00: Office de Kabbalat Chabbat
Samedi 27 septembre 2008 – 27 Eloul
5768
NITZAVIM
10h30: Office
Lundi 29 septembre 2008
EREV ROCH HACHANA 5769
19h00: Office
Mardi 30 septembre 2008
ROCH HACHANA I.
10H00: Office du matin
11h00: Office des enfants
19h00: Office du soir
le shofar
Eloul 5768/Tichri 5769
Mercredi 1er octobre 2008
ROCH HACHANA II.
10H00: Office du matin
Vendredi 3 octobre 2008
20h00: Office de Kabbalat Chabbat
Samedi 4 octobre 2008 – 5 Tichré 5769
VAYELEH– Chabbat Chouva
10h30: Office
Jeudi 16 octobre 2008
SOUCCOT III.
20h00: Midrach dans le texte avec Rabbi Abraham Dahan
Vendredi 17 octobre 2008
SOUCCOT IV.
20h00: Office de Kabbalat Chabbat
Dimanche 5 octobre 2008
11h00: Pèlerinage à Gan Hashalom
Samedi 18 octobre 2008 – 19 Tichré
5769
SOUCCOT V.
10h30: Office de Chabbat Souccot
Mercredi 8 octobre 2008
EREV YOM KIPPOUR
19h00: Office de KOL NIDRE
Lundi 20 octobre 2008
SOUCCOT VII.
19h00: Office de Chmini Atzeret
Jeudi 9 octobre 2008
YOM KIPPOUR
10h00: Début de l’office
11h00: Office des enfants
17h45: Yiskor
Fin du jeûne: 19h52
Mardi 21 octobre 2008
Chmini Atzeret – SIMHAT TORA
10h00: Office de Simhat Tora (et Yiskor)
(voir annonce)
Vendredi 10 octobre 2008
20h00: Office de Kabbalat Chabbat
Samedi 11 octobre 2008 – 12 Tichré
5769
HA’AZINOU
10h30: Office
Dimanche 12 octobre 2008
A partir de 11h00: construction de la Soucca
(voir annonce)
Mercredi 22 octobre 2008
14h15 à 16h15: Talmidi
Vendredi 24 octobre 2008
20h00: Office de Kabbalat Chabbat
Samedi 25 octobre 2008 – 26 Tichré
5769
BERECHIT
10h30: Office
Mercredi 29 octobre 2008
Pas de Talmidi
Lundi 13 octobre 2008
EREV SOUCCOT
19h00 : Office
Jeudi 30 octobre 2008
20h00: Midrach dans le texte avec Rabbi Abraham Dahan
Mardi 14 octobre 2008
SOUCCOT I.
10h00: Office de Souccot
Vendredi 31 octobre 2008
20h00: Office de Kabbalat Chabbat
Mercredi 15 octobre 2008
SOUCCOT II.
14h15 à 16h15: Talmidi
29
COMMU N AU T É
CARNET
BAR MITSVA
Le samedi 20 septembre 2008, chabbat Ki
Tavo: Nathan AZIZOLLAHOFF
DECES z»l
Nous avons appris avec tristesse le décès le
27 juillet 2008 de Raymonde Lefevre, maman
de notre amie Véronique (Noisette) Ebstein.
A Noisette, ses enfants et la famille, nous
tenons à exprimer ici toute notre affection
et notre sympathie.
C’est avec tristesse que nous avons appris le
décès, le 2 août 2008 (1 Av 5768), de Hadassa
Goldberg, la grand-mère d’Elie et Isabelle
Gold­berg. A Elie et Isabelle, ainsi qu’à la
famille, nous voulons exprimer ici toute notre
affection et notre sympathie. Puisse la chaleur
des amitiés et des proches qui vous entourent
vous apporter réconfort et sérénité.
C’est avec beaucoup d’émotion que nous
venons d’apprendre le décès à Bonn (Allemagne), le 10 août 2008 (Tisha be-Av), d’Anneliese Baurose, docteur en sciences, la
maman de notre ami et membre du Conseil
d’Administration Ralph Bisschops. A Ralph,
Heidi et à leur fils Tobias, ainsi qu’à leur
famille, nous voulons dire ici tout notre
attachement et les assurer de notre chaleureuse amitié. ■
30
Envie de nous écrire ?
de participer à la rédaction du Shofar ?
N’hésitez pas et contactez nous !
le shofar
31
J U DA Ï SM E
Nos Bné Mitsva
32
Dracha d’Elie Bok
… « Ma paracha s’appelle « Bamidbar » ce
qui signifie « dans le désert ». (…) Nous
sommes le premier jour du deuxième mois
de la deuxième année de la sortie d’Egypte.
(…) L’Eternel demande de faire un relevé de
toute la communauté des enfants d’Israël par
un recensement nominal de touts les mâles
de 20 ans. Moïse se fait aider d’un homme
de chaque tribu. Les noms des tribus sont :
Ruben, Siméon, Gad, Juda, Isachar, Zébulon,
Joseph, Menashè, Benjamin, Dan, Asher et
Naftali. Or la tribu des Lévi n’est pas recensée ici parmi les tribus. Elle est chargée de
s’occuper du Tabernacle, afin, dit le texte, «
que la colère divine ne sévisse point sur la
communauté des enfants d’Israël ». Dans
ma Paracha, l’Éternel dit aussi à Moïse et à
Aaron que toutes les tribus doivent s’assembler et camper autour de leur Tente D’assignation. La tribu des Lévi sera chargée de
servir l’Éternel lui-même. En effet, l’Eternel
avait initialement choisi les premiers-nés des
enfants d’Israël pour le servir mais, comme
le pense le commentateur Rachi, suite à l’épisode du Veau d’Or, ceux-ci ont été déchus au
profit de la tribu des Lévites. Comme le nombre des premiers-nés était plus important que
les hommes de la tribu des Lévites, la différence sera payée : c’est ce qu’on appelle le
rachat des premiers-nés.
Chers amis, cher Rabbi, j’ai eu il y a quelques
jours une grande frayeur. Un rabbin réputé
est venu nous rendre visite et nous a dit que
ma Paracha n’était pas BAmidbar !! J’ai pensé,
tout est à refaire, réétudier !!…Oui, cher Rabbi
: je le cite ….et vous rassure : c’était plutôt
BEmidbar, BEmidbar Sinaï !! Dans un désert
nommé, avec ses repères géographiques, pas
juste le désert ! Par ailleurs, ces noms cités
que notre tradition et notre communauté
entretiennent par le texte m’ont fait penser
à la notion même de nom. A mes huit jours
de vie après ma naissance, j’ai reçu un nom,
Elie. Bien qu’il soit agréable à mes oreilles,
je ne l’ai pas choisi. Je sens maintenant qu’il
m’incombe d’en faire un nom, c’est-à-dire
un renom et là réside ma tâche à partir de ce
moment où je fais ma Bar-Mitsva.
Le texte de ma Paracha décrit le résultat du
recensement, c’est-à-dire des nombres, des
quantités et pourtant, avec le choix des Lévites, l’on voit que c’est les qualités qui priment
aux yeux de l’Eternel, et que les seconds
nés ont désormais toute la place qui leur
revient !!
En relisant ma Paracha, j’ai décelé des leçons
à tirer de la même façon qu’on peut en tirer de
la lecture des contes pour enfants comme « Le
Petit Chaperon Rouge » ou « Les Trois Petits
Cochons »… Rabbi Chinsky m’avait parlé
de Bruno Bettelheim, rescapé des camps,
connaisseur du midrash, qui a écrit un livre
« The Use of Enchantments » ou « psychanalyse des comptes de fées » où il explique le
message symbolique des contes classiques.
De la même façon, il y a dans les récits bibliques des enseignements qu’il faut dévoiler et
révéler par l’étude. Cependant, dans la tradition juive, on ne fait pas la morale : « tu es libre
de croire ce que tu veux, mais on te raconte
des histoires pour te faire réfléchir ».
Etre juif qu’est-ce que cela veut dire ? Est-ce
qu’il faut dire le mot « juif » à voix basse dans
les transports en commun pour éviter les
réactions d’autres jeunes ? Comment puis-je
leur expliquer la richesse des textes, des
commentaires, des réponses aux commentaires, des synthèses, des contes de nos Sages
et de nos guides ? Comment puis-je leur dire
que notre histoire éprouvée nous a forgé une
le shofar
résistance, une résilience propre à affronter
les courants et contre courants de la vie ?
Oui, en tant que Juif masculin, j’ai un petit
quelque chose en moins, mais je crois qu’en
tant que membre de notre communauté, j’ai
un petit quelque chose en plus… »
Dracha de Deborah Peruch
… « La parasha d’aujourd’hui, Behoukotai,
clôt le livre de Vayikra (…), le Lévitique en
français.
Vaykra veut dire « il appela » : ces lois servent à nous interpeller, à nous faire réagir.
C’est le troisième livre de la Torah et il conte
l’exposé à Moïse des lois et des coutumes
qui vont réguler la vie religieuse, morale et
sociale en Israël. (…) Behoukotai est le 27ème
et dernier chapitre du Lévitique. Behoukotai
signifie « dans mes lois »
La racine de ce mot est Hok, décrets divins,
lois qui sont ordonnées par Dieu, que
l’homme ne comprend pas toujours dans
l’immédiat mais qui influencent le moyen et
le long terme.
Après avoir défini une majeure partie des
mitsvot, Dieu tient à avertir son peuple de
l’existence d’un système de récompense pour
le motiver. Si le peuple juif suit les commandements, tout se passera bien ; Dieu promet
de (le) bénir (…) pour l’étude et l’accomplissement de la Torah, par l’abondance, la paix, le
bonheur familial. En revanche, on découvre
aussi les conséquences encourues si l’homme
abandonne Dieu et Ses commandements. La
pluie n’abreuvera plus la terre et le sol asséché ne produira plus ; ce sera la famine.
La Torah va jusqu’à dire: « Mais si vous ne
m’écoutez point, et que vous cessiez d’exécuter tous ces commandements, je dirigerai
ma face contre vous, et vous serez abattus
devant vos ennemis. Ceux qui vous haïssent
vous domineront et vous fuirez sans qu’on
vous poursuive. » (…)
Ces paroles peuvent sembler dures. Il faut les
adoucir en rappelant qu’il est toujours possible de changer de comportement. De plus,
Dieu finit par avouer que jamais, Il ne rompra l’alliance conclue avec son peuple. Cette
promesse mille fois vérifiée au cours de l’Histoire a toujours cours pour nous. Plutôt que
de punitions, je pense qu’il s’agit de nous alerter sur les conséquences de nos actes.
(Dieu ne se détourne pas de nous, mais on
peut avoir honte de ne pas avoir bien fait les
choses et cette honte nous fait tout rater).
La fin de cette parasha nous détaille à quel
prix on peut consacrer un être humain ou un
animal au sanctuaire. Dieu dit à Moïse : « Parle
aux enfants d’Israël et dis leur : si quelqu’un
promet expressément par un vœu la valeur
estimative d’une personne à l’Eternel appliqué à un homme de l’âge de 20 à 60 ans, cette
valeur sera de 50 sicles d’argent au poids du
sanctuaire, et si il s’agit d’une femme le taux
sera de 30 sicles. » (…) La Torah continue en
détaillant des prix pour chaque âge de la vie.
Quand j’ai lu ce texte pour la première fois,
je ne comprenais rien. Je me demandais
pourquoi la valeur d’un homme était-elle
supérieure à celle d’une femme ? Est-ce
du sexisme ? Non. La preuve, c’est qu’il a
aussi une différence entre vieux, adultes
et enfants ! Mais cela ne nous rassure pas !
La Torah dévaloriserait non seulement les
femmes mais aussi les jeunes et les vieux ?!
Les femmes valent-elles moins que les hommes ?!? Les enfants moins que les parents ?!?
Voilà ce dont il s’agit en réalité :
Parfois, dans la vie, on veut faire un don au
Temple. Or, il n’est pas normal de donner
un humain au Temple ! De plus, on est sorti
d’esclavage (…). Pour ne pas réduire des
personnes en esclavage, la Torah propose
qu’on donne de l’argent en remplacement, et
c’est déjà beaucoup mieux.
33
COMMU N AU T É
Mais comment estimer le montant de l’argent à donner ?
où les femmes sont considérées comme de
moindre valeur.
Si chacun décide comme il veut, il risque
d’y avoir des jalousies car c’est un système
subjectif.
Ce que je voudrais, c’est que chacun soit
reconnu comme ayant la même valeur ;
d’ailleurs, c’est ce que nous enseigne cette
même Torah ! L’être humain, homme comme
femme a été créé à l’image de Dieu, betselem élohim, c’est-à-dire avec une valeur
infinie et égale.
Par exemple, si je promettais de donner à la
synagogue un don du montant de la valeur
de mon petit frère, ça ne lui ferait peut-être
pas plaisir que je propose un euro 50 ! (…)
Mais alors, comment estimer la valeur de
quelqu’un de façon objective ? On pourrait
regarder le Quotient Intellectuel par exemple. Mais pour moi, le QI ne représente pas
la valeur d’une personne. Le QI ne mesure
que l’intelligence, mais il y a aussi la gentillesse, la force, la culture, l’ouverture d’esprit et plein d’autres choses qui ont aussi
beaucoup de valeur !
34
Donc de toute façon on ne trouvera pas de
bon critère pour estimer la valeur d’une personne, et ça créera toujours des problèmes,
des disputes, de la jalousie. Comment faire ?
A l’époque où existe l’esclavage, la Torah
choisit de se référer à la valeur des gens au
marché aux esclaves. Le problème, c’est qu’à
l’époque, la valeur d’un esclave dépend de sa
force physique.
Donc l’homme adulte vaut le plus cher en
moyenne ! Plus qu’une femme ou qu’une personne âgée ou qu’un enfant…
La Torah respecte la psychologie des gens
de cette époque, où l’esclavage existe et
Le midrach raconte que Dieu n’a crée qu’un
être humain initial pour une raison importante :
Que personne ne dise « mes ancêtres étaient
supérieurs aux tiens ». En effet, nous sommes tous des « fils et filles d’Adam ». On
peut ajouter que l’homme et la femme descendent tous deux de l’humain initial,
adam harichon, et ont autant de valeur l’un
que l’autre.
Notre tradition prend en compte les mentalités, et je suis fière et heureuse de vivre
à une époque où les mentalités sont enfin
prêtes à laisser une jeune fille faire sa bat
mitsva.
C’est ainsi que pourra peut-être se réaliser la
promesse divine du début du chapitre 26 :
« Si vous vous conduisez selon mes lois, si
vous gardez mes préceptes et les exécutez,
je ferai régner la paix dans ce pays et nul n’y
troublera votre repos. Je ferai disparaître
du pays les animaux nuisibles et le glaive ne
traversera point votre territoire. »
■
le shofar
35
COMMU N AU T É
Beth Hillel en Israël
ou Le voyage des émotions
Par Rachel Namias 1
Le voyage que nous avons fait débuta le 8 mai
2008, 60 ans après la naissance d’Israël. Les
participants purent faire plus ample connaissance lors d’un dîner préalable à la bonne
franquette chez Luc où chacun avait amené
une préparation culinaire de son choix.
Autour de quelques bonnes bouteilles et de
délicieux plats, une certaine empathie commença à naître dans le groupe.
36
Pour ce périple , nous étions bien encadrés:
d’abord par Anne Simon qui effectua un
travail de Titan pour organiser ce voyage,
ensuite par Philippe Lewkowicz , notre bienaimé président qui, par sa profonde connaissance d’Israël et ses nombreux amis dans le
pays, nous concocta quelques visites hors
des sentiers battus. Rabbi Dahan s’occupa,
de son côté, du volet spirituel du voyage. Il
vivait « ses interventions, explications, histoires, anecdotes avec le rire de bonheur et
de bonté ou avec les larmes de l’émotion ».
Le groupe était riche au point d’avoir une
mascotte en la personne de la petite Lili, une
adorable petite fille de trois ans venue avec
sa maman, Virginie, d’origine camerounaise.
Après un vol sans histoire, nous avons posé
le pied sur la terre de nos pères en début de
l’après-midi de ce 8 mai. Deux des membres
du groupe se rendaient pour la première fois
dans le pays, Virginie et Chantal, et, lors du
tour de ville de Jérusalem en car, eurent un
choc, celui « d’être enfin arrivées chez elles
et de pouvoir déposer leur valise ». Ce fut la
première émotion ressentie en Israël.
Jérusalem, ville aux multiples facettes, nous
offrit le lendemain, à la Cité de David, un de
ses nombreux visages. Nous avons eu l’occasion de mettre les pieds dans l’eau du tunnel
d’Ezéchias, qui constituait l’unique source
d’eau pour les habitants de la ville à son époque. Ce tunnel, long de 533 mètres et dont le
niveau d’eau peut atteindre 70 centimètres,
est unique en son genre.
Beth Hillel au Kotel
Après cette promenade rafraîchissante, nous
nous sommes dirigés -toujours en compagnie
1 Merci à mon mari qui m’a aidé à rédiger ce texte et à mon fils Fabrice qui l’a relu.
Merci à Luc, Gilda, Hélène, Dahlia, Chantal, Virginie, Jacques et Annie qui m’ont communiqué leurs impressions sur le voyage.
le shofar
de Liliane notre guide- vers le sanctuaire
des manuscrits de la Mer Morte. Depuis leur
découverte fortuite en 1947, les manuscrits de
Qumram ne cessent de susciter l’intérêt des
chercheurs à cause des détails fournis sur
l’histoire de la période du Deuxième Temple.
Du Mont des Oliviers, Jérusalem nous apparut dans toute sa splendeur. Le cimetière juif,
le plus grand et le plus vieux du monde, où les
places sont si rares et si chères, nous laissa
rêveurs: tant de personnes ont sacrifié une
grosse partie de leurs biens matériels pour
être enterrés là et nulle part ailleurs.
Cette journée nous permit de vivre un premier shabbat à Jérusalem. C’est la synagogue
Kol haNeshama qui nous accueillit pour kabbalat shabbat. L’office, très différent de ce que
nous connaissons à Beth Hillel, suscita dans
le groupe des réactions en sens divers. Certains ont apprécié son rythme « jazzy » tandis que d’autres l’estimèrent « folklorique ».
Samedi matin, un vieux rêve de Rabbi Dahan
se réalisa : célébrer shabbat au Kotel avec
sa communauté. La majesté de cet endroit
chargé de tant d’histoire nous a tous pris à
la gorge. Chez les uns, les larmes coulaient,
chez les autres l’émotion du lieu brisait toute
réaction extérieure.
Je voudrais citer un témoignage fort et vrai,
celui de Virginie, la maman de Lili. « Pour
nous, Camerounais, Israël reste un pays
hors du commun. Nous avions tous le rêve
de voir ce pays cité tant et tant de fois dans
nos prières. Moi, j’ai la chance d’être en
Europe, à Beth Hillel. Quand j’ai annoncé à
mes proches que je me rendais en Israël, ils
étaient tous fous de joie. Je culpabilisais un
peu : pourquoi moi ? J’étais émue, j’avais
l’impression d’être choisie et me disais que
je devais y aller, voir, toucher, marcher,
prier pour moi et pour eux.
En Israël, je fus saisie d’une grande émotion,
c’était comme dans un rêve … La beauté du
pays se révèle à chaque pierre, chaque montagne te parle et te raconte une histoire. A
Jérusalem, j’ai ressenti une étonnante sérénité. J’avais tellement prononcé son nom
dans les Psaumes. Mes mains touchaient,
mes pieds foulaient cette terre. J’étais bouleversée jusqu’aux tréfonds de mon âme. Quel
privilège d’être là! Au moment où j’ai effleuré
le Kotel, ce fut le summum. Je devais glisser
dans le mur des petits mots que les uns et les
autres m’avaient confiés. Il fallait que je touche pour eux, ceux qui ne pouvaient être là.
Une responsabilité terrible s’est emparée de
moi. Avoir fait shabbat à cet endroit restera
gravé dans ma mémoire à tout jamais. »
Très fatigués, certains restèrent à l’hôtel et
d’autres, accompagnés de Philippe, se rendirent au quartier Ben Yehuda. C’est un endroit
plein de vie, où tout le monde se promène,
prend un verre, où les jeunes font la fête, sans
aucune tension, sous la surveillance d’une
police décontractée.
Sur le pont dès 7 h du matin, dimanche,
le groupe de Beth Hillel visita les minarot
haKotel, les tunnels du Kotel . Impressionnants, ils permettent de revivre le Temple et
son histoire. C’est aussi un des seuls endroits
où les femmes peuvent venir prier jusqu’à
plus soif, à la limite de la transe. L’émotion du
matin ne fut pas la seule de la journée. Yad
Vashem a été très éprouvant pour nous tous.
Qui n’a pas au moins un membre de sa famille
happé par la tornade nazie? Les larmes coulaient encore au moment de la signature du
livre d’or, lorsque nous nous adressâmes à
ceux qui ne sont plus là. Au retour, nous nous
sommes promenés dans le cimetière du Mont
Herzl, qui symbolise la continuité puisque s’y
trouvent les tombes des principaux leaders
israéliens, Golda Meir, Yitzhak Rabin et bien
sûr Théodore Herzl .
Heureusement, tout le groupe a pu se sentir
un peu plus détendu en soirée au dîner du
KKL, donné pour l’anniversaire des 60 ans
de l’Etat d’Israël. Le Premier Ministre Ehud
37
COMMU N AU T É
Olmert rehaussa la soirée de sa présence!
Dans l’assistance, Beth Hillel mettait de l’ambiance avec quelques danses bien rythmées
et un de nos membres qui confondit huile et
vin blanc! On lui signala qu’il avait une tête de
chandelier et qu’il n’y avait plus qu’une mèche
à lui donner pour l’allumer !!! C’est sur cette
note légère et …digestive que notre séjour à
Jérusalem toucha à sa fin.
38
Le lendemain commençait, en effet, notre
voyage vers le Nord d’Israël. Avant de partir,
nous avons visité la Cour Suprême, qui est la
plus haute instance judiciaire de l’Etat. C’est
un superbe bâtiment moderne, sobre et doté
par ses architectes Ram Karmi et sa sœur
Ada d’une lumière naturelle intense. De par
son style, le bâtiment est parfaitement intégré
dans le paysage de Jérusalem. Il exprime la
splendeur majestueuse sans être trop monumental. La particularité des sites les plus
impressionnants de la ville n’est pas liée à la
force mais plutôt à l’esprit. L’architecture de la
Cour Suprême s’inspire des métaphores bibliques ainsi que des valeurs telles que la justice,
la vérité, la loi, la bonté et la miséricorde.
La ligne droite est l’expression formelle et
visuelle des concepts de loi, de droiture et de
droit chemin. Le cercle exprime, par sa forme,
l’idéal de justice.
La journée se poursuivit avec une visite à Meggido, symbole de la guerre dans l’Apocalypse.
Cette place forte, qui domine la riche plaine
d’Yiréel, occupait une position stratégique capitale sur la route de la mer. Sur une surface de 5
hectares, les fouilles ont permis de retrouver
les restes de 20 villes superposées. Le déjeuner
qui suivit au lac de Tibériade nous donna l’occasion de déguster un délicieux poisson.
Ce jour-là, nous atteignîmes l’extrême nord
d’Israël : Metula. Stéphane Juffa, rédacteur en
chef de la Metula News Agency, nous dressa un
panorama général de la situation géostratégique de la région avant de nous amener le long
de la frontière. Croiser des militaires druzes
de Tsahal, une patrouille de l’ONU et quelques
Libanais peu amènes a permis à Beth Hillel de
frissonner sans trop de danger!
Après une nuit de repos, le voyage se poursuivit vers Safed et ses synagogues, notamment
Abu Hav, magnifique dans son ton bleu prédominant, bleu du Talmud, bleu céleste. La
synagogue sépharade de Joseph Carro tout en
sobriété nous offrit un moment de calme et de
repos. Nous étions tous assis en rond, comme
au Maroc, pratiquement en « méditation »,
profitant de la fraîcheur offerte par deux fenêtres ouvertes sur la vallée. Un autre moment
fort nous attendit lors de cette journée: l’inauguration du second bosquet de Beth Hillel
(constitué de mille arbres, symbole de vie) à
Shrumit, près de Kyriat Shmonah. Le responsable du KKL, David Duhane, nous expliqua
qu’il avait fallu prévoir un budget de restauration de 8 millions de shekels (1.520.000 euros)
pour un travail de reboisement sur 1.200 hectares de terres brûlées par des incendies en
1989 et 1995, puis lors de la seconde guerre du
Liban en août 2006. Notre petite Lili dévoila
la plaque commémorative sous le crépitement
de nombreux flashs. A la fin de la journée, une
promenade originale et relaxante nous attendait : la visite de la vallée du Houlah en tribune
roulante, ouverte d’un seul côté pour moins
perturber les animaux. Tiré par un tracteur,
cet engin, en nous emmenant tout près des
différents oiseaux, nous permit, après une
journée harassante, de goûter au calme et à
la sérénité d’une réserve naturelle. Le silence
est un luxe dont nous appréciâme la qualité en
admirant dans le soleil couchant de superbes
oiseaux et le plateau du Golan tout proche.
Nous vivions au cours de ce voyage des
moments intenses mais ils étaient toujours
entrecoupés de rires et de joie, soit pendant
les trajets parfois longs, soit autour d’énormes tablées en savourant des plats « tous
meilleurs les uns que les autres » et en dégustant quelques bonnes bouteilles.
Le Golan est un sujet de controverse assez
brûlant en Europe. Certains disent que les
le shofar
Israéliens doivent faire un effort pour la paix
en rendant ce territoire. C’est un peu facile…
En étant sur place, nous avons pu nous rendre
compte de la position tout à fait stratégique du
lieu. De nombreux jeunes soldats ont donné
leur vie pour se rendre maîtres du Golan,
afin de protéger les populations en contrebas,
attaquées par les Syriens. Laissons aux Israéliens et à eux seuls la décision sur l’avenir de
la région. En 40 ans, ils ont réussi à faire de ce
territoire, auparavant aride, une terre verte à
perte de vue.
Notre guide nous amena voir une position
syrienne avec bunkers et champs « non déminés » prise par Tsahal en 1967. Beaucoup
d’entre nous ressentirent une vive émotion en
pensant à toutes ces vies fauchées lors de la
conquête de cet endroit. L’agriculture sur le
Golan est particulièrement développée. Nous
eûmes l’occasion de visiter le moshav Yonathan et de parler au responsable de sa sécurité, Jojo, et à son épouse Ginette, d’origines
belge. Cette dernière est professeur de cinéma
à l’école du moshav. Si nous n’avions eu l’oc-
casion de discuter avec elle de son travail,
nous aurions pu nous étonner de la présence,
là-bas, d’un professeur de cinéma. C’est absolument étonnant : elle a, parmi ses élèves, 80
jeunes Israéliennes et 80 jeunes Ethiopiennes
montées en Israël dans le cadre de l’opération
Moïse. Celles-ci arrivèrent dans le pays comme
si elles tombaient sur la planète Mars ! Rien ne
ressemblait à ce qu’elles avaient connu, leur
culture étant totalement différente. Au dîner
de shabbat, par exemple, elles ne voulaient
pas manger. Car au pays, c’étaient les parents
qui mangaient d’abord, puis les enfants. Le
cinéma leur montre une autre vie, pose un
autre regard sur les choses. Elles réalisent
elles-mêmes des films, ce qui leur procure
une énorme satisfaction. Malheureusement,
beaucoup d’Israéliennes les rejettent et cela
prendra sûrement une génération pour que ces
filles courageuses et travailleuses soient totalement intégrées. Ce n’est pas facile pour elles
car elles sont déchirées entre leurs familles
et le pays qui les accueille. Enfin, à la coopérative vinicole du Golan, nous eûmes l’occasion de faire une étape très agréable, faite de
Laissez-vous séduire par le fait d’être chouchouté !
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39
COMMU N AU T É
projection d’un film sur la fabrication du vin et
d’un grand moment de dégustation.
Le lendemain, nous prîmes la route de TelAviv, avec un arrêt marquant à Netanya où
nous fûmes accueillis à l’internat Levovitch.
Encore un moment fort! La Tsedaka doit
d’abord concerner sa propre communauté,
puis un projet en Israël, et enfin autre chose
au choix. C’est sur cette base que Beth Hillel
soutient depuis 2003 un atelier psychopédagogique formé par l’internat (une troupe de
théâtre venue à Bruxelles en 2004 et 2006).
La plupart des élèves d’aujourd’hui fait partie du programme Naale insérant des jeunes
de l’Est venus avant leurs parents. Il y a
aussi de jeunes Israéliens de familles à problèmes. Après les discours de remerciement
traduits au fur et à mesure, un montage de
photos nous fut présenté découvrant ces
jeunes dans leurs activités quotidiennes. La
joie pouvait se lire sur leur visage. Beth Hillel
aide à construire leur avenir. Nous pouvons
être fiers de notre communauté. Après avoir
jeté un coup d’œil aux logements des jeunes, nous avons chanté tous ensemble. Et
là, plus besoin de traducteur : il y avait une
telle communion, une telle symbiose entre
tous que mes larmes et celles de mon mari
commencèrent à couler, sans trop savoir
pourquoi …
A Tel Aviv, Beit Hatfutsot, le Musée de la
Diaspora, créé en 1978, intéressa beaucoup
d’entre nous. A l’aide de techniques audiovisuelles modernes, il conte l’histoire des
communautés juives de la Diaspora à travers
les âges et les continents. Un vaste panneau
photographique présente les faciès juifs existant en Israël : blancs, noirs, jaunes ou bruns.
Cela nous montre qu’il n’y a pas de définition
physique d’une ethnie. L’unité d’Israël est
ailleurs. La guide nous fit connaître la structure des communautés et les principaux
40
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Rapports annuels
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pays d’accueil : Afrique du Nord, Allemagne,
Espagne, France, Italie, Lituanie, Pologne,
Russie,Turquie… Nous pouvions nous apercevoir à travers les maquettes des synagogues combien leur style s’intégrait parfaitement à chaque pays. Il y a également, au sein
du Musée, une reconstitution historique, une
filmothèque et un centre de recherche qui
permet la reconstitution par ordinateur de
l’arbre généalogique de familles.
Le lendemain, la promenade à Nahal Binyamin et au Shouk HaCarmel permit à certains
d’entre nous de faire leur dernier shopping et
de plonger dans le bruit, la foule, les parfums,
les couleurs et le marchandage.
Kabbalat shabbat se déroula à la synagogue
Beth Daniel2 avec laquelle le projet de jumelage avec notre communauté permettra l’accueil mutuel des jeunes.
Nous fûmes invités après l’office dans quatre
familles francophones. Pour la première fois,
nous avons utilisé le chirout, minibus suivant
la ligne des bus officiels – mais beaucoup plus
fréquent – et s’arrêtant sur simple signe au
chauffeur. Quel simple bonheur ai-je ressenti
lors de ma descente, lorsque j’ai souhaité shabbat shalom au chauffeur ainsi qu’aux autres
passagers! La famille qui nous accueillit nous
reçut à bras ouverts, faisant preuve de beaucoup de générosité et d’un sens du partage
très développé. D’origine belge, notre hôtesse
avait immigré il y a quatre ans en Israël, avec
ses deux enfants. Nous étions frappés par sa
sérénité et son sourire. A notre avis, c’était là
le résultat de son aliah.
Le lendemain, nous visitâmes la maison de
Ben Gourion, avec son impressionnante
bibliothèque dont tous les livres ont été classés et étiquetés par ses soins (20.000 volumes
couvrant différents domaines en plusieurs
langues).
L’ambiance à Tel-Aviv le week-end est absolument extraordinaire. Nous avons rencontré
un orchestre sur la Tayellet avec un public de
tous âges qui dansait. Le soir, la promenade à
Neve Tsedek, le premier quartier de Tel-Aviv,
frappa beaucoup Dalia. Elle aima la ballade
dans ces anciennes petites rues et pu comparer aussi le Yaffo actuel à celui d’il y a 30 ans,
absolument inouï ! Elle admirait cette action
de construction, de reconstruction et d’implantation du peuple juif « Ba Aretz ».
Le dernier jour, nous eûmes l’occasion de
visiter le Musée de l’Indépendance. Après les
explications intéressantes de notre guide,
dix-sept membres de Beth Hillel écoutèrent la
voix de David Ben Gourion proclamer l’indépendance de l’Etat d’Israël, suivi de la bénédiction du rabbin. Quand les premières mesures de l’Hatikva retentirent, tous, nous nous
sommes levés par respect et amour pour le
pays et pour ceux qui donné leur vie pour lui.
A ce moment-là, je pensai à la phrase de Ben
Gourion : «Je ne veux pas subir l’Histoire, je
veux la créer ». Nous étions très émus.
Notre voyage est terminé. Nous éprouvons
déjà une certaine nostalgie d’Israël et des
merveilleux moments passés ensemble.
Comme l’a très bien résumé Luc : «Ce fut un
voyage d’émotions: émotions des lieux, émotions des moments, émotions des rencontres
programmées ou dues au hasard.
Je me fais l’interprète de tout le groupe pour
adresser un immense merci à Anne, à Philippe
pour le long et dur travail, parfois ingrat, d’avoir
tout organisé pour nous, d’avoir conservé au
groupe tout son enthousiasme et sa cohésion.
Le résultat était exceptionnel. Merci à Rabbi
Dahan pour la communauté qu’il a créé».
A quand le prochain voyage? Nous répondrons présents ! ■
2 Ndlr : Beit Daniel - 62 B’nei Dan St. Tel Aviv 62305 The Center for Progressive Judaism in Tel Aviv - Yafo
Phone: 03-5442740 ext. 113 Fax: 03-5444030 www.beit-daniel.org.il
41
COMMU N AU T É
Un jeune pianiste à
«l’Heureux Séjour»
par Monique Ebstein
42
Mars 2008. Je l’ai rencontré, très blond, très mince, dans un couloir de la
maison de retraite «Heureux Séjour» où avec un grand sourire il aidait une
personne âgée à marcher. Un peu plus tard, je l’ai vu dans la grande salle
où se tiennent les résidents l’après-midi. Toujours avec un grand sourire,
il poussait la chaise roulante d’un vieux monsieur hémiplégique. Il l’a installé près du piano dont il a ouvert le couvercle. Il a commencé à jouer la
«Pathétique» de Beethoven, d’abord avec quelque hésitation, puis il a pris
de l’assurance et la salle a retenti de la musique de Beethoven d’abord, puis
de Schumann, de Schubert, de Chopin.... La plupart de ses auditeurs étaient
enchantés, ils l’ont manifesté par de chaleureux applaudissements. Il y a cependant eu l’incident de cette dame qui lui a méchamment enjoint de «faire
moins de bruit».
La raison de cet interview est l’intérêt que j’ai ressenti pour ce jeune Allemand qui a décidé de passer un an dans un pays étranger, d’y faire son service civil et de s’occuper de personnes âgées, souvent handicapées, dans une
maison de repos juive.
Comment un jeune Allemand voit-il les Juifs aujourd’hui ? Quel regard perçoit-il dans les yeux de ces seniors auxquels il apporte sa gentillesse, son
aide et sa jeunesse ?
Etes-vous toujours aussi souriant ?
En souriant, c’est plus facile, et c’est positif
pour les personnes âgées.
Pouvez-vous vous présenter ?
Je m’appelle Jakob Hohnerlein, j’ai 20 ans et
je suis né à Munich, en Bavière. Ma famille
a déménagé lorsque j’avais 2 ans pour aller
habiter à Ulm, une ville d’environ 120.000
habitants qui se situe à la frontière du Bade-
Wurtemberg et de la Bavière. Mon père est
psychologue et ma mère est pédagogue. Elle
s’occupe d’enfants et de jeunes ayant des problèmes. J’ai un frère de 18 ans et une petite
soeur de 11 ans. J’ai fait mon «Abitur»1 l’année dernière et j’ai commencé mon service
civil d’un an dans le cadre d’ASF2 au début
du mois de septembre 2007. Je resterai donc
en Belgique jusqu’à la fin du mois d’août prochain.
1 L’Abitur est en Allemagne l’examen qui, après l’enseignement secondaire, permet d’accéder à l’Université.
2 A SF: Aktion Sühnenzeichen Friedensdienste (Action pour la Réconciliation et la Paix). ASF est très active en Israël et y envoie de
nombreux volontaires.
le shofar
Quels sont vos intérêts ?
La musique bien sûr. Je joue du piano depuis
que j’ai 5 ans. Je joue aussi de la clarinette,
mais pas ici, car la clarinette est un instrument que l’on ne peut pas jouer en solo.
J’aime aussi beaucoup l’histoire, c’est une
matière que j’ai choisie comme cours intensif pendant les 2 dernières années de ma
scolarité.
Quelles études comptez-vous entreprendre après votre service civil ?
Peut-être le droit ? Peut-être les sciences
politiques ? En tout cas des études de sciences humaines, pas de sciences exactes.
Peut-être aussi la musique. J’ai réussi un
examen d’entrée pour être accepté dans une
université dont les étudiants se destinent à
l’enseignement de la musique, mais je sais
bien que les débouchés des études de musique ne sont pas très prometteurs.
Ne pourriez-vous pas combiner des études
de droit par exemple avec des études de
musique ? Je sais que c’est possible en Allemagne.
Oui c’est vrai, mais c’est très rare. Il est vrai
qu’un magistrat de la Cour Constitutionnelle
allemande a étudié le droit, la philosophie et
la musique !
Pourquoi avez-vous choisi de faire un
service civil et non pas un service militaire ?
Je n’ai jamais envisagé de faire un service
militaire. Je ne veux pas servir dans l’armée.
Je suis contre la discipline et l’obéissance au
doigt et à l’oeil. Par contre, il y a des possibilités de faire son service civil en Allemagne
dans le secteur social: p.ex dans des hôpitaux, des jardins d’enfants......J’ai choisi de
le faire dans le cadre d’ASF. Cette association existe depuis 1958. C’est grâce à elle
que mes parents se sont connus en France
alors que mon père effectuait son service
civil et ma mère un volontariat. Les jeunes
filles, encore aujourd’hui, sont légèrement
plus nombreuses que les garçons, elles
effectuent toutes un service volontaire.
Depuis quand date votre intérêt pour la
période nazie ?
Pendant ma scolarité, j’ai écrit un travail de
20 pages sur Reinhold Settele, un habitant
d’Ulm, qui pendant la guerre a fait en solitaire de petites actions de résistance. Vers
la fin de la guerre, la Wehrmacht a voulu l’arrêter, mais il a pu s’échapper et passer chez
les Américains.
Parlez-moi d’ASF
ASF signifie «Aktion Sühnenzeichen Friedensdienste» (Action pour la Réconciliation et la Paix). Elle a été créée lors du
Synode de l’Eglise Evangélique d’Allemagne
réuni à Berlin en avril 1958. Lors du plénum
qui eut lieu le dernier jour du congrès, le
président Lothar Kreyssig déclara: «Nous,
les Allemands, nous avons commencé
la Deuxième Guerre Mondiale et nous
nous sommes rendus responsables d’une
souffrance humaine incommensurable.
Les Allemands ont, dans un soulèvement
impie contre Dieu, assassiné des millions de Juifs. Et même ceux qui n’étaient
pas d’accord, n’ont pas suffisamment agi
pour empêcher ces crimes». Les fondateurs
et fondatrices de l’association ont voulu
demander «aux peuples ayant souffert du
national-socialisme qu’ils nous permettent de faire, avec nos mains et nos moyens,
quelque chose de bien pour leur pays», un
acte symbolique de demande de pardon et
de paix. «Response-ability», la traduction
anglaise de «responsabilité» exprime bien
ce qui se cache derrière ce terme. La faculté
de répondre est précédée par celle de poser
des questions. Les questions que soulève le
problème du national-socialisme ébranlent
les fondements mêmes de la civilisation
humaine. Comment tout cela fut-il possible ?
Les crimes des nazis posent des questions
concrètes sur les raisons qui ont poussé l’Allemagne à sombrer dans le national-socialisme. Il faut bien sûr aussi se demander
43
COMMU N AU T É
quelles sont actuellement les répercussions
du national-socialisme sur la jeune génération, sur la société d’aujourd’hui. ASF invite
les jeunes à chercher leurs propres réponses
à ces questions3
44
Comment devient-on volontaire à ASF ?
Il y a dans l’association différents secteurs
de travail: formation historique et politique,
travail social: dans des jardins d’enfants,
des hôpitaux, des maisons de repos pour
personnes âgées. Or il y a plus de candidats
que de places disponibles. Il faut donc participer à un séminaire de sélection, ce que j’ai
fait en février 2007, en mars j’ai su que j’étais
accepté. Un candidat ne peut pas décider du
lieu où il sera envoyé, mais il peut, s’il désire
se rendre à l’étranger, indiquer ses pays favoris. Pour ma part j’ai indiqué, la Belgique, (car
je désirais perfectionner mes connaissances
de français), mais aussi les Pays-Bas et la
Pologne. Je n’ai pas indiqué la France, car
j’aurais dû signer un contrat sans savoir où
je serais envoyé, or je voulais aller dans une
grande ville. Je n’ai pas indiqué Israël non
plus, car je ne voulais pas avoir peur de monter dans un bus.
Le financement du séjour de chaque volontaire se répartit de la façon suivante: la famille
assure un quart des frais, à quoi s’ajoutent
des aides du gouvernement allemand et de
l’Union Européenne. De plus, 15 personnes
s’engagent à payer pour un volontaire 10 € par
mois pendant 1 an. En ce qui me concerne, la
Fondation Auschwitz et l’Heureux Séjour me
donnent aussi un peu d’argent de poche.
Après avoir été accepté, le candidat doit faire
un stage de 2 semaines dans une institution
sociale ou effectuer la visite d’un Mémorial.
J’ai choisi de visiter le Mémorial de Stutthoff
en Pologne, J’avais déjà été à Dachau avec
mon école. Mais il est aussi possible de se ren-
dre à Dantzig, Auschwitz ou Maidanek. C’était
triste, mais intéressant, nous avons beaucoup
discuté, et j’ai eu dès ce moment une très
bonne impression d’ASF. Nous avons visité les
lieux et interrogé la mémoire, nous en avons
discuté, nous avons analysé des textes, nous
nous sommes posé la question «Comment un
homme peut-il devenir un bourreau ?......
A l’Heureux Séjour, l’atmosphère est en général une atmosphère de sympathie à mon
égard. Il y a juste une dame qui refuse que je
rentre dans sa chambre, lorsque le mercredi,
je fais la distribution d’eau minérale.
Parlez-moi de votre séjour à Bruxelles.
De septembre à octobre, j’ai travaillé uniquement à la Fondation Auschwitz, passant
la plupart de mon temps devant l’ordinateur.
Comme je désirais également faire un travail
social, j’ai commencé à travailler à «l’Heureux
Séjour» en décembre, grâce à Mme Renate
Lange, responsable d’ASF pour Bruxelles qui
a pu combiner ces 2 activités.
Qu’est-ce que la Fondation Auschwitz et
qu’y faites-vous ?
La Fondation Auschwitz est une institution
dont le but est de travailler sur l’Histoire.
Elle est dirigée et gérée par des non-Juifs, le
directeur actuel est grec. Elle est en contact
avec des institutions allemandes. Je m’y
occupe de la bibliothèque et du bulletin trimestriel pour lequel je fais la recension de
livres allemands. Je traduis aussi le courrier
électronique. La bibliothèque n’est pas vraiment une bibliothèque publique, mais tous
ceux qui ont des raisons particulières ou
des intérêts précis (étudiants, enseignants)
peuvent y consulter des livres après en avoir
demandé l’autorisation. La Fondation organise également des interviews de rescapés
belges, mais à l’heure actuelle il n’y en a plus
beaucoup. Nous analysons des cassettes de
3 Ce paragraphe est tiré de textes disponibles sur Internet que Jakob m’a donnés au début de l’interview.
Pour plus de détails sur ASF, voir le site: www. asf-ev.de
le shofar
témoignages. J’ai écrit le résumé d’un témoignage, qui date des années 90, d’une femme
qui a fait partie de l’orchestre des femmes à
Birkenau. C’est dur, mais on s’habitue ! Une
étudiante fait actuellement une thèse sur la
musique composée dans les camps. La visite
d’un Mémorial impressionne davantage que
la lecture d’un témoignage. Tous les volontaires ASF qui se trouvent en Belgique sont allés
visiter le camp d’internement de Breendonk.
La bibliothèque possède des cassettes vidéo
d’anciennes émissions de la RTBF. Les volontaires en écrivent des résumés. C’est très dur.
En effet, il est plus dur de voir des images que
d’entendre un témoignage.
Aviez-vous connu des Juifs en Allemagne ?
Que savez-vous du judaïsme ?
Non, je n’ai pas connu de Juifs en Allemagne,
il n’y en a pas, ou peu à Ulm. Ce que je connais
du judaïsme ? Ce que l’on apprend à l’école
où la religion est une matière scolaire, et où
l’on enseigne des rudiments de toutes les religions. Personnellement je suis protestant.
Je sais qu’avant Hitler, les Juifs allemands
étaient très assimilés, souvent très instruits,
et qu’ils ne se sentaient pas essentiellement différents des autres Allemands, car
ils n’étaient plus très religieux. A mon avis,
ce qui les caractérisait c’était, entre autre,
l’emploi de mots hébreux lorsqu’ils parlaient
l’allemand. Dans l’ensemble, les résidents
belges de l’Heureux Séjour, m’ont dit que leur
famille n’était pas très religieuse, que leur vie
avant la période nazie n’avait pas été très différente de celle des autres Belges, que certes
ils célébraient les fêtes juives, mais qu’ils se
sentaient avant tout belges.
Quel est votre rapport à la période de la
2ème Guerre Mondiale qui doit vous sembler extrêmement lointaine ?
Je me sens concerné par ce qui s’est passé,
mais pas coupable. Du reste, mes parents sont
eux aussi nés après la guerre. L’idée qui guide
l’action d’ASF est que la guerre donne une
responsabilité aux Allemands d’aujourd’hui,
afin qu’ils améliorent le monde auquel les
Allemands de l’époque nazie avaient fait tant
de mal.
A votre avis, comment est- il possible
que Hitler ait accédé au pouvoir ?
Les Allemands avaient une tradition militaire
et il y avait un courant nationaliste allemand.
Il y avait aussi, depuis le Moyen Age, un
courant antisémite. Beaucoup d’Allemands
n’étaient pas en faveur de la République de
Weimar, et la situation économique était
très mauvaise. Hitler avait écrit tout son programme dans «Mein Kampf», il y avait exposé
ses théories folles sur les différents types de
races humaines, mais beaucoup de monde
ne l’avaient pas lu et parmi ceux qui l’avaient
lu, beaucoup n’y croyaient pas. Une partie de
la population espérait surtout une amélioration de l’économie, jugeant que c’était plus
important que tout le reste. Mon grand-père
lui-même pensait que, vu la situation économique grave dans laquelle se trouvait l’Allemagne, il fallait que quelque chose change,
donc pourquoi pas Hitler ? Cependant, mes
parents, nés dans les années 50, parlent de
cette période sans sentiment de culpabilité.
Aujourd’hui en Allemagne, la plupart des villes moyennes votent CDU/CSU, (c’est à dire
les partis conservateurs), Ulm fait exception,
elle vote SPD (parti social-démocrate).
Comment perçoit-on Israël en Allemagne ?
La plupart des Allemands reconnaissent le
droit absolu d’Israël à exister. Israël est considéré comme un pays ami, mais on critique la
politique israélienne envers les Palestiniens.
Les Allemands pensent en effet que l’on doit
pouvoir critiquer ses amis. Ils disent la même
chose des Américains en ce qui concerne la
guerre d’Irak.
Beaucoup de volontaires ASF effectuent leur
année de service en Israël. Ils y reçoivent
une formation historique et travaillent dans
le secteur social (homes, jardins d’enfants,
45
COMMU N AU T É
hôpitaux...), c’est le même travail que dans les
autres pays. Ce travail et les projets qui existent en Israël m’auraient intéressé, mais la
situation y est top peu sûre et je n’avais aucune
envie d’être exposé à exploser dans un bus !
Comment percevez-vous les Juifs à présent ?
Avant de venir, je ne connaissais pas de Juifs,
ma perception était plutôt positive, mais
théorique et abstraite. Maintenant que j’en
connais personnellement, ils me sont plus
proches. Non, je n’ai jamais été invité dans
une famille juive (ni du reste dans une famille
belge), je n’ai pas assisté non plus à un office
religieux, ni été dans une synagogue. Les
Juifs que je connais sont surtout les personnes âgées qui résident à l’Heureux Séjour.
46
Pendant mon temps libre, mes soirées et
mes week-ends, je vois mes camarades qui
sont volontaires à Bruxelles et avec qui j’ai
de bons contacts, je rends aussi visite à des
copains qui se trouvent dans d’autres villes
(Amsterdam, Lyon...)
Quelle a été votre motivation principale
pour ce volontariat ?
La réconciliation bien sûr, car les Allemands
ont fait du mal aux Juifs, et il est bon qu’un
jeune Allemand apporte de l’aide à de vieux
Juifs. Mais il y a également le désir d’apprendre à mieux connaître un pays étranger, de
montrer que les jeunes Allemands sont différents de leurs aînés, et qu’ils ne sont pas
antisémites.
C’est en 1968 que l’on a commencé à parler
à plus large échelle du nazisme. C’est aussi
l’époque où l’on a critiqué les Etats-Unis pour
la guerre du Vietnam. A cette époque, il y
avait encore beaucoup de fonctionnaires, de
professeurs, de magistrats de l’époque nazie
qui étaient restés en place. De cette époque
date le slogan «Unter den Talaren, Muff von
1000 Jahren» (Sous les toges, stagne l’air
confiné d’un millénaire) ! C’est aussi en 1968
que le gouvernement fédéral a changé la
Constitution au moyen de lois d’exception.
A ce moment, les jeunes ont eu des craintes
pour l’avenir de la démocratie.
Lorsque ASF fut créée en 1958, on critiqua
ses membres qui furent qualifiés de traîtres
à la patrie. Maintenant on en parle dans les
écoles et dans les médias. La connaissance
du passé s’est beaucoup améliorée. Dans l’exAllemagne de l’Est, il y a encore de la xénophobie, mais il n’y en a plus à l’Ouest, sauf
bien sûr chez quelques extrémistes qui ne
sont pas représentatifs de la population.
Racontez-moi une expérience forte que
vous avez vécue :
Un jour une résidente de l’Heureux Séjour
m’a demandé comment il était possible qu’en
Allemagne, le pays de Goethe et de Schiller
de tels événements aient pu se produire. Je
lui ai répondu que, moi non plus, je n’arrivais
pas à le comprendre. Elle m’a cru et j’en ai été
très heureux.
***
J’ai été très heureuse de rencontrer Jakob et
de pouvoir l’interviewer. J’ai parlé à un jeune
Allemand tout à fait à l’aise dans ses convictions et ses choix. Avec dignité il assume sa
responsabilité sans ressentir de culpabilité
vis à vis du peuple juif. Il considère Israël
comme un Etat ami de son pays, mais il
affirme également son droit à critiquer ses
amis. Comme ses parents, eux aussi nés
après la guerre, comme beaucoup d’autres
jeunes Allemands, il choisit de passer un an
de sa vie en mettant son sourire et son talent
de musicien au service de vieilles personnes
juives. Cette rencontre en Belgique de jeunes
Allemands avec des Juifs, grâce à une Association qui oeuvre pour la réconciliation et la
paix est un pas important dans la lutte contre
l’antisémitisme, car elle permet une ouverture, une éducation de l’esprit et du coeur
des jeunes générations. Ce sont justement
ces jeunes qui nous permettent d’espérer que
cela ne se passera PLUS JAMAIS !
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47
COMMU N AU T É
Nouvelles d’Israël et d’ailleurs
La France compte une troisième femme rabbin en la personne de Delphine Horvilleur, 30
ans. Diplômée de l’Université Hébraïque de
Jérusalem et journaliste à France 2 avant de
commencer ses études de rabbinat, elle a été
ordonnée rabbin en mai dernier par l’Hebrew
Union College à New York dont elle fait partie de la promotion 2008.
Delphine Horvilleur rejoint l’équipe rabbinique du Mouvement Juif Libéral de France à
Paris, composée des rabbins Daniel Fahri,
Stephen Berkowitz et Célia Surget.
***
48
Le 22 juin dernier, le Consistoire central de
France a élu son nouveau Grand Rabbin en
la personne de Gilles Berheim, 56 ans, qui
entrera en fonction le 1er janvier 2009 pour
un mandat de 7 ans.
Répondant aux questions posées par le mensuel juif français L’Arche1 sur la division du
Judaïsme français en sous-communautés
consistoriales, libérales, massorti, et sur
l’opportunité d’une « concertation » entre
celles-ci, le Grand Rabbin Gilles Bernheim
conçoit le dialogue avec ses coreligionnaires
ainsi : « (…) Ce qui fait beaucoup de ravages
(…), depuis assez peu de temps, et ce qui peut
en causer bien plus encore dans un proche
avenir, c’est une tendance tardive à l’importation en France des vieux clivages, hérités
de la Réforme du Judaïsme dans l’Allemagne
du début du 19ème siècle, et qui divisent très
profondément aujourd’hui les sociétés jui-
1 L’Arche, n°602-603, juillet-août 2008, p.40
ves nord-américaines et israéliennes, entre
orthodoxes, conservateurs et libéraux. (…)
La synagogue libérale, née vers 1905 à l’initiative du rabbin Louis-Germain Levy, fut très
longtemps groupusculaire. La synagogue
massorti (calque de l’américain conservative)
n’est apparue qu’il y a peu de temps (…). Estil fatal que notre communauté (…) importe
tardivement ces vieilles querelles dont nous
voyons les ravages aux Etats-Unis, la conséquence la plus grave étant la non-reconnaissance des conversions et des mariages, donc
la rupture, sur le fond, de l’unité du peuple
juif ?... »
Pour mémoire, le nouveau Grand Rabbin
consistorial de France est Agrégé en Philosophie et responsable, entre autres, au sein
du Consistoire de Paris, du département «
Torah et société » centré sur les grands problèmes de société. Gilles Bernheim, auteur d’
« Un rabbin dans la cité » donne, par ailleurs,
régulièrement son avis sur le sida, la pauvreté, les relations avec l’Islam, lorsqu’il ne
dialogue pas avec le christianisme…
***
Au moment des jeux de Pékin, il est intéressant de se rappeler qu’Israël et les jeux Olympiques, c’est l’histoire d’un long fleuve peu
tranquille. Dès la proclamation de son indépendance en 1948, le nouvel Etat décida d’envoyer ses sportifs aux Jeux de Londres. Mais
la Grande-Bretagne, qui venait de renoncer à
son mandat sur la Palestine, s’y opposa, prétextant que la délégation israélienne n’avait
le shofar
pas encore été reconnue officiellement. Quatre ans plus tard, Israël expédia à Helsinki
sa première délégation, composée de 13
athlètes ainsi que d’une équipe de basketball. Si les performances sportives de cette
délégation ne resteront pas gravées dans la
mémoire collective, le symbole politique, lui,
fut fort car il marqua le début d’une reconnaissance internationale pour ce jeune pays
qui venait de sortir d’un conflit armé avec
ses voisins. La guerre de 1956 avec l’Egypte
empêcha la plupart des sportifs israéliens de
se rendre aux Jeux de Melbourne : seule, une délégation symbolique de trois
athlètes y fut envoyée. En
1968, à l’occasion des Jeux
de Mexico, la délégation
israélienne remporta ses
premiers succès, avec son
équipe de football en quart
de finale et un nageur à qui
il manqua quatre centièmes de seconde pour
accéder à la médaille de bronze.
Puis vint la tragique prise d’otages des Jeux de
Munich en 1972 et l’assassinat de onze sportifs israéliens. Les survivants de la délégation
israélienne rentrèrent chez eux dans l’état
de choc qu’on imagine. Aucune délégation
nationale ne s’associa à la demande d’Israël
d’interrompre les Jeux : ceux-ci reprirent leur
cours normal dès le lendemain. Pire, il fallut
attendre 1996 pour que le comité olympique
décide enfin de commémorer officiellement
ce drame ! Israël ne renonça pas à sa participation aux jeux suivant ceux de Munich et
envoya une délégation à Montréal en 1976. En
quatre-vingt, répondant à l’appel du président
américain Jimmy Carter, Israël boycotta les
Jeux de Moscou, en signe de protestation à
l’invasion de l’Afghanistan par l’URSS. Les
années suivantes, les délégations se professionnalisèrent et les espoirs de médaille se
multiplièrent : en 1992, à Barcelone, Israël
décrocha ses premières médailles mais pour
l’or, il fallut attendre Athènes, en 2004 et le
véliplanchiste Gal Frydman…
***
Le lieu de rendez-vous, à Anvers, des ultranationalistes flamands et de l’extrême droite
se dénomme le «Leeuw
van
Vlaanderen»
(le
« Lion des Flandres »). C’est
un bistrot situé au Jezuietenrui que les connaisseurs qualifient de «bruine
kroeg» (« café brun », au
sens propre et comme au
figuré). Ce haut lieu du
rejet de la Belgique et de
ses valeurs démocratiques affiche sans complexes le sigle des SS, bien mis en valeur sur
la façade.
En effet, sur ladite devanture jaune dudit
caberdouche récemment repeinte a été ajoutée «de beest» (« la bête »), une référence au
lion des lieux, dont le S reproduit à l’identique
les initiales de sinistre mémoire. Interrogé
par « Joods Actueel » sur cet inadmissible
symbole nazi affiché en toute impunité en
plein cœur d’Anvers, le président de la NV-A
Bart De Wever a condamné.
***
Des adolescents suédois proches des milieux
néonazis viennent de recevoir une formation
sur la Shoah et se sont rendus à Yad Vashem.
Ils ont suivi le parcours de 16 Juifs pendant
49
COMMU N AU T É
la guerre, originaire de leur ville natale,
Karlstad, et morts en déportation. Le projet,
baptisé «lutte contre les troubles sociaux» et
initiative d’un éducateur suédois, avait pour
objectif de prendre dans la rue des jeunes en
difficulté, de les confronter à leurs préjugés
et leur ignorance et de les faire devenir euxmêmes formateurs sur la Shoah.
concision par une équipe de l’organisation
non gouvernementale israélienne Jerusalem
Aids Project (JAIP). L’objectif est de lutter
contre l’épidémie du sida qui ravage le pays,
enclavé entre l’Afrique du Sud et le Mozambique. L’augmentation du nombre de circoncisions va permettre non seulement de juguler
l’épidémie du sida à travers le pays mais aussi
d’améliorer le dépistage de la maladie.
***
Les chercheurs estiment que la pratique de
la circoncision dans l’Afrique subsaharienne
pourrait éviter la contamination de deux millions de personnes et sauver la vie de 300 000
malades dans les dix prochaines années. ■
Une dizaine de médecins de l’Etat africain
du Swaziland (Etat qui compte le plus grand
nombre de séropositifs au monde avec 26 % de
ses habitants âgés entre 15 et 49 ans atteints
du virus HIV) a été récemment initié à la cir-
(JWH)
50
Simhat Tora
Le lundi 20 octobre 2008 à 19h00
Soyez tous présents pour célébrer dans la joie la Tora!
Nous danserons et chanterons ensemble avec les Sfarim, comme tous les ans.
Venez avec vos enfants et vos amis.
Si vous avez des instruments de musique, venez nous régaler de vos talents.
le shofar
51
COMMU N AU T É
Limoud revient
Par Gaëlle Szyffer
Chers Amis,
Il y a deux ans j’ai eu l’occasion de participer à Limoud, en
France.
Ce fut une de mes plus belles
expériences de ces dernières années.
Or, voilà que Limoud revient, du 21 au 23
novembre prochain, au Coudray-Monceau.
52
A cet évènement participent quelques centaines de personnes de tous les âges, depuis les
enfants, même très jeunes jusqu’aux beaucoup moins jeunes de la troisième, quatrième,
voire cinquième génération, en passant par
des rabbins libéraux, massorti, orthodoxes, ...
et aussi des gens comme ... nous! Si les participants sont en grande majorité juifs, des
non-Juifs qui voudraient éventuellement se
convertir ou qui, plus simplement, sont intéressés par l’interconvictionnel sont également présents.
L’idée de base est que chacun peut apprendre
de l’autre.
Chacun peut proposer à l’autre ce qu’il sait :
ainsi, tout juif bar ou bat mitsvah peut animer un séminaire (1 h) pour enfants, jeunes
ou adultes.
On y rencontre aussi bien de très jeunes
animateurs que des conférenciers de renommée mondiale côtoyant des représentants
des associations juives en tous genres, des
libraires, des restaurateurs casher.
Bref, Limoud, c’est tout ce qui
a trait au judaïsme : cuisine,
danse, chants, torah, talmud,
havroutah, judaïsme historique, philosophique et autres
iques, musique yiddish, israélienne, religieuse, klezmer, voyages, ...
Et s’il vous vient à l’esprit qu’il manque quelque chose dans le programme, c’est que vous
ne l’avez pas proposé !
Tout le monde est bénévole, tout le monde
est responsable, tout le monde est ouvert
à l’autre, personne ne reproche rien à personne, tout le monde est content.
Vous l’aurez compris, il s’agit là d’une expérience qui vaut la peine d’être vécue.
Amis de Beth Hillel, on pourrait peut-être
s’y rendre ensemble, imaginer un départ de
Belgique en groupe et qui sait, si comme moi,
vous aurez trouvé Limoud fantastique, on
pourra peut-être aussi, alors, imaginer d’organiser cela un jour chez nous ?
Limoud existe déjà en Grande Bretagne, aux
Etats-Unis, en Russie ainsi que dans bien
d’autres pays.
N’hésitez pas, contactez moi ! Amitiés, Gaëlle
Szyffer [email protected]
■
le shofar
53
COMMU N AU T É
Un peu d’humour
Daniel, qui a beaucoup travaillé durant toute
son existence, décède. Ses dernières volontés
révèlent le souhait de magnifiques funérailles,
dignes de l’énergie sans faille dont il a fait
preuve tout au long de sa vie, et qu’à cet effet,
un budget de 50.000 euros y soit consacré.
Tout est rapidement réglé, le permis d’inhumer obtenu. Bref, à l’entrée du cimetière, les
intimes attendent l’arrivée du cortège funèbre.
Jess, la veuve de Daniel, arrive, accompagnée
de Sam, le meilleur ami de son défunt époux.
54
Quelques moments plus tard, lorsque tout est
fini, Jess, toujours au bras de Sam, lui dit : « Je
crois que Daniel aurait été très content… »
«Certainement, chère Jess, certai­ne­ment !»
lui répond Sam, en lui tapotant gentiment
la main. Puis, chuchotant, il poursuit à son
oreille : « Mais dis-moi, tout ceci t’a-t-il coûté
combien ?!? »
versés à la shule pour les prestations du rabbin ; les en-cas, boissons comprises, pour la
shiva, également 500 euros ; et le reste, je l’ai
dépensé pour la pierre ! »
Sam recompte rapidement : « Veux tu dire
que tu as payé 42.500 euros pour la pierre en
souvenir de Daniel?!? Oye ! Elle doit être phénoménale, pour ce prix-là! »
« Oui: cinq carats et demi »
***
A reform Rabbi was having an argument with
an orthodox Rabbi.
He asked him, “Why don’t you let the men and
women of your congregation sit together as
they do in my congregation ?”
The orthodox Rabbi replied:
« Tout compris ? Oh, cinquante mille »
« Non ?!? Cinquante mille? Jess, c’était convenable, mais tout de même… cinquante mille !
N’exagère tu pas un petit peu ?»
“If you want to know the truth, I don’t really
mind them sitting together at all. The trouble
is, however, that I give sermons and I can’t
have them sleeping together.”
Et Jess d’expliquer, l’index égrenant les doigts :
« Mais oui, 50.000 ! Calcules : 6.500 euros pour
les frais funéraires proprement dits ; 500 euros
***
In f o r m at i o n s u t i l es
VIE COMMUNAUTAIRE
OFFICES DE CHABBAT
Vendredi à 20h et samedi à 10h30
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Talmud tora et preparation a la bar/bat mitsva
Tous les mercredis après-midi. Voir calendrier.
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Cours adultes et cercles d’etude
Contactez Rabbi Abraham Dahan ou Rabbi Floriane Chinsky
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Yiskor
Si vous voulez être tenus au courant des dates de Yiskor
pour des membres de votre famille, contactez Giny ( 02.332.25.28
SOCIÉTÉ D’INHUMATION
A.S.B.L. GAN HASHALOM
En cas de nécessité, téléphonez aux numéros suivants:
Le jour A Beth Hillel ( 02.332.25.28
Le soir Rabbi Floriane Chinsky ( 0485.428.490
Rabbi Abraham Dahan ( 02.374.94.80 ou 0495.268.260
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téléphonez à Willy Pomeranc
Le jour ( 02.522.10.24 • Le soir ( 02.374.13.76
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et ayant adhéré à la société d’Inhumation
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